La salle dans laquelle avait lieu les Sectionals était bondée. De nombreuses personnes avaient fait le déplacement pour voir les chorales s’affronter dans la compétition qui les mènerait peut-être aux Regionals. Dans le public, on pouvait reconnaitre plusieurs visages familiers, tels que William Schuester et Bryan Ryan, assis l’un à coté de l’autre, le regard rivé sur la scène plongée dans l’obscurité. Car ils le savaient : dans quelques secondes, les Awesome Directions se produiraient.

Les lumières de la salle s’éteignirent soudainement tandis que la scène s’éclaircissait doucement. Rapidement, les personnes assises dans le public se turent, seuls quelques petits chuchotements se faisaient encore entendre. Quelques notes de piano s’élevèrent alors, rompant le silence qui avait à peine eu le temps de s’installer. Un piano fit son apparition, s’avançant lentement vers le devant de la scène sur ce qui semblait être une plaque mouvante. Alex Donovan était assis sur un petit tabouret, exécutant à merveille l’introduction de la chanson I want you back, ses doigts glissant sur les touches du piano à une vitesse fulgurante. Sur le piano étaient assis Kurt Hummel et Brittany Pierce qui s’échangeaient quelques regards passionnés. Les trois chanteurs possédaient des perruques afro-américaines, à l’image des véritables Jackson 5. Ils portaient tous les trois des pantalons noirs en pattes d’éléphant, et des chemises amples aux couleurs différentes : celle d’Alex était jaune tandis que celles de Kurt et Brittany étaient respectivement orange et rouge. Leur métamorphose était stupéfiante et il était difficile de les reconnaitre, accoutrés de la sorte

Le piano s’arrêta au milieu de la scène au moment où l’introduction au piano d’Alex se termina. La musique de la chanson se fit entendre de part et d’autre de la salle. Les trois adolescents commencèrent à faire les chœurs puis, après avoir adressé un dernier sourire à Kurt, Brittany se mit à chanter les premiers vers de la chanson :

“ When I had you to myself
I didn't want you around
Those pretty faces always made you stand out in a crowd ”

Alors que Brittany chantait le premier couplet de la chanson, Kurt et elle n’avaient cessé de s’observer, s’envoyant même quelques clins d’œil l’un à l’autre. De son coté, Alex secouait la tête en signe de dénégation, jetant des regards noirs à Kurt qui ne le voyait même pas.

“ But someone picked you from the bunch
When glance was all it took
Now it's much too late for me to take a second look ”

La voix de Brittany s’éteignit l’espace de quelques secondes durant lesquelles Kurt l'aida à descendre du piano avant d’en descendre à son tour, tandis qu’Alex se levait de son coté. Ils s’avancèrent tous trois vers le devant de la scène et Alex et Kurt chantèrent le refrain, Brittany aidant dans les chœurs, alors qu’ils exécutaient tous trois quelques mouvements de danse, de la gauche vers la droite, avant de les réaliser de nouveau en sens inverse.

“ Oh baby give me one more chance
(show you that I love you)
Won't you please let me
(back to your heart)
Oh darlin' I was blind to let you go
(let you go baby)
But now since I see you in her arms
(I want you back)
Yes I do now
(I want you back)
Ooh ooh baby
(I want you back)
Ya ya ya ya
(I want you back)
Na na na na ”

Kurt se tourna alors vers Alex et s’avança vers lui. Brittany recula de quelques pas, laissant le devant de la scène aux deux garçons, continuant à danser seule. Un sourire aux lèvres, Kurt chanta les vers suivant, tout en veillant à ne pas quitter Alex du regard :

“ Tryin' to live without your love
Is one long sleepless night
Let me show you boy
That I know wrong from right ”

Lorsqu’il chanta, Kurt fit quelques pas vers Alex alors que celui-ci reculait au fur et à mesure, lui tournant le dos à plusieurs reprises, ou observant ailleurs. De son coté, Brittany dansait entre eux, frôlant parfois leurs épaules, s’appuyant sur l’un et l’autre d’un air séducteur, avant de s’écarter de nouveau et exécuter des mouvements de danse. Toutefois, cette dynamique fut bientôt rompue lorsque la voix de Kurt laissa place à celle d’Alex. Celui-ci se tourna vers le premier et s’avança vers lui, les mains levées en signe d’interrogation.

