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 01. Waiting For A Blue Sky

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MessageSujet: 01. Waiting For A Blue Sky   01. Waiting For A Blue Sky EmptyJeu 5 Jan - 22:15

À califourchon sur le rebord de sa fenêtre, Peter fumait une cigarette, les yeux dans le vague. La nuit tombait sur Lima, et l'éclairage nocturne venait de se déclencher. Le halo des réverbères reflétait la bruine; Il ne pleuvait pas encore assez pour sortir les parapluies, mais assez pour que les vêtements collent à la peau et que les cheveux frisent mollement sous l'effet de l'humidité. Un temps, somme toute, parfaitement désagréable. Le jeune homme fixait sans vraiment les voir les passants qui rentraient chez eux. Tous avaient un point commun: tête baissée, ils regardaient leurs pieds. Ils les scrutaient avec insistance, comme s'ils craignaient de les perdre. Peter ne comprenait pas cette habitude; Il avait toujours habité à plusieurs étages du sol, et en avait tiré un goût prononcé pour l'observation des balcons. Même lorsqu'il se promenait, il avait toujours un oeil sur ce qui passait au dessus de lui. Ce comportement ne faisait pas de lui un doux rêveur; il partait simplement du principe que le monde ne se limite pas à notre vision périphérique. Ainsi, il savait qu'à deux rues de chez lui, une vieille dame entretenait une véritable forêt tropicale sur 5m carrés de terrasse, que 12 chats, 7 oiseaux et 4 chiens cohabitaient sur la plus grande avenue de la ville, et qu'un sdf avait élu domicile sur le toit d'un immeuble concomitant au sien. Sans être voyeur, il aimait observer le monde et déceler des détails auxquels personne ne prêtait attention. Cela lui procurait une sensation étrange, comme s'il était le seul à pouvoir capter la beauté des choses simples et furtives.
Une boule de poils bondit près de lui. C'était un énorme matou, mou comme un loukoum, gris et balafré. Le chat du voisin, en perpétuelle balade. Vagabond dans l'âme, avait l'habitude de disparaître pendant des jours et de réapparaître ensuite comme si de rien n'était, avec quelques cicatrices supplémentaires sur son museau grincheux. Étant donné la disposition de la résidence, la fenêtre où était assis Peter jouxtait l'escalier de secours commun à tous les appartements, et le chat n'avait qu'à descendre quelques marches pour un peu de compagnie. Il s'assit sur le rebord, et fixa un instant le jeune homme, en plissant ses grands yeux bleus. "Tu ressembles à Maître Yoda quand tu fais cette tête là." lança le professeur en soutenant son regard perçant. Il n'aimait pas spécialement les animaux, mais il ne les détestait pas non plus. Il ne lui serait pas venu à l'idée d'en posséder un, mais Hercule - c'était le nom du chat, ne le dérangeait pas. Il avait plus de mal avec son maître, un pharmacien dégarni qui dégageait une odeur de camphre proprement nauséabonde. Seul, la quarantaine passée, il vouait un culte à son Hercule: il passait son temps à lui parler, le brossait sans fin, lui confectionnait des colliers en raphia de couleur, lui achetait la pâtée la plus chère de l'Ohio, et était intarissable à son sujet. Peter était scandalisé qu'on puisse être atteint d'anthropomorphisme à ce point. Un chat était un chat, ni plus ni moins. Il devait garder son statut d'animal. Lorsque le fugueur venait lui rendre visite, chacun restait à bonne distance, et si, éventuellement, le jeune homme se fendait d'une caresse sur la tête, il n'était jamais question entre eux de plus de familiarités.
Lassé de scruter son acolyte fumeur dans le blanc des yeux, l'angora s'invita effrontément en sautant à l'intérieur. Le jeune homme l'observa entamer un tour du propriétaire, silencieux et curieux. Hercule sauta sur le bar, et entreprit l'inspection en règle d'un sac en papier qui y traînait.
La situation plutôt cocasse - le chat avait maintenant la tête dans la boîte à thé, rappela au jeune homme que son frigo était vide, et que s'il voulait manger autre chose qu'une tartine au beurre rance au dîner, il avait intérêt à descendre à la supérette rapidement. Il habitait seul depuis quelques années déjà, mais il éprouvait toujours autant d'ennui à faire les courses et la cuisine. Le ménage ne lui posait aucun problème, le repassage non plus, mais ce n'était décidément pas un grand chef. Il s'astreignait à manger équilibré, mais cela tenait plus de la corvée que du plaisir. Manger était nécessaire, donc il mangeait, point. Pas besoin de s'essayer à la haute gastronomie. Contrarié à l'idée de quitter son coin de fenêtre confortable, il se redressa, jeta son mégot dans le verre qui faisait office de cendrier, et se glissa au sol. Laissant le quadrupède poilu à ses explorations, il enfila son manteau, passa une main rapide dans sa tignasse, et sortit. "Pas de bêtises", lança-t-il au chat avant de refermer la porte, sans attendre de réponse. De toute façon Hercule était trop occupé pour prêter attention à ses conseils: il avait décidé de piquer un somme sur le clavier de l' ordinateur allumé.
Dehors, le vent avait forci. Il plissa les yeux à cause de la pluie qui lui fouettait le visage, et regretta déjà d'être sorti. Il accéléra le pas, en tentant de dresser une liste mentale de ce qui lui manquait.
Alors qu'il se débattait déjà suffisamment avec son manteau qui prenait les courants d'air de tous les côtés, il fut également obligé de cohabiter avec les badauds et leurs parapluies, qui se croyaient seuls au monde sur les trottoirs minuscules. Il évita de justesse l'énucléation, se baissa pour échapper au scalp, et atteint un stade d'énervement critique lorsqu'un Hummer l'aspergea copieusement en roulant dans une flaque. "Et on s'étonne qu'il y ai des assassinats..." grogna-t-il, furieux. Après avoir traversé le quartier détrempé, il arriva finalement à la supérette; par chance, il n'y avait que peu de monde. Il retira son manteau, et s'ébroua; ses cheveux, châtains d'habitude, prenaient une teinte mordorée sous la pluie et le néon blafard. Il les plaqua en arrière d'un geste, et entra dans le magasin: deux caissières, le regard morne, attendaient la fin de la journée, engoncées dans un uniforme jaune poussin ridicule. Les rayons présentaient un amoncellement d'articles abîmés ou mal reposés, symbole de la bonne éducation des citoyens de Lima. Trop dépité pour s'énerver une nouvelle fois, Peter se saisit d'un panier en plastique aussi jaune que les deux mégères et s'engagea dans le premier rayon venu. Entre deux paquets de lessive, il dégota une barre de céréales et quatre steaks sous vide, bons à jeter. Il soupira. Au rayon suivant, il fit le plein de pâtes instantanées, de riz "spécial cuisson rapide", de conserves et plats préparés: tout était bon pour réduire son temps de séjour dans la cuisine. Cependant, il se força comme à chaque fois à passer par le rayon légumes frais, dans l'hypothèse d'une éventuelle visite - le terme exact serait inspection - parentale. Ses parents habitaient à l'autre bout de la ville, mais ils venaient régulièrement prendre de ses nouvelles. Son père, un de ces américains taiseux et hirsutes, dont la barbe lui mangeait le visage et dissimulait habilement ses rides naissantes, était maintenant à la retraite, mais il occupait son temps à bricoler et réparer de vieilles voitures dans le garage familial. Il prenait la route pour les essayer une fois le travail terminé, et traversait ainsi parfois plusieurs États avant de se décider à rentrer. Sa mère, Lizzie, travaillait à temps partiel dans un centre d'accueil pour personnes en difficultés en dehors de la ville, et accompagnait régulièrement son mari dans ses road trips impromptus.
"Peter?"
Le jeune homme se raidit légèrement, comme si on l'avait bousculé, mais ne releva pas. Des millions de gens s'appellent Peter. Il continua donc d'avancer, l'anse du panier lui cisaillant l'avant bras. Il n'avait absolument pas envie de tomber sur un ancien camarade de promo, ou pire, un de ses collègues de Mc Kinley. Il n'avait rien à leur dire, il n'avait rien en commun avec eux. Les seules personnes qu'il estimait un tant soit peu n'était plus dans cette ville, où ne l'appréciait pas au point d'engager la conversation entre des pommes et des poireaux - raison pour laquelle il les louait volontiers.
"Peter, c'est vous?"
Cette fois-ci, il s'arrêta. Il avait reconnu cette voix. Ses épaules s'affaissèrent, sous le poids de ses achats autant que de la résignation; Pourquoi était-ce toujours dans des endroits aussi incongrus qu'une supérette miteuse que l'on se trouvait nez-à-nez avec du monde connu? Il se retourna lentement, le temps de se composer un visage de circonstance.




Dernière édition par Peter Matterface le Ven 27 Jan - 23:25, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: 01. Waiting For A Blue Sky   01. Waiting For A Blue Sky EmptyMar 10 Jan - 1:05

Relisant pour la troisième fois la même phrase bourrée de fautes sur la copie qu’elle avait tirée de sa pile, Ashandra soupira profondément avant de lâcher le crayon sur lequel ses doigts étaient crispés. Était-ce une illusion ou bien le niveau des classes d’anglais du lycée avait très fortement baissé ? Elle avait elle-même toujours été assez bonne élève tant que ça n’impliquait pas de mathématiques, mais dans ses souvenirs elle était loin d’être la tête de sa classe. Qu’est-ce qui avait bien pu se passer en cinq ans pour que des élèves de dix-sept ans aient oublié comment conjuguer un verbe irrégulier au passé ? La jeune femme était désespérée après seulement dix copies, et il lui en restait encore une petite vingtaine sur un coin de sa table de travail. Elle avait commencé son premier stage depuis quelques jours à peine et déjà son ancienne professeur devenue tutrice pour cette année universitaire lui avait confié la plupart des tâches ingrates. Dire que cette femme était si parfaite dans sa mémoire. La jeune femme avait gardé un souvenir ému de cette personne qui derrière ses grands airs et ses commentaires acerbes faisait attention à ses élèves et ne s’attachait pas à eux pour ne pas être triste quand elle les voyait partir. Mais en réalité, il s’était vite avéré que tout ceci relevait des vues de l’esprit d’Ashandra qui avait rêvé le professeur idéal pour sa matière préférée. Non seulement Mrs Mauley ne se souvenait pas du nom des élèves dans sa classe, mais elle les méprisait tous sans même faire l’effort de les connaître. Quant à sa stagiaire, c’était à peine si elle lui donnait des conseils pendant les cours. Elle ne restait pas une seconde dans la salle de classe une fois que la sonnerie avait retenti, elle se contentait de ramasser le seul livre tiré de son minuscule sac à main et de partir en laissant la porte grande ouverte. La première semaine, la jeune afro-américaine était tombée de très haut lorsque toutes ses illusions et tous ses espoirs pour l’année à venir tombèrent aux oubliettes. Dès le début de la deuxième semaine, Mrs Mauley avait commencé à la bombarder d’e-mails contenant une seule et unique phrase lui intimant l’ordre de passer prendre tel ou tel livre à la librairie pour elle, ou bien d’apporter un café en venant en cours, voire de préparer un cours au débotté pour l’assurer à sa place. Pensant tout d’abord qu’il s’agissait d’un bizutage traditionnel au lycée, elle s’était renseignée auprès de ses autres collègues et bien vite devant leurs mines gênées elle comprit qu’elle était juste (très) mal tombée et que ses semaines de stages seraient des semaines de servage. Toutefois, elle ne perdait pas la foi, et gardait la tête haute, accomplissant chacune des tâches qu’on lui imposait avec sérieux, le sourire aux lèvres, sans jamais laisser échapper une plainte. C’était sûrement idiot d’endurer de la sorte, et un mot de tout ce petit manège tyrannique au principal Figgins ou à l’Académie lui aurait peut-être évité de perdre son temps à apprendre à être une bonniche et à ne pas être un bon professeur. Cependant, outre le fait qu’elle était bien trop peureuse pour intenter quoi que ce soit contre cette marraine qui tenait davantage de la marâtre, elle ne voulait pas prendre le risque de se retrouver sans stage pour valider son diplôme à la fin de l’année.

