Fran Fabray se sentait prise d’émotions contraires en entrant de nouveau dans son ancien lycée. Contrairement à ce que l’on pouvait voir dans les téléfilms à bas budget, elle n’eut aucun flashback précis en poussant la double porte en bois de l’établissement, juste une sensation désagréable dans son ventre comme si elle s’apprêtait à avoir ses règles. Rien de très glamour ou nostalgique. La sécurité était plus accrue qu’à son époque, elle avait dû passer par la réception de McKinley High, entrant son nom et le motif de sa visite sur un formulaire avant qu’un sticker jaune criard marqué « visiteur » ne lui soit collé sur son chemisier en soie sans le moindre avertissement. Fran jeta un rapide coup d’oeil autour d’elle et même si les couloirs n’avaient pas changé, elle remarqua les posters criards, les slogans dits « éducatifs » toujours aussi ringards et l’odeur de sueur et de parfum bon marché qui trainait autour des casiers.

Fran n’était pas vraiment dans un état d’esprit qui encourageait à la rêverie ou la contemplation de son passé adolescent. Elle se sentait très ancrée dans le présent et le motif de sa visite était la seule pensée qui occupait son esprit. Son beau-frère Sam Evans, lui avait demandé de le rejoindre après l’entraînement de l’équipe qu’il coachait au lycée. Le prétexte qu’il avait formulé était l’ouverture d’un poste administratif à McKinley, il avait proposé que Fran vienne et rencontre l’équipe pour éventuellement négocier un emploi au sein de l’école. Sam Evans, tout benêt qu’il paraissait à Fran, avait très bien calculé son coup. Il s’était assuré de proposer son idée devant Quinn pour que Fran se sente obligée d’accepter. Il avait sans doute compris qu’une demande en privé aurait abouti à un refus catégorique. Sam n’était pas dupe, il sentait bien la froideur et la retenue que Fran manifestait à son égard. Il faut dire qu’elle le faisait sentir de manière bien sentie. Sam était toujours souriant et courtois avec elle mais Fran maintenait une barrière entre elle et lui. Même s’il était le mari de sa soeur, il lui déplaisait et elle ne lui accordait pas la moindre confiance. Maintenant, Frannie était à McKinley, forcée de consacrer quelques heures à ce beau-frère dont elle se serait bien passée.

Les cours étaient finis et les rares élèves que Fran croisait étaient ceux qui participaient à diverses activités extra-scolaire dans l’espoir de gagner quelques crédits supplémentaires ou de fournir leur lettre d’application aux universités. Fran sourit en se rendant compte qu’elle attirait l’attention des jeunes ados mâles du lycée. Leurs hormones étaient en pleine ébullition et l’apparence de Fran semblait étudiée pour les provoquer. Elle avait opté pour une tenue simple mais efficace : une petite robe noire dont la forme se voulait modeste mais qui était si ajustée qu’elle suggérait plus que ce que son styliste avait planifié. Il faut dire que Fran avait acheté la robe une taille en dessous pour qu’elle produise cet effet, pas question de s’attifer d’un look de bonne soeur. Fran avait complété la tenue par un bracelet en or et nacre, une paire d’escarpins noirs à bout ouvert car elle ne portait pas de collants. Le tissu sombre de la robe contrastait avec sa peau légèrement plus pâle que ce qu’elle pouvait être en été.

Frannie atteint le complexe sportif et regretta son choix de tenue presque instantanément. Elle n’avait pas pensé qu’il lui faudrait passé par un sentier en terre pour rejoindre le bord du terrain où les Titans s’entraînaient. Elle décida de ne pas s’y aventurer, Sam finirait bien par l’apercevoir. Il faut dire qu’au milieu des adolescents en tenue de sports et des Cheerios en jupette rouge, elle faisait un peu tâche. Il aurait été difficile de ne pas la voir. Fran répondit machinalement à un groupe de garçons, certainement du club d’athlétisme, qui la saluèrent en passant lors de leur footing. Elle tenta de voir où en était l’entaînement et s’il lui faudrait attendre longtemps. Sam était sur le bord du terrain, hurlant des consignes quelconques aux garçons qui s’évertuaient à se dérober le précieux ballon. Fran avait toujours trouvé le football ennuyeux à mourir mais quiconque la voyait faire son travail de Cheerio aurait pû jurer du contraire. Elle mettait une telle énergie et conviction à soutenir les équipes qu’on aurait cru qu’elle s’y intéressait vraiment. Un cri barbare lui fit comprendre que la partie venait de toucher à sa fin. Une équipe hurla et se congratula bruyamment pendant que l’autre tapait du pied et s’échangeait le blâme de la défaite. C’était toujours la même chose. Fran soupira. Sam beugla quelques instructions et fit signe à sa belle soeur. A contre-coeur, elle lui fit signe à son tour et l’encouragea à la rejoindre. Autant que ce soit fini au plus vite.

Sam arriva en trottinant vers elle, sa casquette de coach à l’envers. Se croyait-il encore au lycée ? Fran souffla en se promettant qu’elle devrait garder son calme face à son beau-frère. Elle savait d’instinct qu’il allait essayer de lui parler, nouer un lien avec elle et cette perspective l’agaçait d’avance. Elle n’avait aucune intention de s’ouvrir à lui ou de devenir sa nouvelle meilleure amie. Ils étaient liés à travers Quinn mais cela ne signifiait pas qu’ils devaient pour autant s’apprécier autant qu’ils aimaient Quinn. Fran le laissa récupérer son souffle avant de le saluer.

