Choriste du mois

Le Deal du moment : -45%
WHIRLPOOL OWFC3C26X – Lave-vaisselle pose libre ...
Voir le deal
339 €

Partagez | 
 

 06. Suspicious encounter

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
AuteurMessage
Invité
Invité
06. Suspicious encounter Empty
MessageSujet: 06. Suspicious encounter   06. Suspicious encounter EmptyMar 15 Jan - 1:18

Le ciel était d’un bleu azuré presque semblable à celui des yeux de Robin. Autour de lui, Larry entendait des cris d’enfants, des rires, des éclats de voix de parents inquiets rappelant à l’ordre leurs rejetons comme des chiots un peu trop vifs qu’il faut remettre au pied. Le parc était devenu son repère depuis que les jours s’étaient améliorés. Il marchait pendant des heures sur les routes de sable qui s’enfilaient entre les arbres, en apparence sans but. Il croisait des coureurs, des promeneurs de chiens, d’enfants, des lycéennes exposant leurs gambettes au soleil, des garçons se lançant un ballon ovale des milliers de fois sans trouver cela ennuyant un seul instant. La population était diverse et variée, mais de tous ces être on ne peut plus banals, une seule sorte l’intéressait. Les gens suspects. Pas les exhibitionnistes qui portent de longs manteaux de pluie été comme hiver pour le plaisir de l’ouvrir et de faire crier les petites filles, non. Les petits frisés nerveux qui gardent leurs mains dans leur poche et serrent la mâchoire dès qu’une patrouille passe à côté d’eux, les grands costauds qui se la jouent tombeurs mais ont ce léger tremblement dans les mains quand ils restent immobile trop longtemps, voilà ceux qui l’intéressaient. Les victimes de la drogue. Ceux qui la vendent, ceux qui la consomme, ceux qui pourraient la consommer. La période qui avait précédé les examens avait fait le bonheur de ses finances. Qui aurait cru que les petits génies de l’Ohio confieraient le sort de leurs études à des pilules roses ? Le trafiquant, lui, n’en avait pas douté un seul instant. Il avait épuisé tous ses stocks sans avoir à faire pression sur ses dealers en culotte courte une seule fois, un vrai bonheur. Mais maintenant que le lycée avait cessé ses activités pour les vacances, il devenait plus dur pour lui d’infiltrer plus en profondeur la jeune clientèle qui l’intéressait tant. Toutefois il ne pouvait pas se permettre de mettre ses petites affaires en berne, ce n’était pas l’envie qui lui en manquait depuis que Robin avait misé sur une carrière pseudo-politique, mais elle s’y était opposée de toutes ses forces. En réalité, son manque patent de personnel était un frein cruel à la distribution. Il ne pouvait pas se salir les mains en accostant directement ses cibles, c’était bien trop dangereux, mais qui irait suspecter un homme souriant se promenant dans un parc ? On lui aurait le bon dieu sans confession. C’était d’ailleurs le cas des Hamilton, chez qui il devait dîner le soir-même. Des gens charmants, mais qui vivaient dans une rigueur effrayante. La drogue n’avait jamais fait partie de ses ambitions par le passé. Trop d’intermédiaires, trop d’implication, de stocks, d’argent à blanchir. Sa capacité à analyser les gens et leur comportement n’aurait dû servir qu’à prévoir la pause café d’un garde dans un musée ou à décrire un personnage avec un peu moins de banalité. Pourtant il en était rendu à espionner les gens dans la rue pour deviner s’ils prenaient ou non de la drogue et s’ils feraient de bonnes victimes. Qu’est-ce qui avait bien pu le pousser à vouloir corrompre de cette sorte la jeunesse ? Leur donner un livre d’une main et un pochon de l’autre, de qui se moquait-il ?

Jetant un coup d’œil à sa montre, il décida d’arrêter là sa pseudo-promenade pour d’autres activités plus saines. Il était devenu las de jouer à ce petit jeu tout seul. Même s’enchaîner à son bureau pour rendre les derniers chapitres du roman de gare qu’il avait promis à son éditeur le mois dernier lui semblait plus gai que de faire ces rondes de repérage. Ce n’était pas excitant. Ce n’était pas l’adrénaline du cambriolage, l’appât du gain, pas de démonstration de ses qualités de crochetage de serrure, pas de gadget qui ouvrent les portes à code, rien. Rien que des pilules et des gamins aux pupilles trop dilatées. Même pas de quoi écrire un bon navet. Larry soupira profondément alors qu’il retrouvait le pavé du vieux quartier. Ah si seulement il pouvait mettre à exécution tout de suite le plan Holcomb-Pierce, détourner assez de fond pour s’abstenir de traficottage sans retomber dans la classe moyenne... Que faire pour remonter son moral présentement au plus bas. Aller faire un tour au cinéma ? S’aventurer de jour dans le cabaret ? L’absence de compagnie était un peu fâcheuse, et Robin devait sûrement être en train de préparer le thé pour Brittany ou une autre de ses nouvelles “amies”. De l’autre côté de la rue, il aperçut la vieille boutique de disques et instruments. Laissant passer une voiture, il traversa pour se planter devant la vitrine avec un intérêt tout particulier pour un vieux vinyle de rock’n’roll qui jurait un peu dans le paysages de CD. Voilà une solution pour se remonter le moral ! Dépenser le fruit de son dur labeur ! Poussant la porte, il fit retentir la petite cloche de l’entrée et sonda le paysage pour repérer le bac des antiquités. Deux pas plus loin, il alpagua le vendeur avec son plus grand sourire en remontant ses lunettes sur sa tête. «Est-ce que vous auriez l’un de ces vieux disques des classiques ? Quelque chose en trente-trois tours, vous voyez ? Mon pick-up se sent las de passer toujours la même chose...» commenta-t-il rieur avant d’emboiter le pas du jeune homme. Ses yeux d’éternel adolescent s’écarquillèrent d’émerveillement lorsqu’il arriva en face de la section vinyles. Faisant complètement fi des conseils du garçon qu’il remercia abondamment, il commença à fouiller avec avidité le contenu du bac à la recherche de tout ce qui pourrait lui plaire à lui ou à son épouse. Plaçant chaque disque sur le rebords du comptoir près duquel était la section, il continua pendant près de quinze minutes à laisser s’accumuler les pochettes sous les regards ébahis de la clientèle et du personnel qui ne s’attendait certainement pas à faire un tel chiffre un jour de la semaine. Se redressant finalement, son visage était illuminé d’un très large sourire de satisfaction qui aurait rendu aveugle quiconque le regardait directement. «Voilà, je crois qu’on a fait le tour !» La bouche béante, le caissier avait l’air d’assister impuissant à sa folie dépensière sans réellement prendre part à la scène où il devait à présent remplir un rôle clef. «Alors alors ? Je vous dois combien ?» s’enquit-il d’un ton enfantin en sortant son porte feuille de sa poche de pantalon. Le bip sonore de chaque code-barre l’enchantait chaque fois un peu plus. La dernière fois qu’il s’était senti aussi épanoui c’était sans doute quand il avait acheté cash l’appartement où il vivait désormais avec Robin. La somme n’était rien en comparaison, mais il avait pleinement conscience qu’il n’aurait jamais pu se permettre se genre de folie avec la seule recette de ses livres et le salaire de misère des enseignants de lycée.

