« Hm, tu es sûre, Jessica ? ». Perplexe, Emma jeta un nouveau coup d’œil au miroir de la chambre. Elle fit un tour sur elle-même avant de retrouver sa position initiale, toujours aussi indécise. Vêtue d’une robe légère couleur crème, ses cheveux étaient relevés en une queue de cheval et elle n’était pas encore maquillée. Pieds nus sur la moquette, elle se retourna vers son amie et fit la moue. Un peu plus tôt dans la journée, Will lui avait annoncée qu’il préparait une surprise pour la soirée et depuis, la jeune femme était dans tous ses états. A en croire l’éclat qu’elle avait décelé dans son regard alors qu’elle cherchait en vain à lui tirer les vers de nez, tout portait à croire que cette soirée ne serait pas banale. Paniquant à moitié face à un événement qu’elle n’avait pas prévu, elle avait alors emporté la moitié de sa garde-robe qu’elle avait soigneusement pliée et rangée dans sa valise, puis s’était rendue chez Jessica afin de lui soutirer un peu d’aide. Emma n’était pas habituée aux imprévus, elle avait l’habitude de tout prévoir à l’avance et de faire en sorte de ne pas être prise au dépourvu au dernier moment. Son agenda était rempli de rendez-vous et autres invitations. Elle demandait toujours à ses amis de lui réserver telle ou telle date, allant même jusqu’à leur donner une heure précise. Aux Etats-Unis, où les choses s’organisaient toujours dans la précipitation et de préférence au dernier moment, un tel comportement pouvait être surprenant. Mais il s’agissait d’Emma, et à ses yeux, l’organisation était le mot clé qui permettait de se sentir à l’aise dans n’importe quelles circonstances.

Ouvrant de grands yeux, elle gonfla les joues puis se remit à courir dans tous les sens, allant du miroir à Jessica, et de Jessica au miroir. Mettant un terme à son agitation, cette dernière finit par la prendre par les épaules et lui proposa de se calmer un peu. Emma respira calmement, fermant les yeux tout en écoutant attentivement les indications de son amie qui la poussait à choisir la tenue qu’elle portait. Acquiesçant d’un signe de la tête, elle se mordit l’intérieur de la joue puis rouvrit les yeux. Il était sûrement idiot de réagir d’une telle manière, c’était digne d’une fille de dix-sept ans avant un bal de promo. Cependant, c’était plus fort qu’elle. Elle ne savait pas ce qui l’attendait et cela l’angoissait plus que de raison. Elle avait confiance en Will, pourtant. Elle savait que tout serait parfait, comme à chaque fois qu’il lui faisait une surprise –et autant dire qu’en cinq années de vie commune, il y en avait eu quelques-unes. Retrouvant petit à petit son calme, elle leva le menton et plongea son regard dans celui de Jessica, afin de retrouver confiance. Elle prit une longue inspiration puis décida qu’elle opterait donc pour cette robe, suivant ainsi les conseils de Jessica. Réunissant les autres robes qui étaient à présent étendues sur le couvre-lit de la jolie blonde, elle les plia avec grand soin et les rangea de nouveau dans la valise qu’elle referma quelques minutes plus tard. La conseillère consulta sa montre et s’aperçut qu’elle avait encore une heure devant elle avant de retrouver son mari devant l’appartement.

Avec l’aide de Jessica, elle n’eut aucun mal à être prête à l’heure. Will lui avait conseillée d’être sur son trente-et-un, et elle avait donc suivi ses consignes en faisant de son mieux. Perchée sur ses escarpins, elle serra une dernière fois Jessica dans ses bras avant de quitter l’appartement puis l’immeuble dans lequel vivait la psychiatre de Lima -ainsi que sa très chère colocataire, Holly, qu’elle n’avait bien heureusement pas vu de l’après-midi. S’installant derrière son volant, elle patienta quelques secondes avant de se mettre en route. Curieuse, elle cherchait désespérément à percer le mystère qui entourait ce samedi soir. Lui préparait-il une soirée en famille avec Emily ? Compte tenu de la tenue qu’elle portait, la probabilité de cette suggestion était moindre. Une sortie au restaurant ? Ecaterina n’avait pas encore déménagé, elle garderait peut-être la fillette en leur absence. A Lima, les restaurants avaient toujours été rares. Seulement, depuis que Sue Sylvester avait été élue mairesse, ils pullulaient un peu partout dans la ville et plus particulièrement dans le centre-ville près du grand hôtel entièrement rénové qui accueillait soi-disant les jet-setters les plus côtés du Pays, qui étaient en réalité les has-been d’Hollywood. Emma n’avait jamais mis les pieds dans les deux ou trois restaurants de luxe qui venaient à peine d’ouvrir, mais peut-être était-ce l’idée de son époux ? Après tout, il avait promis de lui offrir une soirée spéciale. Fronçant un sourcil, la jeune femme finit néanmoins par douter de son idée : ces restaurants devaient être hors de prix et si goûter à de la haute gastronomie ne lui déplairait pas, ce serait de la folie que de dépenser autant d’argent pour une seule soirée.

Persistant à trouver ce qui se tramait dans son dos, lorsqu’elle parvint devant son immeuble, un tas d’idées lui étaient venus à l’esprit. Une fête surprise (en quel honneur ? Elle n’avait toujours pas trouvé la réponse à cette question), un diner romantique dans l’appartement (mais pourquoi tant de mystère ?), une virée improvisée dans une ville voisine (le problème, c’est qu’elle ne s’imaginait absolument pas danser collé serré avec son mari parmi des étudiants dans une boite de nuit branchée) une sortie au cinéma (ce qui n’expliquait pas l’importance de la tenue), une dégustation de vins (mais qui était encore moins probable étant donné sa faible résistance à la boisson), une annonce surprise (mais s'il lui annonçait qu'il était enceinte, elle n'était pas sûre de le croire) et une bonne dizaine d’autres scénarios qui semblaient toutes plus absurdes les uns que les autres. Bredouille, elle se gara sur le parking et quitta son véhicule afin de se diriger vers l’immeuble. Resserrant l’étreinte de son manteau autour d’elle, elle pressa le pas et atteignit enfin la porte principale. Elle prit ensuite l’ascenseur qui la conduisit jusqu’à l’étage souhaité et lorsqu’elle se retrouva devant son propre appartement, elle marqua une pause. Plissant les yeux, elle se tourna légèrement et posa une oreille contre la porte, comme pour essayer de percevoir quelques bruits qui lui permettraient de mieux comprendre ce qui se déroulait. A son grand désarroi, le silence était complet et elle se redressa finalement, plus confuse que jamais. Attrapant sa clé dans son sac à main, elle l’inséra dans la serrure et tourna la poignée, impatiente de découvrir la surprise de Will. Ouvrant enfin la porte, elle fronça le nez en humant l’odeur d’encens qui flottait dans l’appartement. La lumière de ce dernier était tamisée et, tendant le bras, elle vérifia sur sa montre qu’elle était bien à l’heure. Mais il était vingt heures précises, l’heure du rendez-vous. Intriguée, elle fit un pas dans l’appartement puis se dirigea vers le salon. Elle eut à peine le temps d’entrevoir les quelques bougies qui donnaient à l’éclairage cet aspect tamisé, que des mains se plaquèrent devant ses yeux. Sursautant, elle posa ses propres doigts sur les mains et reconnut celles de son mari. « Will ? » Demanda-t-elle d'une voix particulièrement aiguë. Autour d’elle, le silence était quasiment complet. Seule la respiration de Will près de son oreille perturbait la quiétude de la pièce.

