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 06. Breathe Me

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06. Breathe Me Empty
MessageSujet: 06. Breathe Me   06. Breathe Me EmptyLun 17 Déc - 18:01



“Help, I have done it again. I have been here many times before,
Hurt myself again today and the worst part is there's no one else to blame”

BREATHE ME

L'astre solaire s'approchait doucement de la ligne d'horizon dans un ciel teinté de nuances à la fois orangées et violacées inhérentes à l'implantation prochaine du crépuscule. Une brise aussi rafraîchissante qu'inattendue ébouriffa les mèches corbeaux du Cubain tandis qu'il ralentissait considérablement pour abaisser la vitre conducteur et allumer une cigarette. Une écharpe de fumée s'évapora immédiatement par la fenêtre et il inspira profondément, sentant déjà les effets de la nicotine agir sur son organisme. Il expira doucement, s'appliquant à dégourdir sa nuque douloureuse et à atteindre les prémices d'un état de détente. Un coup de klaxon intempestif interrompit ses tentatives. Il fronça les sourcils en consultant prestement son rétroviseur et s'empressa de changer de file. Une poignée de secondes plus tard, un Hummer aux couleurs excentriques le dépassait à vitesse grand V et, Aaron en profita pour adresser un geste obscène de la main au conducteur, avant que celui-ci ne le distance. Il hocha négligemment la tête, déconcerté. Certains comportements ne changent pas, surtout en Amérique, songea-t-il distraitement, avant de scruter l'espace qui s'offrait à lui, au côté droit de l'Autoroute 75, à la recherche d'une sortie salvatrice. Il avait passé l'intégralité de son après-midi à Toledo afin de régler quelques courses de dernière minute au compte de son oncle ; celui-ci s'était retrouvé coincé derrière le comptoir de son restaurant et s'était résigné à déléguer ses rendez-vous à son plus jeune neveu. Aaron avait rencontré une série de fournisseurs en prévision de la fête nationale qui se profilait et, se préparait activement à Lima. Sergio tenait à ce que stocks et activités soient parfaitement ficelées d'ici la semaine suivante, de manière à ne pas avoir à renouveler ce genre de transactions au cours des festivités. La fatigue accumulée au cours des dernières semaines se faisaient clairement ressentir et, il se serait sans doute damné pour quelques heures de sommeil un tant soit peu revigorantes. Un panneau indiquant Buffton attira son attention et après un court instant d'hésitation, il l'emprunta ; une pause était plus que bienvenue. Il prendrait un verre pour se restaurer et s'accorderait une petite sieste d'une vingtaine de minutes avant de reprendre la route. Lima n'était plus qu'à une petite demi-heure de là, toutefois il ne se sentait pas la force d'enchaîner suite aux deux heures de circulation qu'il venait de maintenir. Ses pensées dérivèrent lentement tandis qu'il s'engageait tranquillement dans le trafic citadin. Il n'arrivait toujours pas à concevoir qu'une année ce soit écoulée depuis son emménagement à Lima. Les évènements qui l'avaient poussé à venir s'installer en Ohio lui semblaient subitement si proches et pourtant si lointains.
Le Cubain s'immobilisa sous l'injonction d'un feu rouge indifférent aux pensées qui se succédaient subitement sous le crâne du conducteur. Il se frotta le visage, exténué. Il savait ce que ça signifiait. Silvia, sa sœur aînée, ne tarderait sans doute pas à l'appeler d'ici quelques jours, pour prendre des nouvelles. Autrement dit, savoir s'il était sur le point de faire une connerie ou non. Il faisait toujours des conneries irréfléchies à cette période de l'année ; c'était presque psycho-morphologique. Ses doigts entamèrent un concert de pianotement sur le volant tandis qu'il s'impatientait. Cigarette calée entre les dents, son menton pivota malgré lui vers le siège passager : le souvenir le frappa brutalement, sans qu'il ne s'y attende. Aaron se souvenait très bien de cette nuit-là ; il doutait de pouvoir l'oublier un jour, à vrai dire. Il avait vingt ans. Alvaro, son père, avait toujours été doué d'une bonhommie aussi singulière que contagieuse. Lorsqu'ils avaient emménagé aux États-Unis, il avait inculqué à ses enfants les coutumes propres au pays qu'ils allaient découvrir au fil des ans. Et cela passait inévitablement par le 4 Juillet et, ce qu'il représentait pour la nation américaine. Ils s'étaient invité dans une fête de quartier dans le New Jersey, chez un collègue de travail de son père. Ils s'étaient amusés, aucun doute là-dessus. Ils avaient bu jusqu'à ce que l'euphorie filtre chaque pore de leur peau. Alvaro avait cédé la place passager à son fils cadet et, moins d'une dizaine de minutes plus tard, ils s'étaient fracasser contre un poteau électrique. Et il s'était éteint, aussi simplement qu'une flamme soufflée par le souffle putride de la mort. Et lui était toujours debout, plus vivant que jamais - increvable. Plus de trois ans plus tard, il cherchait encore à donner du sens à cet incident qui n'en détenait aucun. C'était arrivé et, il n'y avait rien de plus à ajouter.
Le feu passa finalement au vert ; Aaron écrasa l'accélérateur plus brusquement qu'il ne l'aurait souhaité et, ses pneus crissèrent bruyamment sur l'asphalte ; il négocia négligemment un virage serré et le véhicule fut secoué de soubresauts lorsqu'il chevaucha maladroitement un trottoir en accédant au parking d'un petit établissement. Il coupa le moteur, après s'être rangé au plus proche possible. 22h03, s'informa-t-il avant de quitter fluidement l'habitacle, abandonnant sa veste sur la banquette arrière en vue de la chaleur étouffante qui s'était abattue sur l'Ohio depuis quelques semaines. Il écrasa son mégot sous son talon avant de se diriger d'une démarche chaloupée vers l'entrée du pub. La clameur des conversations, de la télévision branchée sur la chaîne sportive et une odeur de tabac froid fondit sur lui dès qu'il en eût franchi le seuil. Ses pupilles ébène glissèrent doucement sur l'ensemble de la salle, scrutant furtivement chaque visage ; puis il rejoignit le comptoir et commanda une bière pression avant de s'écrouler sur un siège.
En attendant l'arrivée de sa commande, Aaron prit brièvement connaissance des messages qu'il avait manqué lorsqu'il conduisait. Il effectua un tri sommaire, excluant les publicités de son opérateur et les nouvelles qui n'avait aucun besoin de son attention immédiate. Il découvrit une note de la part de sa mère, qu'il laissa sans réponse. Elle aussi s'inquiétait pour son état ces derniers jours et, il avait cessé de chercher à se montrer apaisant à la longue. Il prit le temps de répondre brièvement à son oncle pour lui indiquer que les affaires s'étaient bien déroulée et qu'il ne serait pas nécessaire de l'attendre cette fois-ci. Le barman glissa un verre de 75 cl devant lui ; Aaron le remercia d'un hochement de tête avant de coincer quelques dollars sous son dessous-de-verre. Il en but deux longues gorgées avides avant de laisser un soupir d'aise s'échapper de ses lèvres, repu. Il s'accouda avec nonchalance au comptoir de service, s'intéressant distraitement aux scores des deux équipes qui s'affrontaient à l'écran. Il n'était jamais parvenu à trouver le moindre intérêt au football. Il ne s'agissait que d'un sport où douze guignols courent après une balle pendant quatre-vingt-dix minutes. Rien de bien passionnant.