Sortant enfin du Gramophone avec son gros sac en papier gavé de disques, il n’était pas encore tout à fait apaisé, et cherchait à présent une nouvelle cible pour ses folies acheteuses. Un regard circulaire sur la rue lui rappela qu’il n’était qu’à quelques pas de sa librairie préférée, et quoi de mieux que la musique si ce n’est la lecture ? Ni une ni deux, Larry marchait d’un pas aussi léger que décidé vers la caverne d’Ali Baba pour faire s’effondrer les étagères de sa bibliothèque. Les mains prises par son chargement, il poussa la porte avec son dos pour pénétrer dans l’échoppe où il ne vit d’abord personne. «Hého du bateau ? Il y a quelqu’un ?» appela-t-il en se dirigeant déjà vers la section des livres de collection. Il bavait depuis plusieurs semaines sur un exemplaire illustré d’un recueil de poésie par John Donne qu’il n’avait pas encore osé s’acheter parce qu’il n’avait pas de raison de le faire. Les livres de collection, c’était sa récompense. S’il terminait dans les délais, s’il faisait une grosse rentrée d’argent, ce genre de réussites suffisaient comme prétexte pour qu’il s’offre un de ces petits bijoux que les étudiants rêvent de posséder pour se donner un genre intellectuel. Lâchant un coin de son chargement pour étendre la main et attraper le volume sur l’une des étagères hautes, l’inévitable finit par se produire et le sac en papier craqua, laissant s’échapper les galettes qui s’écrasèrent sur le sol avec un léger fracas mais sans casse apparente. «Quelle m...» Larry retint son juron et s’agenouilla sur le sol pour ramasser ses biens éparpillés lorsqu’un bruit de pas attira son attention. Relevant les yeux, il tomba nez-à-nez avec la petite vendeuse brune qui se trouvait faire partie de la même chorale que lui. Enfin nez-à-nez... Sa position lui offrait en réalité une vue directe sur le dessous de la jupe de la jeune fille et il mit tout de même plusieurs secondes à réaliser la situation dans laquelle il se trouvait. «Oh Charlie ! Tu étais là.» Détournant le regard, il se recentra sur les disques qu’il n’avait pas fini de réunir. «Un petit coup de main ? Je suis désolé, le papier a craqué...» sourit-il à la choriste sans plus vraiment oser regarder dans sa direction de peur qu'elle ne se rendre compte du panorama.


Dernière édition par Larry Faithorn le Jeu 7 Fév - 19:27, édité 1 fois
Revenir en haut Aller en bas
Charlie Pillsbury
Charlie Pillsbury
GANGSTA CHARLIE ► Whatever happens tomorrow, we had today.
Age : 25 ans.
Occupation : Assistante de Cassie chez les SC & Rédactrice.
Humeur : Angoissée.
Statut : Épouse de Wyatt Pillsbury.
Etoiles : 1621

Piece of Me
Chanson préférée du moment : Coldplay ─ Charlie Brown
Glee club favori : Second Chances
Vos relations:
06. Suspicious encounter Empty
MessageSujet: Re: 06. Suspicious encounter   06. Suspicious encounter EmptyMar 15 Jan - 23:00

Installée derrière le comptoir de la librairie, une fausse paire de lunettes rondes coincée sur le nez, Charlie était plongée dans sa lecture de King Lear. Voilà plus d’une heure qu’elle était assise sur son petit tabouret après avoir soigneusement récupéré sa copie de Shakespeare, de toute évidence lasse face au peu de clientèle qui se présentait à elle cet après-midi-là. Pour une fois que la jeune femme attendait de pied ferme quelques clients qui auraient pu la divertir, ils se montraient réticents à pousser la porte de la librairie, préférant de loin profiter du soleil qui brillait sur la ville plutôt que d’aller se réfugier en compagnie de livres. De son côté, Charlie avait tout essayé pour lutter contre l’ennui : au cours de la première heure de son créneau, elle avait flâné dans les rayons de la boutique, lisant quelques résumés par-ci par-là lorsqu’une couverture de livre l’intéressait ; puis, constatant non sans un certain agacement qu’il n’y avait toujours personne à servir, elle s’était postée derrière les fenêtres de la librairie, bras croisés, tentant de capter le regard des passants qu’elle repoussait plus qu’elle n’attirait. Résignée, elle avait passé l’heure suivante à accomplir toute une variété de choses insensées dans le seul but de tuer le temps : gribouiller des coloriages immondes sur son plâtre, tenter un grand écart dans l’arrière-boutique (ce qui s’annonçait plus que difficile en raison de l’étroitesse de la jupe qu’elle portait), fusiller du regard l’affiche introduisant Ecaterina comme l’employée du mois, se tresser sauvagement les cheveux au beau milieu de la librairie -pour ensuite passer une bonne dizaine de minutes à démêler ses pauvres mèches brunes prises au pièges dans des nœuds complexes- avant de retourner au point de départ : le comptoir, où elle avait fini par attraper son sac afin d’en sortir son livre, soit une excellente façon de calmer ses ardeurs. Résultat, en trois heures de temps, seuls quatre clients étaient venus fureter dans les rayons, sans repartir avec le moindre achat. Un véritable échec pour l’apprentie libraire, agacée de travailler dans une ville où personne ne prenait le temps de venir apprécier la compagnie de tous ces livres qui faisaient son bonheur à elle. Et c’était bien sûr sans compter la fureur qui se frayait lentement mais sûrement en elle en pensant au futur sourire de satisfaction qui se dessinerait sur les lèvres de sa colocataire lorsque celle-ci se verrait recevoir, une fois de plus, le titre d’employée du mois. Une véritable injustice aux yeux de la brunette qui, au cours de ces derniers mois, s'était pliée en quatre pour apparaitre comme l’employée modèle aux yeux de la direction afin d’obtenir à son tour les honneurs. Malheureusement, la propriétaire de cette fichue librairie semblait avoir un faible pour les blondes, au grand désarroi de la jeune femme.

Claquant les ongles de sa main valide sur le comptoir comme un moyen de se libérer de toute la frustration de ce début d’après-midi, Charlie poussa un énième soupir en lisant un long monologue de Lear. Elle avait beau être une grande fan de littérature et compter cet ouvrage parmi ses pièces favorites de Shakespeare, il n’en demeurait pas moins que le protagoniste de celle-ci était incroyablement torturé, pour ne pas dire ennuyeux par moments. Se replongeant néanmoins avec facilité dans sa lecture, seul le cliquetis sec de la porte vint la déranger à peine quelques secondes plus tard. Relevant le menton avec intérêt, elle fut rapidement déçue en croisant le regard de l’adolescente qui sa dirigea derechef vers le rayon jeunesse. Esquissant malgré elle un sourire des plus hypocrites, elle poussa sa copie de Shakespeare sur le comptoir et descendit du tabouret, s’élançant à la poursuite de sa cliente. Lorsqu’elle parvint à sa hauteur, plongée de force dans l’univers des livres pour adolescents en plein émoi, elle coinça une mèche de cheveux derrière son oreille et emprunta le ton chaleureux de la vendeuse pleine d’enthousiasme qu’elle s’efforçait d’être : « vous souhaitez un renseignement, peut-être ? ». La brunette se tourna vers elle avec une nonchalance que Charlie ne manqua pas de noter, avant de piquer un fard. « Je… Je cherche les romans d’E. L. James. Je sais que ça date un peu, mais… ». Se retenant de lever les yeux au ciel et d’envoyer balader cette adolescente aux goûts littéraires plus que douteux, la jeune libraire se mordit la lèvre inférieure avant de forcer un sourire peu convaincant. Se détournant légèrement de la lycéenne pour faire face aux rayons, elle plissa les yeux et chercha du regard les romans de l’auteur britannique, avant de se hisser sur la pointe de ses pieds et de récupérer les ouvrages -si toutefois on pouvait les appeler ainsi- qu’elle tendit machinalement à sa cliente. « Voici pour vous les trois romans principaux. Si vous avez besoin d’un nouveau renseignement, n’hésitez pas ». L’adolescente acquiesça vaguement, trop intéressée par la trilogie de livres qu’elle tenait victorieusement dans ses mains pour accorder plus d’importance à Charlie. Cette dernière tourna les talons et repartit en direction du comptoir, jetant un coup d’œil navré à sa propre copie de King Lear, comme pour s’excuser auprès de ce bon vieux William d’avoir aidé sa cliente à trouver des romans aussi frivoles. L’adolescente la rejoignit quelques instants plus tard, les trois tomes en main, ce dont Charlie se réjouit malgré elle : certes, ces livres n’étaient peut-être pas de grandes œuvres littéraires, mais des ventes étaient des ventes. Et c’était tout ce qui comptait à ses yeux pour le moment.

