L’arrivée des Sectionals et la composition de chansons potentielles faisaient qu’Ingrid et Sunny passaient de plus en plus de temps ensemble. Si seulement elle avait su que cette après-midi repérage à la salle des fêtes la conduirait venir participer à un lancer d’œufs sur l’hôtel de ville, peut-être aurait-elle évité de boire à la bouteille qui était en apparence du jus de fruit, et en réalité une boisson alcoolisé. Qui eut cru qu’un jour Ingrid Jaana Svensson boirait de son plein gré ? En toute inconscience, certes, elle n’avait pas eu idée que ce n’était pas du jus de fruit, mais elle s’était tout de même empressée de vider son premier verre - trouvé dans un placard - tout d’une traite. Le goût ne lui avait pas paru particulièrement suspect, mais elle n’avait pas tardé à avoir un peu chaud, ce qui lui avait mis la puce à l’oreille, et elle avait décidé d’arrêter de boire… après avoir pu l’équivalent de plusieurs verres. Bien entendu, son sang viking lui avait permis de rester relativement sobre. Cependant, la suédoise n’avait pas besoin d’avoir un peu trop bu pour aller critiquer ou essayer de détruire Sylvester, dont elle était soulagée d’être débarrassée. Les œufs pourris trouvés dans le réfrigérateur de la salle des fêtes étaient alors aussitôt devenus des projectiles de résistance acharnée contre l’oppresseur. Et Sue s’était ainsi transformée Lord Voldemort pour une soirée remake d’Harry Potter, version New Directions, à Lima en Ohio, plutôt qu’à Poudlard en Ecosse. En imaginant quelques secondes que les œufs étaient des cognards et que l’hôtel de ville était une représentation inanimée de celle qui leur avait gâché la vie depuis le début de l’année, ç’aurait pu être un remix crédible. Il ne leur manquait plus qu’un balai volant, et elles auraient pu jouer un match de quidditch ensemble, contre une équipe visible.

Seulement, Ingrid, en bonne élève de Poufsouffle avait bien écouté les conseils du professeur Chourave et était en train de chercher un remède contre l’ivresse pour son amie. Alors que celle-ci continuait de jeter des œufs sur le mur de la mairie, la déléguée Ikea du ministère de la magie cherchait une feuille d’arbre en kit à faire avaler à Sunny pour la sauver d’un état d’ébriété relativement avancé. Malheureusement, aucune Forêt Interdite à l’horizon, et Hagrid, un peu perdue, ne trouvait plus sa cabane. Elle n’osa pas laisser l’autre blonde pour aller explorer les bois sans son fidèle Crockdur, qu’elle n’avait trouvé nulle part. Elle n’osait pas non plus forcer les portes de la mairie, de peur que Touffu se cache derrière celles-ci. Evidemment, elle n’avait pas emmené son piano avec elle pour l’endormir, et l’opération était donc trop risquée. Elle revint tranquillement vers l’autre choriste alors qu’elle venait juste d’atteindre Sue Sylvester en plein visage, clamant qu’elle avait attrapé le vif d’or. « Hééé mais c’est injuste ! Tu viens de mettre fin à la partie ! J’ai à peine eu le temps de jouer ! ». Son visage se trouva légèrement déformé par une grimace de déception. Elle attrapa néanmoins un œuf, et fut tentée un instant de le jeter sur son adversaire de Gryffondor, légèrement vexée de n’avoir eu aucune chance de gagner. « Et non, en plus je suis chez Poufsouffle moi, et ouais ! ». Mais elle se rappela d’une phrase très importante qu’elle avait entendue auparavant : « Remember who the real enemy is ». Et elle visa à son tour le visage botoxé au possible de Sylvester. Sa chirurgie était tout de même ratée, puisqu’on voyait presque ses bandages de momies dépasser sur sa veste. Le bras de la suédoise se déploya en sa main s’ouvrit, alors que l’œuf partait dans une direction inattendue. Il alla, au lieu de s’écraser sur l’affiche, faire un atterrissage sur la poignée de la porte principale de l’hôtel de ville.

La pensée de Sylvester posant ses mains dessus le lendemain matin lui arracha un sourire malsain, peu commun à son visage. Elle attrapa la bouteille que Sunny lui tendait, mais, il ne leur restait plus aucun œuf, et elle craignait que cette bouteille ne donne d’autres idées étranges à son amie si elle continuait à la boire, alors elle s’enfuit en courant, serrant l’objet entre ses bras, comprimant tellement le plastique qu’il menaçait d’exploser et de déverser le liquide sur elle. Ses foulées se faisaient un peu hasardeuses, et ses genoux flanchaient légèrement sur le côté par moment, mais elle courut aussi vite qu’elle le pouvait vers une fenêtre du bâtiment, sur le rebord de laquelle elle grimpa. Elle tenta de grimper plus haut, mais elle n’avait aucune prise. Elle regarda en bas, et fut prise d’une nausée. Sa seule solution était de rester debout sur le rebord de la fenêtre et de lever la bouteille le plus haut possible, afin que son amie n’ait aucune chance de l’attraper. « Non, non, tu ne l’auras pas ! On a assez bu comme ça, non ? ». Une idée traversa soudainement l’esprit de Krisprolls. Elle n’était pas ivre, mais cela semblait être fort amusant, quand on observait Sunny. Elle rouvrit la bouteille, dans un équilibre instable au bord des pierres et en but deux grosses gorgées. « Quoi ? » lança-t-elle à Sunny, persuadée d’avoir aperçu un regard outré, mais pas vraiment certaine, puisqu’elle était trop haut pour qu’elle puisse discerner les traits de son visage. « Moi aussi j’ai le droit de m’amuser un peu ! » affirma-t-elle en hochant la tête. Et elle se rendit à l’évidence : le partage était une notion importante dans la vie. Elle voulut descendre, et jeta d’abord un œil en bas, avant de relever immédiatement la tête. Elle était à un mètre du sol. « Sunny » commença-t-elle d’un ton étranglé. « Faut que tu trouves un hyppogriffe, je peux pas descendre. Je peux pas, je peux pas, je peux pas ». Elle secoua la tête de toutes ses forces.