“ Every street you walk on
I leave tearstains on the ground
Following the boy
I didn't even want around ”

Les deux garçons s’arrêtèrent soudainement et se tournèrent vers le public dans un même mouvement et chantèrent en chœur :

“ Let me tell you now ”

Brittany revint vers le devant de la scène tandis que les deux autres reprenaient leurs distances, Alex se dirigeant vers la gauche, Kurt vers la droite. Ces deux derniers chantèrent une nouvelle fois le refrain. Brittany en profita pour se mettre au milieu et tandis qu’ils chantaient ensemble, elle alla de l'un à l'autre en glissant à reculons, esquissant le célèbre moonwalk.

“ Oh baby all I need is one more chance
(show you that I love you)
Won't you please let me
(back to your heart)
Oh darlin' I was blind to let you go
(let you go baby)
But now since I see you in her arms ”

Le rythme de la chanson ralentit et les trois adolescents prirent une nouvelle fois leurs distances. La musique en arrière plan s’effaça peu à peu quand Brittany chanta les chœurs « a buh buh buh ». Alex se tourna vers Kurt, et chanta comme s’il s’adressait à lui :

“ All I want ”

Kurt rejoignit Brittany dans les chœurs avant de chanter, comme s’il répondait à Alex :

“ All I need ”

Alex se rapprocha de Kurt qui ne bougea pas. Le même schéma se reproduisit et tour à tour, Alex et Kurt répétèrent :

“ All I want
All I need ”

Kurt et Alex firent quelques pas de danse et se rejoignirent au centre de la scène. Brittany se remit à tournoyer autour d’eux, ne cessant d’aller vers l’un, puis vers l’autre, comme si elle ne savait lequel choisir, ou quel parti choisir. Alex continua à chanter les vers suivant, avant que Kurt ne le rejoigne en fredonnant lui aussi quelques mots :

“ Oh just one more chance
To show you that I love you
Baby baby baby baby baby baby ”

Brittany finit par rejoindre Kurt, et Alex en profita pour reculer de quelques nouveaux pas. Ne se souciant pas de la jeune fille qui se tenait désormais à ses cotés, Kurt n'avait de yeux que pour Alex, qui lui répondit de nouveau en chantant :

“ Oh baby I was blind to let you go
But now since I see you in her arms ”

Les trois adolescents répétèrent ensemble :

“ I want you back ! ”

Puis Kurt finit par détourner son regard et fit face au public. Haussant les épaules et secouant la tête, il chanta deux derniers vers :

“ Spare me of this cause
Gimme back what I lost ”

Kurt fit un pas vers Alex, comme s'il voulait obtenir une réponse mais celui-ci recula, tourna les talons et fit face aux coulisses. De son coté, Kurt l’imita, sans prendre la peine d’accorder un dernier regard à Brittany. Les deux garçons partirent dans des directions opposées, rejoignant les coulisses. Pendant ce temps, Brittany s’avança vers le devant de la scène et chanta les deux derniers vers de la chanson :

“ Oh baby I need one more chance ha
I tell ya that I love you ”

L’adolescente fit deux saltos arrière puis recula à petits pas chaloupés, la tête baissée, tout en claquant des doigts. Alors qu’elle atteignit le fond de la scène et disparut derrière le rideau, la musique faiblit avant de s’arrêter, marquant la fin du premier tableau du medley…

Les premiers applaudissements se firent timides, tendus. Dans l’amphithéâtre, l’on sentait comme une tension, c’était palpable. Bien que l’on m’avait forcé à écrire cet article pour le journal du lycée, j’étais heureuse d’être là. Les premières prestations avaient été correctes. A mon avis, il n’y avait pas de quoi en faire toute une histoire. Mais, bientôt débarquèrent les élèves de McKinley High School. Un lycée de Lima que je ne connaissais que de réputation. On racontait que l’équipe de football de ce lycée était la plus médiocre d’Ohio. Comme si cela avait une quelconque importance, à mes yeux. Enfin. Mon appartenance à un autre établissement aurait dû me contraindre à les détester comme toutes les autres chorales concourant ce soir. Seulement, je devais admettre que la prestation du premier groupe fût de loin ma préférée. Exaltée, j’applaudis en cadence avec les autres : quel spectacle !