Alors que la cliente repartait en direction de la sortie, son sac en papier précieusement placé contre sa poitrine comme si son existence dépendait de la survie des trois navets qu’elle portait, Charlie entendit le tintement de la porte résonner à nouveau. Cette fois-ci, un sourire sincère vint se placer sur ses lèvres : une voix d’homme avait retenti dans toute la boutique, et à en croire son timbre profond, il ne s’agissait pas là d’un adolescent pré-pubère en quête de magazines pornos. Laissant sa dernière cliente partir sans le moindre regret, elle gonfla la poitrine et se dirigea vers les rayons, cherchant le client sacré qui lui éviterait peut-être d’avoir totalement perdu son après-midi à sillonner les rayons déserts. Au moment où elle atteignait celui des livres philosophiques, un grand fracas se fit entendre d’entre les étagères pleines à craquer se situant de l’autre côté de l’allée, faisant sursauter la jeune femme si habituée au silence des lieux. Malgré elle, le juron lancé d’une voix viril la fit sourire un peu plus et elle se dirigea cette fois vers le rayon des livres de collection, certaine d’y trouver un homme d’âge mûr privilégiant des ouvrages de qualité. Plissant soigneusement sa jupe de sa main gauche avant de faire son entrée dans le couloir délimité par les larges rayonnages, droite comme un piquet, elle tourna finalement dans l’allée et posa son regard sur le client agenouillé par terre, occupé à récupérer ses disques éparpillés sur le parquet de la librairie. Un client qui n’était autre que Larry Faithorn, un Second Chances qu’elle côtoyait sans trop fréquenter depuis qu’elle avait rejoint la chorale. Charlie s’arrêta net face à l’écrivain, troublée, alors que celui-ci levait doucement son regard vers elle… non pas pour rencontrer le sien, non, mais bien pour jeter un coup d’œil sous la jupe de la jeune femme, qui se trouvait être un obstacle entre leurs deux regards… du moins, ce fut la conclusion qu’elle en tira en le voyant détourner le regard après quelques secondes, visiblement embarrassé suite à ce moment d’égarement. La brunette sentit ses joues rosir légèrement, et cligna des yeux pour se remettre les idées en place. Non, c’était sûrement son imagination qui lui jouait des tours, il était marié et avait clairement passé l’âge d’aller se rincer l’œil sous la jupe des filles. Reculant toutefois prudemment d’un pas, Charlie acquiesça lorsqu’il la reconnut et le salua poliment à son tour : « bonjour monsieur Faithorn ». Sur le même ton, il l’invita à l’aider et la libraire s’exécuta, s’inclinant doucement avant de se résigner et de poser ses deux genoux sur le sol, se tenant dans une position peu confortable. « Ne vous inquiétez pas, je comprends. Si vous saviez le nombre de fois où je renverse mes affaires, je ne pense pas que vous vous excuseriez pour votre maladresse. Chez moi, c’est chose courante. La preuve… » Ajouta-t-elle en désignant d’un coup de menton son poignet immobilisé par le plâtre. De sa main libre, elle aida l’écrivain à réunir ses achats, en profitant pour passer en revue les titres des vinyles qu’elle honora d’un hochement de la tête appréciateur. Il avait beau avoir tendance à la mettre mal à l’aise lorsqu’il se trouvait dans les parages, il fallait néanmoins admettre que le choriste avait de bons goûts musicaux. Empilant les disques avec soin, elle les glissa vers Larry lorsqu’ils eurent tous deux terminé de les rassembler, puis prenant appui sur sa main valide, se releva à sa suite. Croisant le regard de celui-ci, elle posa une main sur sa hanche et s’éclaircit la voix. « Vous avez là un sacré butin, monsieur Faithorn » Fit-elle en désignant les vinyles qu’il avait récupérés. « Puis-je vous être d’une aide quelconque ? Si vous êtes aussi avide de lecture que de musique, je pense que l'on devrait bien s’entendre » Ajouta-t-elle avec le sourire, tentant de dissimuler la nervosité qu’elle ne pouvait s’empêcher de ressentir.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
06. Suspicious encounter Empty
MessageSujet: Re: 06. Suspicious encounter   06. Suspicious encounter EmptyJeu 17 Jan - 2:13

Pour une raison qu’il ignorait, Larry avait toujours senti de la part de Charlie une forme de gêne et une distance anormale entre eux. Il avait pourtant tout fait pour se montrer cordial, que ce soit en tant que client de la librairie ou en tant que choriste. L’écrivain ne cherchait pas à devenir son meilleur ami, ni même à s’en faire une amie tout court, mais il avait la désagréable sensation qu’il représentait une menace pour elle, et tant qu’il ne serait pas parfaitement rassuré sur la nature de ses réticences il ne pourrait pas avoir l’esprit en paix. Il n’avait pas d’autre choix que de s’assurer que personne ne se doutait de ce qui se cachait derrière le masque si savamment travaillé de M.Faithorn. Il en allait de sa liberté. Pour se mettre dans la peau de son personnage de parfait chrétien il s’était plongé dans la littérature romantique, s’était gavé de séries stupides où malheureusement les clichés n’avaient pas l’air de faire tâche à Lima, il avait observé silencieux les bancs de l’Eglise en imitant les mimiques de la foule jusqu’à atteindre sa synthèse parfaite de tout ceci. Ç’avait été amusant de se créer une identité si différente de ce qu’il était à l’origine. Dieu et lui n’avaient jamais eu de bons rapports. Si toutes ses créatures étaient égales alors pourquoi avait-il manqué du pain qu’il avait partagé avec ses apôtres quand il était petit ? Pourquoi son père avait-il perdu son emploi alors que ses parents songeaient à un petit frère Fossett ? Il avait eu l’occasion de se confronter à tous ses problèmes avec la religion dans le long roman qu’il avait écrit en prison, le second pour être précis. Il n’avait rien eu de mieux à faire entre les murs gris et froids de sa geôle de dix longues années que de s’interroger sur son passé et de réfléchir à ses erreurs. Voler n’avait pas été une erreur, c’était s’être fait prendre qui en avait été une. C’était d’avoir fait confiance à Matt et de faire semblant de ne rien voir de ses problèmes de drogue. La drogue, encore et toujours. L’éternel dilemme, gagner plus ou rester modeste. Le trafiquant avait fait son choix, mais il aurait aimé mettre un terme à tout cela maintenant qu’il n’en avait plus besoin. La cupidité et le manque de précaution l’avait fait tomber une fois, pas deux. Vendre à Lima était très différent d’une grande ville comme Seattle, il avait le résultat sous les yeux, il avait l’horrible impression que tout le monde connaissait tout le monde et il finissait par ne plus se supporter lorsqu’il faisait ses comptes et envoyait de nouvelles consignes aux différents niveaux de l’organisation. Si la nouvelle d’une overdose mortelle devait apparaître dans le journal il saurait que tout ceci serait de sa faute et ça, c’était inacceptable. Il pouvait jouer tous les rôles, mais pas celui d’assassin. Il n’y avait pas une personne en ville qui aurait pu dire du mal de lui. Il mettait un point d’honneur à être un citoyen modèle, si l’on exceptait bien sûr ses activités illégales. Tout le monde devait mordre à l’hameçon, à commencer par ses petits camarades de chorale. Et contrairement à Peter Matterface, Charlie n’avait pas l’air du genre à douter de sa (fausse) bonne foi. Alors que lui reprochait-elle ? Cette rencontre fortuite était le meilleur moyen de mener sa petite enquête.

