04. Accusée à tort

Le mois de décembre était sans conteste celui que Lucy préférait, il était synonyme de beaucoup de choses, des valeurs très importantes pour la jeune fille qui s’était immédiatement portée volontaire pour accueillir les enfants malades lors de la journée de solidarité qui aurait lieu aujourd’hui même, le 18 décembre, dans le self de McKinley. La lycéenne avait toujours eu pour habitude de s’impliquer à fond dans les activités extrascolaires, preuves en étaient ce qu’elle avait déjà à son actif mais, rendre les enfants joyeux en cette période de Noël –qu’ils soient malades ou non- l’avait rendu très enthousiaste et motivée. Lucy se sentait utile, investie d’une vraie mission, c’est donc tout naturellement qu’elle avait passé ces derniers jours à préparer l’événement mais, aussi à venir en aide aux autres élèves ayant sollicités ses talents de cuisinière pour le stand de cupcakes.

Elle avait usé de grands moyens pour cette journée spéciale placée sous le signe de la générosité : afin que tous les enfants malades puissent profiter des petites douceurs de Lucy, cette dernière avait sagement attendu l’aval des médecins et des nutritionnistes avant de se mettre aux fourneaux, chantonnant un air de OneRepublic. Le jour J était enfin arrivé et après avoir eu l’accord du principal Figgins, elle s’était mise à décorer la salle, à disposer les tables et le buffet où seraient disposées les sucreries en tout genre pour le bonheur de leurs papilles gustatives. Tout avait été soigneusement pensé pour accueillir les convives dans la joie et la bonne humeur en cachant le cadre très « scolaire » du self pour un environnement beaucoup plus chaleureux. Lucy y avait mis vraiment tout son cœur, considérant la cuisine comme un art comestible. En effet, tout le monde sait que le souci d’un artiste et de faire naître une certaine émotion à travers son œuvre ce qui était exactement le cas pour la lycéenne, un simple sourire lui suffirait.

Petit à petit, le self commençait à se remplir et une fois encore, Lucy prit son rôle d’hôte très à cœur. Elle engagea rapidement la conversation avec les enfants, leur offrant une bise, des sourires, veillant à ce qu’ils se mettent à l’aise. Ils n’avaient pas forcément besoin de parler, la lycéenne lisait facilement l’émerveillement au travers de leurs yeux pétillants de joie à l’idée de passer une journée sans penser à la maladie mais, à la magie de Noël. Lucy se sentait un peu comme Santa même si elle aurait souhaité faire beaucoup plus que de simples gâteaux pour les enfants, ils étaient si adorables… Bien décidée à les choyer, la lycéenne prit le temps de discuter avec chacun d’eux et au bout d’une heure, les prénoms étaient quasiment tous mémorisés. Les sourires qu’affichaient les enfants, les gémissements de satisfaction que leur procuraient les friandises de Lucy lui avait mis du baume au cœur, elle se sentait vraiment à sa place et cela n’avait fait que renforcer son envie de créer sa propre chaine de restauration plus tard mais, également –même si c’était un peu tôt pour y penser- de fonder une famille.

Appuyée contre le mur et observant ces enfants se régaler en écoutant attentivement les comptines de Noël l’avait fait méditer sur cette dernière pensée. L’air ailleurs, un léger sourire étira les commissures de ses lèvres, creusant de petites fossettes aux creux de ses joues et son cœur se serra légèrement. C’est l’entrée fracassante d’un professeur qui lui arracha un sursaut, la ramenant brusquement sur terre, Lucy esquissa un sourire et laissa ses bras retomber le long de son corps avant d'aller à la rencontre du professeur en question.

« Je peux vous aider ? »

demanda t-elle gentiment, un sourire extrêmement doux et chaleureux peint sur son visage radieux.