Faisant passer le stylo entre ses doigts fins, elle remonta ses lunettes sur son nez pour regarder la plafond perdue dans ses pensée lorsque la voix rauques de sa mère la fit sursauter. «Ashandra ! Je n’ai plus de citron ! Va me chercher du citron !» Après un moment de silence où elle discerna clairement des bruits de chaussures s’éloignant de la cage d’escalier, Dracy revint sur ses pas pour ajouter un rapide «S’il te plaît.» Jetant le crayon sur sa table, l’étudiante poussa sa chaise sur le parquet pour se dégager du bureau et se lever. Elle s’étira de tout son long pour détendre ses muscles contractés à force d’être courbée au-dessus de ses copies et jeta un rapide coup d’œil par la fenêtre. Il faisait déjà nuit noire et dans la banlieue les lampadaires espacés n’éclairaient que mal la route plongée dans l’obscurité. La maison des Moon n’était pas très loin du centre-ville à pied, elle aurait pu en profiter pour faire une petite marche qui lui aurait changé les idées, s’aérer, peut-être même croiser quelqu’un qu’elle connaissait. Mais la pluie fine qui commençait à tomber dissipa vite toute envie de prendre son temps. Elle aurait préféré rester chez elle, se mettre au lit et dormir pour oublier les soucis, mais elle savait que si elle refusait de rendre ce service à sa mère celle-ci en profiterait pour enfiler les reproches comme des perles. Se résignant donc à affronter le froid et l’humidité qui gonflerait ses jolies boucles, elle descendit l’escalier sans bruit, enfila son manteau et claqua la porte derrière elle. Faisant tourner ses clefs dans le starter, le ronronnement de sa vieille voiture l’apaisa. Ce vieux clou qu’elle avait ramené de Des Moines était son passeport pour la liberté. Elle l’avait payée avec son argent durement gagné, tout était à son nom, elle était la seule à avoir des droits dessus et personne n’y touchait. Elle gardait toujours précieusement les clefs dans sa chambre, avec elle, pour être sûre que son alcoolique de frère ne soit pas tenté d’aller faire un tour avec et de la plier dans le premier virage venu. Accélérant sur la longue avenue, elle monta le son de la radio et chantonna la mélodie du titre qu’elle ne connaissait pas. Il fallait encore attendre deux jours avant la répétition des Second Chances, et ça allait vraiment lui sembler une éternité. C’était le moment de la semaine où elle était enfin libre de passer l’après-midi en paix, de profiter de son temps à elle de manière purement égoïste en faisant ce qui lui plaisait le plus : chanter en compagnie de personnes qui partageaient les mêmes valeurs qu’elle. Grâce aux Second Chances elle avait eu la chance de rencontrer de nouvelles personnes auxquelles elle n’aurait probablement jamais adressé la parole autrement. Ces derniers temps elle s’était considérablement rapprochée de Jude, et elles passaient souvent du temps ensemble après les répétitions. Et puis il y avait aussi son collègue au lycée, Peter Matterface. D’abord un peu rude, la jeune femme était persuadée qu’il était bien plus gentil qu’il ne voulait bien le laisser croire et elle allait souvent à sa rencontre lorsqu’elle le croisait dans les couloirs. Elle se faisait parfois rabrouer mais mettait ça sur le compte de la gêne. Les temps n’avaient pas vraiment changé à McKinley et il ne faisait pas bon faire partie d’une chorale, même en étant adulte. Apercevant une place aux alentours du supermarché, elle stationna sa voiture non sans mal dans le petit emplacement libre et traversa la rue de ses petites foulées, entrant vite dans le magasin pour ne pas prendre l’eau. Resserrant les pans de sa veste autour de sa poitrine après avoir croisé le regard vicieux de l’un des clients, elle réalisa qu’elle n’avait pas pris la peine de se changer avant de sortir. Elle portait encore sa jupe de travail mais avait troqué son chemisier contre un débardeur profondément décolleté avec lequel elle avait l’habitude de traîner dans sa chambre à l’abri des regards. Il n’était pas tard mais elle n’était pas très rassurée devant cette constatation et pressa le pas pour se rendre au rayon des fruits et légumes chercher les fameux citrons qu’elle n’avait pas oubliés en route.

Tirant un petit sac plastique transparent, elle le rempli de quelques fruits et attrapa en prime une pomme qu’elle glissa dans sa poche le temps de sortir son porte monnaie et de vérifier qu’elle avait assez sur elle. Tâtant frénétiquement toutes ses poches, elle en arriva rapidement à la constatation qu’elle avait oublié son seul moyen de paiement chez elle en voulant partir le plus vite possible pour s’éviter le disque rayé de sa mère grognonne. Prenant sa tête entre ses mains elle passa ses doigts dans ses cheveux en soufflant bruyamment. Qu’allait-elle faire maintenant ? Relevant le nez pour regarder l’heure à la pendule accrochée à côté de la porte de service, elle crut reconnaître une figure familière au détour d’une allée. Arquant un sourcil, elle baissa ses lunettes pour y voir plus clair de loin et fronçant les sourcils et le nez d’un air concentré, comme si ça allait l’aider à mieux discerner les traits de sa cible, elle s’approcha doucement de lui. Elle n’était plus qu’à quelques mètres de distance et ça ne faisait aucun doute ! Peter Matterface se trouvait bel et bien devant elle ! «Peter ?» Elle l’appela une première fois d’une petite voix mais il ne sembla pas réagir. Elle était pourtant certaine qu’il s’agissait de lui, elle ne pouvait pas se tromper à cette distance. «Peter, c’est vous ?» Lorsqu’enfin il se retourna vers elle, la jeune femme lui sourit de toutes ses dents, satisfaite de cette rencontre fortuite, sûrement guidée par Dieu. «Ça pour une coïncidence ! Je pensais justement à vous il y a un instant ! Je euh... Que faites-vous ici à cette heure ?» La question pouvait sembler idiote mais elle n’avait rien trouvé de mieux pour entamer la discussion. Ses citrons toujours dans les mains elle le fixait de ses grands yeux noirs, ayant pour l’instant complètement oublié sa mère et son porte-feuille abandonné.
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MessageSujet: Re: 01. Waiting For A Blue Sky   01. Waiting For A Blue Sky EmptyJeu 12 Jan - 20:22

Peter ne pu retenir un soupir d'ennui, qui heureusement passa inaperçu, étouffé par la musique d’ascenseur qui grésillait dans le magasin. Ashandra Moon se tenait devant lui; ça n'aurait pas pu être pire. Cette jeune femme travaillait également à Mc Kinley, en tant qu'assistante de Ms Mauley. Il la plaignait sincèrement d'être tombée sur cette harpie frustrée, mais ce n'est pas pour autant qu'il désirait nouer un quelconque lien avec elle. La première rencontre entre eux s'était déroulée de façon parfaitement normale, dans la salle des professeurs lors de la rentrée. Peter, dont le radar à conquêtes potentielles était toujours en éveil, avait vite repéré la belle métisse qui épluchait un livre de littérature de façon minutieuse sur un coin de table et, bien élevé, s'était présenté. Il avait été d'abord subjugué par ses grands yeux, d'une douceur immense, son sourire d'une blancheur éclatante et ses longues mains fines. Seulement quelques détails lui avaient vite sauté au yeux, et l'avaient refroidi plutôt brutalement. Lorsqu'elle s'était levée pour lui serrer la main, il avait pu remarquer sa longue robe chaste, son absence de maquillage et une petite croix dorée pendant à son cou. Le jeune homme, athée, n'avait rien contre les croyants, même s'il ne comprenait pas leur besoin d'étaler leur appartenance à une religion aux yeux de tous. Mais il devait bien admettre que le potentiel d'Ashandra était gâché par cet accoutrement pieux et désuet. Il n'aimait pas les femmes à la sexualité exacerbée, qui en montrent plus que de raison, mais l'inverse était tout aussi dérangeant à ses yeux. Il l'avait donc reléguée sans plus attendre dans la case "Indifférent". Toutes ses connaissances étaient classées précisément, allant d'"Amis" à "Souhait d'une mort lente et douloureuse".
Mais depuis ce premier contact, Ashandra avait semblé intéressée par lui, ne manquant aucune occasion pour engager la conversation au détour d'un couloir. Cet intérêt était sans aucun doute lié au fait qu'ils faisaient tout deux partie de la chorale Second Chances. Seulement, Peter n'y accordait que peu d'importance. Ses piètres capacités vocales ne lui permettaient pas de tirer un quelconque orgueil de cette activité, et il ne s'était inscrit que pour passer le temps et s'investir d'une façon ou d'une autre dans la vie de Mc Kinley HS. Bien qu'indéniablement poli, Peter avait parfois le verbe cinglant, et ne se privait pas de congédier la stagiaire sans prendre de gants. Le professeur avait une capacité aiguë à discerner les personnalités, et avait rapidement compris qu'Ashandra était aussi pieuse que son apparence le laissait penser. Une vraie sainte. Joviale autant qu'enjouée, généreuse et altruiste. En un mot, ennuyeuse. Les gens parfaits avaient le don de crisper Peter. Comment pouvait-on passer une vie entière au service des autres, en se faisant exploiter consciemment? Il ne concevait pas ce don de soi. Peut-être pouvait-on lui reprocher son égoïsme, mais au moins il dirigeait sa vie comme lui l'entendait, et non pas pour les autres.
"Ça pour une coïncidence ! Je pensais justement à vous il y a un instant ! Je euh... Que faites-vous ici à cette heure ?"
Entre le rayons des fruits et celui du traiteur, c'est vrai qu'on pouvait se le demander. Peter, sentant que la jeune femme était embarrassée, décida de la pousser dans ses retranchements: Il était de mauvaise humeur, elle allait donc apprendre que parfois, il vaut mieux passer son chemin. Plusieurs fois déjà il avait tenté de lui faire passer le message, allant jusqu'à fuir dans les toilettes des hommes alors qu'elle lui parlait, mais rien à faire. Elle insistait, comme persuadée de leur amitié naissante. C'était bien la première fois qu'une femme se donnait tant de mal pour entretenir une relation non charnelle avec lui. Il avait déjà eu à repousser des amantes d'un soir qui désiraient le convaincre des avantages de la vie en couple, mais jamais personne n'avait encaissé ses remarques cyniques aussi stoïquement, uniquement pour apprendre à le connaitre. Cela forçait son respect, et il devait bien admettre qu'elle avait une force de caractère insoupçonnée et une résistance étonnante. Il s'était d'abord demandé si elle n'était pas simplette, à la voir s'acharner à satisfaire Mrs Mauley en accomplissant sans broncher des tâches parfois avilissantes. Toutefois, il avait vite compris qu'il ne s'agissait là que d'abnégation et de motivation inébranlable.
"Bonsoir Ashandra. J'attends mon avion pour Bangkok, et vous?"
La jolie métisse tiqua, déstabilisée par cette réponse digne d'un mauvais humoriste. Peter se flagella mentalement: il était bien meilleur d'habitude ! Irrité, se reprit: "Je plaisantais bien sûr; comme vous, je fais quelques courses de dernière minute." Il laissa passer un moment, et décida d'attaquer plus fort: "Alors vous pensiez à moi? Je suis flatté d'une telle attention." susurra-t-il avec un sourire enjôleur. Son côté séducteur reprenait vite le dessus, et embarrasser la jeune fille le plongeait toujours dans une douce euphorie. Un sentiment de puissance l'envahissait, il était maître de la situation. Immédiatement, Ashandra s'empourpra, et baissa la tête. En la détaillant un peu plus, le professeur remarqua son décolleté, bien plus prononcé que d'ordinaire. Une aubaine.
"Votre tenue vous va à ravir; Toutefois je ne vous conseille pas de venir au lycée habillée ainsi, certains élèves pourraient perdre en concentration."
La jeune femme eu un sursaut, et serra plus fort les pans de sa veste autour de sa poitrine; Peter jubilait. Le jeu ne faisait que commencer.
Profitant du malaise de son interlocutrice, il s'approcha, son sourire narquois figé sur ses lèvres fines, les yeux rivés aux siens, et se baissa vers elle. Elle eu un mouvement de recul, les yeux agrandis par la surprise. Peter avança la main et se saisit... d'un filet de clémentines, posées sur l'étal juste derrière elle. Son visage n'était qu'à quelques centimètres du sien, et il pouvait presque sentir les battements paniqués de son petit coeur pur. Il se redressa, et, impassible, jeta un oeil à sa montre. "Avez-vous fini vos achats? Je me ferai un plaisir de vous tenir compagnie." Encore ébranlée par ce rapprochement impromptu et parfaitement déplacé, Ashandra bredouilla une inintelligible réponse. Beau joueur, Peter jeta un oeil rapide au panier de sa victime. "Vous n'avez que ça? Enfin, c'est idiot de faire un aller-retour pour ça, laissez-moi vous dépanner!" Il savait pertinemment qu'accepter l'aumône d'un collègue allait contre les principes d'Ashandra, et il comptait bien pousser le malaise jusqu'à son paroxysme.
"Je ne vois pas où est le mal; entre collègues c'est normal de s'aider non? C'est tout à votre honneur, mais ce n'est vraiment rien, je vous assure. On ne peut pas dire que vous me ruineriez avec quelques citrons." Il ne se départissait toujours pas de son sourire en coin, persuadé de la faire craquer sous peu.
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MessageSujet: Re: 01. Waiting For A Blue Sky   01. Waiting For A Blue Sky EmptyDim 22 Jan - 20:23