Les mains plongées dans les poches de mon pantalon, je traversais la long couloir du lycée. Je devais à tout prix voir Emma pour la prévenir de la soirée que j'allais préparer pour nous deux. Le regard posait sur mes chaussures, je ne fis pas attention à l'élève qui sortait du bureau d'Emma et manquais de peu de lui rentrer dedans. Je bafouillais une excuse avant de toquer doucement sur la porte en verre. J'adressais un léger sourire à Emma avant de demander en pointant du doigt le fauteuil face à elle: « Je peux ? » J'attendais d'avoir son autorisation avant de m'asseoir lentement. Ma langue passait sur ma lèvre inférieure, alors qu'un léger silence s'installait pendant lequel je ne la lâchais pas du regard. Je riais doucement avant de passer une main dans mes cheveux. « Je ne vais pas te retenir longtemps. Promis. » Je pouvais sentir qu'elle s'impatientait et se demandait vraiment quelle raison m'avait poussé à venir la voir à cette heure-ci dans son bureau. Mon s'agrandissait un peu plus alors que je reprenais sur un ton posé et sérieux. « Madame Schuester, vous êtes invitée ce soir, dans notre appartement même, à passer la soirée avec moi. » Je me penchais, m'accoudant sur mes genoux et plongeant mon regard dans celui d'Emma. La bouche d'Emma commençait à s'ouvrir, mais je repris la parole, la coupant dans son élan. « Ne dis rien. Tu n'as pas le choix et je ne te donnerais aucun détail. A ce soir. » Je mimais le fait de fermer ma bouche à l'aide d'une fermeture et me levais du fauteuil. Je me penchais au-dessus du bureau, déposais mes lèvres sur celles d'Emma et partais aussi vite que ce que j'étais arrivé sans me retourner. Si je restais ne serait-ce qu'une minute de plus dans le bureau d'Emma, elle réussirait à me faire parler et je voulais que cela reste une surprise.

Je descendais rapidement de ma voiture, un sourire étirant mes lèvres. Je courais jusqu'à notre appartement et fouillais dans les poches de ma veste pour trouver la clé. Je poussais la porte d'entrée à l'aide de mon épaule et je fis quelques pas dans l'appartement avant de jeter ma sacoche sur le fauteuil du salon. Je jetais un coup d’œil à ma montre : il me restait encore deux heures avant qu'Emma n'arrive. Après avoir fouillé pendant plusieurs longues minutes dans les tiroirs de tous les meubles du salon, je trouvais enfin les bougies et les disposais un peu partout dans le salon. Je retroussais mes manches et partais me mettre aux fourneaux. Deux heures, ce serait peut-être juste en fin de compte. Tout devait être prêt pour l'arrivée d'Emma et la connaissant mieux que quiconque, je savais que tout devait être parfait. Emma n'aimait pas le désordre et aimait que tout soit sous contrôle. Après de -très- longues minutes aux fourneaux, je regardais à nouveau ma montre : il ne me restait plus qu'un quart d'heure. Je restais planté au milieu du hall d'entrée, réfléchissant à ce qu'il me restait à faire. Je fis quelques aller-retour entre la cuisine et la salon, amenant les assiettes sur la table. Puis, une fois la table dressée, je me rappelais alors d'une chose que j'avais totalement oubliée jusque là. Je retournais au salon et fis brûler de l'encens avant d'allumer rapidement toutes les bougies du salon. Je tirais ensuite les rideaux ce qui plongeait le salon dans une ambiance tamisée, grâce à la présence des bougies. Sachant qu'il ne me restait plus beaucoup de temps, je courais jusqu'à la chambre afin de me changer et d'être fin prêt lorsqu'Emma arriverait dans l'appartement. J'ouvrais la penderie et attrapais un de mes costumes avec une cravate rouge que j'avais piochais au hasard dans la précipitation.

Je terminais d'arranger ma cravate lorsque je crus entendre la porte d'entrée se fermer. Je ne bougeais plus, écoutant attentivement le moindre bruit pour savoir si Emma était là ou pas. Le bruit de talons claquant sur le sol me fit comprendre que oui. Je me regardais rapidement dans le miroir avant de traverser le couloir et me diriger vers le salon. Elle était là, devant moi, dans le salon. Malgré la faible lumière qu'il y avait dans la pièce, je devinais qu'elle portait une robe couleur crème qui lui allait à ravir. M'approchant lentement d'elle, je plaquais mes mains sur ses yeux. Les mains d'Emma se déposèrent alors sur les miennes et elle semblait les avoir reconnues. Je déposais un baiser dans son cou avant d'enlever mes mains de devant ses yeux. Je la faisais tourner pour qu'elle me fasse face. « Bonsoir » Je lui souriais doucement avant de lui proposer d'aller dans le salon. Je tirais une chaise afin qu'elle puisse s'asseoir. Je m'asseyais en face d'elle et posais ma main sur la sienne. Le regard posé sur nos mains enlacées, je pris la parole et brisais ainsi le silence qui s'était installé. « Tu dois vraiment te demander à quoi rime tout ça.. » Je riais doucement en levant la tête vers Emma. Je me raclais la gorge, fronçant doucement les sourcils en réfléchissant à la façon dont j'allais expliquer à Emma pourquoi j'avais tenu à ce que l'on passe la soirée ensemble. « Tu sais comme moi, que pour l'instant, nous n'avons pas la possibilité de faire notre lune de miel là où on le souhaiterait.. » Je posais mon autre main sur nos mains déjà enlacées. « Donc, j'ai décidé que l'on passerait cette soirée tous les deux pour fêter notre mariage. Parce que je crois vraiment que ça doit se fêter. » Mon sourire s'agrandissait un peu plus lorsque mon regard croisa à nouveau celui d'Emma. Notre mariage été l'un des plus beaux jours de ma vie, dont je me souviendrais dans les moindres détails dans plusieurs années. On se devait donc de fêter ça ensemble autour d'un bon repas avec une bonne bouteille de vin.

Derrière les mains de son mari, les yeux de la conseillère d’orientation se refermèrent. Plus confuse que jamais maintenant qu’elle avait franchi le seuil de la porte, elle avait du mal à faire taire la curiosité qui la tourmentait déjà. Emma n’aimait pas les surprises. Depuis sa toute première fête d’anniversaire surprise organisée par ses parents lorsqu’elle avait neuf ans, elle rechignait à chaque fois qu’elle se retrouvait confrontée à l’une d’entre elles. Ce jour-là, certains de faire plaisir à leur fille ainée, Rusty et Rose Pillsbury avaient invité tous ses petits camarades de classe à la maison. Le printemps venait d’arriver et la météo s’avérant étonnamment clémente pour un mois de mars, ils avaient tout préparé dans le petit jardin de la demeure familiale. Tout aurait pu se passer à la perfection si seulement Emma n’avait pas été cette fillette isolée qui ne s’était jamais mêlée aux autres. C’était une solitaire : ses camarades l’intimidaient et la plupart du temps, ils prenaient même un malin plaisir à se moquer de ses petites manies et de son obsession grandissante pour les germes. Alors cet après-midi-là, lorsqu’elle était arrivée devant ses camarades et qu’elle avait compris ce que ses parents avaient fait, elle avait tout simplement fondu en larmes devant l’ensemble de sa classe du 3th grade. Evidemment, la réaction des petits monstres avait été imminente : ils avaient tous éclaté de rire, faisant rougir jusqu’aux oreilles la principale intéressée qui avait alors tourné les talons pour aller se réfugier dans sa chambre, près de ses petites brosses à dents. Elle avait passé le reste de la journée cloitrée dans celle-ci, si nerveuse qu’elle n’avait pu s’empêcher de la récurer de fond en comble afin de s’occuper l’esprit et de chasser les mauvaises images de son esprit. Traumatisée par ce souvenir douloureux, elle avait par la suite fait comprendre à son entourage qu’elle n’était pas une adepte des surprises. Avec Will, c’était légèrement différent, bien sûr : elle avait une confiance infinie en lui et après tout, la plus belle journée de toute sa vie était associée à l’une de ses surprises, le jour où il l’avait demandée en mariage. Cependant, cela ne l’empêchait pas de devenir particulièrement agitée à chaque fois qu’elle sentait que quelque chose se tramait dans son dos.