Voilà la grande contradiction de l'esprit supérieurement intelligent - quand l'envie lui prenait, ce qui n'arrivait pas très souvent, juste quand il lisait un livre - de Flow : rien ne lui insupportait plus qu'une journée portes ouvertes. Vraiment ! Quelle idée d'aller perdre une journée de plus au lycée dans la semaine. Une journée de plus ! Il ne comprenait rien à ces élèves. Ils n'aimaient pas travailler et ils étaient toujours en train de s'amuser et personne ne lui ferait croire qu'ils préféraient être au lycée, cette maison du diable, plutôt que chez eux en train de jouer à la Wiwi... ou la Wii, comme ils l'appelaient. Alors Flow, avec sa grande âme, venait participer quand même, parce que même s'il passait son temps à critiquer toutes ces activités inutiles, il adorait voir les élèves se donner en spectacle - lui aussi faisait cela avant, ne mentons pas - et c'était pour cela qu'il avait pris la peine de se lever le matin. Enfin, s'il avait su qu'en arrivant une fille se jèterait sur lui pour l'enfermer dans SA bibliothèque - bref, passons. Maintenant il était dehors et il avait d'autres problèmes à régler. Enfin, ce n'étaient pas des problèmes. Pas pour l'instant. Il devait juste s'assurer que personne ne l'avait surpris en train de spolier la machine à café de la salle des profs pour la mettre sous son bureau. A priori, personne n'était là, tout le monde s'occupait du bon déroulement des animations, ce qu'il était censé faire aussi. Ah oui... où devait-il aller, déjà ? Surveiller des gâteaux, un truc comme ça. Enfin, pas les gâteaux, la fille qui les faisait... ou pas. Peut-être les gâteaux eux-mêmes. Ou encore les enfants qui les mangeaient. Peu importe, il ne voyait pas en quoi il pourrait y avoir de problème. Que croyaient-ils tous ? Qu'on allait empoisonner les gâteaux ? Ce fut à ce moment qu'il vit passer une troupe de petit babouins euphoriques. Qu'est-ce qu'ils avaient, ces gosses ? Ils souriaient comme des bêtas.

- Bonjour. Vous êtes de bonne humeur aujourd'hui !

Il rit tout seul en repartant, se demandant pourquoi il disait cela. Il avait horreur des gosses et leur parler comme faisaient tous ces imbéciles, les parents qui se rappellent quand ils étaient petits, n'était pas du tout dans ses habitudes. Pfff... qu'est-ce qu'ils pouvaient être agaçants, les parents ! Et sa mère qui n'arrêtait pas "oh il était mignon quand il avait trois ans..." "Oh ! J'ai 39 ans !" Mais non, toujours à le ramener à l'âge où il bouffait son caca... Peut-être certainement mieux que ces petits-là. Ils avaient tous l'ai étrangement euphoriques, et l'un d'eux laissa échapper que c'étaient les gâteaux qui lui faisaient cet effet-là. Mais... Comment ça, les gâteaux ? Non, ce n'était pas vrai quand même. Il avait entendu dire, l'année précédente, que certains membres de la chorale avaient utilisés des substances illicites pour mieux vendre leurs gâteaux et récupérer de l'argent. En fait, c'était peut-être pour cela qu'on tenait tant à faire surveiller ce stand. Il se jeta dans le couloir et entra dans la pièce à gâteaux dans une violence terrible. La petite qui s'occupait de la cuisine n'avait pas l'air bien méchante. Mais ils n'avaient jamais l'air méchants, ils ne l'étaient pas d'ailleurs, les inconscients qui utilisaient de tous les moyens pour rendre leurs camarades heureux ! Pour tant, il hurla presque:

- Jeune fille, qu'avez-vous mis dans ces gâteaux ?

Citation :: - Jeune fille, qu'avez-vous mis dans ces gâteaux ?

« Monsieur, calmez-vous s’il vous plait. Vous êtes ici dans un lieu où règnent la joie et l’esprit de Noël… Vous voulez savoir ce que j’ai mis dans mes cupcakes ? Rien de plus que ce qu’il est écrit sur ma recette. Avez-vous seulement effectué des examens pour voir ce qu’il y aurait dedans avant de venir ici pour me pointer du doigt ? Sans vouloir vous manquer de respect, il aurait été plus délicat d’en discuter à l’écart plutôt que d’hurler devant tout le monde et en particulier ces enfants qui peuvent enfin sortir de l’hôpital pour fêter Noël avec nous. »

« Je n’aurais jamais fait une chose pareille. Les cupcakes que j’ai confectionné pour les enfants ont été approuvés par le personnel médical de l’hôpital de Lima, médecins et nutritionnistes ont jugé qu’ils pouvaient les consommer et que je n’y ai ajouté aucun ingrédient douteux mais, si jamais vous voulez en avoir le cœur net alors prenez donc un gâteau qui se trouve sur le plateau et faite l’examen par vous-même. J’aimerai bien savoir ce qui vous a fait croire que c’était le cas, Monsieur. »

Chris savourait la journée qui s'annonçait froide mais chaleureuse pour les enfants qui pourraient profiter de ce jour pour se changer les idées Pour cela, la majorité des professeurs avaient été réquisitionnées par le proviseur afin d'assurer la surveillance des pièces et surtout des surveillants. Évidemment, beaucoup avaient râlé. Pour Chris, cela était une occasion d'aider encore plus et de profiter de l'animation au lieu de rester seule chez elle. Bien sûr, il y avait ses animaux mais cela ne remplaçait en aucun cas une bonne discussion.