Un mouvement désordonné à la périphérie de son champ de vision attira son attention. Une armoire à glace coiffée d'une casquette de routier s'approcha de lui sous le regard de ses compagnons, une clope éteinte au bec. Son allure déplût instantanément au Cubain. Il modifia instinctivement ses appuis, tandis que l'étranger se plantait devant lui : « Hé, gars. T'aurais pas du feu ? » lança-t-il avec un fort accent du Sud, accompagnant sa question d'un geste du pouce. Aaron empocha son téléphone avant de tâter silencieusement ses poches à la recherche de son Zippo. La flamme s'éleva du dispositif, claire. L'homme souffla un nuage de fumée à la figure du Cubain qui se détourna de l'importun pour boire une nouvelle gorgée, sans un mot. « Elle est à toi, la Camaro ? » poursuivit-il, sans accorder la moindre attention au désintérêt manifeste que lui portait Aaron. « Ouais » répondit-il sans s'étendre plus. « Quelle année ? ». Bon sang ! Pourquoi n'allait-il pas voir ailleurs s'il y était ? Le Cubain réprima un soupir d'agacement avant de reprendre : « 67, pourquoi ? ». Une expression indéchiffrable passa sur les traits du fumeur qui, sans le quitter des yeux, s'adressa à ses camarades de beuverie : « Camaro de 67 les gars ! » s'esclaffa-t-il grassement. Il reprit subitement son sérieux. Et son poing serré se dirigea tout aussi soudainement vers l'estomac du Cubain. Pris au dépourvu, Aaron se plia en deux, le souffle coupé. Un second coup vînt l'accueillir au niveau de la pommette et il cracha un grognement de douleur. « Tu vois mon gars, dans le Sud, nous apprécions beaucoup le respect. Et quand un individu choisit de jouer les vilains petits canards, il n'y a pas deux solutions ! » raconta-t-il au creux de son oreille. Il n'eût aucun mal à discerner les effluves d'alcool qui émanaient de l'haleine de son agresseur, sans comprendre à quoi celui-ci pouvait bien faire allusion. « Hummer, Hummer » chantonna-t-il, avant d'écraser de nouveau son poing contre les côtes du mécanicien.
Les avant-bras d'Aaron bloquèrent l'attaque avant qu'elle ne l'atteigne et, il repoussa brusquement le routier en sentant une poussée d'agressivité déferler dans son organisme. Ce n'était certainement pas le bon moment pour le pousser à bout. « Casse-toi » lâcha-t-il d'une voix qui ne laissait aucun doute quant à ses capacités à maîtriser un assaut physique. L'armoire à glace éclata d'un rire qui le hérissa désagréablement. L'instant suivant, les deux hommes s'empoignaient sans la moindre retenue, gravitant vers le centre de la salle pour s'offrir un meilleur espace de lutte. Quelques cendres s'accrochèrent au débardeur noir d'Aaron ; il cilla à peine. Il avait déjà rencontré des hommes que celui-ci dans le passé. Des quadragénaires complexés qui aspiraient à décrocher une victoire facile en hommage à leurs jeunesses passées, histoire de prouver à leurs collègues que la paire de couilles qu'ils avaient entre les jambes étaient encore en activité. Des conneries tout ça. Aaron dévisagea attentivement le faciès de son adversaire, déformé par l'effort physique qu'il était obligé de produire pour faire perdre ses positions au lutteur professionnel qu'il avait devant lui. Comme à chaque fois qu'il s'approchait d'une situation où ses poings entraient en service, Aaron éprouva un brusque accès de violence. Celui-ci enflamma ses nerfs un à un, tel un poison insidieux et incontournable. Il s'agissait presque d'un besoin, arrivé à ce stade. Son genou percuta le bas-ventre du routier, qui se plia en deux à son tour. Du coin de l’œil, il nota que ses camarades de beuverie s'étaient levés à demi de leurs sièges en attendant de voir l'évolution de l'altercation. Aaron leva le poing et frappa une première fois en poussant un grognement de rage. Il empoigna stratégiquement une touffe de cheveux sales dans sa main gauche avant de se fendre une nouvelle fois, prêt à frapper, la vision rouge. Il s'interrompit aussi soudainement qu'il avait commencé. Une sensation prévenante se glissa au premier plan de son esprit, obscurcît par un épais voile de violence. Qu'était-il en train d ... Il n'était pas supposé se conduire ainsi. La police avait été très claire à son propos : un faux pas supplémentaire et il serait obligé de passer quelques mois à l'ombre du centre de détention de Lima. Se laisser progresser sur la voie de la facilité, à céder à ses pulsions de la sorte, n'était pas une option envisageable. Malgré lui, ses mains tremblèrent et tandis qu'il écrasait son poing droit contre la tempe de son adversaire, son poignet craqua sèchement. Une onde de douleur insoutenable remonta le long de son avant-bras, le paralysant complètement. Il repoussa difficilement son ennemi avant de se précipiter vers les toilettes des hommes, à l'image d'un animal blessé. Il verrouilla la porte derrière lui après avoir expulsé sans ménagement, un petit vieux qui lisait son journal du soir. Il s'approcha des lavabos pour passer de l'eau froide sur sa blessure, priant pour qu'il n'y ait aucune fracture. Il tâta précautionneusement la zone en grimaçant, avant de se laisser glisser sur le carrelage. Combien de temps devrait-il rester bloquer ici, avant que ses assaillants ne se résignent à quitter l'endroit ? Le délai pouvait se compter en heures. Il inspira profondément, cherchant à réduire son taux d'adrénaline. Que pouvait-il faire, maintenant ? Une pointe de désespoir lui perça la poitrine et il plaça son crâne entre ses genoux, assommé de fatigue, s'appliquant à ignorer l'irritante douleur qui lui envahissait le bras dès qu'il effectuait un mouvement trop brusque. Que dirait Ecaterina si elle venait à apprendre qu'il avait flanché ?

Une étincelle de lucidité éclaira son esprit. Il se contorsionna difficilement afin d'atteindre sa poche arrière avec sa main valide et perdit quelques secondes à faire défiler ses contacts. Elle lui avait donné son numéro de téléphone dès le premier jour en spécifiant qu'il avait la possibilité de l'appeler, en cas d'urgence. Il avait hoché la tête en roulant des yeux. Certainement qu'il n'aurait jamais pensé à en faire usage quelques semaines plus tôt, comme il s'apprêtait à le faire aujourd'hui. Les tonalités résonnèrent longuement contre son oreille, il retînt son souffle jusqu'au bout. Il tomba sur sa messagerie. Un juron familier s'échappa de ses lèvres tandis qu'une voix préenregistrée s'élevait de l'appareil ; le bip sonore lui céda finalement la parole : « Hé, Ecaterina, hm --, Il s'interrompit, ne sachant comment exprimer son problème au téléphone, auprès d'une personne avec laquelle il était aussi peu familier. Était-ce réellement nécessaire, finalement ? Elle ne consulterait pas ses messages avant le lendemain matin et lui, resterait seul jusqu'à ce qu'on lui demande de quitter les lieux. Il déglutit. Je -- Tu as dit que je pouvais appeler si j'avais besoin de quelque chose. J'aurai besoin que tu viennes me chercher, s'il te plaît ». Le dernier mot mourut sur ses lèvres tandis qu'il prenait lentement conscience de la situation dans laquelle il s'était empêtré. Le Cubain s'humecta fébrilement les lèvres avant de reprendre d'un ton aussi détaché que possible : Je suis dans un bar, à Buffton -- Le Nirvana, je crois. Dans les toilettes. C'est à une vingtaine de minutes de Lima. Je -- J'essaie de ne pas m'emporter, d'accord ? ajouta-t-il d'une voix qu'il tenta de rendre convaincante. Qui tentait-il de duper, au juste ? Si tu as ce message avant demain matin, est-ce que tu pourrais emporter une trousse de soin avec toi ? Je crois que je me suis cassé le poignet. Et sinon, on se voit lundi soir. Gracias » souffla-t-il juste à temps. Délai épuisé, l'appel se rompit, tandis que quelques coups étaient portés contre le panneau, qui ne bougea pas d'un centimètre.

Il regroupa ses genoux contre sa poitrine et, l'attente commença.


Dernière édition par Aaron J. Guevara le Mar 12 Fév - 22:04, édité 1 fois
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Ecaterina S. Robertson
Ecaterina S. Robertson
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Occupation : Bibliothécaire à l'OSU-Lima, auteure publiée, membre des Awesome Voices
Humeur : Changeante
Statut : Célibataire, "collabore" avec Tate Bartowski
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Piece of Me
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06. Breathe Me Empty
MessageSujet: Re: 06. Breathe Me   06. Breathe Me EmptyJeu 20 Déc - 16:40

Le faisceau de la lampe posée sur le bureau combiné à la lueur de l’écran de l’ordinateur allumé en face d’elle donnait au teint de Cat une carnation étrange qui n’altérait pourtant en rien la délicatesse de ses traits. Cela faisait maintenant deux heures qu’elle avait pris son service à l’association et malgré la chaleur s’insinuant dans les couloirs de l’établissement plongé dans un silence tranquille, la blonde ne faiblissait pas, gardant le combiné du téléphone toujours collé à son oreille. Comme tous les soirs, le numéro gratuit pour les habitants en détresse de Lima était ouvert, leur permettant de venir quérir quelques bons conseils auprès de volontaires aguerris. Ils étaient dix à la Lima’ s P. Association, tous bénévoles. La L.P.A. était un refuge où tout le monde avait sa place. Des réunions y étaient données, des coopératives y étaient organisées entre tout autre évènement mensuel auquel les fondatrices, Emma Pillsbury et Cassandra Hamilton, accordaient une importance singulière. Rien n’était fait au hasard à la L.P.A., tout était tourné vers autrui. Le don de soi, c’était la politique de la maison. Lorsqu’Emma avait proposé à Ecaterina de rejoindre le rang des bénévoles, elle n’avait pas hésité. En revanche, cette politique qu’elle avait d’emblée jugé barbare l’effraya en parfaite introvertie qu’elle était. Elle s’était questionnée. Que devrait-elle donner, qu’était-elle censée faire ? Elle s’était demandé si elle serait à la hauteur de la tache qu’on voulait lui confier. Cat n’était pas habituée à s’ouvrir aux autres, et encore moins aux inconnus. Finalement, cela c'était fait naturellement. La crainte de décevoir Emma avait été plus forte que les réserves qu’elle nourrissait à se dévoiler. Qui plus est, elle avait trouvé en la personne de Madeleine Wild une alliée de choc qui l’avait aidée à prendre confiance et à s’épanouir en tant que bénévole. Désormais, elle se sentait autant à sa place que les neuf autres membres de l’équipe. Elle était même populaire auprès des sans-abri qui venaient profiter du dortoir, mais aussi auprès des membres des réunions de soutien à la gestion de la colère dont elle était l’animatrice. Était-ce à cause de son physique de poupée ou de sa gentillesse, Cat ne savait pas, et elle s’en fichait. Elle était en paix avec ce qu’elle accomplissait quand elle franchissait le seuil des locaux de la L.P.A. Pour une fois qu’elle était fière d’elle et qu’elle était convaincue que ce qu’elle faisait était utile.