Bien qu’elle fût devenue une habituée de Lima by night, Ashandra n’était pas mécontente d’être tombée sur son collègue dans la petite supérette à côté du centre commercial. À force de courir après son frère toutes les semaines, appelée par le commissariat ou les propriétaires des bars, la jeune femme avait fini par ne plus redouter autant le fait de sortir seule le soir. Dans les premiers temps elle était toujours pétrifiée à la simple perspective de devoir chercher Damon toute seule dans les rues du centre-ville qui était pourtant assez tranquille. Un bruit derrière elle suffisait à la faire tressauter et son cœur n’avait de repos que lorsqu’enfin elle fermait la porte du petit pavillon de banlieue derrière elle, avec ou sans sa cible. Et puis avec le temps elle s’y était faite, elle avait pris de l’assurance et connaissait chaque ruelle, chaque bar, chaque habitué. Elle avait même fini par trouver un certain charme aux paysages nocturnes qu’elle avait évité jusqu’alors. Bien sûr elle aurait préféré rester dans le fond de son canapé, enroulée dans les couvertures à dévorer un roman sans avoir à se soucier de personne d’autre au monde, mais on ne lui avait pas vraiment donné le choix. Si ça n’avait tenu qu’à son frère il l’aurait probablement renvoyée directement là d’où elle venait avec une remarque acide. La relation qu’elle entretenait avec son petit frère ne cessait de se dégrader au fil du temps, plus elle essayait de l’aider plus il semblait la détester. Elle n’arrivait même pas à se souvenir de la dernière conversation un peu normale qu’ils aient eue ensemble. Mais peu importait les reproches et les mots durs qu’il avait à son égard, elle prenait sa mission très à cœur, malgré la mauvaise foi qu’elle y mettait parfois. Malgré toutes les horreurs qu’il pouvait faire ou dire il était son frère et elle l’aimait plus que tout au monde. Il était la personne la plus importante au monde à ses yeux mais lorsqu’elle avait découvert que faire passer ses propres intérêts avant ceux des autres était aussi une option, c’était lui qui en avait fait les frais. Poussant un soupir profond en évitant une rangée d’étudiants au rayon alcools, elle chassa ces pensées négatives de son esprit. Après tout ce soir il ne s’agissait pas de lui.
La dernière fois qu’elle avait écrit à son frère aîné elle s’était vantée de pouvoir reconnaître le benjamin de la famille à près de cent mètres dans la nuit. Parker était sans doute la seule personne avec laquelle elle était capable de rire de Damon, il était le seul qui comprenne vraiment la situation qu’elle vivait tous les jours, le seul qui connaisse vraiment Dracy et ce dont elle était capable. Malgré la distance qu’il y avait à nouveau entre eux, il était celui dont elle se sentait le plus proche ces derniers temps. Pas un mois ne passait sans qu’elle ne l’appelle ou qu’elle lui envoie un long mail pour lui raconter tout ce qui avait pu se produire de plus ou moins intéressant dans sa vie : ses retrouvailles avec Ruby et la déception qu’elle avait éprouvé en découvrant qu’elle avait rejoint la chorale adverse, le retour de Christabella et l’insécurité étouffante qu’elle éprouvait à ses côtés, son dernier devoir pour l’université... Il était sa voie de secours, la personne vers qui elle pourrait courir si les choses devenaient trop pesantes et qu’elle n’avait plus la force de tout porter toute seule. Elle savait qu’elle avait toujours une place dans la chambre d’amis de sa maison à Des Moines et que Melissa serait ravie de l’accueillir à nouveau. Tout du moins jusqu’à ce que le projet de bébé du jeune couple soit réalisé. Elle faisait tout pour ne pas y penser, mais elle savait qu’elle devrait arrêter de sans cesse compter sur leur soutien pour grandir seule. Ils étaient un jeune couple marié, plein de projet, avec un avenir brillant devant eux, et elle n’avait pas l’intention de se mettre sur leur chemin vers le bonheur. Elle n’était pas encore prête à affronter les choses seules. Il lui fallait un peu plus de temps pour devenir plus forte, plus assurée.

Elle avait bien sûr parlé de Peter dans son dernier mail racontant sa rentrée. Elle l’avait présenté comme un collègue distant, parfois froid, mais elle était intimement convaincue qu’il ne s’agissait en réalité que de timidité et de crainte. On ne le voyait que rarement se mélanger aux autres professeurs pour avoir une discussion banale, toujours sur ses gardes, prêt à vous envoyer une réplique cinglante. Ashandra ne s’était pas vraiment posé la question de savoir si leurs caractères étaient compatibles, ou bien s’il avait même envie d’essayer de la connaître. Trop aveuglée par l’enthousiasme de retrouver un membre de la chorale de son cœur au lycée elle l’avait aveuglément suivi. Il en résultait qu’elle faisait parfois face à un mur et ne comprenait pas les réactions que le professeur de mathématiques pouvait avoir à son égard. Peut-être que sa défense à lui était l’attaque... Alors qu’elle lui souriait le plus gentiment du monde, une fois de plus, à l’enthousiasme dont elle faisait preuve il ne répondait que par du cynisme. Interloquée par une telle vivacité à vouloir mettre de la distance entre eux, son sourire s’effaça légèrement. Ne sachant pas quoi répondre à sa remarque amusée, elle le scrutait d’un air interrogateur pour essayer de percer le mystère de son regard rieur, un rictus nerveux figé sur son visage. Il enchaîna donc sur l’une de ces répliques qui avaient l’art de la mettre mal à l’aise. Il fallait bien avouer qu’elle n’aimait pas la manière dont il parlait aux femmes, mais ne lui en tenait pas rigueur mettant naïvement tout sur le compte de l’embarras. Ses pommettes s’assombrirent, un peu honteuse de l’audace qu’il avait cru voir dans sa remarque, et découvrant un sourire carnassier elle ne trouva plus la force de soutenir son regard baissant les yeux vers le sol. «Je mmh... Oui je pensais à... aux répétitions de samedi. Est-ce que euh... vous avez préparez quelque chose cette semaine ?» Elle se remettait à bafouiller comme elle l’aurait fait quelques années plus tôt dans la même situation. L’étudiante essayait de se convaincre qu’elle n’avait plus de difficultés à parler avec un membre du sexe opposé mais force était de constater que la moindre tentative de rapprochement, la moindre remarque un peu suggestive, le moindre geste déplacé suffisait à la faire paniquer. Dès que les choses devenaient ambiguës elle perdait tous ses moyens mais s’entêtait à poursuivre la conversation par pur orgueil. Prenant une profonde inspiration pour retrouver son calme, elle releva ses yeux vers lui pour constater avec effroi que ses yeux étaient venus se perdre dans son décolleté. Avant même qu’il n’ait le temps d’ouvrir la bouche elle se précipita sur les pans de son gilet en laine grise pour le resserrer sur sa gorge découverte, se maudissant intérieurement d’avoir été aussi stupide. Décidément elle avait tout gagné en essayant de faire au plus vite pour ne pas avoir à supporter une enième crise de sa mère : pas de porte-feuille et des regards tout à fait répugnants. Si elle se sentait prête à nouer des amitiés masculines elle était encore à des lieues d’imaginer entretenir une relation physique avec un homme. Depuis Arturo elle n’avait jamais retrouvé cette étincelle qui faisait s’emballer son cœur. Un regard trop appuyé suffisait à la faire trembler. Elle ne supportait pas les sifflements dans la rue et avait en sainte horreur les lycéens qui se retournaient dans les couloirs en soufflant une remarque vicieuse. Sans cesse à la recherche d’un juste milieu entre son ancienne garde-robe trop stricte et des vêtements trop révélateurs, son objectif premier était de ne pas se faire remarquer. Être jolie sans attirer trop d’attention n’était pas une mince affaire pour la jeune femme qui perdait toute l’assurance qu’elle s’était construite avec la femme de son frère en moins de temps qu’il ne fallait pour le dire. Rougissant franchement à sa remarque, elle ne savait plus où se mettre et ses mains s'agrippèrent plus fort au sachet en plastique contenant les quelques citrons qu’elle n’avait pas les moyens d’acheter. Et pour ne rien arranger voilà qu’il s’approchait d’elle alors qu’elle était déjà acculée contre le présentoir. Dans sa poitrine son cœur battait à tout rompre et elle n’osait plus respirer. En le voyant s’approcher encore et encore, elle ressentit le besoin compulsif de le pousser de toutes ses forces et de partir en courant mais elle se força à rester immobile. Elle n’avait aucune raison d’avoir peur de lui pas vrai... Il n’allait pas lui faire de mal. Ils n’étaient pas seuls. Ouvrant de grands yeux pour se convaincre que tout allait bien et qu’elle n’était pas en danger, elle dévisageait Peter d’un air presque suppliant. Il n’était plus qu’à quelques centimètres d’elle et elle se sentait si impuissante, mais il s’éloigna à nouveau, tout sourire, un filet de clémentines à la main. S’appuyant franchement sur l’étale de fruits, la jeune femme sentait ses jambes se dérober sous elle. Reprenant sa contenance comme elle le pouvait, elle bafouilla quelques mots inaudibles avant d’articuler plus clairement. «Mes élèves ne me posent pas ce genre de soucis.» mentit-elle entre ses dents. En réalité elle avait effectivement quelques soucis avec certains élèves, le jeune Witwicky en particulier, mais elle n’avait pas la moindre envie d’en faire part à Peter, surtout après cette tentative de rapprochement qui l’avait profondément gênée.