- Bon entraînement ?

Elle se fichait totalement de la réponse mais elle était en public et il fallait conserver une apparence digne et courtoise. Egalement, Fran savait qu’elle ne pouvait pas cracher sur une possibilité d’emploi, même si le travail ne présentait aucun interêt pour elle. Un salaire fixe serait la clef pour retrouver son indépendance et quitter le domicile Evans. Elle ne serait plus forcée de voir Sam chaque jour et pourrait se contenter de passer du temps avec sa soeur uniquement quand cela lui chanterait. Il lui semblait presque ironique que Sam lui même lui offre l’opportunité de le fuir. Elle joua avec son bracelet en attendant que Sam poursuive la conversation.

Lorsque Quinn avait annoncé à Sam qu'il allait pouvoir faire la connaissance de sa soeur, le blond avait de suite été nerveux. Pas aussi nerveux que lorsqu'il était passé par la case parents, mais tout de même. Cela ne lui était jamais arrivé, et d'après ce que sa petite-amie lui avait dit, Fran semblait être une personne très sympathique seulement voilà, à cette époque, le blond n'était dans le coeur que de très peu de personnes, il avait bien plus de gens qui ne l'aimaient pas que l'inverse et très peu de confiance en lui. Du coup, il avait essayé de ne pas le montrer à Quinn, mais il appréhendait fortement cette rencontre, et il avait eu raison.

Dès la première seconde, il avait vu dans le regard de Fran qu'elle n'avait pas l'air enchantée de faire sa connaissance, et en y repensant maintenant, c'était plutôt bizarre comme réaction. Il s'était toujours dit que si Stevie lui ramenait une petite-amie plus tard, il chercherait à en savoir plus sur elle, à savoir ce qu'elle aimait chez son frère et surtout, il analyserait le comportement de son frère en sa présence. Peut-être que pour les filles c'était différent après tout. La rencontre s'était déroulée sans encombres, mais les silences pesants présents à plusieurs reprises donnaient la couleur. Il se sentait gêné par le regard de l'aînée et une fois encore, s'était dit qu'il ne devait pas être assez bien pour Quinn.

Les années avaient passées, et il n'avait du la revoir que deux ou trois fois tout au plus, il ne s'en était franchement pas porté plus mal. C'était toujours aussi tendu entre eux, il fallait dire qu'ils n'avaient pas vraiment fait connaissance, leurs conversations s'étaient toujours limitées à celles de bases, prendre des nouvelles, voilà, c'était plus Quinn et Fran qui parlaient, et Sam qui écoutait sans vraiment faire attention.

Des efforts il en faisait, mais il ne fallait pas trop lui en demander. Le dernier qu'il allait faire, était d'aider la blonde à trouver un emploi, mais ça n'était pas désintéressé. Si elle avait une situation stable, elle pourrait partir de la maison, et ainsi, il pourrait souffler. Il avait passé moins de temps chez lui ces derniers temps, surchargé de travail, mais aussi pour éviter l'ambiance qui régnait à la maison. Le moment était plutôt mal choisi d'ailleurs, avec Quinn enceinte, il tenait à être près d'elle le plus qu'il le pouvait mais c'était quasi impossible, Fran était toujours présente chez les Evans. Cela l'agaçait, mais encore une fois, il n'avait rien dit, préférant passer par un autre moyen. Il avait proposé à la blonde de venir faire un tour à McKinley dès qu'il avait eu vent du poste administratif qui s'était libéré, pour qu'elle puisse poser sa candidature et au mieux, avoir le poste. Il l'avait fait délibérément devant Quinn, de ce fait, elle ne pouvait pas refuser, alors qu'en privé, elle lui aurait sûrement ri au nez et aurait refusé. Cela allait devoir impliquer qu'ils passent un peu de temps ensembles mais bon. Le blond avait déjà parlé d'elle à Figgins, en bien, il avait du vanter ses qualités chose qui n'avait pas été facile puisqu'il ne les connaissait pas vraiment, ses qualités… mais Figgins avait confiance en Sam qui, même s'il n'était pas très bon acteur, avait réussi à la mettre dans ses petits papiers. Il ne fallait plus grand chose pour qu'elle soit prise.

L'entraînement du jour avait été intensif, l'équipe était au plus haut de sa forme et il ne fallait pas que ça change, du coup Sam ne les laissait pas se reposer sur leurs lauriers, d'autant plus qu'il fallait qu'il fasse ses preuves s'il voulait un jour monter en grade. Ils avaient gagné, certes un match d'entraînement mais c'était quand même une victoire. Après avoir félicité son équipe et avoir envoyé ses membres à la douche, Sam qui avait aperçut Fran, lui fit signe avant de poser son sifflet et ses feuilles sur le bureau pour la rejoindre. Une fois à sa hauteur, il lui fit un sourire, ravi de voir cet air sur son visage.

« Ouais on est dans une bonne période là donc il ne faut rien lâcher. » répondit-il avant d'enlever sa casquette. « Figgins sera là dans une heure à peu près, le poste est pratiquement dans ta poche, à voir si ça te convient mais bon, on ne crache jamais sur du boulot. Pis c'est pas si mal ici. »