Au final, peu importait si les individus employés à venir en aide à leurs concitoyens étaient qualifiés pour prodiguer leurs conseils, tant que les malheureux avaient quelqu’un sur qui compter. Cat aimait cet aspect de l’association, plus encore que l’issue de secours qu’elle offrait à ceux qui n’avaient pas de lit dans lequel dormir. Elle n’était pas la plus à même de donner son avis, c’était un fait qu’elle ne reniait pas, très lucide. Cependant, elle se savait douée pour écouter les autres s’épancher sans les juger. La jeune femme avait également un avantage – si l’on pouvait parler d’un avantage –, c’était qu’elle aussi avait connu la précarité pendant les trois années qu’elle avait passées à Cincinnati. Elle avait vécu dans une chambre de bonne sans fenêtres au neuvième étage d’un immeuble vétuste situé dans le quartier le plus sinistre de Cincinnati. Elle n’avait pas de salle de bain, et devait tous les jours gratter à la porte de sa concierge pour espérer prendre une douche chaude, et avoir le droit à un petit-déjeuner décent, trop souvent composé de bacon qu’elle laissait sur le côté de son assiette avant de se faire gronder par son hôte qui l’obligeait à l’engloutir malgré son végétarisme. Elle enchaînait les services dans des fast-foods douteux quand elle ne posait pas pour le compte d’une boutique de lingerie du centre. Tout ça en ne ratant pas un seul des cours qu’elle suivait à la fac. Trop fière, Cat n’avait pas voulu demander de l’aide à son père ni à sa grand-mère. Elle tenait à démonter qu’elle n’avait besoin de personne pour s’en sortir. Ça avait été une période difficile comme toutes les autres, mais aujourd’hui, elle pouvait se targuer de ne pas être endettée. Elle avait réussi à passer sa licence sans jamais devoir supplier son père de lui envoyer un chèque. Quelque part, elle était fière de ça aussi. Ces trois années l’avaient forgée. Ces moments pénibles qu’elle avait passés dans la chambre du neuvième, Cat s’en servait pour aider les autres. Cela dit, même si elle aimait son travail, ce volontariat n’en était pas moins éprouvant. Il lui était déjà arrivé de tomber sur des cas qui la touchaient plus que d’autres. Quand elle rentrait chez elle, elle ramenait dans ses affaires un bout de l’histoire de la personne qu’elle avait écoutée. Quelques fois, elle avait pleuré en se disant que son propre malheur était insignifiant comparé à celui de ceux qui n’avait même pas de famille sur laquelle se reposer. Elle avait honte d’avoir pensé qu’elle devait être la personne la moins chanceuse de l’univers alors qu’elle avait un travail stable, une maison, un petit-ami, une famille et des amis.

« Je suis heureuse d’avoir pu vous aider. Je serai là aussi demain si vous voulez rappeler. Bien sûr, tout ira bien. Passez une bonne nuit et prenez soin de vous. » Le silence fut perturbé par la voix rauque de la blonde qui raccrocha le téléphone dans un sourire affable. Son oreille gauche était rouge vif, lui picotant atrocement et pour soulager l’engourdissement, elle la frotta avec la paume de sa main. Ça ne l’empêcherait pas néanmoins de savourer l’instant. Ce moment où elle prenait conscience que la demi-heure qu’elle venait de prendre pour écouter une mère de famille débordée ne serait pas vaine. Soupirant de satisfaction, Cat s’appuya contre le dossier de sa chaise avant de vérifier d’une œillade absente l’heure sur l’écran de l’ordinateur. Dans moins d’une minute, elle pourrait rentrer chez elle. C’est en fermant l’écran qu’elle se leva, glissant à deux mains ses cheveux derrière ses oreilles brûlantes. À côté, la voix de Madeleine résonnait dans un murmure débonnaire, caractéristique de sa folie reconnue et assumée. Ecaterina lui attribua un sourire puis alla ramasser ses affaires, vérifiant d’abord les quelques messages qu’elle avait reçus pendant les deux dernières heures sur son téléphone portable. Elle aurait dû s’empresser de vérifier ceux que Gale lui avait envoyés, mais c’est celui de sa boîte vocale qui retint son attention, et portant derechef l’appareil à son oreille la moins chaude, elle fronça expressément les sourcils lorsqu’elle reconnu la voix à l’autre bout du fil « Hé, Ecaterina, hm -- » Elle connaissait peu de personne qui l’appelait par son prénom complet. Seuls sa mère, son frère pour l’agacer et les membres des réunions du lundi soir se risquaient à le prononcer en entier. Cet accent ne lui était pas inconnu non plus : c’était Aaron Guevara. Passée la surprise, Cat boucha son autre oreille avec sa main libre, s’éloignant de quelques pas pour assimiler ce qu’il avait à lui dire en toute intimité. La pause qu’il marqua l’angoissa, il n’allait pas bien.

Aaron était un garçon borné, très charmant au demeurant, qu’elle recevait pendant les réunions de soutien de la L.P.A. Il s’y rendait seulement parce qu’il y était obligé. Des travaux d’intérêt général l’avaient amené jusqu’à l’association et le moins que l’on puisse dire, c’était que leur premier contact n’avait pas été chaleureux. Ecaterina avait craint qu’il ne lui fasse payer son obstination, mais s’en prendre à une fille comme elle ne faisait sûrement pas partie du code d’honneur des machos dont Aaron était le principal auteur. Il était certain que ces réunions étaient inutiles. Il ne voyait pas ce que cela pouvait lui apporter de partager son expérience avec d’autres impulsifs comme lui. Et puis, une réunion tenue par une petite blonde dans son genre ? C’était une plaisanterie, il suffisait de la regarder pour savoir qu’elle ne faisait pas le poids. Il avait raison, dans un sens. Ecaterina ne paraissait pas être celle qui aurait dû être à la tête de ces assemblées hebdomadaires, mais il se trouvait qu’elle était la plus compétente pour se montrer autoritaire et faire se dégonfler une ribambelle de machos persuadés de ne pas avoir besoin d’aide « Je -- tu as dit que je pouvais appeler si j'avais besoin de quelque chose. J'aurai besoin que tu viennes me chercher, s'il te plaît. » Aaron était le seul membre des réunions à qui elle avait donné son numéro personnel. Elle ne savait pas précisément pourquoi. Probablement parce qu’elle sentait qu’il était sincère malgré son sale caractère. Il ne tentait pas de se chercher des excuses ou s’inventer des circonstances atténuantes à la violence contre laquelle il luttait. C’était la première fois qu’il l’appelait. À en juger par le ton de sa voix, il était à deux doigts de craquer. C’était le travail de Cat d’essayer de le faire redescendre et de le calmer. Elle n’avait jamais eu à le faire, elle devrait improviser. Peu importe si elle était fatiguée ou si elle avait peur. Appuyant davantage sur son tragus pour chasser les bruits qui la gênaient, elle entendit le souffle du jeune homme brouiller le haut-parleur, puis il reprit d’une voix métamorphosée par son évidente tentative de rester maître de lui-même « Je suis dans un bar, à Buffton -- Le Nirvana, je crois. Dans les toilettes. C'est à une vingtaine de minutes de Lima. Je -- j’essaie de ne pas m'emporter, d'accord ? Si tu as ce message avant demain matin, est-ce que tu pourrais emporter une trousse de soins avec toi ? Je crois que je me suis cassé le poignet. Et sinon, on se voit lundi soir. Gracias » Cat coupa la communication, tint fermement son téléphone dans sa main pour enfiler sa veste aussi vite, et attrapa son sac qu’elle mit à son épaule. Pour ne pas éveiller les soupçons de Madeleine, elle se dirigea d’un pas aérien vers l’infirmerie. Elle évitait de se poser des questions, sachant qu’elle agirait à reculons si elle se mettait à songer à la gravité probable de la situation. Aaron avait besoin d’elle, point. Sortant le trousseau de clefs de son sac à main, Cat ouvrit la porte et discrètement entra dans la pièce. Elle fureta à l’intérieur, passant en revue chaque recoin, repéra une trousse d’urgence qu’elle attrapa, et qu’elle glissa elle aussi à son épaule. Une seconde après, elle referma la porte pour s’engouffrer à l’extérieur. Elle sentait que quelque chose de grave s’était peut-être passé, avait-elle le temps de prévenir Charlie pour qu’elle ne s’inquiète pas de son retard ? Non, elle n’avait pas le temps. Néanmoins, elle fit une halte à l’entrebâillement du bureau dans lequel Madeleine se trouvait, et qu’elle-même venait de quitter, pour lui dire d’un très ton naturel « Wild, je file. J’ai laissé la retranscription des appels de ce soir sur mon bureau. Tu n’auras qu’à dire à Emma que je les classerai pendant la perm’ de demain soir. Bon courage. », elle fit un pas de côté pour reprendre son chemin, mais revint sur ses pas pour ajouter avec malice « N'en profites pas pour manger tous les cookies dans la salle de pause. », et avant d’être atteinte par le stylo que Madeleine lui lança à travers la pièce, Ecaterina reprit sa route, gardant à l’esprit qu’elle devait se dépêcher. À mi-chemin, elle piqua un sprint pour quitter les lieux plus rapidement.