Elle se trouvait désormais face à un dilemme. Bien qu’elle ne sût pas pourquoi, elle sentait que Peter ne souhaitait pas qu’elle reste discuter avec lui. Malgré ses jolies phrases engageantes, son visage semblait dire tout autre chose et son sourire la plongeait dans la plus totale perplexité. Pourtant son offre de lui avancer la somme nécessaire pour payer ses maudits citrons était plus qu’alléchante. Si jamais elle rentrait sans elle devrait essuyer les remarques de Dracy qui en profiterait sûrement pour passer ses nerfs sur elle. Or sa journée avait été plutôt bonne jusqu’alors et elle n’avait guère envie de la terminer dans les larmes. Serrant ses doigts sur le sac plastique qui bruissa doucement, elle trahissait ses doutes en fronçant ses sourcils plongée dans ses pensées. Il fallait qu’elle se décide au plus vite. Rester des heures à réfléchir à ce qu’elle pourrait répondre était totalement suspect et il allait sûrement la prendre pour une folle. Malgré ses réticences, elle n’avait pas vraiment le choix. «Je... En fait c’est idiot mais j’ai oublié mon porte monnaie.» Un petit rire embarrassé passa ses lèvres alors qu’elle baissait les yeux. Décidément elle n’avait pas une image très reluisante à lui offrir... «Ça ne vous embête pas ? Je vous le revaudrai bien sûr !» Manquant totalement le sourire en coin fourbe de son collègue ses grands yeux brillaient d’espoir maintenant qu’il semblait disposé à la tirer de ce mauvais pas. Marchant vers les caisses d’un pas décidé sans se retourner vers Peter elle pousuivit «Je suis tellement tête en l’air parfois... Je suis sûre que ça ne vous arrive jamais à vous ce genre de choses, vous avez l’air plus... Organisé peut-être, je ne sais pas, c’est comme si on pouvait vous faire pleinement confiance.» Ses remarques étaient d’autant plus ironiques que quelques minutes auparavant elle paniquait à l’idée qu’il fasse quelque chose d’inconvenant mais Ashandra avait préféré tout cela derrière elle et ne plus y faire attention. Elle s’était fait des idées voilà tout.
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MessageSujet: Re: 01. Waiting For A Blue Sky   01. Waiting For A Blue Sky EmptyDim 26 Fév - 23:24

Rien ne se passait comme prévu. Peter avait tout fait pour mettre Ashandra mal à l'aise, et pourtant elle s'entêtait à rester dans son sillage, comme si elle préférait la compagnie d'un collègue malsain à la solitude.
«Ça ne vous embête pas ? Je vous le revaudrai bien sûr !»
Eh bien si, ça l'embêtait. Il n'avait pas proposé sérieusement à la jeune femme de la dépanner; il était jusqu'alors persuadé qu'elle refuserait poliment, prisonnière de ses principes. Mais soit. Puisqu'elle acceptait, elle n'était pas au bout de ses peines. Ils se dirigèrent vers les caisses: il la suivait, laissant traîner son regard là où bon lui semblait. Sa collègue était véritablement jolie, mais elle ne semblait pas en être consciente. Ses vêtements étaient censés la dissimuler, mais en réalité, ils ne faisaient que suggérer davantage ses formes scandaleuses. A la réflexion, la jeune femme aurait pu être désirable dans n'importe quelle tenue. Il existait des femmes qui, quoi qu'elles fassent, attiraient tous les regards, et Ashandra Moon en faisait partie. Ce pouvoir la mettait clairement mal à l'aise, et Peter la voyait souvent raser les murs du lycée pour ne pas attirer l'attention.

"Je suis tellement tête en l’air parfois... Je suis sûre que ça ne vous arrive jamais à vous ce genre de choses, vous avez l’air plus... Organisé peut-être, je ne sais pas, c’est comme si on pouvait vous faire pleinement confiance."
Peter soupira, de façon à ce qu'elle l'entende cette fois-ci. La flatterie n'était absolument pas la tactique à adopter avec lui. "Organisé je demande à voir; je n'arrive même pas à éviter les importuns en allant faire mes courses." La remarque, volontairement acerbe, avait été lancée à toute vitesse. Peter était sans compassion envers les gêneurs, mais les grands yeux d'Ashandra l'empêchaient d'être aussi insensible qu'il le souhaitait. Il désirait s'en débarrasser, mais il préférait éviter ses larmes.
En déposant ses articles sur le tapis roulant, Peter nota le regard entendu de la caissière. Son uniforme jaune poussin faisait ressortir son mascara bleu cyan, qui jurait affreusement avec son rouge à lèvres carmin, lui donnant un faux air de clown triste. Elle eu un petit sourire complice vers les deux jeunes gens, comme pour signifier que le couple qu'ils formaient l'attendrissait.
L'occasion était trop belle.
Lorsqu'elle fut rendue aux citrons de la discorde, il se pencha pour déchiffrer le nom sur son badge, et susurra : "Bonsoir Madame, Dotty c'est ça? Voilà Dotty, ma ravissante amie que vous voyez avec moi a oublié son porte monnaie. Que voulez-vous, parfois notre esprit est ailleurs, vous savez ce que c'est..." Il assorti sa tirade d'un clin d'oeil appuyé, et attrapa Ashandra par les épaules pour la ramener contre lui. Imperturbable, il continua son numéro. "Je me demandais si vous ne pourriez pas faire un geste, juste pour cette fois... Ce ne sont pas quelques citrons, qui d'ailleurs ne sont mêmes pas mûrs qui vont ruiner votre patron n'est-ce pas?"

Droit comme un I, le sourire enjôleur et son regard spécial drague-de-ménagère, Peter ne doutait de rien. Il avait appris que le culot peut parfois être le meilleur des atouts. Et par la même occasion, il plongeait Ashandra dans une honte mortelle. Il n'eut aucun regard vers elle, convaincu de la tenir enfin à sa merci. La caissière ne tarda pas à se confondre en excuses: "Je suis désolée jeune homme, je comprends bien votre problème, mais c'est parfaitement interdit par le règlement. Je risquerai un blâme pour une attitude pareille; croyez bien que ce n'est pas contre vous." Peter renifla, il accusait le coup. Il haussa les épaules: "Ne vous excusez pas, je ne vais pas vous demander de défier le système entier pour quelques agrumes innocents. Je vous les laisse derrière votre caisse d'accord?" Sans attendre une quelconque réponse, le professeur se dirigea lestement au niveau des caddies et des paniers, et y déposa le petit sac. Un sourire contrit fièrement collé aux lèvres, il rejoint les deux femmes, tendit sa carte et régla ses achats. "Bonsoir Dotty" lança-t-il, "l'Amérique à besoin de gens honnêtes comme vous pour maintenir la société à flots, je vous souhaite une excellente soirée. A bientôt peut-être..."
Dotty fondit comme neige au soleil en recevant en plein coeur le dernier clin d'oeil dévastateur de l'enseignant, et se contenta du salut mièvre de la main, perdue dans ses fantasmes de Prince Charmant retrouvé.

Peter saisit la main d'Ashandra fermement, et l'entraîna avec empressement hors du centre commercial. Sans se préoccuper d'avoir l'air d'un forcené traînant sa victime à travers la galerie, il eut juste le temps de penser qu'il tenait encore son manteau à la main et qu'il pleuvait à torrents dehors. Tant pis. Ils passèrent les portes de sortie, et se retrouvèrent sur le parking, désert. La lumière des lampadaires était étouffée par la brume de pluie. En s'y attardant un peu, il aurait été possible d'y déceler une beauté poétique. Mais l'heure n'était pas à la contemplation. Peter se décida enfin à lâcher la main d'Ashandra, et se tourna vers elle. Il eu un mouvement de tête pour replacer ses cheveux trempés, puis, en voyant la jeune femme trempée jusqu'aux os, il se mit à rire. A rire aux éclats. Son rire résonna longuement entre les murs du parking ouvert; C'était un rire enfantin, sans aucune barrière de convention, un rire pur et sincère, un rire qui donne envie de rire. En croisant le regard d'Ashandra, Peter considéra que la plaisanterie avait assez duré. Il réprima quelques hoquets, et entreprit de fouiller la poche droite de son manteau. Après quelques contorsions, il en sortit les citrons. Il ne les avait jamais posés près de la caisse, il n'avait jamais été question de les laisser. Mais il n'avait jamais été question de les payer non plus. L'idée d'avoir associé Ashandra Moon à un vol caractérisé l'enchantait. Il n'aimait rien de plus que de bousculer l'ordre des choses, et ce soir, il avait semé un véritable chaos. Il tendit les citrons à la jeune femme, et lâcha en souriant:

"Je crois que ceci vous appartient."


Dernière édition par Peter Matterface le Mer 29 Fév - 1:34, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: 01. Waiting For A Blue Sky   01. Waiting For A Blue Sky EmptyMar 28 Fév - 23:17

Alors qu’enfin elle avait réussi à se décoller des bacs contenants les légumes, Ashandra jeta un coup d’œil furtif sur sa tenue pour s’assurer que cette fois sa poitrine était correctement couverte et à l’abri des regards indiscrets. Elle était si en colère contre elle-même qu’elle ne fit même pas cas des œillades appuyées du professeur de mathématique sur ses courbes et marchait à côté de lui d’un pas décidé en regardant le sol, confuse et honteuse de se retrouver contrainte de s’endetter auprès de lui. Son esprit avait beau divaguer sur toutes les insultes, très correctes, qu’elle pouvait s’adresser à elle-même, la jeune femme ne manqua pas la remarque marmonnée à toute vitesse par Peter. Tournant vivement la tête vers lui l’air horrifiée, elle n’osait pas comprendre ce qu’il venait de lui lâcher en pleine figure. Cette fois-ci elle ne rougit plus, trop stupéfiée par la franchise et la méchanceté contenue dans ces quelques mots qu’il lui avait adressés sans la nommer, sans même lui accorder un regard alors que quelques secondes plus tôt il la reluquait comme un malotru. Ses sourcils se levèrent haut au-dessus de ses grands yeux noirs mais elle ne fut pas capable de répondre. D’ailleurs il n’attendait probablement pas de réponse puisqu’il continuait à marcher, imperturbable, l’air aussi hautain que lorsqu’il s’était approché tout près d’elle. Après tout... peut-être qu’il n’était pas aussi bon qu’elle voulait bien s’en convaincre. Elle ne connaissait rien de lui. La seule raison qui l’avait poussée à lui faire confiance plus qu’aux autres au lycée c’était sa présence chez les Second Chances. En y réfléchissant, elle ne savait même pas pourquoi il s’y était enrôlé. Il n’avait très clairement pas foi en Dieu, puisqu’elle ne l’avait jamais croisé à un seul office. À moins qu’il ne fût catholique. Mais étrangement, Ashandra avait beaucoup de mal à situer le choriste dans une doctrine aussi stricte que celle du catholicisme, et à ce qu’on lui avait rapporté, le prêtre qui officiait pour les messes dans les environs était quasiment un intégriste qui prônait la non-tolérance envers les protestants et ne manquait pas de rappeler le massacre de la saint Barthélémy chaque année pour en fêter l’anniversaire. Un illuminé en somme. Et si Peter grimaçait lorsqu’elle évoquait la possibilité de chanter un peu de negro spiritual, elle n’osait même pas l’imaginer sur les bancs d’une église où le chant était quasiment proscrit pour se concentrer sur l’ascétisme. Maintenant qu’elle se posait la question, pourquoi était-il devenu choriste chez les SC ? Certes, il avait une jolie tessiture mais sa voix n’avait pas la force de celle de Ryan par exemple, et il lui arrivait de se laisser emporter dans des fausses notes assez épouvantables. Jamais Ashandra ne l’aurait critiqué pour cela, elle travaillait son chant avec beaucoup de sérieux pour éviter ce genre d’incident parce qu’elle ne se trouvait pas le talent que pouvaient avoir d’autres membres. Ce genre d’idée ne serait sûrement pas venu à Peter qui brillait toujours d’une confiance en lui remarquable, même lorsqu’il était faux.