Prenant une grande inspiration, la jeune femme frémit lorsqu’elle sentit les lèvres de Will dans son cou. Cela ne faisait désormais plus aucun doute : il s’agissait bel et bien de son époux, derrière elle. Les mains de ce dernier se retirèrent finalement de ses yeux et il la força à se tourner vers lui afin de pouvoir la dévisager. Un sourire fendit aussitôt son visage. De toute évidence, elle avait eu raison d’écouter les conseils de Jessica en adoptant une tenue qui sortait un peu de l’ordinaire, car vêtu de son costume, Will était particulièrement élégant. La conseillère posa une main sur son épaule, la nervosité qu’elle avait ressentie au cours de ces dernières heures s’envolant peu à peu. « Bonsoir » Répondit-elle d’une voix égale. Les raisons qui l’avaient poussé à lui organiser cette soirée étaient toujours obscures à ses yeux, mais l’espace d’un instant, elle oublia complètement qu’elle portait une robe qu’elle n’avait mise qu’une seule fois dans sa vie, qu’elle avait passée l’après-midi à redouter le moment où elle retrouverait son mari, et qu’elle avait bien failli ne jamais pousser la porte de son propre appartement de peur de découvrir la vérité qu’elle dissimulait. Et puis, elle abandonna une seconde les yeux de Will, parcourant la pièce du regard. Ses grands yeux bruns s’attardèrent sur les nombreuses bougies qui éclairaient faiblement la pièce, les bâtons d’encens qui brûlaient au loin et, en penchant légèrement le visage, elle parvenait même à apercevoir la table dressée dans la salle à manger, un peu plus loin. Reportant son attention sur Will, elle lui adressa un nouveau sourire puis glissa sa main dans la sienne lorsqu’il l’attira vers la table qu’elle avait aperçue. La jeune femme prit place sur la chaise qu’il désigna et attendit qu’il en face de même. Les questions se bousculaient désormais dans son esprit. Tant de mystère… sa curiosité n’en était que décuplée.

Comme en réponse à ses interrogations, Will commença enfin à s’expliquer. La jeune femme plissa les yeux, plus impatiente que jamais, mais les premières paroles qu’il prononça ne lui furent d’aucune aide ; il ne faisait que prolonger le suspense de façon insoutenable. Se redressant légèrement sur sa chaise, elle parvint néanmoins à se détendre et entremêla ses doigts aux siens. « Mmh, c’est exact » Répliqua-t-elle doucement avant de se montrer silencieuse à nouveau, dans l’attente de nouvelles explications. Will avait dû le comprendre puisqu’il se mit enfin à table, non sans avoir laissé un petit rire lui échapper au préalable. Lorsqu’Emma comprit enfin quel était le but de cette soirée, elle soupira de soulagement, à la fois satisfaite et délestée du poids de ses doutes. Si elle avait bien tout compris, il s’agissait donc de la continuité de leur mariage ; or un mariage entrainait inéluctablement une lune de miel. Riant à son tour avec légèreté, la jeune femme l’observa à la dérobée avant de se pencher doucement vers lui. Il avait raison : ils ne pouvaient pas encore organiser une vraie lune de miel, loin de Lima. Non seulement ils avaient tous les deux un emploi du temps des plus chargés, mais le mariage s’était révélé coûteux et ils avaient donc préféré repousser leur voyage de quelques mois. Cela ne dérangeait pas Emma : elle avait toujours rêvé d’un beau voyage pour sa lune de miel ; elle préférait donc de loin attendre encore un peu et pouvoir réaliser son rêve plus tard, plutôt que de bâcler les choses en voulant aller trop vite. Et puis, ce n’était pas comme si cette lune de miel était si significative que ça : elle avait une fille de plus de quatre ans, elle pouvait donc difficilement prétendre attendre sa lune de miel pour sauter le pas.

A cette idée, son sourire s’intensifia un peu plus. « J’ai bien envie de le fêter, moi aussi ». Se penchant davantage vers lui, elle pressa furtivement ses lèvres contre les siennes avant de s’écarter, plus rayonnante que jamais. « Et puis, après tout, nul besoin de s’envoler à l’autre bout du Monde pour avoir un peu d’intimité. D’ailleurs, bravo pour les bougies, c’est vraiment magnifique ». La jeune femme jeta un regard circulaire à la pièce, toujours aussi apaisée par l’ambiance qui régnait dans l’appartement. Pour une fois qu’ils avaient droit à une soirée en tête à tête, elle était comblée. La vie de parents avait beau être des plus enrichissantes, ils n’avaient pas eu énormément de moments rien qu’à deux au cours de ces dernières années. Certes, Ecaterina leur donnait régulièrement un coup de main –et encore, la jeune fille ne tarderait pas à prendre son envol puisqu’elle semblait bien déterminée à déménager, ne souhaitant pas profiter plus longtemps de la générosité du couple, selon ses dires- mais Emma tiquait toujours à l’idée d’abandonner sa fille ne serait-ce que pour une soirée. Elle ne la voyait déjà pas suffisamment à son goût, alors elle préférait profiter d’elle un maximum lorsqu’elle en avait l’occasion. Reportant son attention sur Will, elle huma de nouveau l’odeur d’encens mêlée à un autre parfum, plus familier. Haussant un sourcil, elle inclina le visage. « Alors, quel est le programme de la soirée, monsieur Schuester ? J’espère que tu ne comptes pas m’avoir en me faisant boire des litres de vin pour pouvoir profiter de moi par la suite, ce ne serait pas correct ». Riant doucement, elle posa les doigts de sa main libre devant ses lèvres afin de retrouver son sérieux –ou du moins, d’essayer de le retrouver. « D’accord, je me tais » Concéda-t-elle, sans pour autant en avoir l’intention. « Enfin non, parce que j’ai une dernière question : mon odorat me tromperait-il, ou tu t’es vraiment mis aux fourneaux pour moi ? ». Loin d’elle l’envie de se moquer : au contraire, il était un excellent cuisiner. Posant son dos contre le dossier de la chaise, elle soupira légèrement. Décidément, elle n’aurait pas dû faire tout un plat de cette soirée, car celle-ci s’annonçait parfaite.