Le trajet jusqu’à Button se fit paisiblement. La route était dégagée, tout comme le ciel étoilé. Par miracle, sa conduite désastreuse ne fit pas de sienne. Les vitres ouvertes et sa veste reposant sur le siège passager, Cat n’avait même pas pris la peine d’allumer l’autoradio, suivant avec une concentration sans égale les panneaux indicatifs sur son chemin, ses cheveux virevoltants dans l’habitacle et l’air chaud faisant vibrer sa peau. Elle se souvenait d’avoir déjà visité le bar qu’Aaron lui avait indiqué. C’était il y a cinq ans, avec son frère, Dorian. C’était typiquement le genre d’endroit où il la traînait, la sortant de ses devoirs, pour se produire de temps à autre et récolter quelques extra. Les pourboires ne se résumaient qu’à une vingtaine de dollars presque à chaque fois, mais les tickets de boissons gratuites faisaient le bonheur de son aîné. Elle aurait dû prédire que sa consommation astronomique d’alcool durant ces concerts improvisés les aurait menés à l’incident qui l’avait contrainte à quitter Lima. Toutefois, comme Gale lui avait dit une fois, « ce qui est fait est fait ». Elle ne pouvait plus revenir en arrière. Tous les bars se ressemblaient. Ecaterina s’attendait donc à retrouver cette odeur de tabac froid et d’alcool qui s’imprégnait dans les fibres des vêtements même les plus onéreux. Elle tomberait sur des ivrognes qui tenteraient de la faire valser au milieu du bar où les serveuses en petites tenues la jaugeraient, envieuses de ne pas avoir le quart de la classe qu’elle dégageait. Soudain, elle discerna les lumières de la ville au loin, ce qui la fit accélérer, pied au plancher, et bifurquant dans une allée lorsqu’elle distingua l’enseigne lumineuse du bar, Ecaterina se gara au milieu de deux places près de l’entrée. Coupant le moteur, elle s’octroya une pause pour réfléchir un instant. Dans quel état trouverait-elle Aaron ? Il lui avait dit sans détour qu’il pensait avoir le poignet cassé, était-ce sa seule blessure ? Se mordant les lèvres, Cat attrapa son sac et la trousse de secours qu’elle passa en bandoulière et remonta les vitres avant de descendre, bouclant les portières d’un geste souple de la main. Sans se torturer l’esprit plus longtemps, elle entra dans le bar.

Comme elle l’avait prédit, l’odeur familière de tabac lui fit plisser les paupières. C’était soir de match et le bar était bondé. Les mâles rugissaient devant les exploits de leur équipe préférée et les habitués du vendredi soir consommaient leur boisson sans chercher à se faire remarquer. Il y avait peu de femmes dans cet endroit, elles n’étaient ici que pour servir, ce constat la fit sourire par dépit et elle s’avança vers le bar à la recherche d’une information précise. Les regards se tournèrent vers elle, elle remarqua que certains des clients tapotèrent brusquement sur l’épaule de leur copain de beuverie en la pointant du doigt. Avec sa trousse de secours pendouillant près de sa cuisse nue, elle ne se fondait pas dans la masse. Du moins, c’est ce qu’elle espérait, et tout à coup, elle se maudit de ne pas avoir pensé à mettre de nouveau sa veste ou à passer chez elle pour enfiler un jean. Faisant fi des œillades insistantes dans sa direction, elle se pencha précautionneusement sur le bar et calmement, demanda au tenancier « Les toilettes ? » L’homme en question se tourna vers la blonde pour la toiser, arrêtant lourdement ses paupières à demi-closes sur son décolleté. Il avait dû être très séduisant dans sa jeunesse, il avait de beaux yeux noisette qu’elle distinguait par intermittence, grâce aux néons rougeâtres de son bar. Mais maintenant, ce n’était plus qu’un gros tas de muscles flasques et un visage cerné par des nuits d’insomnies qu’il passait en compagnie d’une bouteille. Cat se surprit à avoir de la compassion pour lui malgré son regard libidineux et ses lèvres retroussées. Il se pencha à son tour pour inspecter ses chevilles cette fois, puis vint s’accouder juste devant elle. Si près qu’elle pouvait sentir son haleine et son souffle lui caresser le visage. Il appuya son menton dans la paume ouverte de sa main, et fit mine de battre des cils en affrontant le regard bleu clair de la blonde qui l’avait questionnée « Et j’ai le droit à quoi en échange, mon cœur ? » Cat esquissa un petit sourire, lança un regard complice au client accoté au comptoir avant d’incliner la tête, reportant son attention sur l’homme, et de murmurer « Mon plus beau sourire ? » Elle n’était pas naïve au point de penser que sa tentative désespérée fonctionnerait. Le rire gras de l’homme lui confirma d’ailleurs qu’elle n’obtiendrait rien de plus. Aussi, quand il coula un regard au sac de la blonde et tapa fermement sur le comptoir, cette dernière en sortit quelques billets verts qu’elle déposa sur le bar, les glissant lentement vers lui pour qu’il les récupère. Bingo. Il empoigna les billets, les compta, satisfait et les plia pour les mettre dans la poche de son pantalon trop étroit au niveau de la taille. Enfin, il désigna de l’index une porte dans le fond. Tendant la main pour venir gentiment tapoter la joue de l’homme, il la gratifia d’un grand sourire benêt, fermant les yeux pour savourer ce contact qu’il ne devait pas avoir eu depuis longtemps, du moins, avec une femme de l’acabit de Cat « Merci. », elle tourna les talons pour rejoindre les toilettes.

Sur le chemin, elle se prépara mentalement à retrouver Aaron couvert de sang. C’était une vision pessimiste de la situation, mais les histoires qu’elle entendait lors des réunions à l’association lui avaient appris qu’il ne fallait pas sous-estimer la puissance des coups de poing attribués par un homme. Devant la porte des toilettes, le premier réflexe de Cat fut de pousser la porte d’un coup de hanche, mais elle était fermée. Haussant les sourcils, la jeune femme comprit alors qu’Aaron devait souffrir. Pas à cause de la douleur physique causée par les coups qu’il avait reçus ou donnés, mais à cause de la retenue dont il faisait preuve pour ne pas craquer. S’humectant les lèvres en passant doucement sa langue dessus, elle remonta ses sacs qui commençaient à peser sur son épaule, et approcha ses lèvres du mince interstice qu’elle distinguait entre le mur et la porte, puis avec beaucoup de douceur, elle dit « Aaron ? C’est moi. J’ai la trousse, ouvre la porte. »
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06. Breathe Me Empty
MessageSujet: Re: 06. Breathe Me   06. Breathe Me EmptySam 12 Jan - 19:39

Aaron s'adossa doucement au mur carrelé, le front perlé de sueur. Il ignora superbement les coups que l'on portait itérativement contre la porte verrouillée, à grand renfort d'invectives sèches et déplacées qui ne l'atteignirent pas. Il appuya doucement sa pommette brûlante au sommet de ses genoux regroupés et se perdit dans l'attente, les pupilles plantées sur son écran de téléphone désespérément inactif. La jeune femme avait-elle pris connaissance de son appel à l'aide ? Il inspira trop rapidement en sentant sa fréquence cardiaque croître subitement et, durant une brève seconde, il eût envie de se frapper la tête contre un mur. Il était stupide. Il n'avait jamais suivi beaucoup de règles. Toutefois, il avait toujours mis un point d'honneur à ne jamais dépendre de quiconque et, à ce que jamais personne n'ait à dépendre de lui. Il se connaissait instable et indubitablement dominé par ses pulsions. Bien plus que quiconque ne pourrait le soupçonner. Certes, il était très mal au point et une main amicale serait la bienvenue. Néanmoins, s'il avait pris le temps de réfléchir quelques minutes supplémentaires, jamais il n'aurait demandé à Ecaterina Robertson de voler à sa rescousse. Du moins, pas avant d'avoir réussi à quitter l'établissement dans la plus grande discrétion et, à mettre une distance satisfaisante entre le groupe de routiers et, lui. Ce n'était ni l'heure, ni l'endroit pour une jolie blonde aux sourires renversants et, à la paire de jambes hautement appétissantes. Elle risquait de s'attirer de sérieux ennuis par sa faute.
Qu'importe finalement, si elle ne l'avait pas intercepté. Peut-être devrait-il y discerner un signe. Oui, peut-être l'avait-il tout simplement mérité. Après tout, ne récoltons-nous pas ce que l'on sème ? Et puis, ce n'était pas la première fois qu'il se retrouvait dans ce genre de situation précaire. Il mentirait s'il prétendait n'avoir jamais cherché à en être. Toutefois, c'était très différent, aujourd'hui. Il le sentait très clairement dans ses os. La sensation d'accablement qui, autrefois, le poussait inexplicablement en avant, faisait désormais poids sur ses épaules, à leur point de rupture. Insoutenable. Il se sentait à bout de forces. Aaron poussa un long soupir, souda ses paupières et se focalisa sur la douleur qui paralysait son bras droit. La douleur. Il en avait fait sa compagne quotidienne depuis l'accident qui avait ôté la vie à son père. C'était l'unique chose réelle qu'il pouvait ressentir à grande ampleur. La souffrance physique s'était invitée peu après. Parce qu'il s'était cherché le moyen de savoir s'il pouvait toujours éprouver quelque chose de différent. Parce qu'elle était nettement plus facile à accueillir que celle qui étouffait sa poitrine lorsqu'il songeait à l'absent toujours présent dans son esprit en deuil. C'était sans doute pourquoi il avait commencé à la provoquer de plus en plus régulièrement au fil des ans, jusqu'à s'engager à peine perdue dans des combats de rues. Pour annihiler, ne serait-ce qu'un instant, la peine et la culpabilité dévorante qui l'assassinait à petit feu, sans jamais porter le coup de grâce.
Parfois, il en arrivait à s'interroger sur les émotions qui appartenaient aux personnes heureuses, lorsqu'elles se levaient au beau milieu de la matinée, avec pour seules préoccupations, le devoir d'appréhender une nouvelle journée en toute simplicité. Souvent, il nourrissait le désir de se lever lui aussi et, de ne plus se sentir aussi misérable. Il souhaitait réussir à se rappeler le sentiment qui était le sien, lorsqu'il pouvait encore s'éveiller au sein d'une famille complète et soudée. Finalement, c'était sans doute la chose la plus douloureuse dans les étapes du deuil. Se montrer incapable de se remémorer ce que l'on ressentait avant que ça n'arrive. Le meilleur moyen d'alimenter sa frustration et, par extension, son tempérament impulsif.