La musique s’amenuisa, des cris d’encouragement émanèrent de part et d’autre de la salle et moi, j’attrapais mon calepin posé sur mes genoux tremblants d’excitation. Je n’avais eu le temps de rien noter, trop prise par le spectacle qui s’offrait à moi ; je devais au moins reporter mes impressions. Mon cœur battait trop fort, ma bouche était sèche et une envie irrépressible de danser s’empara de moi. Aussi, je me contentais de remonter d’une main fébrile mes lunettes glissantes sur mon nez. La mine de mon stylo posée sur le papier, je m’apprêtais à résumer ce premier tableau avec un peu plus d’ardeur qu’à l’accoutumée. Les lèvres pincées, je cherchais mes mots, la langue entre les dents. Soudain, les applaudissements s’arrêtèrent nets : le show recommençait. Prise de cours, je relevais la tête vers la scène assombrit. C’est à ce moment précis que les premières notes de « Beat It » retentirent.

Le noir après la prestation du premier groupe m'avait plongé dans une confusion telle que seul le bruit des applaudissements avait pu l'apaiser. Le dos voûté et la bouche entrouverte, j'aurais voulu cligner des yeux mais, mon cerveau ne semblait plus vouloir fonctionner. Sur scène, un autre groupe était apparut. Un garçon. Deux filles - visiblement élégamment accoutrés et tout de noirs vêtus. Des costumes et un décor minimaliste qui détonnaient avec la prestation précédente. Encore plongée dans l'obscurité, on ne percevait que les silhouettes des jeunes chanteurs. Quand alors l'introduction attaqua sa deuxième partie plus rock, une lumière criarde éblouit les interprètes.

De là où j'étais, je parvenais à me faire une opinion sur ces jeunes gens : ils devaient sans doutes les choisir sur catalogue, leurs chanteurs. Deux jolies poupées et un monsieur muscle, je soupçonnais les directeurs de cette chorale de vouloir appâter les jeunes filles en fleurs avec le physique de bellâtre du jeune homme. D'ailleurs, je ne pus m'empêcher de jeter un coup d'œil entendue aux responsables de cette mascarade et je haussais les épaules, déçue par cette méthode qui - croyez le ou non, ne ferait pas d'émule sur ma petite personne. Me ressaisissant, je devais me concentrer à nouveau sur le spectacle et laissant ma mesquinerie au placard (pour cette fois), je me redressais en haussant les sourcils. L'interlude musicale se termina et la blondinette en jupette ouvrit la bouche, attaquant le premier couplet :

“ They told him don't you ever come around here
Don't wanna see your face, you better disappear
The fire's in their eyes and their words are really clear
So beat it, just beat it ”

Se mettant un peu plus en avant que ses partenaires, je constatais que cette jeune fille avait du coffre. Belle et blonde, l’expression agressive sur son visage ne faisait malheureusement pas disparaître cette lueur de douceur qui émanait d’elle. Exécutant de petits mouvements rapides - reprit en décalage par ses camarades - elle croyait pourtant en ce qu’elle disait, dommage. Quelques cours de théâtre ne lui ferait pas de mal. Étouffant un rictus moqueur, je me calais sur mon siège. Derrière moi, je sentais que les spectateurs jubilaient. Je ne pouvais m’empêcher d’être dans le même état qu’eux malgré mon sens critique qui, je le sentais commençait à vouloir se frayer un chemin entre cette étonnante montée de bons sentiments. Sur scène, une espèce de vague humaine vint casser le rythme de la chorégraphie. La lumière se fit plus forte et je plissais les yeux, aveuglée par cette clarté désagréable Terminant son couplet, la blondinette rejoignit sa place et le garçon pris la sienne.

“ You better run, you better do what you can
Don't wanna see no blood, don't be a macho man
You wanna be tough better do what you can
So beat it, but you wanna be bad ”

En plus d’être incroyablement mignon, ce garçon était doué. Bien plus crédible dans le rôle du bad-boy de service que sa camarade tout droit sortit d‘un livre de conte pour enfants. Je souris en coin quand il se mit à danser. Me redressant légèrement, j’attrapais du bout des doigts le stylo que j’avais négligemment posé sur mon calepin d‘apprentie journaliste ; ce garçon aurait peut-être le droit à une bonne appréciation, finalement. Il fallait absolument que je sache s’il était célibataire. Notant cela au coin de ma feuille, je dessinais un cœur transpercé d’une flèche, rêveuse. La musique était forte, j’entendais les spectateurs chantonner mais, je mordillais l’extrémité de mon stylo, pensant à tous ces weekends que l’on passerait à siroter de la grenadine au bord de la piscine, cet été. Contentée par mes songes, je relevais la tête. A ce moment, il s’avança un peu plus vers le bord de la scène. Malgré moi, je me mit à glousser. Je ne fus pas la seule. La fille à côté de moi frappa dans ses mains avec une mine de parfaite abrutie. Consternée, je lui lançais un regard mauvais par-dessus mon épaule pour lui faire comprendre qu’elle n’avait aucune chance et d’une façon dédaigneuse, je détournais la tête.