Terminant rapidement de ramasser les disques en vérifiant qu’il n’en avait fêlé aucun, il remercia la vendeuse d’un large sourire chaleureux avant de se fixer sur son poignet. «Ça a l’air plutôt douloureux...» Toujours agenouillé à réunir ce qu’elle venait de lui tendre, il ne put s’empêcher de tendre la main vers le maigre poignet dans le plâtre. «Il faut prendre soin de toi voyons. Maintenant que j’y pense ça fait un moment que je ne t’ai plus vue aux répétitions, ne me dis pas que ça a un rapport ?» Larry avait pris le ton du père surprotecteur qu’il aurait pu devenir si Robin avait voulu des enfants. Ce n’était pas réellement un point de désaccord au sein du couple qui ne s’était jamais vraiment posé la question puisqu’il était derrière les barreaux lorsqu’ils avaient l’âge idéal, mais en grand enfant qu’il était resté, le quadragénaire ne pouvait s’empêcher de vouloir couver un peu la jeunesse. C’était également le cas avec Lynn Sawyer. Ces gamines trop maigres et maladroites pour leur propre bien représentaient sans doute sa faiblesse et il ne pouvait s’empêcher de vouloir faire quelque chose pour elles. Mais autant Lynn semblait réceptives à ses approches, autant Charlie battait en retraite à la moindre ouverture. Et une fois de plus la jeune femme changea de sujet alors qu’ils se relevaient pour retrouver une tenue plus correcte. Tirant sur les pans de sa chemise sombre pour la remettre parfaitement en place près avoir déposé les disques désormais libre de leur sac sur un coin d’étagère, il tapa les genoux de son pantalon comme s’ils avaient été salis par le sol, manquant de buter dans l’épaule de la jeune femme en se penchant. Pour s’excuser sans un mot il la regarda avec un léger sourire une fois l’opération terminée. Très fier de sa toute nouvelle collection qu’il avait déjà hâte de ranger dans sa discothèque en verre, il bomba le torse comme s’il avait lui-même produit ces disques. Trop heureux que la jeune femme ait remarqué son bon goût, il ne prêta pas réellement attention à son expression crispée en repensant à la raison de sa venue qui allait sûrement lui en mettre plein la vue et peut-être améliorer son image de lui. Peu importait le prix, aujourd’hui en plus de sa pile de livres, il repartirait avec les bonnes grâces de Charlie Watson-Brown. «Mais j’espère bien.» glissa-t-il avec un sourire en coin malicieux en plongeant ses yeux dans ceux de la jeune femme. «Avant de tout ficher en l’air, j’essayais d’attraper cette charmante édition illustrée de Donne tu vois, juste... là.» Il détourna le regard, et s’appuyant sur un des bacs de livres, Larry s’étira de tout son long pour atteindre enfin l’objet de sa convoitise qu’il serra contre sa poitrine avec une joie enfantine qui rompait avec son image de gentleman. Beaucoup de choses étaient feintes dans son comportement en public, mais il y avait certaines choses qui étaient plus fortes que lui, et son amour des livres en faisait partie. L’arrogance de sa jeunesse où il avait cru pouvoir écrire mieux que tous ces auteurs qui remplissaient désormais les rayonnages de son bureau était passée depuis longtemps et il rattrapait le temps perdu en lisant encore et encore jusqu’à se rendre ivre de mots. «Je ne sais pas si vous tournez au pourcentage, mais j’ai comme l’impression que c’est ton jour de chance. Ecaterina va se mordre les doigts de ne pas avoir été là. Mais comme j'ai le privilège d'avoir ce petit tête à tête, profitons-en !» ajouta-t-il avec un clin d’œil à l’adresse de la libraire. «Que me conseilles-tu ? Et qu’est-ce que vous avez reçu récemment ? Oh je ne parle pas des livres de poche. On en reparlera plus tard. Non, je cherche plutôt... Quelque chose de beau, début du vingtième ? Couvertures en cuir... Les meilleures.» S’écartant de quelques pas sans lâcher sa prise de guerre, il dévorait des yeux les étagères hautes où brillaient les tranches des livres réservées aux collectionneurs. «Que penses-tu de Nabokov ?» demanda-t-il finalement en faisant volte-face.
Revenir en haut Aller en bas
Charlie Pillsbury
Charlie Pillsbury
GANGSTA CHARLIE ► Whatever happens tomorrow, we had today.
Age : 25 ans.
Occupation : Assistante de Cassie chez les SC & Rédactrice.
Humeur : Angoissée.
Statut : Épouse de Wyatt Pillsbury.
Etoiles : 1621

Piece of Me
Chanson préférée du moment : Coldplay ─ Charlie Brown
Glee club favori : Second Chances
Vos relations:
06. Suspicious encounter Empty
MessageSujet: Re: 06. Suspicious encounter   06. Suspicious encounter EmptyLun 21 Jan - 12:42

Perçant le regard de l’écrivain non sans une certaine curiosité, la librairie l’observa prendre son bras, résistant à l’envie de reculer encore un peu plus face à cet homme qu’elle ne parvenait à sonder. De nature méfiante depuis sa plus tendre enfance, elle n’accordait pas sa confiance aussi facilement que l’on pouvait l’imaginer. Au cours de son adolescence, elle avait dû faire des efforts inimaginables pour ne pas rester sur la touche pendant la durée de sa scolarité, allant contre sa nature pour tenter de se lier d’amitié avec certains de ses camarades de classe. Indépendante mais sensible, solitaire et pourtant intriguée par le monde qui l’entourait, elle semblait souvent indécise et rencontrait de nombreuses difficultés lorsqu’il s’agissait d’accorder sa confiance. Cet aspect de sa personnalité n’avait cessé de lui jouer de mauvais tours, l’amenant à se méfier aux mauvais moments ou au contraire, à faire confiance aux mauvaises personnes. Depuis qu’elle avait emménagé à Lima, ce problème s’était quelque peu amélioré par l’intermédiaire de rencontres fortuites qui avaient évolué pour donner lieu à de belles amitiés mais aussi à une histoire d’amour. C’étaient des personnes comme Ecaterina, Lexie et Wyatt qui lui permettaient d’évoluer et de se sentir parfaitement à l’aise. Faisant fi des secrets qu’elle pouvait bien garder, ou même de son capital folie (qu’il ne fallait jamais sous-estimer), ils l’aidaient à se reconstruire et l’acceptaient telle qu’elle était, avec ses failles, ses craintes et ses antécédents. A Lima, Charlie n’avait pas le sentiment de ne pas être à sa place pour la simple et bonne raison que tous ses habitants semblaient eux aussi avoir leurs petits défauts, plus ou moins apparents chez certains. Dans une ville où l’on misait sur la différence, le développement créatif et la foi, tout le Monde avait sa place, y compris les étrangers qui, à l’image de Charlie, décidaient de s’y installer pour débuter une toute nouvelle vie ou tout simplement tenter sa chance loin de sa ville natale. Jusqu’à présent, cette décision de changer d’environnement lui avait réussi : en dehors d’un accident qui lui avait causé une petite rechute au début du mois, elle parvenait la plupart du temps à maintenir sa bonne humeur et à oublier ce qui avait précédé sa venue à Lima. Et son moral irait encore en s’améliorant dès qu’elle récupérerait l’usage de sa main droite et pourrait rejoindre la chorale de Cassandra Hamilton, guitare en main, ce dont elle rêvait depuis le jour où elle s’était montrée un peu trop violente envers son punching-ball.

Se mordillant la lèvre, la jeune femme plongea son regard dans celui de Larry et secoua timidement la tête lorsqu’il se souvint que cela faisait un moment qu’elle n’était pas venue aux répétitions, brusquement intimidée par ces yeux sombres qui la dévisageaient. Echappant à l’emprise de son regard, elle détourna le sien et haussa légèrement les sourcils. « J’ai bien peur de ne plus vous être très utile, sans ma guitare » Murmura-t-elle, avant de récupérer son poignet droit qu’elle observa quelques secondes d’un air songeur. Lorsqu’elle avait été emmenée aux urgences le jour du fameux incident, la première question qui lui avait traversé l’esprit quand les résultats étaient finalement tombés et qu’une fracture au niveau de son poignet fut détectée, avait été de savoir si elle pourrait un jour rejouer de la guitare. Confiant, le médecin lui avait assuré qu’à partir du moment où elle respectait sa période de convalescence et ne cherchait pas à retirer son plâtre par tous les moyens possibles et imaginables, elle retrouverait son poignet tel qu’il avait toujours été et ne souffrirait sans doute que de légères douleurs au moment des premières notes. Ce jour-là, elle s’était promis de suivre les conseils qui lui avaient été donnés et de ne pas donner raison à son impatience en cherchant à accélérer le rétablissement de son poignet. Pour ce faire, elle prenait soin à ménager son bras droit et tenter d’éviter toute maladresse susceptible de provoquer de nouvelles lésions. Grâce à l’aide qu’Ecaterina lui apportait quotidiennement, la tâche ne s’avérait pas aussi complexe qu’elle ne l’avait prévu, et son médecin semblait confiant quant à la durée de la guérison. Tout ce qui lui restait à faire était de prendre son mal en patience et compter les jours jusqu’à ce que cet abominable plâtre lui soit retiré.