L'assoupissement commença à le prendre d'assaut. Sa tête dodelina lentement sur le côté et il perdit toute notion du temps. Une minute se serait écoulée, peut-être soixante. Il n'aurait pas été capable de discerner la moindre différence. Il s'accrocha à sa lucidité avec acharnement, très peu désireux d'être appréhendé dans les bras de Morphée, aussi vulnérable qu'un nourrisson. Les coups à la porte avaient cessé, lui cédant un répit inespéré. Ses assaillants avaient-ils déserté le Nirvana ? Il en doutait fortement mais de là où il se trouvait, il ne pouvait entretenir aucune certitude. Il détestait ça. Se terrer derrière une porte en attendant que quelqu'un lui vienne en aide, ça ne lui ressemblait pas. Et s'il désirait sortir de ces toilettes, il le ferait. Malheureusement, il ne connaissait aucune manière diplomate de le faire. Et s'il brûlait de pouvoir débrider son agressivité sur ses agresseurs jusqu'à s'en briser chaque os du bras, il n'avait aucun droit de le faire. Un goût désagréablement métallique sur la langue, il déglutit une nouvelle fois, tremblant de tous ses membres. Il attendit encore, écoutant la clameur festive qui régnait de l'autre côté du couloir.
Il sursauta violemment lorsque la poignée de la porte s'actionna dans le vide. Elle ne bougea pas d'un millimètre, malgré l'insistance de celui qui se trouvait de l'autre côté. Il cligna les paupières, à la fois réconforté par cette constatation et, anxieux à l'idée qu'un responsable se soit déplacé pour lui ordonner de quitter les lieux. Il n'était pas en état de conduire. « Aaron ? C’est moi. J’ai la trousse, ouvre la porte. » déclara une voix féminine, aux accents très doux. Il n'eût aucune difficulté à l'identifier et mentalement, il lui adressa toutes les bénédictions qu'il connaissait en espagnol. Un soupir de soulagement étranglé quitta ses lèvres ... Immédiatement coupé d'une exclamation aussi plaintive que douloureuse. Machinalement, il s'était appuyé sur sa main droite pour se redresser. Il retomba en arrière, sentant les larmes lui monter aux yeux. Le cubain examina sommairement sa blessure et, une grimace fendit son visage. Son poignet avait doublé de volume de manière inquiétante. Il inspira profondément en espérant faire refluer les ondes de douleurs sourdes qui remontaient jusqu'à son coude. « J'arrive » bredouilla-t-il d'une voix enrouée, en se mettant sur pied tant bien que mal. Il affronta subitement son reflet dans le miroir crasseux fixé au-dessus des lavabos. Il n'y avait pas prêté attention plus tôt, mais à présent ... C'était sans doute pour le mieux, qu'il ne fréquenta plus Santana actuellement. Au moins n'aurait-il pas à se justifier auprès d'elle dans les jours à venir et, aurait largement le temps de cicatriser. Il chassa distraitement la cendre froide qui avait percé un trou dans son débardeur, avant de faire couler l'eau du robinet. Elle était glacée. Il n'avait aucune envie d'effrayer la jeune femme. Il s'aspergea copieusement le visage de sa main valide, chassant les traces de sang séché qui perlaient ses lèvres et son menton, avant de s'occuper de son membre blessé. C'était tout. Elle n'aurait pas l'occasion d'observer les les hématomes en voie de cicatrisation qui s'étendaient sur son torse, vestiges de sa précédente altercation ; ni les marques qu'il venait de récolter grâce au Sudiste. Pour une chose, il pouvait le féliciter d'avoir majoritairement frappé où les traces de coups n'étaient pas visibles.

Le panneau s'écarta et il découvrit la silhouette élancée de la jeune femme, vêtue d'une robe élégante s'arrêtant à mi-cuisses. Il la détailla durant quelques fractions de seconde, surpris par ce choix vestimentaire, avant de l'attirer à l'intérieur de la pièce et de claquer à nouveau la porte derrière elle. Le déclic que le verrou produit lorsqu'il s'enclencha le rassura et, il put faire face à sa marraine. Durant deux poignées de secondes, il resta immobile sans rien dire. Puis, finalement il présenta précautionneusement son poignet à Ecaterina : « Je ne savais pas quoi faire » lâcha-t-il, à voix basse, évoquant à la fois son état physique et le pourquoi de cet appel nocturne. Il ne savait pas exactement pourquoi il baissait subitement d'un ton ; seulement, il éprouvait un profond sentiment de mal aise. C'était une chose que d'appeler Ecaterina pour qu'elle vienne le chercher. C'en était une autre que d'affronter sa présence dans un état qu'elle ne lui avait encore jamais connu au cours de leurs précédentes entrevues. Peut-être, faudrait-il commencer par ne plus l'appréhender comme une adversaire, songea-t-il distraitement. Il s'était présenté aux réunions de la LPA, sous la contrainte. Et, il lui avait immédiatement opposé un mur de machisme, de sarcasmes et d'indifférence face aux efforts qu'elle déployait pour l'assister. Il l'avait associée aux figures d'autorité qu'il méprisait et, avait reporté toute son irritation sur elle. Il n'avait jamais compris ce qui la poussait à ne pas baisser les bras, face un individu aussi peu réceptif à ses tentatives. « I snapped », avoua-t-il inutilement, honteux. C'était ce dont il s'agissait. Son incapacité à contrôler son impulsivité était sa plus grande humiliation.
« Tu penses que je suis une mauvaise personne ? » l'interrogea-t-il, subitement, tandis qu'elle s'occupait de sa main. Il planta ses pupilles ébène dans les siennes, cherchant à discerner une réponse concrète et sincère. Ce n'était peut-être pas le moment idéal pour s'ouvrir enfin à elle ; toutefois, il savait qu'il se refermerait comme une huître une fois sorti de cette pièce. Il refuserait de parler devant les autres. Et, ils seraient de retour à la case départ.


Dernière édition par Aaron J. Guevara le Mar 12 Fév - 22:04, édité 1 fois
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Ecaterina S. Robertson
Ecaterina S. Robertson
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Occupation : Bibliothécaire à l'OSU-Lima, auteure publiée, membre des Awesome Voices
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06. Breathe Me Empty
MessageSujet: Re: 06. Breathe Me   06. Breathe Me EmptyMar 15 Jan - 18:51

Devant la porte close des toilettes, ses doigts resserrés sur la poignée qu’elle actionna, anxieuse, Cat sentit son cœur manquer une pulsation au moment où elle entendit Aaron se manifester. Sa voix était étouffée par l’épaisse cloison qui les séparait, mais Ecaterina la trouva calme. Ça ne la rassura pas, néanmoins. Sur le qui-vive, elle s’empêcha de sombrer dans des pensées inutiles, craignant que si elle se mettait à analyser la situation, son talent singulier pour la dérobade reprendrait le dessus. Car il s’avérait que, malgré les apparences, elle était loin d’être intrépide. Prendre la voiture au beau milieu de la nuit pour une destination inconnue sans avoir au préalable prévenu Gale, ça ne lui ressemblait plus et après une œillade fureteuse dans la salle mal éclairée, s’arrêtant sur un groupe d’hommes costauds aux regards concupiscents, elle se dit qu’elle avait peut-être fait preuve de trop d’assurance en cédant à son impulsion. Qui savait ce qui pourrait lui arriver dans cet endroit, accoutrée d’une robe d’été qui convenait pour de chaudes journées, mais qui serait pris comme de l’incitation pure dans une virée imprévue dans un bar rempli de misogynes qui se pourléchaient déjà les babines en laissant leur imagination vagabonder, leurs pupilles brouillées par l’alcool suivant le galbe plaisant de ses gambettes dénudées. Laissant le bleu clair de ses yeux balayer la salle enfumée, il rencontra celui plus sombre du jeune homme toujours accoudé au bar. Il lui adressa un signe de tête, abattu par la bestialité de ces hommes qui grognaient en la gratifiant de propos imagés peu classieux, lui proposant de venir les rejoindre pour s’amuser un peu. Cat répondit au garçon par un petit sourire entendu, se demandant ce qui pouvait bien l’amener par ici s’il n’approuvait pas leur comportement. Mais un bruit sourd de chaise raclant le parquet la fit sursauter et elle se détourna de ses interrogations en même temps que son regard se dispersa au centre du bar.

Elle n’avait pas peur. Nonobstant sa petite carrure, Ecaterina savait déjà se défendre en temps normal. De fait, quand son appréhension était sollicitée, son éloquence était décuplée. Sa verve, ses regards hautains étaient plus efficaces que n’importe quoi, il n’y avait qu’à voir la façon dont elle faisait flancher les curieux qui continuaient de la détailler de loin. Qu’est-ce qu’une fille comme elle faisait dans un bar miteux, devaient-ils se demander ? Elle faisait son travail. Elle prenait sur elle, chassant les dizaines de joutes verbales machos que lui avait attribuées Aaron depuis son arrivée à l’association, car il avait besoin d’elle et que c’était son job. Elle ne faisait pas ça par vanité. Elle ne voulait pas récolter les lauriers, ni recevoir de remerciements, Ecaterina se fichait de la gloire. Elle le faisait parce que dans le passé, elle avait été seule de nombreuses fois alors qu’elle avait besoin d’une épaule sur laquelle se reposer. Elle en était persuadée, si elle avait été moins seule, sa vie aurait été différente aujourd’hui et la plupart de ses erreurs n’auraient jamais été commises. Même à son pire ennemi Cat ne lui souhaitait pas de connaître la solitude. Si à l’époque elle pensait s’y complaire et bien la gérer, elle avait tout faux : la solitude, encore plus que la culpabilité, était un sentiment qu’elle ne voulait plus jamais ressentir. Si elle pouvait faire comprendre à Aaron que demander de l’aide à quelqu’un ce n’était pas honteux, elle ne se gênerait pas pour le faire. Ecaterina était têtue, et visiblement, c’était payant puisque pour la première fois depuis des semaines, Aaron était venu vers elle.

