Ils s’étaient fixés ce rendez vous la première fois qu’ils s’étaient vus. Pas le genre de rendez vous amoureux, loin de là. Plutôt le rendez vous pour vider son sac, raconter sa semaine à quelqu’un qui nous connais si peu mais tellement bien à la fois. Robbie attendait ça chaque fois avec impatience tant il n’avait pas ressenti cette légèreté depuis longtemps. Il savait qu’il pouvait lui dire ce qu’il voulait, elle ne le jugerait pas, et il l’avait compris dès la première parole échangée.
Leur rencontre avait quelque peu été inattendue et extrêmement étrange. Deux inconnus commençant à se raconter tout leurs plus insignifiants malheurs. Puis au fil de la conversation, il fallait aller dans des détails plus profonds, cachés qui n’aspiraient qu’à être déterrés. Et depuis, chaque fois qu’ils se voyaient, sachant le passé de l’autre, les deux se transformaient en oreille attentive pour l’autre.

Robbie se préparait dans sa chambre. Oh rien de très extravagant, il suffisait de remettre ses cheveux en place après la nuit qu’ils avaient eu, et de prendre des vêtements au hasard dans l’armoire. Il descendit, et vit que sa mère était assise à la table de la cuisine, en train de se préparer à aller à l’église. C’est fou qu’après tout ce qu’elle lui avait fait subir elle continue d’y aller. C’était le mal incarné. Quoiqu’elle essayait surement de se repentir et là, elle en avait encore pour un certain moment. Il entra dans la cuisine, fouilla dans le frigidaire et se servit un verre de jus d’orange. Il attrapa un bout de pain et ressortit de la pièce.

Sa mère l’interpella pour lui dire de ramener le courrier puisqu’il sortait. Il alla a la boite aux lettre, rentra dans la maison et lança les factures reçus sur la table, toujours sans lui adressé le moindre mot. Il mit son verre dans l’évier avant d’y mettre un coup d’eau pour le rincer. Il entendit sa mère dans son dos déchiré une première enveloppe.

Robbie, puisque tu vis ici, il va falloir que tu commencer à payer la moitié des factures. Je ne vais pas te loger gratuitement à vie, sache-le !

Il ne prit même pas la peine de lui répondre ou d’émettre un quelconque commentaire. Il ne prit pas la peine de la prévenir de son départ non plus, et puis de toute façon, elle s’en moquait bien. Il mit ses écouteurs dans ses oreilles, passa le pas de la porte, enfonça ses mains dans les poches de son pantalon et puis se mit en route.

Comme souvent, il allait rencontrer Iris dans le parc. Il faisait un peu froid à cette époque, mais il suffisait de bien se couvrir pour ne pas devenir glacé pour autant. Il enfonça son visage un peu plus dans son écharpe, lança un regard vers la grande horloge de la place Bellefontaine et vit que n’étant pas en avance il ferait mieux de presser le pas. Il arriva dans le parc et avança vers le point de rendez vous, où il put voir que Iris l’attendait déjà. Il espérait qu’elle n’ait pas été là depuis longtemps et fini par courir pour le rejoindre.

Désolé du retard. J’ai fait du plus vite que j’ai pu, mais ma chère mère avait encore trouver des choses a me faire faire.

Il tira sur le fil de ses écouteurs pour les enlever, et s’assit à ses cotés, soufflant dans ses mains pour les réchauffer un peu. Comme si ce n’était pas déjà une punition suffisante que de vivre avec elle, il devait en plus payer pour ça. Non mais, y croyait-elle vraiment ? Lui n’avait qu’une idée en tête depuis bien longtemps, et c’était de quitter le cocon familiale. Et un jour, il y arriverait.

Je t’ai pas fait attendre trop longtemps au moins ?