Changeant de sujet devant la curiosité de l’écrivain qu’elle préférait éviter, la jeune femme redevint professionnelle et lui proposa son aide dans la recherche d'ouvrages, certaine en voyant le nombre de disques qu’il tenait précieusement en main qu’il serait son meilleur client de la journée. Calant son bras droit sur la lanière qu’elle portait en bandoulière et qui lui permettait de reposer son poignet, la jeune femme esquissa un sourire en entendant Larry lui conter son désir d’investir dans un recueil de poésie signé John Donne, puis recula de quelques pas afin de lui donner le loisir d’attraper celui-ci. « Excellent choix, si je peux me permettre. L’œuvre n’est pas très prisée par nos clients, et pourtant pour avoir étudié quelques poèmes de Donne à l’université, je peux vous assurer que cet écrivain est vraiment talentueux ». Se tournant vers les rayonnages, Charlie passa en revue les tranches des livres lui faisant face et reconnut plusieurs auteurs qui attirèrent son attention. La littérature était précieuse à ses yeux, et il était si rare de rencontrer des clients qui s’y connaissaient vraiment que c’était toujours un véritable plaisir pour elle que de pouvoir les renseigner et leur donner quelques conseils, lui donnant l’impression qu’en fin de compte, elle ne servait peut-être pas uniquement à vendre des livres des adolescents attardés en quête de navets littéraires, comme elle avait tendance à le penser. Charlie avait beau se méfier du regard que Larry posait sur elle jusqu’à parfois se faire des idées au sujet de ses intentions, il n’en demeurait pas moins qu’elle appréciait avoir en face d’elle un homme cultivé qui savait de quoi il parlait.

Attirant à nouveau son attention, Larry Faithorn lui fit comprendre qu’il avait bel et bien l’intention d’acheter quelques œuvres, insinuant que la jeune femme pouvait être certaine de faire un bon pourcentage en le renseignant. A la mention du nom d’Ecaterina, Charlie se retourna vers lui et scruta son regard. L’espace d’un moment, elle avait oublié que sa colocataire connaissait et côtoyait l’écrivain. Plissant les yeux un instant, elle se demanda ce qui avait bien pu amener Cat à faire confiance à un type pareil, avant de lâcher prise ; après tout, ce n’étaient pas ses affaires, et elle devait se contenter de faire son travail. Continuant sur sa lancée, l’homme lui demanda quelques conseils au sujet des derniers arrivages et Charlie retrouva son air professionnel. « Hm, nous avons reçu quelques œuvres de Kipling récemment… » Annonça-t-elle non sans une once d’enthousiasme. Se tournant vers les rayonnages, elle se dirigea vers l’extrémité des étagères et se hissa sur la pointe des pieds avant de lever la main gauche vers une rangée de livres, étudiant le nom des auteurs. « Ah voilà ! Vous avez « The Fringes of the Fleet », que je peux vous recommander, et si vous cherchez un recueil plus rare, celui-ci devrait vous plaire »» Conclut-elle en attrapant « Collected Verse » du même auteur, un pavé de près de cinq cents pages de l’éditeur britannique Hodder & Stoughton. Elle le tendit à Larry, un sourire aux lèvres. « Comme vous pouvez le voir, il est en parfait état. On l’a reçu la semaine dernière, et il n’en existe que deux exemplaires dans la librairie». Se concentrant à nouveau sur les rayonnages, elle se dirigea vers les auteurs classés à la lettre « M » qui se trouvait tout en bas des rayons et revint vers l’écrivain quelques secondes plus tard avec un nouveau ouvrage. « André Malraux, « Les Voix du Silence » : si vous aimez la littérature française, je ne peux que vous le conseiller. J’ai étudié cet auteur en cours, cette année, et personnellement j’ai beaucoup aimé ! Celui-ci est plutôt orienté vers les arts, mais il a d’excellentes critiques ». Charlie allait poursuivre sa quête des livres, lorsque Larry lui lança le nom de Nabokov. Observant l’écrivain, elle sourit. « Pour dire vrai, je connais surtout « Lolita », que j’ai lu il y a deux ans environ, et dont j’ai étudié l’adaptation de Kubrick en filmologie, l’an passé. Mais il me semble que nous en avons également quelques-uns en stock ». La jeune femme partit cette fois-ci vers la rangée des auteurs classés à la lettre « N » et grimaça en constatant qu’elle était installée tout en haut des rayonnages. Charlie avait beau ne pas rougir face à sa taille, elle n’était toutefois pas suffisamment grande pour atteindre la rangée la plus haute sans devoir aller chercher un escabeau. « Une seconde, si vous permettez. Je reviens » Dit-elle à l’écrivain avant de se diriger vers un rayon voisin où Ecaterina avait laissé l’escabeau la veille. N’étant pas capable de le porter dans l’état actuel des choses, elle le fit glisser jusqu’au rayon où se trouvait toujours Larry avant d’en gravir les marches avec précaution. Atteignant enfin la rangée souhaitée elle plissa les yeux et attrapa deux œuvres lourdes de sa main gauche avant de tendre son bras gauche vers l’écrivain resté en bas. Ne pouvant s’aider de sa main droite, la jeune femme fut l’espace d’un instant déstabilisée et se rattrapa de justesse à l’étagère à laquelle se heurta le plâtre. Sentant la douleur se propager dans son bras, la jeune femme serra les mâchoires et ne put s’empêcher de lâcher un juron. Lançant un regard désespéré à l’écrivain en contrebas, elle murmura : « je suis désolée… Pou… pouvez-vous m’aider à redescendre s’il-vous-plait ? Je crois que je n’aurais jamais dû monter aussi haut ».
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
06. Suspicious encounter Empty
MessageSujet: Re: 06. Suspicious encounter   06. Suspicious encounter EmptyMer 23 Jan - 1:23

Il avait beau faire tout ce qui était en son pouvoir pour se rendre sympathique, ses efforts étaient à chaque fois déjoués par Charlie qui l’ignorait superbement sans en avoir l’air avec ce petit sourire professionnel. Est-ce que son comportement le rendait plus suspect ? Il n’avait pas l’impression d’en faire des tonnes pourtant. Le naturel était à peine forcé. Son attitude froide et distante à son égard l’avait rendu un peu paranoïaque et il était hors de question de ressortir autrement que blanc comme neige. Depuis qu’un imbécile avait tenté de braquer la bijouterie minable du centre ville et blessé un policier, les forces de l’ordre étaient aux aguets pour redorer leur blason. Le trafiquant avait même été contraint de réduire un peu ses achats de petites pilules qui rendent heureux de peur de voir la marchandise saisie. Peut-être qu’ils avaient des indics en ville, parmi les étudiants, pour repérer les gamins qui distribuent lesdites pilules et leur mettre le grappin dessus pour déjouer les réseaux. Ou des employés dans les boutiques du centre, pour observer les clients suspects et prévenir une nouvelle attaque. Tout était possible, et il ne fallait surtout pas éveiller les soupçons alors qu’enfin l’opération Holcomb prenait forme. À sa connaissance, Charlie n’avait pas pu être conviée à la petite soirée de sa femme, elle n’avait pas du tout le profil et en dehors de la chorale et de cette librairie, ils ne se connaissaient pas. Ecaterina n’avait rien pu voir de suspect à l’appartement, elle ne s’y était d’ailleurs pas rendu plus d’une fois ou deux, et Larry avait protégé ses arrières à chaque fois. Rien ne justifiait son tempérament, tout le monde la brossait comme une jeune femme joviale bien que timide, il n’avait d’ailleurs pas remarqué qu’elle soumette Robin au même genre de traitement. Non, vraiment, tout cela l’intriguait au plus haut point et il avait donc poussé le vice jusqu’à lancer quelques recherches à son sujet dans les bases de données de la police sur lesquelles il avait pu mettre la main. Il avait été très surpris de découvrir qu’elle ne s’appelait en réalité pas Charlie mais Alice, qu’elle venait de Californie et qu’elle avait perdu son père à la guerre. Les dossiers militaires n’étant pas de son domaine d’expertise et Monsieur Ben Israël se faisant désirer ces derniers temps, il n’avait pas pu en apprendre plus sur la figure paternelle qu’elle admirait au point de prendre son nom. Larry en avait donc déduit qu’il était entré en conflit avec la jeune femme en voulant jouer de leur différence de génération et en adoptant une proximité paternelle. Aujourd’hui marquerait donc un tournant dans leur relation et il s’efforcerait de se comporter davantage comme un ami, ou une connaissance, laissant sur le banc de touche l’image du sage quadragénaire qu’il n’était pas en réalité. Il se passerait donc de conseils paternels et de réprimande au sujet de son retrait de la chorale. C’était pourtant tentant... Peut-être ne le savait-elle pas, mais avec son bras en écharpe, c’était tout son corps qui criait : je suis jeune, seule et blessée, j’ai besoin d’une figure paternelle pour me remettre dans le droit chemin, emmenez-moi chez le psychanalyste le plus proche pour régler mon Œdipe.