Enfin, la porte s’ouvrit. La lumière à l’intérieur s’échappa du panneau, éclairant brusquement la silhouette de Cat qui rassembla ses idées en tournant la tête vers la lueur. Elle confronta directement le regard ténébreux et grave d’Aaron, puis il l’attira à l’intérieur, ne lui laissant pas le temps de lire les expressions sur son visage ou de prendre connaissance de son état. Toutefois, Ecaterina lui dit, toujours avec douceur « Je suis désolée, Aaron. J’ai fait aussi vite que j’ai pu. » Il referma le verrou prestement. Cat put alors constater de l’état d’affolement dans lequel il se trouvait en réalité. Dans une rétrospective floue, elle se souvenait de ne pas avoir vu de clients blessés dans le bar. Son assaillant (ou, elle espérait se tromper, sa victime) devait être parti. Ou bien, Aaron était le seul à avoir été touché. L’estomac de la blonde se contracta, soudain angoissée à l’idée que son agresseur fut plus grand, plus fort, plus violent encore que ne l’était déjà Aaron. S’avançant lentement près des lavabos crasseux, Ecaterina ne se laissa pas distraire par leurs reflets dans le miroir. Elle posa son sac à main et la trousse de soins sur le rebord, en dézippa la fermeture éclair pour faire l’inventaire de ce qu’elle avait à sa disposition ; des compresses stériles, de l’antiseptique, du sparadrap, des comprimés anti-inflammatoires, du filet tubulaire, des ciseaux, une lampe de poche, des bandes en coton, des pansements, une petite bouteille d’eau, de l’arnica et aussi bizarre que cela puisse paraître, un kit de couture. Elle avait de quoi faire, ça la rassura et elle retourna son attention vers Aaron qui se mit face à elle, mal en point. Cat eut enfin le loisir de s’enquérir de son état. Il avait probablement fait un brin de toilette avant de lui ouvrir la porte, son visage était humide. Sa blessure à la lèvre recommençait à saigner, il ne s’y était pas bien pris et fronçant les sourcils de douleur, serrant les dents en s’approchant de lui, elle se risqua à lui tourner délicatement la tête quand il reprit la parole. Ecaterina lui plaça le visage de façon à ce qu’il la regarde droit dans les yeux malgré leur flagrante différence de taille « Je suis là maintenant, tu as fait ce qu’il fallait. Montre-moi ce poignet. » La blonde noua alors ses longs cheveux au-dessus de sa tête avec un bracelet qu’elle portait à son poignet, tritura sa boucle d’oreille droite en appréhendant la vision de la blessure et lorsqu’Aaron lui présenta la bête, elle cligna plusieurs fois des paupières, tentant de garder tout son calme – ce qu’elle parvint à faire avec talent. Elle n’avait pas besoin d’être médecin pour poser un diagnostic, l’angle qu’il formait ne prédisait rien de bon. Pinçant les lèvres, elle le prit précautionneusement avec ses doigts et soupira en coulant un regard abattu à sa trousse de secours. Ce dont il avait besoin, c’était de passer des radios. Toutefois, consentant toujours à l’aider, elle le regarda de nouveau et sourit pour le rassurer, attrapant une bande en coton derrière elle « Je vais m’en occuper, ça va aller. »

Ça devait être difficile pour Aaron, Cat n’osait imaginer toutes les idées qui lui étaient passées par la tête et quand il reprit la parole, elle murmura de très doux « Shhh. » et se surprit à vouloir le rassurer. Comme elle l’aurait fait avec un proche. Comme elle l’avait déjà fait avec Dorian quand il avait un peu trop bu et qu’elle était obligée de le glisser dans son lit pour éviter qu’il ne traîne sa carcasse saoule jusqu’à sa chambre à coucher. S’étant assise sur le rebord du lavabo pour avoir une vue d’ensemble sur la main du jeune homme, Cat banda son poignet lentement, ne serrant pas trop le tissu pour ne pas le faire souffrir, ni comprimer la fracture : sa main devait juste être soutenue. Elle insisterait plus tard pour l’emmener voir un médecin, mais pour l’heure, elle sentait qu’il ne serait pas d’accord, et elle savait pourquoi. Se mordant la lèvre en suivant des yeux le trajet de ses doigts habiles déroulant le coton, Ecaterina entrouvrit la bouche pour lui demander ce qu’il s’était passé exactement, mais Aaron la prit de court. Suite à sa question, elle releva la tête dans un petit sourire affable, un tantinet surprise « Si tu veux vraiment mon avis, le fait que tu te poses la question est la preuve que tu n’en es pas une. » Elle croisa les chevilles, reportant son attention sur sa main et continua en souriant davantage « En général, les gens mauvais ne se demandent pas s’ils le sont. Et puis, ils se fichent des autres, ils n’ont pas de conscience. » Ecaterina pinça les lèvres, glissa un morceau de la bande sous l’amas que formait le bandage, pivota sur ses hanches pour prendre le rouleau de sparadrap et en découpa quelques morceaux qu’elle colla tout d’abord sur ses jambes, la tête toujours courbée « Mais puisque que tu me le demandes, non. Je ne pense pas que tu sois une mauvaise personne, au contraire. Tu as juste besoin qu’on t’aide et ça tombe bien, » Elle colla cette fois les sparadraps sur la bande en coton, releva les pupilles pour affronter celles d’Aaron « Je suis là pour ça. » Les collants étant bien placés, Cat défit la ceinture en tissu souple de sa jolie robe pour venir la passer autour du cou du jeune homme. Elle se pencha pour faire un nœud costaud au niveau de sa nuque, lui attrapa sa main qu’elle glissa dans l’anneau, espérant que cette position diminuerait la douleur et n’aggraverait pas sa fracture. Perdant peu à peu son sourire, elle replaça correctement l’écharpe de fortune autour du cou d’Aaron et lui chuchota, faussement taquine « Les fleurs te vont bien au teint, bonito. », puis elle soupira en se redressant, souriant de nouveau, toujours perchée sur le rebord du lavabo.

Ecaterina avait envie de lui poser des questions, mais elle préférait d’abord le soigner et ne pas rompre cet élan de confiance soudaine qu’elle percevait dans sa façon de la regarder. De toute façon, ils seraient ensemble pour un moment, au moins le temps du trajet au retour, il était certain qu’Aaron ne pouvait pas conduire. Elle estimait aussi que prendre un ton grave ne lui rendrait pas service, voilà pourquoi elle tâchait de garder le sourire. Soufflant sur une mèche blonde qui barrait son front recouvert d’une fine pellicule de sueur, Cat fit claquer les paumes de ses mains sur ses cuisses avant de descendre du rebord du lavabo pour prendre la petite bouteille d’eau dans la trousse de secours et détacher un comprimé anti-inflammatoire qu’elle déposa dans la paume de la main valide d’Aaron. Puis elle déboucha la bouteille, la lui tendit en disant « Allez, cul sec. » Son regard s’arrêta sur le sang coagulé au coin de sa bouche « Tu pourras garder la bouteille, c’est cadeau. » Grimaçant en fronçant le nez et désignant du menton sa bouche abîmée, Cat ajouta « C’est douloureux ? »
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06. Breathe Me Empty
MessageSujet: Re: 06. Breathe Me   06. Breathe Me EmptyMer 13 Fév - 19:14