Samedi était mon jour de congé et j’en avais grand besoin. Laissez Télémaque seul à la boutique ne me faisait pas plaisir, mais il fallait un peu penser à soi parfois. De plus, avant que je n’arrive, il était seul avec ses pensées. Ça lui fera penser au bon vieux temps. Pour la première fois, je n’avais pas besoin de me lever à l’aube pour chercher les fleurs directement à l’entrepôt, et me lever à 9h était pour moi comme une grasse mat’. Il en faut si peu pour être heureux ! Parfois, je me disais que ma vie était bien simple, que je ne voyais pas pourquoi je n’étais pas heureuse, jusqu’à ce que je me souvienne que tous mes projets pour devenir une danseuse avait été réduit à néant ces quatre dernières années. Rien qu’à penser à la pauvre ballerine raté que je suis me fasse replongée directement dans mon lit pour 30 minutes de déprime. Jusqu’à ce que je me souvienne que j’avais rendez-vous avec Robbie à 10h30 au Parc Lincoln. Sortant en petite culotte de mon lit et parcourant mon appartement surchauffé, j’attrapai une tasse que je mis sous la machine à café. Le temps que je me prépare, cette petite merveille à capsule me livrerait mon petit déjeuner sans sucre et avec un nuage de lait.

Nous étions fin janvier et l’hiver était encore bien présent. Je sortais de mon minuscule appartement pour affronter le froid, enveloppé dans mon manteau anthracite et mon épaisse écharpe de laine noire. J’avais eu la bonne idée d’attacher mes cheveux en chignon, vu qu’ils n’étaient pas totalement sec et que je ne voulais tout de même pas attraper froid. J’apprécie Robbie malgré les deux de rencontre qu’on avait eu mais pas assez pour attraper la crève. Surtout que j’allais déjà lui rendre un énorme service.
J’avançais jusqu’à notre point de rendez-vous, un petit banc près de la fontaine vide en cette époque de l’année, et remarqua qu’il n’était pas encore arrivé. Bon, ce n’était pas bien grave, tant qu’il n’avait pas 10 minutes de retard, voir plus. Je détestais attendre et qu’on m’attende par la même occasion. Si on fixait une heure de rendez-vous, c'était pour la respecter non ? J’étais si catégorique que j’allais jusqu'à ne plus du tout adresser la parole et fréquenter les personnes qui me faisaient poirauter. Heureusement, Robbie arriva rapidement.


ROBBIE ▬ Désolé du retard. J’ai fait du plus vite que j’ai pu, mais ma chère mère avait encore trouver des choses a me faire faire.


J’hochais la tête pour lui signifier que ce n’était rien et me levai pour le saluer. Il me fit signe de nous asseoir.


ROBBIE ▬ Je t’ai pas fait attendre trop longtemps au moins ?

Je secouai la tête négativement et lui répondit


IRIS ▬ Non ne t’inquiète pas, je venais juste d’arriver. Et j’avais une belle vue.

En effet, des bancs de fleurs avaient été installé tout autour de la fontaine et bordait les sillons qui y menait. Pour ma part, je trouvais ça inutile, la plupart allait piétiner ces belles fleurs et surtout, le temps ne leur permettrait pas de survivre. Pourquoi les installer si tôt ? Autant profiter de leur beauté dès maintenant avant qu’elle ne soient plus là.

En temps normal, il n’arrivait jamais en retard. C’était irrespectueux envers la personne qui l’attendait, mais depuis que sa mère avait décidé de mettre des bâtons dans les roues de sa vie, même en étant prêt un certain temps à l’ avance, il pouvait parier qu’il serait en retard. C’était comme ça et sur ce point, Robbie pouvait avouer qu’elle était très forte. A croire que son unique but dans la vie depuis son retour était de le forcer a repartir. Continuant comme elle était lancée, il ne lui faudrait pas longtemps pour que sa tactique marche. Sa dernière lubie étant de le faire payer la moitié du loyer, Robbie n’y céderait pas.

Iris lui dit qu’elle venait tout juste d’arriver, et qu’elle avait une jolie vue pour lui tenir compagnie en plus. C’était surement pour ça qu’ils se retrouvaient toujours dans le parc. C’était presque le seul endroit de la ville comportant autant de diversité de fleurs. Robbie n’y connaissant rien, n’appréciait pas autant le décor qu’Iris, mais tout de même il fallait l’avouer, toute ses couleurs étaient jolies a voir. Avec un soupçon de neige, tout aurait pu paraitre plus beau.

Alors comment s’est passée ta semaine ? Pas trop dur ? J’ai entendu dire que vous couvriez le mariage d’un de mes profs au lycée.