Je savais qu'Emma ne raffolait pas des surprises. Elle aimait garder le contrôle sur tout ce qui se passait, tout le temps, pour avoir un temps d'avance. Lorsque les événements la dépassaient, elle paniquait et prenait la fuite la plupart du temps ou alors elle rougissait comme elle le faisait si souvent lorsqu'elle était gênée. Seulement, pour ma part, j'adorais les surprises. Le fait de savoir que quelqu'un avait prit la peine de tout organiser sans que vous ne vous en rendiez compte était réjouissant. J'avais mis toutes les chances de mon côté pour que cette soirée se déroule comme je l'avais prévu, que tout soit parfait pour Emma et surtout pour qu'elle ne se doute pas une seule seconde de la raison qui m'avait poussé à l'inviter ce soir. Après avoir enlevé mes mains posées sur les yeux d'Emma, je déposais un baiser furtif dans le creux de son cou. Je la forçais à se retourner, prenant un moment pour l'observer. Un sourire étirait mes lèvres lorsque j'apercevais la robe que portait Emma. Elle était vraiment ravissante et je ne regrettais pas de lui avoir dit de se faire belle. Elle répondit à mon bonsoir d'une voix douce. Elle devait encore se demander pourquoi je l'avais invitée à passer la soirée avec moi ce soir dans une robe élégante. Sa main posée sur mon épaule et ses yeux fixant les miens, elle affichait un sourire léger qui me fit chaud au cœur. Puis je vis son regard parcourir le salon que j'avais soigneusement décoré pour l'occasion. Je l'observais minutieusement, guettant une quelconque réaction que je pourrais apercevoir sur son visage. Après quelques secondes à observer la salle dans ses moindres recoins, Emma se tourna vers moi avec un sourire accroché à ses lèvres et fit glisser sa main dans la mienne. Je l'accompagnais jusqu'à la table et m'asseyais en face d'elle, un sourire flottant sur les lèvres.

Je lui expliquais donc que cette soirée consistait à fêter notre mariage en attendant notre lune de miel qui attendrait encore un peu de temps. Emma acquiesçait et confirmer mes dires lorsque j'ajoutais que nous n'avions pour l'instant pas les moyens de quitter Lima pour notre lune de miel. Je voyais Emma soulagée ce qui m'arracha un sourire. Elle avait dû s'imaginer toutes sortes de scénarios, sauf celui-ci. Nous avions préféré repousser un peu notre lune de miel, puisque nous avions tous les deux des emplois du temps chargés et remplis de responsabilités. Puis le mariage s'était révélé assez coûteux, donc nous avions pris la décision d'attendre un peu plus longtemps, pour faire la lune de miel que nous désirions. Je voyais Emma se penchait vers moi alors qu'elle ajoutait qu'elle aussi avait bien envie de fêter notre mariage. Je fermais les yeux lorsque ses lèvres venaient se presser furtivement contre les miennes. Alors que nos visages se séparaient, je voyais le sourire d'Emma s'agrandir ce qui me fit sourire à mon tour. Je m'accoudais sur la table et collais ma main contre ma joue écoutant Emma qui reprenait la parole avec enthousiasme. Elle déclara qu'après tout nous n'avions pas besoin d'aller a l'autre bout du Monde pour avoir un peu d'intimité. Je hochais la tête pou acquiescer aux paroles d'Emma. « Mais je suis totalement d'accord » Elle me félicitait alors pour les bougies en précisant que c'était magnifique. « Merci. » Je lui souriais doucement avant d'ajouter. « Tu es vraiment ravissante. » Je gardais mon regard posé sur elle un instant n'ajoutant rien d'autre. Emma jetait à nouveau un coup d’œil autour d'elle. Je n'avais même pas prévu que les bougies donne cette sensation d'apaisement à la pièce. J'étais fier de ce que j'avais fait et de plus, la décoration semblait plaire à ma femme. J'étais soulagé d'avoir eu le temps de faire et de préparer tout ce que je souhaitais au départ. Emma reprit alors la parole et me sortit de mes pensées en me demandant le programme de la soirée. J'ouvrais alors la bouche pour essayer de répondre, mais Emma continua dans sa lancée, m'empêchant de prononcer ne serait-ce un mot. Elle continuait en me demandant si je comptais la faire boire des litres de vin pour pouvoir profiter d'elle par la suite. Je riais franchement avant de m'empresser de répondre. « Oh non, surtout pas de vin. J'ai déjà vu ce que cela pouvait donner et je préfère éviter. » Je riais doucement à nouveau en me rappelant de la fois où Ecaterina et Emma avaient décidé d'attaquer ma réserve de bouteilles de vin. J'avais bien failli les assommer en les découvrant cachées dans le placard de l'entrée, complètement ivres. Je souriais doucement à cette pensée. Avant de lever lentement mon regard vers Emma et lui demander « Puis je ne suis pas sûr que nous ayons besoin d'alcool » Mon sourire s'agrandissait lentement alors que je ne lâchais pas Emma du regard. « Il n'y pas de programme, Madame Schuester. Pourquoi, vous avez des propositions à faire ? » Elle posait ses doigts devant ses lèvres et ajoutait qu'elle se taisait. Je riais doucement en posant ma main sur son autre main. Puis elle reprit finalement en disant avoir une dernière question. Je penchais légèrement la tête sur le côté en fronçant doucement les sourcils. Elle me demanda enfin si je m'étais réellement mit aux fourneaux pour elle. Je me laissais tomber dans ma chaise et haussais légèrement les épaules. « Il faut croire que oui. Tu vois, tu m'auras tout fait faire. Vraiment. » Je me levais pour aller dans la cuisine chercher les assiettes, puis me stoppant net, je me retournais et ajoutais. « Promis, ce sera mieux que la salade que je t'avais préparé la fois où je me suis mit aux fourneaux pour toi alors que tu étais malade. » Je lui adressais un dernier sourire avant de me retourner. Je revenais au salon avec les deux assiettes et déposais d'abord celle d'Emma devant elle avant de retourner m'asseoir en face d'elle. Je n'étais pas un chef cuisinier, mais j'avais de mon mieux avec le temps que j'avais eu en rentrant du lycée.

Attentive aux réactions de Will, Emma n’en demeurait pas moins intriguée par ce qu’il lui préparait. Sur son petit nuage, elle avait bien du mal à ne pas river ses grands yeux bruns sur le visage de son mari, et comme souvent lorsqu’ils passaient un moment ensemble, elle ne put s’empêcher de se sentir comblée et particulièrement chanceuse. Qui aurait pu croire que la petite fille chétive et renfermée qu’elle avait un jour été, finirait par trouver le grand amour ? Cela faisait plus de cinq ans maintenant qu’ils étaient ensemble, et pourtant c’était une question qu’elle se posait toujours aussi fréquemment. A chaque fois que cette interrogation lui frôlait l’esprit, elle replongeait dans son enfance, cherchant un indice, un seul indice, qui aurait pu la mettre sur cette voie. En vain, puisque cet indice n’existait pas. Si Will et elle s’étaient croisés à McKinley, lorsqu’ils étaient encore tous deux lycéens, il ne faisait pas l’ombre d’un doute qu’elle aurait déjà craqué pour le membre du glee club ambitieux, et ce en dépit de ses réserves précoces concernant les garçons. En revanche, Will, ce garçon populaire partagé entre ses passion pour le football et le chant, n’aurait certainement jamais fait attention à elle. Ils étaient radicalement opposés, tous les deux. Elle était la fille invisible, qui passait inaperçue ou que l’on ne remarquait que pour ses TOCs, et lui était le séduisant adolescent en couple avec la capitaine des cheerios, Terri Del Monico. En définitif, deux personnes dont les destins n’étaient pas censés se croiser, et qui étaient désormais mariés, parents d’une petite fille, et surtout heureux en ménage.