En seulement quelques instants, la présence d'Ecaterina réussit à le reconnecter à une réalité qui l'avait abandonné depuis plusieurs dizaines de minutes — si ce n'est plusieurs semaines, plusieurs mois ou plusieurs années.
Le nœud qui obstruait sa gorge, associé à la masse qui lui opprimait la poitrine — hachant impitoyablement chacune de ses maigres inspirations — se dissipèrent graduellement dans la pièce, se retirant comme à regrets, au contact de l'aura de douceur brute émanant de la jeune femme. Et si ses pupilles ébène n'étaient pas en mesure de la discerner directement, il pouvait toutefois l'éprouver clairement dans le timbre délicat de sa voix, dans la lenteur mesurée de ses gestes, dans la parenthèse discrète que dessinait artistiquement ses minces sourires les plus réconfortants. En réalité, le simple fait qu'elle se tienne en face de lui en cet instant même — malgré l'heure tardive, la nature des lieux et sa précédente attitude des plus récalcitrantes — et non au bout d'une ligne de téléphone, lui assurait une sédition complète.
Il souffla un 'merci' éraillé lorsqu'elle commença à prendre la situation en main, allégeant ses épaules d'un fardeau qu'il n'était pas en mesure de supporter actuellement. Il avait seulement besoin de se laisser prendre en charge. La tension qui bandait ses muscles à l'extrême abdiqua à son tour face à l'atmosphère débonnaire que la bénévole avait emportée avec elle. Cette première céda place à une vertigineuse sensation de vide. Et il connaissait cet abîme ! Ô, il connaissait cet abîme ! Il en avait sondé les moindres tréfonds durant des semaines depuis qu'il avait pris conscience de son existence très proche. Il avait fallu que ses remparts s'effondrent devant Santana, pour qu'il se découvre concrètement au point de chute. Il se demandait si la chute serait longue. Parfois, il se représentait un gouffre sans fond pour illustrer la métaphore ; et cet aspect moulé par son imagination lui suscitait un frisson d'effroi.
Aaron pinça douloureusement les lèvres tout en s'appliquant à retrouver calme et fréquence respiratoire correcte. Cependant, il savait qu'encore une fois, il avait cédé à la panique. Parce que finalement, c'était ce dont il s'agissait. L'angoisse de ne pas comprendre ; de perdre le contrôle de ses émotions ; de débrider cette violence incommensurable dont il se savait désormais capable et pire encore, de ne plus se reconnaître. Il détestait son Impulsivité, avec un grand I. Il aurait souhaité pouvoir associer la responsabilité qui en découlant à quelqu'un, ou quelque chose d'autre. Comme les enfants qui accusent le chat quant à la tâche qu'ils ont formée sur le tapis du salon. Il avait besoin de s'en distancer un maximum. Et vous penseriez sans doute qu'à son âge et, dans ces circonstances, ce serait une attitude assez creepy. Mais croyez-le, il était bien pire de savoir que ce comportement lui appartenait, le contrôlait et le caractérisait. Il n'avait pas toujours été un homme dominé par ses pulsions, comme il l'était aujourd'hui. Il se rappelait même assez aisément l'enfant doux qu'il était lorsqu'il avait émigré aux États-Unis, une dizaine d'années plus tôt. 'El tio' qui apprenait à parler anglais en jouant des claquettes sous la supervision de Lou. L'Insouciance incarnée, avec un grand I, elle aussi. Il n'était plus 'el tio' et parfois il se surprenait à y songer comme à un petit frère disparu. Qu'aurait-il donné pour absoudre les mauvaises expériences passées ? Pour ne plus se laisser aussi facilement surprendre par sa culpabilité, sa honte et sa colère intarissables ? Et pourtant, depuis le temps qu'elles le suivaient aussi fidèlement que son ombre, il aurait dû s'être accoutumé à les ressentir, à les porter dans son cœur et à les réprimer efficacement, comme n'importe quel être humain normalement constitué. Ainsi, il pourrait mettre fin à l'Impulsivité ; et n'aurait plus à affronter cette effroyable crise de conscience post-agression. Cependant, c'était une chose qu'il peinait à maîtriser lorsqu'il se retrouvait seul en face à face avec ses démons les plus insidieux. Et tant qu'une présence paisible l'accompagnerait, il n'aurait pas à s'apitoyer sur l'homme méconnaissable qu'il était devenu.
Aaron lui présenta son membre blessé avec la docilité d'un enfant fautif. Le chuchotement de sa voix l'éloigna une nouvelle fois des abysses de son trouble et, une onde de chaleur monta lentement dans sa poitrine. Il profita de quelques fractions de seconde pour détailler son visage avec une attention inédite, tandis qu'elle cherchait bandages et antiseptiques dans sa trousse de soins. Un menton aux angles souples, une peau nacrée au grain fin et deux pupilles d'un azur éclatant. Il ne comprenait pas. Comment réussissait-elle à effacer l'ardoise ainsi ? À se montrer aussi bien disposée à son propos, lorsqu'il n'avait été qu'un trouble-fête depuis le début de leurs séances ? Peut-être appartenait-elle à ce genre de personne bien exceptionnelle qui ne se laisse pas guider par leurs rancunes? Qui réussissent à dissocier correctement les évènements des uns et des autres. Peut-être avait-elle remarqué quelque chose qui lui avait échappé. Et peut-être n'était-elle qu'une simple bénévole au LPA. Toutefois, il était conscient que 'n'importe qui' — qu'il travaille à l'Association, ou non — n'aurait pas réalisé le déplacement au beau milieu de la nuit. Il se sentit soudainement très proche d'elle – en confiance. Il aurait sans doute été incapable de mettre des mots là-dessus ; il savait seulement que les obstacles qu'il avait sciemment placés entre ses confidences les plus intimes et elle, semblaient s'être résorbés.

La question lui échappa avant même qu'il n'ait pu songer à la retenir. Mais qu'importe finalement. Il avait seulement besoin d'une réponse sincère – aussi étrange puisse-t-il apparaître en cet instant précis. Bien qu'elle fît preuve d'une délicatesse exemplaire, il réprima très difficilement une grimace de douleur que le contact de la bande lui inspira. Il s'acharna à en faire abstraction et, serra vigoureusement les dents – si bien que ses mâchoires ne tardèrent pas à saillirent de chaque côté de son visage angulaire. Ses pupilles suivirent attentivement ses gestes tandis qu'elle découpait plusieurs morceaux de sparadrap avec application. Sa réponse l'ébranla. Une digue céda dans sa poitrine et il sentit une vague de soulagement déferler sur lui à toute allure. Il n'était pas foncièrement mauvais. Il n'était pas foncièrement mauvais. Il avait besoin d'aide. Oui, d'aide ! Une aide qu'elle lui avait déjà proposée à maintes reprises par le passé et qu'il avait inconsidérément jetée aux ordures. Quel idiot ! Il ne savait pas pourquoi il se sentait tout aussi chamboulé par l'opinion d'Ecaterina. Sans doute était-il un peu à fleur de peau. Il se surprit à comparer son état à cette sensation de désagréables picotements, vous savez, lorsque vous désinfectez une plaie ouverte. C'est douloureux sur le moment et on repousse l'importun qui a décrété qu'un coup d'alcool à 90 serait bénéfique. On râle, on grogne, c'est douloureux. Et puis, ça brûle sans doute un peu, d'une douce chaleur de plus en plus apaisante ; mais on sait qu'ensuite, les sentiers de la cicatrisation sont à notre portée. Elle déboucla la ceinture de sa robe pour venir la nouer autour de son cou et, réussir à placer son bras immobilisé en travers de la boucle formée. Il réussit à esquisser son premier sourire de la soirée, maladroitement, à sa tentative d'humour. Mais, il ne décrocha pas un seul mot.

Il n'avait jamais été particulièrement bavard. Et il savait que faire la conversation serait nécessaire dans la prochaine poignée de minutes, ne serait-ce que pour tirer profit du sentiment de confiance qu'elle était parvenue à instaurer – volontairement, ou non. Il observa le comprimé qu'elle déposa dans sa paue avec hésitation. Il n'avait jamais été très adepte des médicaments non plus. Généralement, il se contentait de subir ses maux en attendant qu'ils passent leur chemin et puis c'est tout. Il haussa imperceptiblement les épaules avant de le placer sur sa langue et d'accepter la bouteille qu'elle lui offrit généreusement. Il l'avala prestement et continua de boire jusqu'à ce que sa soif fût étanchée et que le goût du sang se soit dilué. Aaron surprit la grimace de la jeune femme et arqua un sourcil interrogateur : « C’est douloureux ? » lui demanda-t-elle en désignant sa lèvre scindée d'où s'échappait un filet de sang. Il haussa une épaule, laissant son membre invalide au repos : « Honnêtement, j'ai connu pire » répondit-il laconiquement. Il passa devant elle et se pencha au-dessus du lavabo afin d'examiner à nouveau son image, cherchant les plaies qui lui auraient échappé lors de sa première et brève inspection. Rien d'autre, à priori. Il effaça les traces d'hémoglobines avec application, dévisageant Ecaterina dans le miroir : « Tu devrais voir l'autre type » lâcha-t-il avec un détachement fictif, dans une tentative pour meubler la conversation et détendre l'atmosphère. Il massa discrètement ses côtes en inspirant le plus profondément possible. Il n'éprouva guère plus qu'une sensation de froissement, peu douloureuse. Il s'était déjà blessé aux flancs le mois précédent. Il devrait sans doute faire plus attention et éviter les charges trop lourdes dans les prochains jours. Il roula des épaules, mettant en valeur le tatouage de son omoplate droite, testant les autres parties de son anatomie sans ressentir d'autres gènes. « Je ne l'ai pas démonté, si c'est ce que tu penses » reprit-il en lui faisant de nouveau face. Il baissa les yeux vers le sol et se glissa à son tour sur le lavabo, les pieds dans le vide. « Je n'étais même pas là pour ça. Je prenais juste une courte pause avant de reprendre la route jusqu'à Lima. Et puis ce type m'a littéralement sauté dessus. » reconstitua-t-il avec concision. Le cubain releva le menton pour la consulter. Le croirait-elle ? Ou penserait-elle, qu'une fois encore, il était à l'origine de la bagarre ? Il s'humecta machinalement les lèvres avant de reprendre : « Je lui ai manqué de respect sur l'Autoroute — quoi ? le gars conduisait comme un fou furieux ! — Mais je ne pensais pas le recroiser de sitôt. Il n'a pas apprécié, j'imagine. Je me suis emporté. ».
Il s'accorda une nouvelle pause en passant son pouce sur le plat de la ceinture qui lui barrait la poitrine. « Je te promets que je n'ai rien déclenché. Tu me crois, n'est-ce pas ? ». Il planta son regard dans le sien.
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Ecaterina S. Robertson
Ecaterina S. Robertson
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Occupation : Bibliothécaire à l'OSU-Lima, auteure publiée, membre des Awesome Voices
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Statut : Célibataire, "collabore" avec Tate Bartowski
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06. Breathe Me Empty
MessageSujet: Re: 06. Breathe Me   06. Breathe Me EmptyLun 18 Fév - 20:46