Tirée de ses pensées par la voix du professeur, elle posa à nouveau ses yeux sur lui et mit plusieurs secondes à comprendre qu’il ne lui parlait pas à elle, mais à la caissière, et qu’ils étaient arrivés devant la sortie. Comprenant enfin ce qu’il venait de dire, elle n’eut pas le temps de protester qu’il l’attirait à lui en la prenant par les épaules. Ce geste provoqua en elle un grand frisson le long de son échine qui n’avait absolument rien à voir avec du plaisir. Sa tentative avortée plus tôt venait de réussir et cette fois-ci elle ne resta pas immobile et passive face à ce qu’elle considérait comme une véritable agression, prenant doucement la main du grand brun sur son épaule pour la dégager et s’éloigner de lui non sans lui jeter un regard furieux. Observateur comme il semblait l’être, il devait savoir qu’elle n’aimait pas cela. Et elle le soupçonnait de prendre un plaisir vicieux à jouer avec elle en appuyant sur ses faiblesses. Certes, elle était naïve, mais elle n’était pas stupide, et toute la confiance aveugle qu’elle avait pu avoir en lui avait fondu comme neige au soleil en quelques secondes, la laissant particulièrement déçue par son comportement. Peut-être était-ce parce qu’elle le croisait en dehors du lycée ou des répétitions pour la première fois, mais elle lui trouvait un air désinvolte encore plus prononcé que d’ordinaire. Elle essaya de protester lorsqu’il demanda à la caissière de lui offrir les citrons «Je... non ! Je n’ai jamais...» mais elle n’eut pas le temps de former une phrase complète que ladite Dotty lui jeta un regard noir avant de se tourner à nouveau vers Peter qui semblait être le seul interlocuteur qu’elle daignait accepter. Bouche bée, les mains désormais vides puisque celui qu’elle pensait être un ami lui avait ôté les citrons des bras, elle restait plantée là, à côté du petit appareil qui lisait les cartes de crédit, ignorée des deux protagonistes de cette scène de la quatrième dimension. Scène suivante, Peter s’éloignait avec ses citrons dans les mains et les laissait derrière les charriots parfaitement alignés le long du mur. Elle se sentait tellement impuissante qu’elle ne parvint même pas à se tirer de sa torpeur pour essayer de réagir et de lui demander pourquoi il ne les prenait pas avec ses propres achats. Le coup de grâce lui fut porté lorsqu’elle réalisa qu’il n’avait sans doute jamais eu l’intention de lui avancer les quelques centimes nécessaires à l’achat de ces maudits citrons. Les lèvres pincées, honteuse et encore plus en colère qu’auparavant, contre elle-même et sa tête de linotte, contre sa mère et ses envies de citron, contre Peter et son comportement si imprévisible, contre cette caissière qui la regardait méchamment alors qu’elle n’avait rien fait. Elle chercha les yeux du jeune homme et avant qu’elle eut pu souffler un mot voilà qu’il recommençait à poser ses mains sur elle. Cette fois c’était à sa main qu’il s’en prenait, la serrant dans la sienne pour la traîner, littéralement, hors du magasin. À peine avaient-ils passés les portes automatiques que la jeune femme se mit à protester à vive voix «Mais Peter, mais qu’est-ce qui vous prend ? Lâchez-moi ! Lâchez-moi tout de suite !» Mais le jeune homme semblait bien décidé à l’ignorer lui aussi et pis encore il l’entraîna sous la pluie battante dans la direction opposée à sa voiture. «Mais vous êtes fous ! Arrêtez ça tout de suite ! Laissez moi oh mais !» Essayant en vain de dégager son poignet de sa poigne ferme, Ashandra commençait sérieusement à paniquer. Que faisait-il d’elle ? Regardant autour d’elle le parking du centre commercial était désespérément vide, pas âme qui vive pour lui prêter main forte alors qu’elle avait l’impression qu’on la kidnappait comme une enfant en bas âge. Agitant encore son bras en luttant en sens inverse, jamais elle n’aurait pu imaginer que des bras aussi maigres que ceux de Peter pouvaient avoir une telle force. Voilà pourquoi elle redoutait toujours autant les hommes en son for intérieur. Ils n’étaient jamais comme ils le prétendaient. Ils étaient faux. Ils étaient forts. Et ils n’en faisaient qu’à leur tête. Cessant enfin de lutter dans le vide, elle se laissa traîner jusqu’au parking couvert, murée dans un silence rageur. Lorsqu’enfin il relâcha son étreinte sur elle, elle frotta son poignet en le dévisageant mais il ne semblait pas faire attention à elle et préférait agiter sa tête pour évacuer l’eau de ses cheveux. Puis la regardant, il se mit à rire comme un perdu ce qui fit sursauter Ashandra qui se tenait désormais à quelques pas de lui. Elle le dévisagea en silence. Il ne méritait pas sa colère. Il l’avait trompée. Il s’était moqué d’elle depuis le début. Depuis leur première rencontre sans doute. Et cette fois elle ne lui offrirait pas la réaction qu’il attendait tant. Des bourreaux elle en avait connus, et des pires que lui ! Alors ce n’était pas un peu de pluie qui allait la faire pleurer.

Le voyant s’affairer autour de son manteau, elle ne put s’empêcher de le regarder faire avec curiosité alors qu’elle aurait dû tourner les talons et courir en sens inverse jusqu’à sa voiture. Tant pis pour les citrons, elle était si remontée que même la colère de sa mère ne pourrait rien contre elle. Cependant, lorsqu’elle le vit sortir le sachet plastique qui contenait les agrumes, Shandy ne put retenir un cri de stupéfaction. «Mais ! Comment ?!» Lui tendant le sac avec un sourire, il semblait particulièrement fier de son coup et lui présentait l’objet de son larçin avec la même fierté qu’un chat lorsqu’il ramène sa victime encore vivante à son maître. Se saisissant de la poche, en la lui arrachant littéralement avant qu’il ne soit tenté de jouer au plus grand en refusant de la lui donner, l’étudiante cherchait à comprendre ce qui venait de se passer. Il avait volé les citrons. Non. Il avait volé ses citrons ! Donc elle avait volé ces citrons aussi ! Portant une main à sa bouche, elle réprima un second cri. «Oh mon... Vous les avez volés ! Vous... vous n’avez jamais laissé ces citrons derrière la caisse !» Se reculant de quelques pas, elle ne supportait plus cet air satisfait et profondément amusé sur son visage. «Il faut... il faut les rapporter. Oui si on y retourne maintenant...» Sa voix se perdit alors qu’elle scrutait le sol comme si la réponse allait lui venir du béton sale de ce parking. Si elle y retournait maintenant ce serait encore la caissière Betty ou Dotty ou quel que soit son nom qui la verrait revenir et si elle l’avait regardée aussi mal la première fois alors qu’elle n’avait rien fait, elle la lyncherait si elle revenait comme une voleuse. Relevant des yeux affolés vers Peter, elle était prise au piège. Se mordant violemment la lèvre inférieure en serrant le sac entre ses doigts, il avait réussi à la mettre dans une colère noire. «Vous l’avez fait exprès ! Vous... Je ne sais pas ce que je vous ai fait mais vous vous êtes vengé en me faisant ça !» S’approchant de lui tout en gardant des distances précautionneuses, elle le regardait avec mépris et méfiance. «Et vous avez l’air fier en plus.» Sa voix ne tremblait pas, elle était fermement plantée sur ses deux pieds alors que l’eau ruisselait sur son visage et que ses vêtements collaient à sa peau, le regardant avec défi. Oui, elle avait peur, surtout après ce qu’il venait de lui faire. Mais non, elle ne se défilerait pas. «Qu’est-ce que je vous ai fait Peter ?»
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MessageSujet: Re: 01. Waiting For A Blue Sky   01. Waiting For A Blue Sky EmptyMer 29 Fév - 1:14

La pluie ruisselait sur le visage de Peter; il aurait été sous à douche que le résultat aurait été le même. Mais la météo lui importait peu présentement. Face à lui, Ashandra avait changé d'attitude. Envolée, la gentille tutrice ! Il avait réussi son coup. Elle s'était enfin départie de son air doux et compatissant. Ses yeux avaient virés au noir, et un pli de colère apparaissait sur son front. «Et vous avez l’air fier en plus.» Ca pour être fier, il l'était. Elle semblait avoir saisi l'ampleur de son erreur en tentant de lui forcer la main. Elle voulait un ami? Elle avait été servie ! Peter ne supportait plus de devoir l'éviter, encore moins de devoir la brusquer. Il n'était pas sans coeur, loin de là. Simplement, la plupart des gens ne comprenaient pas son tempérament solitaire, et tentaient par tous les moyens d'analyser quel traumatisme avait bien pu le rendre ainsi. Conneries ! Le jeune homme n'avait rien d'un perturbé, il préférait contrôler sa vie d'une main de fer. Ainsi, c'était à lui de décider qui méritait son attention, son amitié, son attachement. A lui et à personne d'autre. Personne n'avait rien à lui imposer. En essayant de le sortir de sa coquille, Ashandra s'était attiré ses foudres. Il n'en avait pas après elle en particulier; elle prenait juste en pleine figure ce qu'il s'était refusé de faire à tous les autres. Dommage pour elle. Au demeurant, le jeune homme admettait que dans d'autres circonstances, ils auraient pu s'entendre. Mais elle était trop collante, trop gentille, trop avenante, trop, trop trop... Son contact le hérissait, sa présence générait en lui une menace d'implosion. La paix et la sérénité qui émanaient d'elle le rendait électrique, sans qu'il ne puisse expliquer pourquoi. Il aurait voulu qu'elle laisse, ne serait-ce qu'une fois, transparaître une émotion autre, qu'elle soit préoccupée, qu'elle soit fatiguée, n'importe quoi qui la rende plus humaine finalement. Mais non, elle était invariablement enthousiaste et pleine d'entrain. Seuls les gens malheureux se construisent un masque aussi solide que celui d'Ashandra Moon. Et ce que Peter ne supportait pas, au delà de l'entêtement, c'était bien le mensonge.

Il y était enfin. Sa collègue n'était pas si parfaite. Et que personne ne s'en rende compte hormis lui le rendait fou de rage. Comment quelqu'un qui ment à longueur de temps peut-il être digne de confiance? La pluie avait encore forci, et il dû se concentrer pour entendre la jeune femme, qui pourtant n'était qu'à un mètre de lui. «Qu’est-ce que je vous ai fait Peter ?» Bien qu'il fut hors de lui, le naturel revint un galop, comme une dernière barrière à l'affrontement réel. "Je vous ai dépannée non? Vous vouliez des citrons? Vous les avez ! De quoi vous plaignez-vous?" Mais il était trop tard. Peter ne savait pas si c'était la pluie glaçante, la lumière agressive de l'enseigne, le regard défiant d'Ashandra ou l'ensemble de tous ces paramètres, mais c'était son tour de sortir de ses gonds. "Vous savez quoi Ashandra? Vous ne m'avez rien fait. Vous vous acharnez à me poursuivre malgré mes refus, vous voulez que nous apprenions à nous connaître quoi qu'il vous en coûte. Très bien. Ce soir, vous avez vu le vrai Peter Matterface en action. Je suis lunatique, brutal, grossier et même voleur. J'aime bousculer les gens ennuyeux de cette ville ennuyeuse, c'est là que je trouve mon plaisir. Mais vous voulez que je vous dise? Je n'ai pas honte de ce que je suis. Je joue cartes sur table, c'est à prendre ou à laisser. Peu prennent, mais lorsque c'est le cas, je suis loyal et sincère." Il marqua une pause. Il tentait de contenir les tremblements dans sa voix. "Je tremble à cause de la pluie, voilà tout." Il ne voulait pas que la jeune femme puisse prendre appui sur son énervement pour le faire passer pour un faible se réfugiant derrière des cris. Il voulait que ses mots l'atteignent au plus profond d'elle même, qu'elle s'en souvienne pour toujours. Il lâcha son manteau et son sac; ils étaient trempés, un peu plus ou un peu moins ne changerait rien. Il porta ses mains à son visage, et tira ses cheveux en arrière pour dégager ses yeux embués d'eau. Il resta un instant ainsi, les mains jointes sur la tête, dans une position désinvolte qui palliait le poids de ses mots.