Emma avait pris une revanche sur son passé et avait trompé tous les détracteurs de son enfance qui lui avaient prédit une vie en solitaire, peu brillante. A l’époque, elle avait mis toutes les chances de son côté en comblant sa vie affective particulièrement monotone (inexistante, en fait) par une vie professionnelle plus intense. Elle avait étudié, décroché ses diplômes haut la main, et avait même obtenu ce poste à McKinley qu’elle désirait. Certes, conseillère d’orientation dans un lycée, ce n’était peut-être pas une carrière très palpitante, mais elle faisait ce qu’elle aimait et c’était ce qui comptait le plus à ses yeux. Et puis, elle était parvenue à réaliser un autre rêve grâce à la création de la LPA. Aujourd’hui, elle avait un salaire raisonnable, des occupations qui lui plaisaient, et surtout elle avait une vie de famille. Elle avait beau être très prise par son métier, c’était bien sa vie privée qui la rendait le plus heureuse. Sa fille était sa fierté ; son mari, l’amour de sa vie. Will lui avait à maintes reprises reproché son travail à la LPA, ses longues soirées passées dans l’association, loin de l’appartement du centre-ville. Bien que réticente au début quant à ralentir la cadence, elle avait fini par tirer des leçons des disputes qui avaient éclatées entre Will et elle à ce sujet, et essayé de réduire ses horaires. Car si un jour on lui demandait de faire un choix entre sa famille et son travail, l’hésitation serait de courte durée.

La voix de son époux la ramena sur Terre et un sourire se dessina sur ses lèvres. Sa remarque concernant le vin n’était pas anodine, et elle était bien placée pour le savoir : quelques semaines plus tôt, elle avait profité d’une soirée sans Will pour passer un peu de temps avec Ecaterina. Après avoir vidé à elles deux une bouteille de vin, elles étaient parties dans un grand délire qui les avait même amenées à passer quelques minutes en tête à tête dans le placard de l’entrée, avant d’avoir la frayeur de leur vie lorsque Will les avait surpris, complètement éméchées. Le lendemain matin, elle s’était réveillée avec un abominable mal de tête, de ceux qui vous martèlent le crâne toute une journée. Et lorsqu’elle avait dû donner quelques explications à son mari, elle n’avait pas su par où commencer. Son comportement avait été irresponsable : Emily dormait dans sa chambre et si elle s’était réveillée et avait découvert sa mère dans un tel état, qu’aurait-elle pensé ? Cependant, malgré tout cela, elle ne regrettait rien car cette soirée avec Ecaterina s’était finalement avérées être l’une des meilleures soirées de toute sa vie : elle avait ri aux éclats jusqu’à en avoir mal aux zygomatiques, s’était prise pour une adolescente et surtout, s’était sentie délestée du poids de tous ses petits tracas quotidiens. « Je suis d’accord : pas d’alcool ce soir ». Elle secoua la tête d’un air qui n’était pas sans rappeler la moue de sa propre fille. « Et tu as raison : nous n’en avons pas besoin, de toute façon » Ajouta-t-elle, espiègle.

Posant ses deux mains sur ses cuisses, elle leva le menton et s’autorisa un nouveau coup d’œil à la table dressée face à elle. Ses yeux experts remarquèrent tous les détails que le commun des mortels n’apercevrait pas, mais qu’elle, maniaque au possible, ne pouvait s’empêcher de découvrir. Les assiettes étaient tournées du même côté, les couverts étaient parallèles à celles-ci. La nappe d’un blanc nacré ne comportait pas le moindre pli, les verres scintillaient presque, et le bougeoir disposé au centre de la table était parfaitement placé. Sa seule déception concernait l’absence de serviettes, un élément indispensable dans le dressage d’une table, mais Emma n’en voulait pas à Will, au contraire : à force de vivre à ses côtés, il avait appris à se montrer consciencieux dans tout ce qu’il entreprenait et désormais, il faisait aussi attention qu’elle à ces petits détails qui faisaient pourtant toute la différence.

Satisfaite, elle croisa le regard de Will et lui adressa un grand sourire, lorsqu’il mentionna l’absence de programme. Elle acquiesça légèrement, plissant les yeux, feignant l’hésitation suite à sa question. Elle finit néanmoins par se redresser et secoua la tête lentement. « J’ai peut-être une ou deux suggestions, en effet, mais je les garderai pour moi » Fit-elle avec amusement, avant de lever ses deux mains devant elle comme pour se défendre. « Hey, pour une fois que je ne dois rien organiser, je ne vais certainement pas me plaindre. Je te laisse faire, ce sera… amusant ». Son sourire s’intensifia sur ses lèvres. Loin d’elle l’envie d’insinuer que Will n’était pas capable d’organiser les choses lui-même : au contraire, il lui avait souvent prouvé le contraire et cette soirée n’était qu’un nouvel exemple sur une liste déjà bien longue. Seulement, l’envie de le taquiner était trop forte pour vouloir ou pouvoir y résister. Elle reposa délicatement ses mains sur ses genoux, puis lança un regard inquisiteur à Will qui confirma ce qu’elle avait deviné : il avait préparé le diner. Elle inclina le visage, ne dissimulant en aucun cas le plaisir que lui procurait une telle information. Humant de nouveau le parfum qui se dégageait de la cuisine, elle hocha la tête et retrouva le regard de Will. « Je vois ça. Fais attention, je ne compte pas m’arrêter en si bon chemin maintenant que je sais que je peux tout obtenir de toi ». Elle eut un petit rire et s’interrompit lorsque le professeur d’espagnol se leva finalement pour se diriger vers la cuisine. Il s’arrêta néanmoins au milieu du chemin, et se tournant vers elle, il fit référence à la première fois qu’il avait cuisiné pour elle. Elle haussa un sourcil, surprise qu’il s’en souvienne bien que ce ne soit pas si étonnant que cela, en fin de compte.

La scène s’était peut-être déroulée cinq ans plus tôt, mais le souvenir était intact dans l’esprit d’Emma, puisque déterminant pour la suite des événements. Ce jour-là, elle n’avait pu rejoindre le lycée McKinley, foudroyée par quelques virus qui semblaient s’être invités pendant la nuit. A l’époque, bien plus terrorisée par les microbes qu’elle ne l’était à présent, elle avait passé la journée chez elle, plus nerveuse et effrayée que jamais. Elle sortait avec Carl, mais lui avait expressément demandé de ne pas venir lui rendre visite. Will, qu’elle n’avait pas prévenu, leur relation étant plus ou moins ambigüe à l’époque, était finalement passé dans la soirée et s’était occupé d’elle. En dépit de ses réserves quant à cette invitation spontanée, Emma s’était laissée faire et n’avait pas rechigné : en réalité, elle avait été bien trop heureuse qu’il soit là pour elle pour lui demander de la laisser seule. Cette soirée avait été incroyablement bonne : non seulement il avait cuisiné pour elle et l’avait aidée à reprendre quelques forces, mais ils avaient passé les heures suivantes devant le dvd d’un concert de Coldplay. C’était peut-être pour cette raison qu’elle aimait tant le titre Fix You, à présent. Depuis qu’il l’avait chantée pour elle ce soir-là, elle associait inévitablement cette chanson à leur soirée, et à lui, par extension. Elle avait fini par s’endormir dans ses bras, et quand Carl avait débarqué au beau milieu de la nuit pour finalement venir en aide à sa belle, le tableau qu’il avait découvert avait attisé sa jalousie. Quelques semaines plus tard, elle quittait Carl pour Will.