Entre les compositions florales au centre des tables, les pétales qu’il faudrait disperser un peu partout, les décorations florales etc, elle allait en avoir du travail si c’était le cas. Ils allaient surement moins se voir pour la laisser se concentrer essentiellement à cet événement. Après tout, s’ils faisaient bonne impression au mariage, peut être qu’ils seront amenés à être recontacté. Ce serait tellement bien. Bien vite, il fixa un point au loin et se laissa submerger par ses pensées à lui aussi.

Bon je te dois des explications sur mon retard. Je te dis le plus intéressant parce que le reste, c’est comme d’habitude donc tu connais déjà. Bref, aujourd’hui on a reçu des factures, et voulant me pourrir la vie une nouvelle fois, bah… Elle veut qu’on partage le loyer en deux.

En tout cas s’il cédait, sa fameuse règle du « tu vis chez moi, tu suis mes règles » ne marcherait pas. D’un coté il avait envie de la mettre au défi, faire tout ce dont il avait envie entre ces quatre murs au point qu’au final, ce soit elle qui parte cette fois, mais d’un autre coté, s’il devait payer un loyer autant vivre seul, et surtout loin d’elle. Et puis tout le monde y gagnerait : il ne l’aurait plus sur le dos, et elle pourrait vivre sa vie. Mais cette idée d’indépendance sembla tout à coup bien loin. Il faudrait qu’il travaille un certain temps avant d’avoir amasser assez d’argent. Le travail ne lui faisait pas peur, au contraire surtout connaissant la récompense finale. Puis commençant a apprécier l’idée de prendre son envol, il continua sur sa lancée, se tournant vers Iris pour lui parler a elle, et non pas aux fleurs.

Non mais franchement, elle y croit vraiment d’après toi, ou elle a dit ça parce qu’elle avait les factures et moi en même temps sous le nez ?

Contrairement à Robbie, j’étais contente qu’il ne neige pas. Ces pauvres fleurs souffraient déjà assez comme ça dans le froid, pas la peine qu’une épaisse couche de neige leur pèse sur les carrures sur fragile. Et même pour moi, je ne voulais pas m’asseoir sur ce qui ressemblait à du slushy, ni en voir tomber. Depuis que je m’en étais pas pris un mais deux slushy, je ne les appréciait plus à leur juste valeur. Alors que je n’étais même pas lycéenne, vous vous rendez compte ! Je plains ces pauvres choristes, je ne sais pas si j’aurais supporter ça moi.


ROBBIE ▬ Alors comment s’est passée ta semaine ? Pas trop dur ? J’ai entendu dire que vous couvriez le mariage d’un de mes profs au lycée.


Il était bien renseigné ! Je me dmandais comment il était au courant avant de me rappeler qu'il était au lycée. Il était certain que c'était le dernier potin ! Leur prof de maths qui se marie avec la super star Logan Quincy ! Surtout que James n'avait jamais montré des signes d'homosexualité qu'elle le sache. Après tout, il avait tenté de l'embrasser.


IRIS ▬ Oui le mariage Sheffield-Quincy ? Ca va, c’est surtout à quelques jours du mariage qu’il va falloir speeder.


En effet, c’était des fleurs donc il fallait les travailler à la dernière minute. Pour l’instant, ils ne se mettaient d’accord que sur les compositions florales, les couleurs, le prix.. Mais c’était le plus gros client de l’année d’après Mrs Higgins, elle ne pouvait pas se permettre de rater ça et nous mettait pas mal la pression sur son fils et moi pour que les présentations soient parfaites, même si c’était toujours le cas. J’étais une personne perfectionniste, j’avais hérité ça de la danse classique et m’appliquais toujours dans mon travail, elle n’avait pas à s’en faire.


ROBBIE ▬ Bon je te dois des explications sur mon retard. Je te dis le plus intéressant parce que le reste, c’est comme d’habitude donc tu connais déjà. Bref, aujourd’hui on a reçu des factures, et voulant me pourrir la vie une nouvelle fois, bah… Elle veut qu’on partage le loyer en deux. Non mais franchement, elle y croit vraiment d’après toi, ou elle a dit ça parce qu’elle avait les factures et moi en même temps sous le nez ?


C'est fou comme certaine personne peuvent avoir tant de fibre maternelle d'un sac en plastique. Je n’avais jamais été particulièrement été attirée par les enfants, je ne savais même si j’en voulais mais en tout cas, je sais que si c’est le cas, je l’aimerais plus que tout au monde. Ca serait une parte de moi, si il souffre je souffre, s’il est heureux je le suis également. Jamais je ne comprend les personnes comme la mère de Robbie qui laisse leur enfant se démerder.