Ravalant ses paroles, Larry se contenta d’un large sourire pour récompenser les connaissances en littérature de l’étudiante. À l’écouter, elle avait plus d’ambition que simple libraire dans ce trou paumé où les gens ne lisent même pas les notices d’utilisation. «J’imagine que les “clients” ne sont pas tous avides de grande littérature. Mais qui sommes nous pour les juger ? Moi le premier, j’en ai lu beaucoup. Pire, il m’est arrivé d’écrire quelques romans de gare.» confia-t-il en feignant le secret. «Rien de bien glorieux mais de quoi mettre du pain sur la table et occuper un trajet en train. Et tout le monde est heureux.» conclut-il avec un air malicieux en emboîtant le pas de la libraire. L’écrivain avait beau être tatillon lorsqu’il s’agissait de remplir son bureau de livres, il n’était pas condescendant ou arrogant. Il venait d’un milieu très modeste et la lecture n’avait jamais été une activité familiale. À dire vrai, il n’était pas certain que son père ait jamais lu autre chose que le journal. Alors il avait lu ce qu’il pouvait, il avait déchiré, brûlé, jeté, annoté, coloré des livres en pagaille. Il s’était créé une histoire de bandit comme on en voit dans les films, se nourrissant de tous les personnages qui entraient dans son cœur pour construire ce persona qu’il était devenu. Ce n’était pas qu’un hobby, ça avait été salvateur, et il ne serait jamais assez reconnaissant aux livres d’avoir passé le temps entre les murs gris de sa prison pendant dix longues années. Il avait vieilli, et il se permettait maintenant de lire de la poésie sur la terrasse de son grand appartement, mais gamin c’étaient les histoires d’aventures, les épopées, les odyssées, c’était explorer le monde depuis son lit qui l’intéressait. Et il aurait été satisfait de lire un navet pourvu que la fin soit heureuse et qu’il puisse croire que sa famille aussi s’en sortirait. Seulement ce temps là était révolu depuis très longtemps, et il avait maintenant les moyens de dépenser tout le liquide qu’il avait sur lui pour acheter une montagne d’ouvrages précieux que lui recommanderait sa guide. Il écoutait attentivement ses conseils, tout en laissant son regard dériver avec envie sur les étagères pleines. Il n’existait malheureusement pas de rayon nouveautés pour les livres chers et rares qui par définition se cachaient jusqu’à ce qu’un riche collectionneur ne vienne les dénicher au fond de la boutique pour les mettre sous verre derrière une vitrine impeccablement rangée, il ne pourrait donc pas reproduire le même cinéma qu’au Gramophone. Cette fois, il entassait les livres que lui tendait Charlie sans mot dire. Un, deux, trois, quatre ! Et ils n’étaient qu’à la lettre M. Bien plus chers qu’un disque, il en avait là pour un sacré moment avant de pouvoir finir ces petits bijoux sur son temps libre. Opinant du chef à la mention de Lolita, il suivit du regard les déboires de la jeune femme blessée se débattant avec son échelle. Malgré l’envie pressante de lui venir en aide, il repensa à ses bonnes résolutions pour ne plus lui donner l’impression de vouloir jouer les papas de substitution et garda son masque de client impassible, resserrant les livres qu’ils tenaient contre son cœur. Lorsqu’elle entama son ascension, il se détourna de l’étagère pour regarder les passants à travers la vitrine, et se fit la remarque qu’une libraire qui se respecte n’aurait jamais dû enfiler ce genre de tenue pour s’occuper de la boutique. «Je pensais plus à Ada, ou L’Original de Laura, un peu moins connus et un peu plus récents. Je ne crois pas les avoir à la maison.»

Dos à elle, il ne vit pas tout de suite les deux gros livres tendus par Charlie, et lorsqu’enfin il la remarqua, il était déjà trop tard et elle avait perdu l’équilibre. Récupérant in extremis les volumes, le juron lâché par Charlie suffit à lui faire comprendre que le bruit sourd n’était pas celui d’une chute de libre mais qu’elle avait dû se cogner quelque part. Posant le tas de livre à côté de lui sur l’une des étagères basses, il étendit les bras vers sa taille et l’enleva à son échelle. Elle avait beau être fine, elle pesait tout de même suffisamment lourd pour que Larry recule d’un pas et la réceptionne un peu violemment contre sa poitrine. Pour ce qui était de garder des distances et de la mettre en confiance, ce n’était sans doute pas la meilleure chose à faire. Repoussant la jeune femme vers l’arrière immédiatement, il s’empressa de lui demander : «Ça va ? Tu ne t’es pas fait mal ? Je suis désolé, vraiment, tu es blessée j’aurais pu grimper là haut moi-même. Et ne me dis pas que le client est roi, à ce stade on va s’en tenir aux étagères du bas. Si à cause de moi tu es privée de chorale plus longtemps je vais m’en vouloir !» Avec un sourire sincère, il s’appuya contre le rebord du présentoir dans son dos et ajouta calmement : «Je n’habite pas très loin, on peut passer chez moi prendre la voiture et je t’emmène à l’hôpital si tu veux.» Décidément, pour ce qui était de la mission client, c'était plutôt raté, mais il pouvait au moins tester sa confiance de cette manière...
Revenir en haut Aller en bas
Charlie Pillsbury
Charlie Pillsbury
GANGSTA CHARLIE ► Whatever happens tomorrow, we had today.
Age : 25 ans.
Occupation : Assistante de Cassie chez les SC & Rédactrice.
Humeur : Angoissée.
Statut : Épouse de Wyatt Pillsbury.
Etoiles : 1621

Piece of Me
Chanson préférée du moment : Coldplay ─ Charlie Brown
Glee club favori : Second Chances
Vos relations:
06. Suspicious encounter Empty
MessageSujet: Re: 06. Suspicious encounter   06. Suspicious encounter EmptyLun 4 Fév - 14:51