Les images de la soirée affluaient dans l’esprit de la conseillère d’orientation qui finit par se reconnecter à la réalité lorsqu’elle entendit le bruit des ustensiles de cuisine, au loin. Un sourire malicieux ne tarda pas à retrouver ses lèvres quand un nouveau souvenir lui revint en mémoire. « Oui, et d’ailleurs si tu pouvais éviter de te blesser cette fois-ci, ça m’arrangerait aussi » Lança-t-elle, faisant de nouveau référence à cette soirée passée ensemble. Elle patienta sagement jusqu’à ce qu’il revienne de la cuisine, son regard s’attardant sur les divers objets de la pièce, et lorsqu’il entra enfin dans son champ de vision, les mains de chaque côté du plat qu’il portait, elle arqua un sourcil. « Quel homme ! » Commenta-t-elle avec légèreté. Il revint enfin à sa hauteur et quand il posa le plat devant elle, elle croisa ses doigts sur le bord de la table et leva le menton pour tenter d’apercevoir le diner. Malheureusement pour elle, le couvercle était posé sur le plat et elle braqua son regard sur Will, suspicieuse. « Hmm, j’espère que ce qu’il y a là-dedans est vraiment comestible, Monsieur Schuester ». Et avant même qu’il n’ait le temps de l’arrêter, elle attrapa le gant que Will portait pour ne pas se brûler, l’enfila à son tour et souleva le couvercle pour découvrir le plat. Filets de poulet et légumes de toutes sortes. L’appétit de la jeune femme monta en flèche et elle lança un regard proche de l’émerveillement à son mari. « Wow, okay tu avais raison, tu as fait quelques efforts depuis la dernière fois». Elle reposa le gant de Will et prit sa fourchette entre ses doigts, l’agitant devant elle comme pour lui faire comprendre qu’elle n’avait pas l’intention d’attendre plus longtemps.

Cela faisait désormais cinq ans que nous étions en couple, Emma et moi. Quelques années auparavant, marié à Terri et pensant avoir un enfant avec cette dernière, je n'aurais jamais pensé arriver où j'en étais aujourd'hui avec la rouquine. Pourtant, nous étions bel et bien mariés et parents d'une petite fille. Après avoir traversé de nombreux moments difficiles, nous avions finalement réussi à nous trouver, et pour de bon. Tout n'avait pas toujours été rose dans notre couple, aussi bien que désormais, plus rien ne pouvait nous séparer. J'avais fait des erreurs dans le passé qui m'avaient coûté cher vis à vis d'Emma. J'avais eu l'impression d'avoir fait une chute libre dans son estime. J'avais même eu l'impression de l'avoir perdu. J'étais donc bien décidé à ne plus faire d'erreurs, à ne plus prendre le risque énorme de perdre la rouquine, surtout que je savais pertinemment qu'un certain professeur de littérature serait prêt à sauter sur l'occasion. Je serrais les dents en pensant à ça. Je n'étais pourtant pas d'un tempérament jaloux, mais avec Emma, cela avait toujours été différent. Que ce soit avec Carl, il y a des années de cela ou avec Scott aujourd'hui. J'avais une totale confiance en Emma, notre relation était solide parce qu'elle était basée sur cette confiance mutuelle. Seulement, je n'avais pas confiance en Scott, ou n'importe quel homme qui pouvait tourner autour d'Emma. Elle n’arrêtait pas de me dire que c'était inutile de jalouser comme je le faisais, mais c'était plus fort que moi. Mon regard se posait sur l'alliance que portait Emma. Je n'arrivais toujours pas à réaliser que nous étions mariés depuis le mois dernier.

J'aperçus un sourire étirait les lèvres d'Emma après ma remarque concernant le vin. J'avais vu à quel point ma femme ne tenait pas l'alcool et je ne voulais pas prendre le risque de la retrouver à nouveau enfermer dans le placard du hall d'entrée. Je souriais à mon tour. Ecaterina avait sûrement voulu tester les limites d'Emma et n'avait pas été déçue. D'ailleurs en y pensant, la jeune femme blonde me devait toujours un shampoing... Mon sourire s'agrandissait à cette pensée. Emma confirmait qu'aucune goutte d'alcool ne serait bu ce soir. Je hochais la tête en arquant les sourcils. « C'est un choix judicieux, madame Schuester. » Elle ajoutait que de toute façon, nous n'en n'avions pas besoin. Un sourire apparut au coin de mes lèvres. « Effectivement.. » J'observais Emma qui détaillait la table dressait devant elle. Je l'avais toujours connu très méticuleuse, faisant attention aux moindres détails et étant une grande perfectionniste. A force de vivre à ses côtés, j'étais moi-même devenu très attentif à ses détails. J'avais bien fait attention à tout mettre correctement sur la table, voulant en quelque sorte impressionner la rouquine qui semblait plutôt satisfait de mon dressage. Elle levait alors ses yeux bruns vers moi et nous échangions un léger sourire. J'espérais avoir bien fait.

Je lui disais alors que je n'avais rien prévu de particulier quant au déroulement de la soirée. Elle me répondait qu'effectivement elle avait quelques idées, mais qu'elle les garderait pour elle. Je fronçais doucement les sourcils en affichant un air légèrement étonné. Je me demandais bien pourquoi elle ne voulait pas partager ses suggestions avec moi. Elle levait ses deux mains devant elle dans un geste de défense devant ma réaction. Elle ajoutait alors que pour une fois que je prenais toute une soirée en main, elle n'allait pas se plaindre. Elle préférait me laissait faire, disant que cela pouvait être amusant. Je riais doucement à cette dernière réflexion. Je voyais son sourire s'agrandir, alors que je plissais les yeux, un sourire également accroché au lèvres. Emma semblait d'humeur taquine ce soir. « Gare à toi, Emma.. » Je lui souriais. En fait, j'aimais qu'elle agisse de la sorte avec moi. J'aimais moi-même la taquiner comme ça, et c'était encore plus amusant lorsqu'elle le faisait aussi. Je plongeais mon regard dans le sien quelques secondes, avant de lui déclarait que j'avais également préparé le repas pour ce soir. J'ajoutais que finalement, Emma m'aurait tout fait faire. Je lui souriais doucement alors qu'elle hochait lentement la tête. Elle répondait qu'elle voyait ça, et qu'elle comptait bien continuer sachant qu'elle pouvait tout obtenir de moi. Je lui répondais d'un sourire qui voulait en dire long avant de me lever afin de me diriger vers la cuisine pour chercher les plats. Je faisais une allusion à un moment passé, il y avait maintenant cinq ans. Je m'en souvenais comme si c'était hier. Je rentrais dans la cuisine alors que je repensais à cette soirée que j'avais passé aux côtés d'Emma, alors qu'elle était malade. M'inquiétant de ne pas voir la rouquine au lycée, j'avais tenu à passer chez elle pour m'assurer que tout allait bien. Lorsque j'avais vu que la rouquine était malade, j'avais décidé de rester avec elle toute la soirée. Je m'étais donc mit aux fourneaux pour elle -me coupant légèrement- et nous avions passé le reste de la soirée devant le concert d'un de nos groupes favoris : Coldplay. Étrangement, depuis ce soir-là, leur chanson « Fix you » me paraît encore plus belle. Emma s'était finalement endormie dans mes bras, sur le canapé. La soirée aurait pu se finir comme ça, seulement Carl nous avait surpris enlacés. J'avais compris que cela avait entraîne quelques problèmes dans le couple qu'Emma et Carl formait à l'époque. Je me frappais intérieurement, lorsque perdu dans mes pensées, je faisais tomber un ustensile sur le sol. J'entendais Emma au loin qui me demandait de ne pas me blesser cette fois-ci. Je riais doucement avant de me baisser pour ramasser ce que j'avais fait tomber. Je revenais au salon avec le plat que j'avais soigneusement préparé. « Quel homme ! » Je secouais doucement la tête en souriant. Je me rasseyais face à elle alors que je la voyais essayer de voir ce qui se trouvait dans le plat. Elle déclarait qu'elle espérait que ce qui se trouvait dedans était vraiment comestible. J'arquais les sourcils et demandait en feintant d'être offusqué. « Douterais-tu de mes talents de cuisinier ? » Sans que je ne puisse faire ou dire quoi que ce soit, Emma attrapa le gant que je portais et soulevait le couvercle du plat. Je souriais de plus belle en voyant le regard que levait ma femme sur moi. Elle paraissait assez étonnée du résultat de mon heure passée en cuisine. Je me sentais fier de moi et je ne le cachais pas. Elle acquiesçait et disait qu'effectivement j'avais fait beaucoup d'efforts depuis la dernière fois. « Merci, merci. » Je la voyais agiter sa fourchette devant elle, montrant son impatience. Je prenais son assiette et la servais en première, avant de faire de même pour moi. Le plat était beau, maintenant il ne restait plus qu'à savoir si il était mangeable. Je fixais Emma, silencieusement avant de me pencher au-dessus de la table et de pressais tendrement mes lèvres contre celles d'Emma. J'attendais qu'Emma commence à manger, pour faire de même. Je levais lentement mon regard vers elle, avant de lâcher « Tu ne t'attendais pas à ça en venant ce soir, pas vrai ? »