Se promenant dans l'ensemble des couloirs, la jeune professeure adressait un sourire radieux à chaque enfant, s'assurant à ce que chacun ait ce qu'ils désiraient. Si certains étaient en train de leur donner des cadeaux, d'autres encore assuraient la pause goûter en donnant des cupcakes gratuitement. Chaque élève aussi était mis à contribution pour ce jour Rien qu'à penser à cela, la jeune femme eut envie d'en goûter un. Probablement un effet de sa grossesse. Arrivant dans la salle, elle remarqua que personne ne tenait le stand. Étrange vraiment. Peut être que Lucy avait eu une urgence? Prenant l'un des gâteaux, elle fut surprise lorsqu'une personne lui conseilla de ne pas y gouter car il y avait des substances illicites à l'intérieur et du doigt désigna les deux personnes qui étaient en train de discuter dehors. Intriguée, Chris, toujours avec le gâteau à la main, alla les rejoindre.Elle arriva au moment où Lucy Jenkins, la responsable du stand, était en train de se défendre du mieux qu'elle le pouvait face à Florent qui la regardait d'un air vraiment dubitatif.

Quelqu'un peut il m'expliquer ce qu'il se passe ici? intervint elle, juste après la fin de la phrase de l'adolescente. Elle avait un peu de difficulté à imaginer Lucy capable de faire cela mais d'un autre côté, elle savait que Florent était juste et qu'il n'accuserait personne sans raison.

- Mademoiselle, vous feriez mieux d'arrêter cela et de répondre à ma question comme il faut. Vous avez de la chance d'être tombée sur moi, parce que vous auriez pu être devant un professeur qui a une susceptibilité bien supérieure à la mienne et qui aurait très mal pris ce que vous venez de dire.

- Il se passe que ces enfants euphorique que tu vois à l'intérieur m'ont dit l'être grâce aux gâteaux qu'ils ont mangé. Tu n'es pas sans savoir qu'un phénomène semblable s'est déjà produit l'année dernière: des substances illicites avaient été mises dans des gâteaux pour qu'on en devienne accro... Enfin, je comprend ce que cette jeune fille a pu vouloir faire, et l'objectif n'est pas le même. Oui, ces enfants sont malades, ça fait toujours du bien de les voir sourire, mais pas de cette façon...

Citation :: - Mademoiselle, vous feriez mieux d'arrêter cela et de répondre à ma question comme il faut. Vous avez de la chance d'être tombée sur moi, parce que vous auriez pu être devant un professeur qui a une susceptibilité bien supérieure à la mienne et qui aurait très mal pris ce que vous venez de dire.

*Une susceptibilité supérieure à la votre… si tant est que ça existe.*

« Monsieur, j’ai répondu clairement à votre question, je n’ai rien ajouté dans ces cupcakes. »

Citation :: - Il se passe que ces enfants euphorique que tu vois à l'intérieur m'ont dit l'être grâce aux gâteaux qu'ils ont mangé. Tu n'es pas sans savoir qu'un phénomène semblable s'est déjà produit l'année dernière: des substances illicites avaient été mises dans des gâteaux pour qu'on en devienne accro... Enfin, je comprend ce que cette jeune fille a pu vouloir faire, et l'objectif n'est pas le même. Oui, ces enfants sont malades, ça fait toujours du bien de les voir sourire, mais pas de cette façon...

« Alors c’est ça votre preuve ? Le sourire de ces enfants malades ? Ils sont sûrement ravis de quitter les murs blancs de leur chambre d’hôpital pour venir ici et être accueillis avec des gâteaux qui leur font oublier l’espace d’un instant la nourriture ragoutante qu’on leur sert tous les jours, c’est peut-être ça qui est à l’origine de leur « euphorie » comme vous dites. »

« Je suis arrivée cette année dans le lycée et je n’avais pas entendu parler de cette fameuse vente de gâteaux fourrées aux produits illicites mais, comme vous l’avez dit, il s’agissait d’une vente. Les miens sont entièrement gratuits comme ceux que je distribue quelque fois dans les couloirs, je n’aurais jamais fait une chose aussi immorale que d’empoisonner ces enfants ou n’importe qui d’autres d’ailleurs, avec mes cupcakes. »

« Je pense avoir assez argumenté, Monsieur m’accuse sans preuve tangible. Il a basé toute son hypothèse sur le simple fait d’avoir vu des enfants sourire ce qui est assez fréquent pendant la période de Noël, il me semble. Je vous garanti que mes cupcakes ne contiennent aucun produit illicite, je suis innocente, Madame. »

Il était difficile pour Chris de se faire une idée de ce qu'il se passait vu les regards que se lançaient Florent et Lucy. Pourtant tous les deux avaient sûrement des bonnes raisons et arguments pour se comporter de la sorte. Ce ne fut que lorsqu'ils prirent tous deux la parole pour lui expliquer, qu'elle comprit.