La maladresse, un nom qui n’était que trop familier au vocabulaire de la jeune Watson-Brown. Celle-ci avait beau faire des efforts, tenter d’inverser la malédiction qui semblait s’être abattue sur elle depuis de trop longues années, rien n’y faisait : elle ne cessait de glisser, trébucher, s’effondrer sur le sol en permanence, se heurtant à chaque objet se trouvant en travers de son chemin, comme si ces derniers avaient une dent contre elle et qu’ils ne pouvaient s’empêcher de la faire gémir de douleur, pour le plaisir. Charlie enviait toutes ces filles de son âge qui parvenaient à la fois à garder la tête haute et les pieds sur terre : pour elle, une telle chose était tout à fait utopique. Lorsqu’elle gardait les yeux rivés sur le sol avec prudence, c’était la foule qui venait la bousculer, et au contraire lorsqu’elle se souciait davantage des gens qu’elle rencontrait, ses pieds venaient inévitablement se confronter à quelques peaux de banane et autres obstacles tout aussi invraisemblables trainant par terre, entrainant des chutes toutes plus monumentales les unes que les autres. Un tel défaut provoquait souvent l’hilarité des personnes qu’elle côtoyait : Charlie ne comptait plus le nombre de fous-rire qu’elle entendait régulièrement éclater alors qu’elle-même se frottait la peau d’un air furibond, n’essayant même plus de contenir son agacement, sachant pertinemment que celui-ci transparaissait naturellement sur son visage. Heureusement pour elle, certains personnes se montraient plus compatissantes et lui offraient une sympathie parfois étouffante mais qui restait néanmoins préférable aux moqueries qui surgissaient d’ordinaire autour d’elle. Les personnes faisant partie de cette dernière catégorie étaient souvent les plus matures, mais également celles que Charlie supportait plus facilement –ce qui, malgré les apparences, ne coulait guère de source. Aussi acceptait-elle toujours un coup de main avec le sourire, en dépit de la contrariété que ce simple geste lui apportait. Pourtant, il était rare que ces bons samaritains soient les victimes de sa fureur. Non, Charlie savait qu’elle était la seule personne à blâmer, elle et cette maladresse qu’elle se trainait comme un fardeau un peu trop encombrant. Et malgré cette haine qu’elle nourrissait désormais envers le punching-ball accroché au plafond de sa cave, responsable d’un accident mémorable qui avait causé la perte temporaire de son poignet droit, elle savait qu’au fond elle ne faisait que reporter la fureur qu’elle éprouvait envers elle-même sur ce pauvre objet qui, en soi, n’y était pas pour grand-chose.

Du haut de la dernière marche de l’escabeau, perchée à moins d’un mètre de la terre ferme, Charlie se sentit vaciller à nouveau, un vertige l’atteignant de plein fouet après le léger incident qui aurait pu entièrement briser son plâtre si elle avait lâché prise. Se raccrochant avec difficulté à l’étagère, elle patienta quelques secondes jusqu’à ce que les petites étoiles dans ses yeux s’éteignent et osa jeter un nouveau coup d’œil à l’écrivain qui, après avoir posé les livres sur l’étagère, s’approcha de l’escabeau. Plissant furtivement les yeux, Charlie tâcha d’ignorer la vue que Larry pouvait à présent avoir de ses jambes partiellement découvertes sous sa jupe droite qui retombait avec légèreté au-dessus de ses genoux. La jeune femme releva la tête, jeta un regard impuissant en direction du plafond de la librairie, et ne put s’empêcher de maudire cette fatalité qui l’avait amenée à être dans une telle position face au choriste des Second Chances qui lui fichait le plus la frousse -eh oui, même Peter Matterface semblait plus civilisé que Larry Faithorn à ses yeux. Une paire de mains fortes vint alors se poser autour de sa taille, la soulevant de la dernière marche de l’escabeau pour la reposer sur terre sans grande délicatesse. Se raccrochant aux épaules de l’écrivain pour conserver une certaine stabilité, Charlie se sentit troublée par la proximité qui existait entre leurs deux corps, et fut des plus soulagées lorsqu’il la repoussa vers l’arrière. Désormais à une distance respectable de son client, la brunette se remémora la douleur en provenance de son poignet et serra les dents. Esquissant quelques pas précaires en direction de l’escabeau, elle s’assit sur l’une de ses marches, ses jambes étroitement serrées, et écouta l’écrivain visiblement inquiet pour elle. Levant le menton, elle croisa le regard de Larry et secoua la tête. « Ne vous inquiétez pas pour moi, Mr Faithorn, je pense que ça ira ». Se penchant doucement, elle examina rapidement le plâtre et remarqua une petite fissure en son milieu. Charlie fronça le nez d’un air désapprobateur : elle n’avait pas la moindre envie de quitter la librairie pour se ruer vers l’hôpital et s’entendre dire que cette énième maladresse lui vaudrait une nouvelle semaine de convalescence. Ça, non. C’était suffisamment difficile comme ça sans en rajouter, elle n’avait pas la moindre envie de devoir passer des journées supplémentaires dans la maison des Vieux Quartiers, loin des Second Chances et de sa guitare.

« Ne dites pas de sottise, je ne vous aurais pas laissé récupérer ces livres à ma place » Ajouta-t-elle à l’adresse de Larry lorsqu’il lui dit s’en vouloir de ne pas être monté lui-même sur l’escabeau. « Je vous assure, vous n’y êtes pour rien. J’aurais dû me montrer plus prudente, voilà tout ». Elle esquissa un sourire poli, ne désirant pas se montrer trop froide envers son camarade de chorale. Après tout, il n’y pouvait rien si elle ne pouvait s’empêcher d’exécuter maladresse sur maladresse et ce en permanence. Tout ceci était entièrement de sa faute et elle en était consciente. Jetant un nouveau coup d’œil au plâtre, elle posa l’index de sa main gauche sur la fissure, puis passa son ongle dans celle-ci. De toute évidence, la fente n’était pas bien profonde et il n’y avait plus qu’à espérer que les dégâts soient mineurs. La douleur était sûrement due à l’impact qui avait ébranlé son avant-bras là-haut, rien de plus. Se mordillant la lèvre inférieure, Charlie tenta de s’en convaincre, et en entendant Larry lui proposer de l’accompagner à l’hôpital, elle secoua une nouvelle fois la tête. La perspective de se retrouver encore une fois seule avec lui dans un espace aussi réduit que celui qui existait probablement dans sa voiture ne la tentait guère ; ses intentions étaient peut-être tout à fait honorables, certes, mais elle n’avait aucune envie de le vérifier. D’autant que faire un crochet par la maison de l’écrivain n’avait rien d’alléchant non plus –Charlie avait visionné trop de films dramatiques et thrillers pour savoir qu’il valait mieux décliner l’invitation d’un homme vous invitant dans ses appartements, même si celui-ci ne présentait à priori aucun comportement étrange, ce que Charlie devait encore déterminer chez son client . « Hm, non merci » Lui répondit-elle, après s’être relevée de l’escabeau. « Je ne peux pas me permettre de quitter la librairie cet après-midi et de la fermer derrière moi, ma patronne me tuerait ». ‘Ou peut-être seriez-vous prêt à lui voler la vedette en prenant vous-même les devants de cette petite affaire’, pensa Charlie. Un petit sourire aux coins des lèvres, elle fit de son mieux pour éloigner cette pensée morbide de son esprit et paraitre tout à fait détendue : elle ne voulait pas que Larry insiste, ni qu’il l’emmène de force hors de la boutique. « Et puis, je suis sûre que c’est trois fois rien. Croyez-moi, j’ai connu bien pire ». Se dirigeant vers l’étagère où reposaient les ouvrages qu’elle avait difficilement tendus à Larry, elle les désigna du bout de son index et, ignorant la douleur au niveau de son poignet qui se dissipait bien trop lentement à son goût, reprit un air professionnel. « Alors, où en étions-nous avant ce léger… incident, Mr Faithorn ? Avez-vous d’autres ouvrages en tête dont vous aimeriez faire l’acquisition ? ».
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
06. Suspicious encounter Empty
MessageSujet: Re: 06. Suspicious encounter   06. Suspicious encounter EmptyJeu 7 Fév - 19:27

Depuis qu’il avait décidé de se sortir de sa retraite anticipée de gangster, Larry avait lancé une vaste opération séduction qui se déclinait sous des formes infinies, chaque fois adaptée à sa cible. D’un naturel pourtant plutôt sociable, il approchait de la saturation. Le mensonge s’était immiscé dans sa vie comme une maladie, contaminant petit à petit tous les domaines, ne lui laissant que sa femme comme bouffée d’air frais et honnête. La plupart du temps, ses relations étaient purement intéressées. Il y en avait tellement... Son grand copinage avec Adam, sa relation très chrétienne avec les parents de la petite Holcomb-Pierce, avec les Hamilton, tous avaient leur utilité dans son plan. Ils leur serviraient de caution. Qui mettrait en accusation un ami intime du pasteur de la ville sans y réfléchir à deux fois ? Pas son bon ami inspecteur. Dans le meilleur des cas il mentait par omission et s’intéressait un peu à ses interlocuteurs sans rien attendre d’eux en retour. La petite Sawyer et sa cousine faisaient partie des exceptions, mais là encore, leur projet était si fragile que cette distraction disparaîtrait sûrement.