De nouveau, Emma semblait sur son petit nuage. Un mince sourire étirait ses lèvres et ses grands yeux bruns dénotaient un enthousiasme qu’elle n’avait pas ressenti depuis longtemps. Il était parfois difficile de sortir de son petit train-train quotidien et de bousculer quelques habitudes pour en établir de nouvelles. La conseillère d’orientation était elle-même très attachée à sa routine, car celle-ci lui donnait l’impression de tout contrôler. Depuis qu’elle était jeune, elle ressentait ce besoin de tout organiser et de ne rien laisser au hasard. Cette tendance n’était pas étrangère à la phobie dont elle souffrait depuis qu’elle était toute petite, ou du moins depuis ce fameux jour passé à la production laitière, lorsque son petit frère l’avait poussée dans la fosse à purin. La monotonie ne la gênait pas, au contraire, elle lui donnait un certain sentiment de confort. Elle aimait partir à la même heure tous les matins, répéter les mêmes gestes en arrivant à McKinley, savoir exactement ce qu’elle faisait et surtout remplir les pages vierges de son agenda, en programmant chaque heure, chaque événement, avec cette satisfaction de savoir ce qu’elle faisait, et où elle allait.

Ce n’était pas toujours simple pour Will, et elle en était consciente. Parfois, lorsqu’il essayait de repousser leurs habitudes en faisant quelques propositions sortant un peu de l’ordinaire, il se confrontait à la désapprobation qu’elle n’explicitait pas toujours à l’aide de mots, mais qui était largement perceptible sur ses traits délicats. Leur mariage était d’ailleurs l’un des nombreux exemples illustrant cette manie de tout contrôler jusque dans les moindres détails. Ils avaient attendu si longtemps avant de se jeter à l’eau qu'aux yeux d'Emma, leur mariage devait être absolument parfait, ressemblant presque trait pour trait aux mariages princiers qu’elle s’était toujours figurée en étant plus jeune. C’était un défaut, elle le savait, et ce n’était pas toujours évident à gérer, surtout pour ses proches. De plus, elle devait continuellement faire attention à réfréner cette tendance face à Emily, qui commençait déjà à répéter le moindre de ses faits et gestes. Or, Emma ne souhaitait pas que sa fille s’inspire d’elle et ait la même enfance avortée qu’elle.

Ce soir-là échappait à toutes ses prédictions, et si elle aurait dû ressentir l’affolement typique qui ressurgissait à chaque fois qu’elle ne contrôlait plus rien, elle était au contraire sereine, presque trop paisible. Le fait de connaitre si bien son époux la réconfortait et lui permettait d’oublier ses manies encombrantes. Avec un autre, tout aurait probablement été différent, seulement elle le connaissait par cœur et ne doutait plus de ses bonnes intentions à son égard. La surprise qu’il avait orchestrée avait été motivée par le désir de lui faire plaisir, elle en était persuadée. Force était de constater que cela fonctionnait à merveille : cette lune de miel improvisée dans leur appartement lui plaisait et le sourire qu’elle arborait depuis plusieurs minutes en témoignait.

Posant un instant son coude sur le bord de la table, elle cala son menton dans sa paume et observa Will à la dérobée pendant quelques secondes, sans se soucier du silence que cela entrainait. Des tas de souvenirs lui revenaient lorsqu’elle plongeait son regard dans le sien. Tous les moments qu’ils avaient passés ensemble, tout cet amour qu’ils avaient partagé, d’abord à travers des gestes simples mais mesurés qu’ils avaient dû dissimuler afin de ne pas éveiller les soupçons, puis en se retenant pendant quelques mois lorsqu’ils avaient été amenés à prendre un peu de distance. Pourtant, même au cours de cette période difficile qui avait néanmoins été un passage obligatoire dans la future évolution de leur relation, ils avaient éprouvé de nombreuses difficultés à s’éloigner l’un de l’autre. Se croiser sur son lieu de travail au quotidien n’était pas simple quand l’on souhaitait « oublier » quelqu’un, et ils en avaient d’ailleurs fait l’expérience. Les quelques mois de flottement avaient été difficilement surmontables, mais avaient permis une jolie conclusion en fin de compte. Quant aux regrets, ils étaient bien minces face à la joie des retrouvailles. Certes, Emma avait blessé des personnes qu’elle appréciait sincèrement. Malheureusement elle ne pouvait pas effacer ses erreurs, alors elle avait appris à vivre avec celles-ci.

Reprenant vie, la conseillère d’orientation abandonna ses pensées afin de se concentrer sur la scène qui se jouait devant ses yeux ébahis : Will lui avait présenté son plat et affichait désormais un large sourire, de ceux auxquels elle ne savait résister. Lorsqu’il lui demanda si elle osait douter de ses talents de cuisiner, elle secoua la tête, riant avec légèreté. « Bien sûr que non, je suis certaine que c’est parfait de toute façon ». Agissant avec rapidité, elle parvint à dérober le gant qu’il portait afin de découvrir elle-même le plat, et lorsque ses yeux se posèrent sur ce dernier, son estomac se mit à lui envoyer quelques messages de détresse, lui rappelant qu’elle n’avait rien avalé depuis plusieurs heures. Posant une main délicate sur son ventre, elle eut un grand sourire tout en attendant (im)patiemment qu’il la serve enfin. Lorsque Will posa son assiette devant elle, elle planta aussitôt sa fourchette dans la viande et goûta à la cuisine de son mari qui s’était visiblement donné beaucoup de mal pour lui faire plaisir.

Levant le regard vers ce dernier, elle lui adressa un petit sourire. « Tu sais, si tu continues comme ça, dans quelques années tu pourras ouvrir ton propre restaurant à Lima » Ironisa-t-elle, bien que le diner fût vraiment délicieux. Elle reprit quelques bouchées, et lorsque Will lui lança qu’il était sûr qu’elle ne s’était jamais imaginé une chose pareille avant de venir, elle reposa sa fourchette sur le bord de l’assiette et acquiesça. « C’est vrai, pour être honnête, j’ai imaginé toutes sortes de scénarios improbables. A un moment, j’ai même cru que tu me préparais une baby-intervention, pour me convaincre de… enfin, tu sais » Abrégea-t-elle avec embarras, se rendant compte de sa bêtise. Elle avait peut-être dit ça sur le ton de la plaisanterie, mais elle aurait dû réfléchir avant de foncer tête baissée vers une conversation qui s’annonçait dangereuse, surtout pour elle. Depuis le mariage, l’idée d’avoir un second enfant la taraudait de plus en plus, et comme elle savait Will particulièrement réactif par rapport à ce sujet, elle évitait de se pencher sur celui-ci en sa présence. De toute évidence, c’était raté. Mordillant sa lèvre inférieure en fronçant les sourcils d’un air concerné, elle riva le regard sur son assiette et prit une nouvelle bouchée de son plat qui disparaissait à vue d’œil. Son visage finit néanmoins par reprendre quelques couleurs quand elle prit la décision de rattraper sa bêtise.