IRIS ▬ Waouh je pensais pas que vos rapports étaient si conflictuels. Je pensais pas qu’une mère pouvait être si horrible à vrai dire. Il faut que tu partes Robbie, c’est mieux pour toi.


C’était un peu evident ce qu’elle disait, surtout que Robbie était déjà en projet de démanagement. Elle s’était porté garante pour la caution mais il ne restait encore l’appart à trouver et un colocataire car je doute qu’il puisse survenir seul à un loyer, car il est encore lycéen et que même s’il a un petit job à côté, pas sur que ça équilibre la balance. La vie est chère malheureusement !


IRIS ▬ T’as déjà trouver un coloc avec qui vivre ?


Je pensais tout de suite à Télémaque. Il m’avait parlé de son envie de quitter la maison familiale et je le comprenais lorsque je voyais sa mère, même si Télémaque adorait cette dernière. Normal c’était sa mère mais bon. J’ai l’impression qu’elle ne m’a jamais apprécier, qu’elle ne m’a engagé que parce que Télémaque m’avait recommandé et qu’elle a l’impression que je pervertie son fils. Si elle savait ! C’est plus lui qui m’entraîne dans les bars que le contraire.

C’était certain qu’ils misaient gros avec ce mariage. Un seul faux pas pourrait être une épine dans le pied de leur carrière. Mais mieux valait ne pas lui rappeler pour ne pas qu’elle panique jusqu’aux quelques jours précédent la réception. Surtout que sa patronne devait déjà exercer beaucoup de pression de son coté. Et puis le fait de tout devoir faire à la dernière minute, surement le jour même d’ailleurs, devait déjà peser lourd dans la balance du stress. C’est vrai que vu comme ça, le travail semblait tellement immense. Surtout que le mariage aurait surement un haut budget et qu’il y aura beaucoup de fleurs un peu partout, mais détail. Tout ça était bien trop abstrait pour lui. En tout cas, sa réponse semblait avoir été dite sur air un plutôt confiant.

Mais de toute façon vous allez assurer ! Y a pas de raison pour que quelque chose cloche.

Et puis ; Iris était très pointilleuse donc vraiment il ne pouvait rien avoir qui pourrait barrer leur chemin. Robbie se sentit dans l’obligation de lui devoir une explication quant à son retard. Il lui expliqua donc les grandes lignes de l’histoire de ce matin. Au fur et à mesure qu’il avançait dans ses paroles, Iris semblait de moins en moins y croire ses oreilles. C’est vrai que dit comme ça de but en blanc ça devait paraitre cruel ce que sa mère lui avait dit ce matin. Lui, il y était habitué, un peu plus, ou un peu moins ne changeait pas grand-chose.

Elle lui confia que d’après elle, la mère de Robbie était une personne horrible. Avant, il aurait mal pris cette remarque prétendant qu’après tout, c’était sa mère dont elle parlait, mais là il ne réagit pas particulièrement. Sa mère semblait le voir comme un colocataire plutôt qu’un fils ? Bien, il cesserait de la voir en tant que mère. Elle lui conseilla de partir pour son propre bien. Mais où ? Avec qui ? Un jeune de 18ans, sans revenus garnis ne pouvait pas se permettre de prendre toute décision sur un coup de tête.

J’ai déjà pensé à partir de chez moi. Mais j’aurais pu tenir quoi… Un mois tout au plus ? Et à mon retour ma mère aurait encore été plus exécrable qu’elle ne l’est déjà. T’imagine un peu le truc ?

Et puis quitte a partir de chez sa mère, autant partir de Lima. Rien ne le retenait ici après tout, et les Etats-Unis étaient assez grands pour avoir l’embarras du choix. Mais Iris lui avait proposé de se porter garante pour un immeuble. Il n’y avait d’ailleurs pas cru, puis ne voulant pas de la charité des autres, il avait refusé encore et encore. Et puis si c’était pour partager un appartement avec un autre gros con pire que sa mère non merci. Pour faire une colocation, pour lui, il fallait connaitre un minimum l’autre personne, et désormais, personne a Lima n’aurait voulu prendre un appartement avec lui, et de courir le risque qu’un jour, il se soit encore enfui. Il le reconnaissait, c’était légitime.