Dans les premiers temps il avait été amusant de se composer cette nouvelle vie. C’était comme s’il avait la chance d’être un personnage de roman. Il s’inventait une réalité arrangée dans laquelle son amour de la littérature suffisait à payer pour un appartement luxueux dans le centre ville et entretenir un train de vie qui faisait plus d’un envieux, où Dieu avait cédé aux prière du petit garçon qu’il avait été et où il l’en remerciait en se rendant à la messe tous les dimanches. Et puis le temps avait passé, cela faisait déjà plus de six mois qu’il préparait son coup de maître et le jeu avait perdu de sa saveur. Ils avaient eu l’habitude des frappes chirurgicales. Observer une semaine, deux tout au plus dans les cas les plus ardus, cambrioler et déménager dans un autre quartier de la ville. Impossible de faire cela à Lima. Ils étaient venus dans cette bourgade pour se couper de la tentation et le piège s’était finalement refermé sur eux, les contraignant à faire preuve de trésors d’ingéniosité. Il était parfois pesant de devoir jouer sans cesse la comédie. Robin avait cela dans le sang : le contrôle, l’autorité, la discipline. Il n’en allait pas de même pour Larry qui, malgré son âge, avait parfois l’impression d’être le plus jeune de leur couple. Sans jamais l’avoir confié de peur de la décevoir, il avait parfois été tenté de jeter l’éponge parce que la tâche se révélait plus difficile que prévue avec Brittany. Leur mise sur écoute ne portait que des résultats modérés, la police se méfiait de tout et de tout le monde, il n’aimait pas ces histoires de drogues qui s’éternisaient. Il n’était tout de même pas sorti de prison pour faire toute cette route et se retrouver enfermé dans une cage sans barreaux.

La frontière entre mensonge et sincérité était devenue si floue qu’il ne savait plus s’il se faisait vraiment du souci pour Charlie ou si cela faisait partie de ses réflexes pour la mettre dans sa poche. Elle portait sur ses nerfs parce qu’elle semblait vouloir résister. De nature méfiante, peut-être même réservée, elle se mettait sans cesse sur la défensive et tenait en échec ses approches quelles qu’elles soient. Une fois de plus, il s’était montré plus que cordial et elle l’avait envoyé sur les roses. Poliment certes, poussant le vice à lui décocher un sourire professionnel, mais sur les roses quand même. Le terme de “sottises” lui fit grincer les dents. Se faire remettre à sa place par une gamine qui avait quelque chose comme la moitié de son âge, il y avait plus agréable. Était-ce la honte de s’être fait mal qui l’avait fait repasser en mode froid polaire ou bien avait-elle réussi à dissimuler son aversion à l’encontre de l’écrivain un peu mieux qu’à son habitude jusque là ? Plissant les yeux face à sa conclusion. Il voulut récupérer ses livres sur le rebord de l’étagère mais se contenta de passer ses doigts sur la couverture en une caresse comme pour reprendre sa contenance. Sa deuxième proposition rencontra bien évidemment un accueil encore plus froid que la première, et il croisa les bras sur sa poitrine, enfonçant ses doigts dans le tissu de sa chemise pour s’empêcher de lui demander de but en blanc quel était son foutu problème à la fin. Il n’aimait pas la manière dont elle le dévisageait et imita son sourire maladroit comme un miroir. Elle se méfiait bien plus que de raison et il fallait qu’il découvre pourquoi. Ce n’était pas une libraire orpheline qui allait lui mettre des bâtons dans les roues. «Quel professionnalisme !» siffla-t-il entre ses dents en relevant le nez vers les étagères supérieures alors qu’elle pointait déjà ses livres gagnés au prix de son poignet. La prochaine fois, il enverrait Robin en éclaireur à la chorale pour lui tirer les vers du nez. Secouant la tête pour chasser ses pensées, il arqua un sourcil en réfléchissant à la raison de sa venue, qu’elle avait presque fait sortir de la tête avec ses frasques. «Oui. Je vais te prendre un exemplaire de toutes les nouveautés au rayon policier.» répliqua-t-il froidement avant de récupérer finalement ses livres et de la devancer vers l’étagère en question. «J’imagine qu’il y a beaucoup de contraintes à travailler dans une petite boutique mais ne néglige pas ta santé.» L’écrivain jeta un coup d’œil par dessus son épaule pour observer sa réaction qui ne se fit pas aussi claire qu’il ne l’aurait souhaité. «Est-ce qu’elle vous surveille au point de vous empêcher de finir un peu plus tôt pour aller à l’hôpital quand la boutique est vide ?» moqua-t-il presque en saisissant un beau volume noir et rouge. «Moi qui pensais que les caméras surveillaient les clients.» ironisa-t-il avant de poursuivre son tour du rayonnage.

L’attitude distante de Charlie avait freiné son envie irrépressible de dépenser sans compter, et une fois les livres de la concurrence ajoutés à son butin, il se rendit à la caisse sans un mot. Derrière celle-ci, l’œil de la caméra le fixait et il esquissa son sourire le plus chaleureux, parfaitement à l’aise avec son honnêteté douteuse en comptant les billets avec lesquels il payerait ses emplettes. Ils pouvaient le filmer, le suivre à la trace même, rien ne trahissait son petit secret. Les billets verts glissaient sous ses doigts avec un bruit délicieux qui lui faisait oublier l’adolescent lambda suffisamment stupide pour croire que ces pilules lui assureraient un résultat satisfaisant aux examens. Abattant la somme généreuse sur le comptoir d’un air victorieux, il n’attendit pas que Charlie ne lui annonce le total. Aussi pesante soit-elle, sa petite comédie tournait à merveille, et on lui en redemandait. Elle aussi finirait par tomber dans le panneau et renoncer à sa prévention futile. «À charge de revanche.» dit-il d’un ton cajoleur finalement radouci. «Si mon prochain livre arrive jusqu’à vos étagères j’espère que vous me ferez l’honneur de le mettre un peu en avant.»

Lorsque les chiffres verts du total s’affichèrent, ses yeux brillèrent d’un éclat nouveau tant la sensation était délicieuse. Ressortant son porte-feuille de sa poche arrière, il feignit un sourire embarrassé avant de rajouter vingt dollars à la somme devant lui. «J’ai toujours été assez mauvais en maths.» souffla-t-il comme s’il s’agissait d’une confidence. Il glissa les disques contre l’une des parois du sac alors que Charlie le remplissait du reste de ses achats et la satisfaction d’avoir accompli l’une de ses missions suffisait à apaiser sa colère de quelques instants plus tôt. «En espérant que les sacs ici soient de meilleure qualité.» ajouta-t-il avec un clin d’œil. «Au plaisir de te revoir bientôt en répétition je l’espère.» Il ne la toucha pas et saisit rapidement son paquet pour se diriger vers la sortie. Il poussa la porte avec son dos et embrassa le magasin tout entier du regard pour repérer les différentes caméras. Il n’y en avait qu’une dans la vitrine, mais elle semblait pointer en direction de la rue. Il avait un mauvais pressentiment. Charlie, les caméras, il devait se méfier et limiter les dépenses à l’avenir pour ne pas attirer l’attention. De retour à la lumière du soleil, les deux mains sous le sac pour supporter le poids des livres, il prit une profonde inspiration et détendit les muscles de son dos contractés sans qu’il s’en soit rendu compte. Avec un tel sac, il attirait le regard des vendeuses désœuvrées derrière leurs vitrines sous surveillance et malgré la chaleur, un frisson lui parcourut l’échine. Quel que soit le choix de planque qu’il ferait pour les objets dérobés à sa richissime héritière, il éviterait ce quartier maudit.

[Rp Clos]
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé
06. Suspicious encounter Empty
MessageSujet: Re: 06. Suspicious encounter   06. Suspicious encounter Empty

Revenir en haut Aller en bas
 

06. Suspicious encounter

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Glee RPG :: 
Archives
 :: Archives Saison 2 :: Episode 6
-