Tout d'abord, je dois avouer que je suis surprise par une telle chose. Il parait évident que dans le cas présent, le mieux serait d'analyser ces gâteaux avant de lancer des accusations infondées davantage. répondit elle, essayant de se montrer la plus neutre possible. Dans le cas présent, elle remarquait que Florent était en colère à l'inverse de Lucy. Qui croire entre les deux? La prudence l'incitait à imaginer le pire mais elle connaissait Lucy. Étudiante calme qui n'avait pas pour habitude de se faire remarquer. Et en discutant parfois d'elle avec quelques collègues, jamais ils ne lui avaient fait part non plus de quelque incident que ce soit au sujet de la Cheerleader et membre de la chorale. Cependant, elle ne devait pas négliger pour autant le fait qu'il s'agissait de Florent. En qualité de responsable, elle devait se montrer unie avec lui malgré tout. Non, le mieux était de conserver sa neutralité et de laisser la science trancher en dévoilant la vérité.

Il y avait justement des tests de drogue dans le bureau du coach sportif. Par mesure de prudence probablement, afin d'éviter toute manœuvre de tricherie de la part de ses sportifs s'il avait à leur égard le moindre petit soupçon.

Le temps que Lucy aille demander un test au coach si elle veut bien, serait il possible que tu mordes un bout de ce gâteau? Il est évident que ni Lucy qui est mineure ni moi enceinte, ne pouvons y goûter pour le moment. Donc il ne reste que toi. dit elle, s'adressant à Forent en lui tendant le gâteau. Allait il accepter de prendre le risque d'en goûter une petite bouchée ou non? Là était la question mais Chris ne se voyait vraiment pas demander à un enfant d'ouvrir la bouche pour prélever un peu de salive pour savoir s'il est drogué ou pas.

Flow s'énervait ? Eh bien, oui ! Il s'énervait. C'était dans sa nature ! N'importe quel abruti passant dans la rue dirait clairement qu'il s'énervait tout le temps. Mais on apprenait à le supporter. Chris, par exemple, avant dû apprendre à le supporter puisqu'elle avait bien l'air d'être la seule ici à faire attention ne serait-ce que d'une façon infime à ce qu'il disait. Non, la jeune fille n'avait pas l'air déstabilisée du tout. Mais il ne prenais pas cela pour preuve. c'était stupide de toujours penser que le plus coupable était celui qui se sentait le plus mal. ou qui en avait l'air. il y avait de très bons acteurs, dans ce lycée comme partout. Et quand elle lui balança clairement que sa preuve était ridicule, il se plongea le visage dans les mains. Il y avait vraiment des élèves qui ne se gênaient pas pour être complètement impolis envers leurs professeurs. bon, il n'était pas vraiment professeur, et alors ? Un problème avec cela ? Son seul problème fut d'entendre que Chris approuvait l'idée de vérifier avant même qu'il ait pu rajouter une couche de cris par-dessus ce qui venait de se dire. Il soupira violemment en tapant du pied, mais il se tut. Et voilà le comportement classique de la jeune fille accusée: elle se tournait vers la deuxième personne qui venait d'arriver et qui ne savait rien de ce qui s'était passé. En regardant à l'intérieur, il vit de nouveau les enfants sourire et certains les observer, certainement en train de se demander s'ils pouvaient continuer à manger ou non. Il sursauta alors en entendant le fabuleux et génialissime plan que lui proposait soudain sa collègue.

- Pardon ? Tu veux que je mange ce truc ? Je ne suis pas un cobaye.

Il connaissait quelqu'un qui se serait empressé de dire que, en grand boudeur qu'il était, il allait vite se mettre à ne plus parler à personne. Mais évidemment, il n'avait pas le choix. C'était vrai, Chris était enceinte et le preux chevalier qu'il était allait lui épargner cela. Il n'était pas non plus du genre à pousser le criminel sur son propre crime: il n'allait pas forcer la jeune élève à s'empoisonner.

- D'accord, c'est bon...

En plus, Flow ne connaissait pas cette étudiante en question. Il ne savait même pas ce qu'elle faisait comme activité - puisqu'apparemment ici tout le monde était jugé en fonction de ses activités. mais peut-être que dans ce cas Chris en savait plus que lui sur la personnalité de la jeune fille. Après tout, c'était l'impression qu'elle lui donnait. Déjà elle connaissait son prénom... Mais bon, il ne fallait pas vraiment se fier sur ce critère pour dire s'il connaissait un élève ou pas puisqu'il était incapable de retenir le moindre nom. Ou alors il ne faisait aucun effort. Peu importe, il décida de se rendre et prit un minuscule bout de gâteau. Il serait soulagé, pour une fois, d'apprendre qu'il avait tort.