Bah non. Je me vois pas vivre avec un inconnu, ni avec un lycéen de l’école. Pas d’inconnu, parce que sinon autant vivre chez ma mère et ne pas lui prêter la moindre attention, pas un lycéen pour ne pas qu’il prenne trop de liberté genre : fête tout les week end. Il faudrait quelqu’un de responsable.

Parce qu’il voulait vivre en collocation certes, mais pas avec quelqu’un comme Paris Hilton. Une fête de temps en temps pourquoi pas. Mais le risque couru avec un lycéen, c’était qu’il soit lâché en liberté trop rapidement. Passant du contrôle parental, à pas de contrôle du tout. Ayant déjà du vivre par lui-même lorsqu’il était en Californie chez sa tante, il savait se gérer. Au moins cette petite parenthèse familiale lui aura apporté quelque chose de bien.

Le mariage approchait de plus en plus, et j’avais toujours maudit les personnes qui faisaient leur mariage en plein hiver. Ne respectait-il pas si peu ces êtres vivants pour les mettre devant un froid hivernal qui allait leur être fatal ? De plus, il fallait faire importer les fleurs de Hollande, car les espèces demandaient ne pouvaient être produite sous serres sur le sol américain. Un remaniement total de l’espace et j’avais toujours détester modifier quoi que ce soit. Privilégier les produits de saisons, c’était aussi applicable pour les fleurs. Mais un mariage ce n’était normalement qu’une fois dans une vie, il fallait donc mettre le paquet ! Tant pis pour l’emprunte écolo.
Je souris, il se voulait rassurant et c’était gentil de sa part. Ca changeait de Mrs Higgins qui idolâtrait totalement son fils et me traitait comme une moins que rien, comme si je pervertissais son fils. Si elle savait ! Au moins, quand il y avait Télémaque avec moi, je n’avais pas à subir ses remarques. Et avec le mariage, c’était encore pire. Je faisais alors toujours de mon mieux pour m’appliquer et lui renvoyer un travail si impeccable qu’elle ne trouvait rien à redire dessus.


ROBBIE ▬ J’ai déjà pensé à partir de chez moi. Mais j’aurais pu tenir quoi… Un mois tout au plus ? Et à mon retour ma mère aurait encore été plus exécrable qu’elle ne l’est déjà. T’imagine un peu le truc ?


J’hochai la tête, heureusement qu’en ce qui me concerne, tout allait bien avec ma famille. J’étais fille unique et j’avais toujours eu tout le soutien de mes parents, même pour les projets les plus fou comme vouloir entrer au NYC Ballet ou alors partir dans une école d’arts de la scène au Pérou. Heureusement d’ailleurs, je n’aurais jamais pu tenir toute seule.


ROBBIE ▬ Bah non. Je me vois pas vivre avec un inconnu, ni avec un lycéen de l’école. Pas d’inconnu, parce que sinon autant vivre chez ma mère et ne pas lui prêter la moindre inconnu, pas un lycéen pour ne pas qu’il prenne trop de liberté genre : fête tout les week end. Il faudrait quelqu’un de responsable.

IRIS ▬ Tu sais que j’ai peut-être la personne idéale pour toi ? Mon meilleur ami, enfin mon collègue aussi. Télémaque O’Higgins, c’est sa mère qui m’emploie, on bosse dans la même boutique.


« Responsable » n’était pas vraiment l’adjectif idéal pour Télémaque. Mais savoir que le jeune homme avait un salaire et qui ne serait pas en dèche pour payer le loyer était un point important sur la candidature et j’en faisais mon principal argument, en plus que c’était un garçon très gentil et sympa, un peu alcoolique et déjanté sur les bords mais c’était ça que j’aimais chez lui.
Je continuais alors l’éloge de mon meilleur ami, sachant également que lui cherchait un endroit pour se barrer de chez sa mère. J’imagine, il la voit au boulot et en plus lorsqu’il rentre chez lui. HORROR.


IRIS ▬ Il a 21 ans et un casier judiciaire vierge, que de demander de plus ?


Toutefois, je ne voulais pas le lui imposer. Je ne voulais pas que Robbie croie que je me portais garante pour son appart uniquement pour caser mon ami dans le besoin. Mais c’est vrai que cette situation arrangement tout le monde. Et puis, recommandé par moi, n’était-ce pas la meilleure recommandation ?