« Mais cette soirée est bien plus intéressante que tout ce que j’aurais pu imaginer. J’ai l’impression que tu as voulu te surpasser, et c’est réussi ». Posant ses couverts, elle laissa de côté son assiette presque vide pour se lever de sa chaise et esquisser un pas en direction de Will. Elle passa discrètement sa langue sur ses lèvres et se pencha vers lui afin de presser son front contre le sien après avoir noué ses bras autour de sa nuque. « Merci, Will » Fit-elle d’une voix douce. Avec un sourire, elle ferma les yeux et ses lèvres s’emparèrent des siennes, qu’elle connaissait par cœur. Sa main glissa le long du bras de son époux et attrapa la sienne, et quand elle dégagea son visage du sien quelques secondes plus tard, elle lui adressa un sourire. « Pour cette première lune de miel, j’aimerais danser avec toi, si tu es d'accord ». Entrecroisant ses doigts aux siens, elle l’attira vers lui tout en attendant sa réponse avec une certaine impatience. De toute façon, ce n’est pas comme s’il avait le choix : n’était-ce pas sa soirée, après tout ?

Emma et moi avions beaucoup de points en commun. Tous les deux, nous faisions toujours ou très souvent passer les autres avant notre personne. Même si Emma était certainement plus généreuse que moi et je l'admirais grandement pour ça. Peu de personnes font ça. Les gens sont égoïstes de nos jours. Nous avions également en commun notre passion pour notre métier. Elle faisait son métier avec beaucoup de passion et conseiller les élèves -et les professeurs parfois- mieux que quiconque. Elle était faite pour ce métier, tout le monde le savait, cela sonnait comme une évidence et elle faisait tout son possible pour faire ça parfaitement. Seulement, nous avions aussi une grosse différence. Elle était très organisée ; elle notait tous ses rendez-vous, n'aimez pas être prise au dépourvue et aimait que tout soit prévu et en ordre correctement. Autant dire tout le contraire de moi. J'aimais les surprises, sortir sur un coup de tête et je prenais souvent des décisions au dernier moment ce qui chamboule souvent mon emploi du temps. Pourtant, même en sachant qu'elle détestait être prise au dépourvue, avec moi, je devais avouer que cela arrivait souvent. La première en date était ma demande en mariage sans aucun doute. Je me souviens encore de l'affolement que j'avais pu lire dans ses grands yeux bruns au moment où je posais un genoux à terre. A force, Emma devait me connaître et avait sûrement de plus en plus confiance puisqu'elle ne paraissait pas stressée ni affolée ce soir. Je m'étais habitué à ne suivre que notre quotidien et à ne surtout pas faire de folies qui sortent de nos habitudes. Seulement, pour notre première lune de miel, j'avais voulu tout mettre en œuvre pour surprendre la rouquine et lui faire plaisir, tout simplement. J'étais donc soulagé qu'elle réagisse aussi sereinement.

Je revenais au salon avec le plat que j'avais soigneusement préparé pour l'occasion. Effectivement, il était rare que je me mette aux fourneaux, mais pour ce soir, j'avais fait une exception. Je taquinais Emma en lui demandant si elle doutait de mes talents de cuisiniers. Je lui adressais un sourire lorsqu'elle répondait que non et qu'elle était sûre et certaine que tout était parfait. Je l'espérais. Sans que je ne puisse faire un geste, elle attrapait rapidement mon gant et soulevait le couvercle du plat. L'odeur du plat envahissait rapidement la pièce alors que je servais rapidement Emma, qui semblait impatiente. Je la regardais attrapait sa fourchette et se dépêchait à commencer à manger avec un sourire accroché aux lèvres. Je faisais de même, appréciant le léger silence qui flottait désormais dans la pièce. Ces silences n'étaient pas désagréables entre nous, au contraire. Puis la plupart du temps, nous n'avions même pas besoin de nous parler pour nous comprendre. Un sourire, un regard ou un geste suffisait. Je relevais la tête lorsqu'elle reprit la parole en disant que si je continuais comme ça, je pourrais ouvrir mon propre restaurant à Lima. Je rigolais doucement avant de répondre en secouant doucement la tête. J'avais perçu son ton un peu taquin, ce qui eut pour effet d'agrandir mon sourire. Je reprenais une bouchée de mon assiette, alors qu'elle me disait qu'elle s'était imaginé toutes sortes de scénario sauf celui-ci. Elle enchaînait en me disant qu'elle avait même cru que je préparais une baby-intervention concernant ce que je savais. Je posais ma fourchette à côté de mon assiette ne lâchant pas Emma du regard. Je ne pensais pas qu'elle mettrait ce sujet sur le tapis. Depuis notre mariage, j'avais partagé avec Emma mon envie d'avoir un deuxième enfant. J'avais bien vu qu'elle était un peu réticente face à cette idée et j'avais donc décidé de ne pas insister sur ça. Seulement, il se présentait une bonne occasion d'en reparler. Peut-être qu'après tout la rouquine avait réfléchit et avait changer d'avis. « Si tu y tiens, on peut faire une baby-intervention puisque nous n'avons pas de programme précis pour ce soir. » Je buvais une gorgée d'eau froide avant d'enlacer mes mains et de baisser les yeux sur ces dernières. « Tu y as réfléchis ? » Je relevais mon regard sur elle, avant d'ajouter rapidement. « Tu sais.. à un deuxième enfant. » Elle gardait son regard rivé sur son assiette et reprit la parole, comme pour éviter le sujet précédent. Je reprenais une bouchée de mon assiette, n'ajoutant rien de plus concernant le sujet qui nous mettait mal à l'aise tous les deux.

Je ne voulais pas me montrer insistant et en fin de compte obliger Emma à vouloir un deuxième enfant. Je relevais la tête alors qu'elle disait que cette soirée était bien plus intéressante que ce qu'elle aurait pu imaginer. Effectivement, je m'étais surpassé et j'étais ravi de voir j'avais réussi. Mes sourcils s'arquaient dans un geste lent en voyant Emma se levait après avoir déposé ses couverts sur la table. Je la suivais du regard, s'approcher de moi en contournant la table. Elle entourait ma nuque de ses bras et déposait lentement son front contre le mien. Je fermais les yeux savourant ce geste. Dans un souffle, elle me remerciait d'une voix douce. Un sourire étirait mes lèvres avant qu'elle ne m'embrasse. Gardant les yeux fermés quelques secondes de plus, je sentais sa main glissait le long de mon bras afin de trouver la mienne. J'ouvrais les yeux et apercevait un sourire sur le visage de ma femme. Elle me demandait alors de danser pour cette première lune de miel. « Avec grand plaisir. » lui soufflais-je en guise de réponse. Je me levais de ma chaise alors qu'elle m'attirait vers elle. Je lui adressais un sourire, à mon tour. Je ne me voyais vraiment pas lui refuser cette danse. Mes mains posées sur ses hanches, j'esquissais quelques pas sur le côté et c'est alors que nous commencions une danse qui ne me semblait pas étrangère. « Ça me rappelle quelque chose.. » Je riais doucement alors que mes pensées s'envolaient vers cette après-midi, il y a quelques années, qui était un moment important pour nous. Je déposais furtivement mes lèvres sur la joue d'Emma, arborant toujours le même sourire.