"Mais vous Ashandra. Vous qui êtes si parfaite, si serviable et impliquée; qui essayez-vous de tromper? On peut me reprocher tous les maux de la terre, mais on ne peut pas me blâmer d'être franc. Vous tentez de masquer votre vrai visage par de doux sourires et de charmantes attentions; vous êtes toujours prête à aider, à vous oublier vous-mêmes pour combler les autres. Mais admettez-vous un seul instant vos propres problèmes? Quel mal y a-t-il à assumer sa propre vie? Qu'est-ce que cela vous apporte de régler les problèmes d'inconnus? Je ne parle pas d'égoïsme; j'estime simplement qu'en reniant votre vie, vous leurrez vos amis. Alors ne venez pas me faire la morale à propos de ma conduite exécrable. Je sais qui je suis. Mais vous, savez-vous seulement qui vous êtes?"

Peter avait la bouche sèche d'avoir trop parlé. Sa colère était partie, laissant place à une sorte de fatigue sourde. Son esprit était ailleurs. Il n'avait pas l'habitude d'aller au bout d'une altercation, ses remarques acides suffisant généralement à faire taire son interlocuteur. Ashandra était toujours devant lui; aucun d'eux n'avait détourné le regard durant son monologue, et ils continuaient de se fixer. Aucun témoin n'était présent sur le parking, et il valait peu-être mieux. Sortie de son contexte, la scène pouvait être étrange. Un homme, une femme, qui se regardaient dans le blanc des yeux sans prêter attention à la pluie sur un parking en pleine nuit, on aurait pu croire un à mauvais film romantique. Le jeune homme soupira. Il avait dit ce qu'il avait à dire. Avec quelqu'un d'autre, il en serait resté là et serait parti. Mais quelque chose dans le regard d'Ashandra le faisait rester. Il lui semblait distinguer un éclat, une lueur qui n'était pas visible jusque là. Le feu pointait sous la glace.

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MessageSujet: Re: 01. Waiting For A Blue Sky   01. Waiting For A Blue Sky EmptyMer 29 Fév - 2:50

C’était la première fois qu’Ashandra s’énervait contre quelqu’un qui ne soit pas membre de sa famille. C’était la toute première fois qu’elle haussait le ton contre quelqu’un qui ne soit pas son frère en réalité. Damon avait le privilège de ses crises de nerfs. Lui seul était capable de toucher cette corde sensible en elle qu’elle prenait grand soin de dissimuler à la vue de tous. Il n’y avait que quand il était ivre dans le salon et qu’il réveillait toute la maison parce qu’il avait envie de rentrer chez lui ce soir parce qu’une fois n’était pas coutume qu’elle se mettait à lui crier dessus. Une fois, et une seule, elle avait perdu son calme en public. Au commissariat, deux semaines plus tôt, avec Damon. Elle avait remercié le ciel parce que ce jour-là ce n’était pas Billie Jean Applebee qui l’avait appelée mais sa collègue inconnue au bataillon, sa réputation restait donc intacte. Parmi tous les soucis qu’elle pouvait avoir, Ashandra voulait malgré tout garder le contrôle des apparences. Elle voulait que les gens ne la voient pas telle qu’elle était : faible, égoïste, imparfaite. Cette image qu’elle essayait de donner en allant au lycée trois jours par semaine tout sourire, avenante, prévenante, ce n’était pas une image faussée d’elle. C’était celle qu’elle rêvait d’être. Si elle n’avait pas été la fille d’une mère dépressive, d’un père en prison, la sœur d’un sportif brisé au début de sa carrière qui préférait noyer son avenir dans la drogue et l’alcool plutôt que de chercher à le reconstruire, elle aurait été cette fille là. Au collège elle avait été cette fille là. Elle avait été la petite Ashandra, celle que l’on appréciait pour sa discrétion, pour sa générosité, pour sa timidité. Cette adolescente chétive qui avait une foi aveugle dans l’être humain et la destinée, où était-elle passé ? On l’avait rouée de coups au lycée. Elle avait découvert la noirceur des hommes, leur fourberie, elle avait été trompée, souillée. Et puis elle avait aussi compris que les personnes qui vous sourient dans la cour un jour peuvent cracher sur votre passage le lendemain, parce que votre père n’était pas celui qu’il prétendait être. Une tromperie de plus. Et puis elle avait rencontré les Cheerios. Elle avait saisi dans la douleur qu’elle était tout en bas de l’échelle sociale dans ce lycée, la tête maintenue au-dessus de la cuvette des toilettes des filles, puis couverte de glace pilée. Mais elle continuait à croire. Croire que tout ceci n’était que des épreuves envoyées par Dieu pour qu’elle cherche sa voie. Elle pensait qu’elle devait accepter son sort. Tout accepter. Et elle avait accepté d’endosser bien plus tôt que de raison, les responsabilités du foyer Moon. Elle avait abandonné l’idée d’aller à l’université pour s’occuper de sa mère et de son frère, pour travailler et financer les médicaments de l’une et l’entrée à l’Ohio State University dont elle avait rêvé de l’autre. Bien sûr tout n’était pas noir. Ç’aurait été mentir que d’imaginer qu’elle vivait comme Cendrillon, prisonnière de son horrible marâtre à servir son frère qui se moquait bien de son sort tant que lui pouvait aller à son bal de promo. Elle n’avait jamais pensé une seule seconde que son sort était misérable. Jusqu’à ce qu’elle craque. Jusqu’à ce qu’elle n’en puisse plus de toutes ces responsabilités, de toutes ces souffrances inutiles qu’elle s’imposait sans un mot parce qu’elle s’était imaginé que Dieu les lui avait envoyées pour faire d’elle une élue. Et si elle avait mal interprété les signes ? Et si tout ceci n’avait eu pour but que de la pousser à sortir de sa coquille ?

Ses mains ne tremblaient pas. Rien ne trahissait sa colère, si ce n’étaient ses yeux plus noirs que jamais et ses sourcils froncés qui jetaient à Peter tout le mépris et la déception qu’elle ressentait. Est-ce qu’il était lui aussi venu la forcer à arracher ce sourire qu’elle mettait tout son cœur à étendre sur ses lèvres jour après jour ? Pourquoi est-ce que les gens ne la laissaient pas en paix ? Pourquoi est-ce qu’elle n’avait pas le droit de vivre une vie comme les autres ? Pourquoi est-ce qu’elle devait se battre pour tout alors que d’autres passaient à travers l’existence sans un souci ? Elle ne comprenait pas quel était l’intérêt de Peter pour la maltraiter de la sorte. La chaleur de ses doigts serrés sur son poignet la faisait souffrir alors qu’elle était désormais libre, comme une cicatrice sensorielle de l’affront qu’il lui avait fait. Bien loin de se sentir désarçonné par sa réponse, Peter monta immédiatement au créneau. Elle les avait, ha ! À quel prix ! Il avait fait d’elle une voleuse en sachant parfaitement qu’elle ne supporterait pas cette idée. Il avait fait exprès de l’acculer dans l’une des pires situations qui soient et voilà que maintenant il lui avait rendu service ? La jeune femme pencha la tête sur le côté un instant, tiquant de rage à sa remarque. Elle sentait ses muscles se contracter mais ne cilla pas, prête à encaisser la suite qui n’allait certainement pas manquer d’arriver. Plus il parlait, plus elle se sentait idiote d’avoir essayé de se rapprocher de lui. Alors c’était à cela qu’il pensait quand il lui répondait vaguement avec un large sourire sur les lèvres ? C’était ça qu’il appelait jouer cartes sur table ? La mener en bateau pendant plus d’un mois ? Elle le trouvait tellement hypocrite, ridiculement hypocrite. Et pire encore, il était persuadé d’avoir raison. Jamais encore elle n’avait éprouvé une telle rage, aussi pure, aussi intense. Elle était placide, elle le dévisageait sans bouger de sa place, tandis que lui tremblait devant elle. Sa remarque lui arracha un pouffement de rire nerveux. C’était étrange mais cette amertume qu’il lui envoyait faisait gonfler dans sa poitrine une espèce de fierté. Non, de supériorité. Elle se sentait supérieure à lui parce que quoi qu’il en dise, elle avait pensé chaque mot qu’elle lui avait dit, depuis le début. Et surtout, parce qu’elle ne tremblait pas, elle. Elle n’était pas faible. Il voulait prendre la place de ses bourreaux ? Grand bien lui fasse, cette fois-ci, elle ne se laisserait pas faire, et elle rendrait les coups.

Regardant ses affaires tomber à ses pieds, elle ne s’occupa pas le moins du monde d’essayer d’essuyer l’eau sur son visage, son tshirt blanc avait viré au transparent sous son gilet alourdi par l’eau de pluie. Elle ne voyait rien d’autre que lui, essayant de se débattre dans cette flaque de colère où il essayait de l’embarquer. De quel droit la jugeait-il ? Il ne connaissait rien d’elle. Il ne lui avait jamais rien demandé, il n’avait jamais répondu à ses questions, il avait toujours refusé ses invitations, et maintenant voilà qu’il pensait l’avoir cernée ? La jeune femme garda le silence, le regarder s’énerver pleine de condescendance. Ses doigts bougèrent sur le sac qu’elle tenait toujours simplement pour se délasser du poids des citrons qui laissait une marque sur sa peau. Ce calme apparent dissimulait une colère aveugle qui était bien trop forte pour qu’elle parvienne à l’exprimer d’un seul tenant. Elle voulait être sûre qu’il avait terminé. Elle sentait qu’il n’avait pas achevé sa merveilleuse analyse mathématique de sa vie dont il pensait tout connaître. Lorsqu’il reprit la parole, elle sentit son cœur exploser dans sa poitrine. C’était la goutte d’eau qui avait fait déborder le vase et elle comprit enfin les ricanements de Damon quand elle le suppliait de revenir à la raison. Voilà donc ce que c’était que d’éprouver de la haine pure, sans peine, sans remords, sans regret ? Une chaleur intense et une froideur extrême. Une envie de rire et d’agresser son interlocuteur. Une envie de se justifier et de tout plaquer pour tourner les talons. Jamais elle ne s’était sentie aussi proche de son frère. Elle comprenait enfin, et ça elle le devait au grand Peter Matterface, maître dans l’art de la sincérité et de la morale bon marché. Il aurait pu partir de manière théâtrale, la laissant méditer sur le sujet, ou même lancer une pointe comique dont il avait l’habitude. Un “vous avez quatre heures” ne l’aurait même plus étonnée. Comment avait-elle pu être si aveugle et ne pas se rendre compte que chaque seconde qu’elle avait passée en sa compagnie n’avait été que mensonge ? Comment avait-elle pu croire qu’en élargissant le cercle de ses fréquentations elle pourrait retrouver une existence normale ? Comme elle s’était trompée... «Vous avez fini ?» finit-elle par lâcher d’un ton sec pour lequel elle s’était entraînée pendant des heures devant son miroir dans sa chambre pour envoyer sur les roses des élèves insolents. Jamais elle n’avait été aussi convaincante. Arquant un sourcil, elle ne quitta pas son regard brun, puis sagement, elle ouvrit le sachet plastique qu’elle tenait toujours entre ses mains pour y attraper un citron. Une fois qu’elle l’eut bien en main, elle le pressa doucement entre ses doigts, et malgré la proximité de sa cible, elle manqua le visage du jeune homme, envoyant le petit agrume voler sur une des voitures derrière eux. «Ah ! On dirait que je ne suis pas aussi parfaite que je veux le faire croire ! Je ne sais même pas viser.» Elle ne savait même pas par où commencer. Elle ne maîtrisait plus rien, et seule cette boule au creux de son ventre qui la faisait se tenir droite semblait être à même de parler. «Vous ne savez rien de moi Peter. De quel droit dites-vous ça ? Qui êtes-vous pour juger ce que je fais ? Vous ne connaissez pas mes amis. Vous ne connaissez pas ma famille. Vous ne savez rien et vous pensez que vous m’avez percée à jour ?» Sa voix était froide, étrangement calme. Elle ne ressentait pas le besoin de hausser la voix comme il avait pu le faire. Elle avait l’impression de se maîtriser, d’être maîtresse de la situation, et de retourner ses propres armes contre lui. Et cette situation, aussi nouvelle et impressionnante soit-elle, la rendait presque euphorique. «Vous m’attaquez en disant que je fuis mes propres problèmes en aidant les autres ? En disant que je suis fausse ? Mais est-ce que vous avez même songé à vous regarder en face Peter ? J’ai voulu devenir votre amie parce que je pensais que nous avions quelque chose en commun vous et moi. C’était sans doute stupide. Mais vous êtes toujours seul, vos conversations ne durent jamais plus d’une minute si l’on peut même appeler ça une conversation, vous ne vous mêlez jamais aux autres, vos élèves vous détestent. Alors oui, je me suis dit que peut-être je pourrais essayer d’apprendre à vous connaître, que je ne ferais pas la même erreur que les autres en me laissant désarmer par votre répartie. Vous n’avez jamais écouté une seule chose que je vous ai dite, avouez-le. Comment pourriez-vous savoir ce que je fais de ma vie, qui je suis et ce que je pense ?» Changeant l’équilibre de son corps en le balançant sur son autre jambe, elle souffla profondément, comme agacée par une situation qui aurait trop duré. «Vous avez mis bien longtemps à me le montrer ce Peter Matterface si sincère et fidèle à lui-même, et je pense que je ne suis pas la seule à avoir cru que vos sourires ne voulaient pas dire “je suis méchant, vain et voleur”. Alors ne me donnez pas de leçon Peter. Vous ne savez rien.»
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MessageSujet: Re: 01. Waiting For A Blue Sky   01. Waiting For A Blue Sky EmptyMer 29 Fév - 14:21