Alors qu’il exposait les différentes raisons qui le poussaient à rester chez lui, malgré l’atmosphère qui y régnait, Iris semblait réfléchir tout en continuant de l’écouter. Alors qu’elle continuait de réfléchir, Robbie se demandait ce a quoi elle pouvait bien penser. Peut-être qu’elle avait laissé le gaz ouvert chez elle, ou qu’elle avait oublié de ‘ranger’ une plante avec de partir ? Ses questions eurent bientôt une réponse du nom de Télémaque. Drôle de nom soit dit en passant. Iris était déjà en train de lui dire qu’il travaillait avec elle, mais Robbie ne l’écoutait plus vraiment. Il avait une possibilité de quitter sa mère. Pour toujours ! C’était la meilleure nouvelle de l’année, du siècle même ! Il avait déjà croisé le collègue d’Iris, et il semblait plutôt simple, pas prise de tête, et assez rigolo. Oui il ne l’avait qu’entre-aperçu mais ça suffisait à Robbie pour s’en faire une mince idée. Et il travaillait, donc avait un salaire régulier, ce qui n’était pas à négliger évidemment. Il essaya tout de même de ne pas trop s’emballer et écouta ce qu’elle continuait à lui dire. Il avait donc 21 ans, donc était assez jeune. Robbie s’empressa de lui répondre, avec enthousiasme.

Tu sais que là, je suis déjà en train de planifier quand je pourrais déménager ! Il a l’air génial, et le fait qu’il soit jeune est un super avantage : au moins si un jour je rentre un peu tard, je devrais pas faire super attention à ne pas le réveiller, ou de ne pas briser une de ses règles de vieux en collocation.

Il ne comptait pas vraiment prendre un appartement pour faire la fête tout les soirs, et rentrer à pas d’heure, mais une fois comme ça il ne dirait pas non. Surtout qu’il recommençait a avoir quelques amis au lycée. Et si au pire du pire un jour il invite quelques amis a la maison, Télémaque ne ferait pas l’associable casanier. Enfin, ça se n’était que des suppositions, mais pour être le meilleur ami d’Iris, Robbie imaginait qu’il fallait avoir un certain nombre de qualité.

La question du colocataire étant désormais plus ou moins réglé, (il fallait toujours qu’il sache si le fameux fleuriste voulait de lui, alors qu’il ne se connaissait ni d’Adam, ni d’Eve), la question de l’appartement se posait. Il avait vu une annonce sur une façade de bâtiment, mais en entrant dans l’immeuble il s’était rendu compte que ce serait bien trop cher pour lui. Il lui faudrait quelque chose qui se rapproche du centre ville. La légende disait que les loyers là bas étaient plus bas. Et moins ils étaient élevés, moins il asséchera son héritage financier (assez conséquent étant fils unique, il n’y avait pas eu de question de partage) qu’il avait reçu à la mort de son père. Il se tourna donc vers Iris avant de reprendre la parole.

Il faudrait que je demande à ton collègue ce qu’il en pense, s’il veut de moi. Tu crois que si un jour j’appelle à la boutique et je demande Télémaque O’Higgins ça passera, ou la patronne ne veux que des appels professionnels ?

Il savait qu’entre Iris et sa patronne se n’était pas l’amour fou. Mais même si cette dernière préférait les appels professionnels, peut-être ferait elle une exceptions pour son fils adoré ? De toute façon, pour toutes personnes normales, les enfants étaient toujours privilégiés lorsqu’il s’agissait d’affaires (professionnelles) familiales.

J’ai vu qu’il y avait quelques appartements à vendre du coté du centre ville. J’ai pas eu l’occasion d’aller y jeter un coup d’œil encore, mais puisque je crois que tu vis par là bas, est-ce que ça craint, ou c’est passable ?

Oui il avait beau ne pas avoir le compte en banque de Crésus, il ne voulait pas non plus aller vivre dans un trou à rat. Et puis s’ils étaient deux, ils pourraient peut-être s’offrir un petit logement luxueux. De toute façon, pour Robbie habiter tout seul à son âge était déjà un luxe, loin de la pénitence qu’était de vivre avec sa génitrice.