Même si l’atmosphère dans les toilettes était relativement sereine, on percevait à l’extérieur des grésillements forts désagréables. Une chaise qui racle le sol, un rugissement agressif, le son de l’écran plat accroché au-dessus du comptoir et des rires, beaucoup de rires, qui adoucissaient l’ensemble mais qui ne rendait pas le vacarme environnant plus supportable néanmoins. Ces rires n’avaient rien de naturel, ils étaient en partie suggérés par l’excès d’alcool ingurgité par les clients affalés sur les banquettes. Ça n’étonnait pas Cat qu’autant de bagarres éclataient dans les bars quand on voyait l’état d’ébriété des habitués, mais qui était-elle pour y apporter son jugement ? À côté de ça, personne ne semblait s’inquiéter du garçon qui avait été pris à partie par un autre client, c’était la routine. Ne pas être témoin d’une altercation, ça, ç’aurait été le plus étonnant. Depuis qu’elle était arrivée, Ecaterina n’avait pas entendu un seul des clients présents dans le bar venir taper contre le panneau pour s’assurer que tout allait bien pour le jeune homme en question, elle était pourtant persuadée qu’ils l’avaient tous vu s’y réfugier la lèvre en sang avec le bras blessé. Ça la mettait hors d’elle, ses blessures auraient pu être plus graves et personne dans ce foutu bar n’avait un tant soit peu de jugeote pour venir lui proposer son aide. Par peur des représailles, peut-être, mais surtout par indifférence. Cat ne se savait pas si concernée par le sort de ses congénères, elle se découvrait plus solidaire qu’elle le pensait et tout en regardant Aaron répondre à sa question, elle fut soudain prise d’un véritable élan d’affection pour lui. Elle ne lui en avait jamais voulu de l’avoir repoussé aussi souvent au cours des réunions à l’association. La patience faisait partie des bons côtés de la blondinette. Elle avait toujours su qu’à un moment donné, il finirait par, si ce n’était s’ouvrir, au moins cesser de la prendre de haut. Bien évidemment, Ecaterina ne se réjouissait pas des conditions dans lesquelles cela se déroulait, mais elle savait qu’il y avait eu un déclic et maintenant, elle avait toutes les cartes en mains pour lui prouver qu’elle était digne de sa confiance.

Ils se ressemblaient. Ça n’avait jamais eu cette clarté de sens auparavant, mais en entendant Aaron faire de l’humour, lui disant que l’autre était plus amoché que lui, elle eut l’impression de s’entendre parler. C’était troublant, il lui fallut du temps pour reprendre contenance et suivre du regard le court trajet du jeune homme jusqu’au lavabo. Elle aussi était du genre à minimiser les choses graves, préférant les sarcasmes aux complaintes. Par pudeur, principalement. Elle estimait que son malheur ne valait pas celui des autres. Finalement, Cat n’était qu’une petite-fille gâtée qui n’avait pas supporté la pression monstrueuse que sa mère avait exercée sur elle, c’était tout. Elle avait toujours eu ce qu’il fallait pour vivre une existence paisible, elle était en bonne santé en plus d’être intelligente, plutôt jolie et ambitieuse, malgré cette peur irrationnelle d’échouer. Sauf que la seule chose qui faisait envie à cette petite blonde, c’était l’indépendance. Une indépendance qu’elle avait prise très tôt en demandant elle-même à son père de renoncer à tous ses droits pour être prise en charge par son frère aîné qui lui aussi était devenu indépendant plus tôt qu’il ne le fallait. Elle aurait pu vivre aux crochets de sa famille, profiter de la réputation de son père dans le milieu de l’édition pour s’assurer une carrière sans lever le petit doigt. Au lieu de ça, elle travaillait très dur, avait étudié et s’était pliée en quatre pour payer ses dettes, même si elle avait fini par mettre son rêve le plus cher de côté après un échec qu’elle considérait comme étant la preuve de son manque de talent. Se faire toute seule, prouver qu’elle pouvait le faire, c’était plus fort que les doutes qui nourrissaient toutes ses angoisses, plus fort que n’importe quoi.

Cat ne connaissait rien de la vie, elle avait encore tout à apprendre. En revanche, elle se connaissait sur le bout des doigts et était capable d’anticiper ses réactions avant les autres, même ceux qui pensaient la connaître par cœur. Elle savait par exemple que même si elle faisait des efforts pour devenir quelqu’un de bien, quelqu’un qui affrontait ses peurs sans ciller, quelqu’un qui mettait de l’eau dans son vin en gommant son caractère compliqué, elle garderait toujours en elle une profonde fêlure que personne n’arriverait jamais à refermer. Le seul moyen qu’elle avait trouvé pour se supporter et la supporter, cette fêlure, c’était l’ironie et l’arrogance.
Aaron était comme Cat. Celle-ci voyait que quelque chose en lui était cassé, qu’il fallait s’y attarder pour tenter de le réparer. Elle ne savait pas de quoi il s’agissait, elle ne chercherait pas à le savoir s’il ne voulait pas lui en parler, mais si elle pouvait lui fournir les clefs pour que son défaut de fabrication soit plus facile à gérer, elle le ferait sans hésiter. Elle s’enfuyait dès qu’elle se sentait au bord du précipice, Aaron, lui, cognait. Est-ce que ça faisait de lui quelqu’un de mauvais ? Absolument pas, et avec du recul, elle était heureuse d’avoir su apaiser ses doutes en lui répondant à la négative quand il lui avait posé la question, un instant plus tôt.

D’une oreille attentive, Cat l’écouta alors lui conter ce qu’il s’était passé avant d’être blessé. Elle ne put s’empêcher d’étirer ses lèvres pleines, le gratifiant d’un sourire amer, quand il lui détailla l’épisode de l’autoroute, pensant que l’autre conducteur devait être l’un de ses rustres idiots qui se sentaient émasculés dès qu’une voiture lui barrait la route. Par chance, Aaron n’était pas une femme. Cat n’osait imaginer ce qui aurait pu se passer si ça n’avait pas été le cas. De nouveau, elle fut surprise de constater que son avis semblait compter pour le jeune homme, comme s’il tentait farouchement de la convaincre qu’il n’y était pour rien dans cette altercation. Il n’avait pas besoin de s’acharner, Ecaterina était déjà convaincue de son innocence, sinon il ne l’aurait pas appelé pour lui demander son aide, ça aussi, elle en était convaincue. Aussi, elle s’échina à le rassurer de nouveau et lui dit, accompagnant ses paroles d’un effleurement de la main sur son genou « Bien sûr que je te crois. » Elle frotta son genou une seconde et croisa ses bras sur sa propre poitrine pour apaiser le petit frisson provoqué par la brise qui s’infiltrait par la fenêtre, puis frictionna ses bras nus en soutenant le regard d’Aaron. Pendant ce court silence, elle vint à penser qu’il était peut-être temps pour elle de lui faire comprendre qu’elle était la plus à même de l’aider, ça dépassait le cadre de ses fonctions à l’association. Reprenant vie, détachant son regard de celui d’Aaron, elle s’approcha du lavabo pour s’affairer et ranger la trousse de soins qu’elle avait utilisée. La tête baissée, elle prit une inspiration incertaine, s’humecta les lèvres, pour enfin dire avec encore plus de douceur « Je connais ce sentiment, tu te détestes. » Elle coula un regard timide en sa direction, poursuivit dans un sourire aussi discret « Tu te détestes parce que tu sais que ce que tu fais, c’est mal. Sauf que céder, c’est la seule solution pour que tu te sentes soulagé. Tu sais que ça fera beaucoup souffrir les gens qui t’entourent parce qu’ils ne comprendront pas pourquoi tu fais ça, t’es même conscient que ça aura des répercussions et ça te fais peur, mais tu ne peux pas t’empêcher de penser que si tu refoules ce besoin vital de te libérer, ça pourrait être encore plus grave pour toi… et pour les autres. » Elle cessa graduellement de ranger la trousse de soins, serra très fort une bande de tissu encore emballée dans sa main tout en haussant les sourcils, l’air détaché. Cat regarda Aaron, et ajouta à mi-voix « C’est un cercle vicieux, Aaron, une situation sans issue. Les gens comme toi et moi sont maudits, on sera toujours obligé de vivre avec cette épée de Damoclès au-dessus de la tête. » Elle n’en dirait pas plus, elle voulait juste lui faire sentir qu’elle connaissait bien la situation dans laquelle il se trouvait et qu’il n’avait pas à craindre de se faire juger, surtout pas par elle. Son départ d’il y a cinq ans, c’était ce dont elle était en train de parler. Son besoin de partir quand les choses ne se passaient pas comme elle le souhaitait, elle devrait le gérer toute sa vie, faire en sorte que les gens autour ne la juge pas sur cette défaillance, car au final, elle n’y pouvait rien. Exactement comme Aaron avec son impulsivité. Reportant son attention sur la trousse de nouveau pleine, elle rangea contentieusement la bande de tissu à l’intérieur et ferma la fermeture éclaire d’un geste, glissant une longue mèche de cheveux derrière son oreille. Elle attrapa son sac à main qu’elle passa à son épaule et ensuite, se plaça face à Aaron, toujours juché sur le lavabo « Ma colocataire a son propre punching-ball au sous-sol. Je sais que je ne suis pas censée faire ce genre de choses en dehors de l’association, mais peut-être que tu pourrais venir taper dedans quand tu sens que tu es sur le point de craquer. Ça sera toujours mieux que de finir avec une lèvre ensanglantée. » Elle lui sourit toujours avec quiétude, pencha la tête sur le côté et aussitôt, ses cheveux dégringolèrent élégamment sur son épaule. Ecaterina observa les traits du visage d’Aaron, resta silencieuse pendant un temps, profondément peinée par l’état dans lequel il se mettait. Cat finit par secouer la tête pour recouvrer ses esprits et passa cette fois-ci, la trousse de soins en bandoulière. Désignant la porte derrière elle avec son pouce, elle chuchota avec exagération, se risquant à lui faire un petit clin d’œil complice « On ferait mieux de partir. J’ai peur qu’ils finissent par réaliser qu’un homme et une femme enfermés depuis plus d’une demi heure dans les toilettes ça a quelque chose de très suspect. »
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