Il commençait vraiment à faire froid. Peter s'entoura de ses bras, pressant sa chemise sur son torse. Le tissu détrempé sur sa peau finit de le faire frissonner, et il dû faire un effort pour ne pas claquer des dents. "Vous avez fini?" Demanda Ashandra d'une voix cassante. Question idiote. Fini quoi? Fini de cracher son venin? Fini de la repousser? Non il n'avait pas fini, il aurait pu y passer la nuit. Mais à quoi bon? Il la regardait toujours, mais il ne la voyait plus vraiment. Son regard passait à travers d'elle, comme pour déceler quelque chose de plus fort, de plus vrai. Soudain, l'impensable se produit. La jeune femme se saisit d'un citron, et lui lança au visage. Dans sa stupéfaction, Peter n'eut même pas un mouvement de recul, et ce n'est que l'approximation du tir qui lui évita un oeil au beurre noir. Il resta là, hébété. Elle avait vraiment voulu l'atteindre? Elle avait voulu lui faire mal, le faire souffrir. La personne qui se tenait en face de lui n'avait plus rien d'Ashandra Moon. Les traits déformés par la rage, la violence dont elle avait fait preuve et ce ton sifflant, tout ça le déstabilisait. Il ne savait plus trop à quoi s'attendre; tout ce qu'il savait, c'est qu'il lui était impossible de faire machine arrière. Il avait déclenché quelque chose qui grondait depuis trop longtemps à l'intérieur de la jeune femme. Ce serait à son tour de payer pour tous les autres. Parce qu'il avait eu le culot d'appuyer sur un point sensible, parce qu'il ne s'était pas laissé aveugler par l'image qu'elle voulait bien renvoyer. Alors oui, il ne connaissait rien d'elle. Il ne savait pas comment elle vivait, ce qu'elle avait traversé; mais ne s'était pas elle-même entêtée à l'aborder toujours de la même façon, sans se remettre en question? N'avait-elle pas imaginé une seconde que le jeune homme préférait qu'on lui laisse les rênes? Elle qui était si pieuse, pourquoi fallait-il qu'elle joue au bon samaritain sans l'accord de son prochain?

Alors qu' Ashandra continuait à lui assener des phrases plus meurtrières les unes que les autres, Peter sentit sa jambe droite lui faire défaut. A cause du froid et de l'immobilité, elle était engourdie. Il aurait voulu marcher un peu pour réactiver la circulation, mais la jeune femme aurait été capable de lui sauter pour l'immobiliser. En y réfléchissant bien, il aurait beaucoup de choses: il aurait voulu que la pluie s'arrête enfin, il aurait voulu qu'Ashandra comprenne, il aurait voulu rentrer chez lui, se sécher, fumer une cigarette, et oublier tout ce cirque... Mais rien de tout ça ne semblait imminent. Il bascula sur sa jambe gauche pour pouvoir plier l'autre, et malgré l'attitude efféminée que cette position lui conférait, il réalisa avec bonheur que des sensations lui revenaient. Il ne quittait pas des yeux la jeune femme, dont les boucles alourdies par l'eau caressaient son cou. "ne me donnez pas de leçon Peter. "Vous ne savez rien." Ce fut le mot de trop. Le professeur déplia ses bras, et ne put s'empêcher de se pencher vers elle. L'instinct reprenait vite le dessus, et cette posture reflétait une animosité non dissimulée. "Je ne sais rien? Vous croyez que toute cette belle tirade sur ma vie que vous, vous auriez réussi à analyser m'atteint? Mes élèves me détestent? Qui me demande d'être aimé, tant que les résultats sont là? C'est mon problème si je suis aussi distant que possible. Il y a une bonne raison à mon attitude, je le reconnais. Mais quel est votre besoin de la découvrir? Ne vous suffisait-il pas de me laisser venir vers vous quand je l'aurais décidé? Respectez-vous autrui suffisamment pour laisser le choix de vous accepter ou non? Vous vous êtes imposée à moi, sans penser à quel malaise vous pouviez créer chez moi." La nausée montait à la tête de Peter. C'était assez; il avait l'impression de revenir cinq ans en arrière. Il avait pourtant si bien réussi à occulter cette période de sa vie, c'était trop bête. Tout ce beau travail, mis à mal par une petite assistante. Ils n'étaient plus séparés que par quelques dizaines de centimètres, mais le jeune homme n'avait plus la tête à remarquer le tee-shirt transparent d'Ashandra.

"Je ne connais pas votre vie dans son ensemble, c'est un fait, reprit-il plus doucement. J'observe simplement que votre attitude est aussi désagréable que la mienne, à une différence près. Vous aidez les gens, vous entrez dans leur vie, mais quand ils veulent entrer dans la vôtre, vous restez insaisissable. Avez-vous conscience de la frustration, voir de la souffrance que vous créez en faisant ça? Vous sous-entendez que vous êtes une sorte de sauveteuse, de Messie même, et que de ce fait, personne ne peut vous aider. Vos problèmes ne sont pas plus importants que ceux des autres Ashandra. Et s'il on aide, on doit accepter d'être aidé en retour. Sans quoi, on s'abstient de l'un comme de l'autre. Il vaut toujours mieux être ignoré par un inconnu que congédié par un ami. Je préfère ne laisser personne compter sur moi que de décevoir." Peter savait très bien de quoi il parlait. Il n'avait pas envie de repenser à tout ça, mais il était trop tard. Son cerveau avait ressorti tous les souvenirs d'un coup. Les visages de Adam, Billy, Chase, Ciera, Sean lui revinrent... Des amis proches, presque des membres de sa famille. Et Eli. Une jolie brune, avec de grands yeux verts, bordés de cils immenses. Active, enthousiaste et positive. A l'époque, elle était dans sa classe, et elle était bien plus douée que lui. Ils avaient fait les 400 coups ensmbles, ils était partis en vacances... Eli n'avait que 21 ans. Le jour de l'enterrement, Peter avait cru devenir fou. Son aveuglement lui avait valu la pire punition qu'un homme puisse subir. Il n'avait jamais voulu faire de mal à son amie. Il ne s'était simplement pas posé la question de savoir si les sentiments d'Eli pouvaient être différents des siens. Il avait, sans s'en rendre compte, poussé la souffrance de la jeune fille jusqu'à ses limites, en avortant de faux espoirs à longueur de temps. Il n'avait pas été assez prudent. Il avait pris, mais n'avait pas réfléchi à ce qu'il devait donner.

Alors aujourd'hui, face à Ashandra, Peter suffoquait. Comme Eli, elle ne voulait pas comprendre. Qu'elle aille régler ses propres problèmes avant de mettre le nez dans ceux des autres ! Elle croyait qu'ils avaient quelque chose en commun? La belle affaire! Si travailler sur le même campus était un point commun, elle avait l'embarras du choix pour nouer de nouvelles relations. Le jeune homme se redressa, et étira son cou en se massant les cervicales. Il avait l'impression d'être là depuis des heures.
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MessageSujet: Re: 01. Waiting For A Blue Sky   01. Waiting For A Blue Sky EmptyJeu 1 Mar - 15:46

Le bruit de la pluie qui martelait le toit au-dessus de leurs têtes était insupportable. Le vent soufflait, si froid sur sa peau détrempée. Elle tomberait sûrement malade en restant là à prendre les courants d’air, mais qui aurait pu se soucier de ce genre de détail trivial alors qu’Ashandra Moon venait de perdre la raison. Elle avait littéralement perdu l’esprit, elle ne voyait plus le monde qu’à travers ses yeux embués de colère, et le fait d’avoir jeté tous ces mots cruels ne lui avait pas fait de bien du tout. Elle ne se sentait pas mieux après avoir exprimé tout ce qui avait pu lui passer par la tête comme ils le disent à la télévision dans ce genre d’émission de développement personnel. Exprimer, extérioriser pour mieux crever l’abcès et s’en sortir, respirer en s’ôtant un poids de la poitrine. Au contraire, ç’avait été comme souffler sur des braises pour les attiser et elle avait envie d’enfoncer le clou, de lui faire ravaler toutes les remarques acerbes qu’il lui avait adressées et sur lesquelles elle avait glissé avec toute la candeur du monde. Pourquoi avait-elle décidé de changer ce soir ? Pourquoi ne pas avoir fait comme tous les autres soirs, en ignorant le mal pour ne chercher que le bien ? N’était-ce pas ce qu’on attendait d’elle ? De voir le bien même chez les individus les plus aigris et de les aider ? N’était-ce pas ce que tout bon chrétien devait faire ? Peter l’aurait sûrement réprimandée pour ce genre de pensée en la traitant de terroriste de la charité, mais au fond d’elle-même Ashandra était troublée parce que ses repères s’effondraient. Est-ce que tout le monde pensait comme lui ? Est-ce que les gens n’acceptaient son aide ou son intérêt pour eux que parce que c’était plus facile que de la rejeter et d’affronter son grand regard perdu ? Était-ce aussi le cas pour Henry avec qui elle passait de plus en plus de temps au lycée ? Prise d’une bouffée d’angoisse qui étouffa un peu sa colère qui commençait à retomber alors qu’elle réalisait doucement tout ce qu’elle venait de dire ou de faire, elle chercha à reprendre son souffle en vain. Sa poitrine se souleva avec peine mais elle était si furieuse qu’elle ne réussissait pas à faire entrer l’air frais en elle. Elle, qui n’avait jamais confiance en elle, était de remettre en cause toutes les amitiés qu’elle avait pu avoir jusqu’alors. Est-ce que Jude n’avait accepté de lui parler de sa surdité que parce qu’elle avait été trop insistante ? Est-ce que Ruby avait été amie avec elle faute de mieux ? Ou pour se moquer d’elle avec les autres Cheerios ? Non... Elle ne voulait pas le croire. Ces deux jeunes femmes étaient différentes. Elles n’avaient pas ce genre de raisonnement perverti. Elles ne lui auraient pas souri en pensant du mal d’elle. La haine si vive qu’elle avait ressentie l’abandonnait pour faire place à un sentiment de vide absolu. Elle ne tenait debout que parce qu’elle était immobile, dévastée par sa propre violence et par celle de son collègue de travail. Elle refusait de croire ce qu’il lui disait. Elle refusait de croire que les gens ne la voyaient que comme un parasite.

La proximité de Peter était insoutenable mais elle endurait en se tenant droite face à lui pour ne pas vaciller. Il était plus grand qu’elle, mais elle avait vu toute sa faiblesse qu’il n’avait pas su réprimer en tremblant devant elle. Il ne lui faisait même plus peur. Elle savait qu’elle aussi avait la force de se défendre. Peut-être pas physiquement, il lui avait montré sans s’en rendre compte en la traînant jusqu’ici de force, mais ses mots avaient l’air d’avoir fait mouche. Il n’était pas comme son frère qui l’ignorait, indifférent à toutes ses remarques. Peter, lui, était atteint par ce qu’elle lui avait dit. Elle n’était pas la seule blessée dans ce combat d’une autre dimension. Elle n’était plus la seule à souffrir de ce qu’il pouvait penser d’elle. Elle s’était laissée emporter par l’aveuglement de la colère mais elle ne regrettait pas de lui avoir dit tout cela. Elle ne devait pas se laisser faire sous prétexte qu’elle ne lui voulait pas de mal et qu’elle avait cru qu’ils auraient pu être amis. Plus jamais elle ne se laisserait reprendre et elle se plierait à sa volonté en l’évitant. Elle ne lui parlerait plus dans la salle des professeurs, elle ne l’aborderait plus pour parler de la prochaine répétition, elle ne se mettrait plus à côté de lui dans les rangs des Second Chances. Sa présence si près d'elle était vraiment dérangeante tant elle lui rappelait qu’il la méprisait de tout son être. Elle aurait voulu se moquer de lui et de ce qu’il pouvait dire ou penser. Elle aurait voulu être indifférente comme Damon. Pourtant en voyant cette expression de désespoir passer sur son visage alors qu’il avait fini de parler, malgré elle, elle sentit son cœur se serrer. Elle n’avait jamais voulu lui faire de mal. Tout comme elle n’avait pas voulu être la source d’un malaise pour lui au lycée. Pourquoi avait-il dit cela ? Pourquoi avait-il l’air triste à présent ? Il était si pâle. Si elle n’avait pas été si rebutée à l’idée d’avoir à nouveau un contact physique direct avec lui elle aurait aimé poser ses mains froides sur ses joues pour leur redonner des couleurs. À quoi pouvait-il penser en lui disant tout cela ? Oubliant définitivement sa colère elle était à nouveau piquée de curiosité. Il avait beau penser toutes ces choses atroces à son sujet, il avait l’air d’un petit garçon épuisé et elle ne pouvait pas s’empêcher d’avoir de l’intérêt pour lui. Si son instinct l’avait poussée à y voir plus loin c’était qu’il y avait une raison, non ? «C’est horrible ce que vous dites Peter.» souffla-t-elle alors qu’enfin il la libérait de sa présence en s’étirant de tout son long. Comment pouvait-on préférer la solitude ? Comment pouvait-on préférer vivre entouré d’inconnus plutôt que d’accepter de prendre quelques coups et d’essayer de vivre heureux ? «Vous devez vous sentir si seul... Vous savez, peut-être que les gens ont pitié de moi, et qu’ils me détestent autant que vous...» sa voix se perdit alors que la perspective de voir ses rares amis la haïr revenait à son esprit. «Mais au moins, j’aurais été heureuse pendant un temps.» Levant les yeux vers ses traits fatigués, elle resserra la prise qu’elle avait sur le sac plastique, décidée à en finir avec cette discussion et à rentrer les ramener à sa mère. «Et je le serai encore, mais on n’est jamais heureux quand on est seul.» Qu’importe qu’il blasphème, qu’il la méprise, qu’il la déteste. Il ne voulait pas qu’elle sache qui était Peter Matterface, elle n’essaierait plus de percer sa carapace. Cette leçon lui suffirait. Ils étaient trop différents. Jamais elle ne comprendrait ce qu’il voulait lui dire, et jamais elle ne cèderait à ses idées pessimistes. «Mais ne vous en faites pas, je ne voudrais pas vous causer davantage de malaise.» cracha-t-elle avec toute l’amertume que ses mots avaient laissé en elle. Remontant la manche de son gilet de laine qui glissait sur son épaule emportée par le poids de l’eau, elle détourna son regard vers le petit citron qui gisait entre les roues d’une voiture. Signe du comble de sa rage il resterait là en souvenir de cette altercation qu’elle n’était pas prête d’oublier, jusqu’à ce qu’ils soit écrasé et réduit à néant par le passage du temps et des véhicules. Cette amitié avait été aussi éphémère qu’illusoire et aussi triste que cela pouvait être pour Shandy, elle savait que la cicatrice que cette soirée lui laisserait l’empêcherait de jamais revenir la première vers Peter. «Vous allez tomber malade.» dit-elle en se tournant lentement pour s’éloigner de lui d’un pas traînant. Dépassant la limite du parking couvert, elle marchait vers sa voiture avec difficulté et lorsqu’enfin elle fut assise dans le vieux véhicule gris, elle s’effondra sur le volant en laissant quelques larmes se mêler à l’eau sur son visage. Pourquoi la vie était-elle si épuisante en ce moment ?
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MessageSujet: Re: 01. Waiting For A Blue Sky   01. Waiting For A Blue Sky EmptyJeu 1 Mar - 18:30

Peter était livide. Il ne regrettait pas ce qui venait de se passer; les choses devaient être claires pour l'un comme pour l'autre. Mais il était vidé de toute énergie. Il ne sentait plus la pluie ni le froid, il était comme anesthésié. Il n'avait plus été confronté à un tel déballage de haine pure depuis longtemps, et pour être honnête, il s'en serait bien passé encore quelques temps. Mais ce qui le dérangeait le plus, c'était que ce soit Ashandra qui l'ait poussé dans ses retranchements. Elle avait su capter cette infime partie du Peter d'avant qui subsistait en lui. Et elle avait été à deux doigts de tout comprendre. Le jeune homme était d'ailleurs persuadé qu'elle avait remarqué son moment d'absence, et qu'elle avait saisit quelque chose d'important. Mais il était trop tard. Il était à présent muré dans son silence, et il n'en ressortirait plus. Il ne ne lui donnerai rien de plus. Il s'était ouvert à elle bien plus qu'il ne l'aurait souhaité, et il devait admettre que sa collègue avait un don bel et bien réel. Elle était parvenue à le faire parler, et surtout, à le faire parler de lui-même. Elle avait fait remonter à la surface des souvenirs bien trop douloureux pour être contenus, et s'il n'avait pas épuisé toutes ses larmes il y a longtemps, il aurait certainement eu un sanglot incontrôlé. Il la regarda, tandis qu'elle semblait rassembler ses esprits. Elle lui parut alors d'une force incroyable; elle était trempée et son regard trahissait encore sa colère, mais elle était fortement plantée dans le sol, et rien ne semblait pouvoir la faire chanceler. Il l'envia l'espace d'une seconde. Elle n'avait pas gagné, mais elle avait laissé moins d'elle-même dans la bataille que lui. Elle l'avait renvoyé à son état, mettant le doigt sur tous les aspects pathétiques de son existence vide de sens. Il était seul, irascible, médisant, et d'un pessimisme à la limite du niveau professionnel. Il savait déjà tout ça; après tout c'était lui qui s'était construit ce personnage. Mais avec le temps, il avait fini par se convaincre qu'il était cet homme. Il n'entretenait que des relations de surface, et elles ne duraient jamais très longtemps. Jude ou Jessica en étaient la preuve. D'ailleurs, il excellait dans l'art de noyer le poisson. Que ce soit ses parents ou ses "amis", personne ne savait vraiment ce qu'il vivait, ce qu'il pensait ou même ce qu'il voulait. Il se bornait aux échanges plats et annihilants. Il n'en souffrait plus, il s'y était fait. Mais les mots d'Ashandra avaient eu l'effet d'une lame de rasoir sur une cicatrice encore fraîche. Il restait face à elle parce qu'il ne pouvait pas faire autrement. Il ne voulait plus parler, mais bouger aurait voulu dire mobiliser ses muscles, et ils étaient tétanisés.

Il fut pris d'une immense lassitude lorsqu'il compris qu' Ashandra n'en avait pas terminé avec lui. Oui, ce qu'il disait était horrible, mais la vérité fait toujours mal. Il savait qu'elle était bien placée pour en juger. Elle ne s'était pas étendue sur sa situation personnelle, mais sa colère en disait assez long pour qu'il comprenne qu'elle était aussi sinon plus torturée que lui. Pour des raisons bien différentes, mais tout aussi justifiées. Finalement, elle avait raison, ils étaient assez semblables. Mais ce qui aurait pu les rassembler les séparait aussi bien qu'un immense gouffre. Elle avait choisi d'endurer toutes les blessures en se réfugiant dans sa foi, pendant qu'il fuyait toute situation à risques. Il ne s'agissait pas de lâcheté; son passé avait fait naître en lui une méfiance profonde et irraisonnée de l'être humain. Il ne fuyait pas pour se protéger des autres, mais pour les protéger de lui-même. Etre la cause de souffrance lui était insupportable, et c'était devenu une peur obsessionnelle. Un oeil étranger ne voyait qu'un homme aigri et indigne, lorsqu'il aurait fallu voir un homme effrayé par son aptitude à être aimé. Il ne voulait plus qu'on l'aime, il ne voulait plus qu'on compte sur lui, il ne voulait plus qu'on se soucie de son cas. Il avait fait défaut à une des personnes les plus importantes de sa vie, et il ne ferait plus jamais cette erreur. "On est jamais heureux quand on est seul." Cette phrase d'Ashandra glissa sur lui comme l'eau qui ruisselait sur sa chemise. On est peut-être pas heureux, mais les autres le sont. Le reste du monde avançait bien sans lui. A la disparition d'Eli, Lizzie avait couvé son fils nuit et jour, paniquée à l'idée qu'il puisse avoir des idées noires. Mais Peter l'avait vite rassurée; Mettre fin à ses jours était la dernière chose à laquelle il pensait. Il détestait les suicidaires pour le mal qu'ils faisaient à leurs proches. Ceux qui restent souffrent bien plus que ceux qui partent. Alors il continuerai à vivre, à atteindre ses objectifs, à faire des projets. Il aimait la vie, il était profondément vivant et heureux de l'être. Mais sa vie ne devait pas déranger celle des autres. Ashandra lui signifia d'un air méprisant qu'elle ne chercherai plus à entrer en contact avec lui; il ne put dire si cela le soulageai ou non. Il l'avait blessée, non pas par plaisir mais par nécessité. Et ce serait un poids de plus à porter, plus lourd chaque fois qu'il la croiserai à l'avenir. Les deux jeunes gens se regardèrent, conscients tout deux qu'une page venait de se tourner. Ce qui s'était passé sur ce parking n'appartenait qu'à eux, et resterait le souvenir d'une amitié avortée dans la douleur. Encore une fois, il n'avait pas su distinguer la sincérité de l'entêtement, et cela lui avait sans doute coûté cher. Il ne le saurais jamais à présent, mais comme il se répétait souvent; ce qui nous est inconnu ne nous manque pas. Cela vaudrait pour lui comme pour elle, et elle oublierait vite qu'elle avait pu avoir un temps un intérêt pour lui.

Elle finit par se détourner de lui lentement, en lui adressant un "Vous allez tomber malade." en guise d'au revoir. Cette phrase, qui serait certainement la dernière à son égard, le fit sourire douloureusement. Quel besoin avait-elle de se soucier de sa santé après tout ça? Etait-elle si apte à passer outre les plus grandes mésententes? Il la vit s'éloigner en traînant les pieds, aussi fatiguée que lui par cette discussion vaine. Lorsqu'il fut certain qu'elle ne pouvait plus l'entendre, il articula doucement : "Désolée Ashandra." Laissant ses affaires au sol, il s'approcha de la voiture la plus proche, et s'étendit de tout son long sur le capot, et ferma les yeux. Il fallait se concentrer sur le bruit neutre de la pluie, il fallait ne penser à rien. Il fallait oublier.
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