“ Just beat it, beat it, beat it, beat it
No one wants to be defeated
Showin' how funky, strong is your fight
It doesn't matter who's wrong or right
Just beat it, beat it, beat it, beat it ”

Le refrain me fit redescendre sur Terre. La prestation était bonne. Les chanteurs étaient bons - et charmants mais, j'étais curieuse de voir ce qu'elle avait dans le ventre, la brunette à leur côté. La chanson de Michael Jackson qu'ils avaient choisi n'était pas ma préférée. Cela dit, il faut de tout pour faire un monde et même si je me devais de garder un certain recul face à tout cela, je devais bien avouer que la salle semblait conquise. Curieuse, je me retournais pour vérifier les réactions de mes condisciples : les sourires béats sur leurs visages témoignaient de leur enthousiasme et après tout, c'était cela qui comptait. La voix des artistes résonnant en écho dans l'amphithéâtre, les dernières notes du refrain furent reprirent en chœurs par les choristes et tapant du pied, j'élargis mon sourire quand vint le tour de celle que j'avais hâte d'entendre chanter :

“ They're out to get you, better leave while you can
Don't wanna be a boy, you wanna be a man
You wanna stay alive, better do what you can
So beat it, just beat it ”

Sans attendre plus longtemps, la jeune fille pris la place qu’occupait auparavant l’atout mâle du groupe. Si, elle était douée ? Bien sûr, ils l’étaient tous et je roulais des yeux quant à cette évidence qui s’imposa de nouveau à moi. J’imaginais qu’il fallait un minimum savoir chanter juste pour faire partie de ce genre de groupe. Je regrettais seulement que leur chorégraphie ne soit pas plus expansive mais, ils parvenaient aisément à occuper tout l’espace sur la scène - ils étaient charismatiques. Il n’y avait pas de place pour l’hésitation dans leur prestation. On les sentait survoltés, prêt à donner le meilleur d’eux-mêmes. Leur investissement était contagieux. Je reposais mon stylo, croisais les jambes avec lenteur. La jeune fille brune termina alors son couplet, le regard brillant d’une lueur coléreuse. Je suivais ses actions avec avidité, les sourcils haussés, prête à bondir. Contrairement à la routine instauré depuis le début du tableau, elle n’alla pas rejoindre sa place attitrée, les autres s’avancèrent avec elle et effectuant quelques pas en décalage, ils entonnèrent le dernier couplet avec ardeur :

“ Just beat it, beat it, beat it, beat it
No one wants to be defeated
Showin' how funky, strong is your fight
It doesn't matter who's wrong or right
Just beat it, beat it, beat it, beat it ”

La musique se calquant à la perfection sur leur pas de danse, je penchais la tête quand ils terminèrent en chœur la fin de ce couple. De mon point de vue, il était le plus réussit. Leurs doigts claquants en rythme sous l’impulsion de leurs pas décidés m’avait donné des envies de révolte et je commençais à penser que tout cela finirait en standing ovation. Un coup d’œil à droite, un coup d’œil gauche. Je remarquais que j’étais la seule à voir les choses de cette manière et tachant de rentrer les crocs, je me ressaisis lentement alors qu’ils terminèrent en rythme de nous exposer leur envie de rébellion : le garçon recula d’un pas, la jeune fille brune de deux quant à la blonde, elle resta à sa place créant ainsi une quinconce harmonieuse.

“ Just beat it, beat it, beat it, beat it
No one wants to be defeated
Showin' how funky, strong is your fight
It doesn't matter who's wrong or right
Just beat it, beat it, beat it, beat it ”

Droit comme des piquets, la lumière les éblouissants de part et d’autre, ils reprirent en écho :

“ Just beat it, beat it, beat it, beat it ”

Jubilant, je sentais que quelque chose allait se passer. Connaissant ce titre mythique, je savais que la meilleure partie allait bientôt ce profiler. Me redressant, les yeux écarquillés, je ne fus pas déçue quand le chanteur que je convoitais arracha son smoking brutalement. Un peu retournée, je posais une main sur ma poitrine en haussant les sourcils et suivait ses moindres faits et gestes, oubliant presque la présence des deux princesses qui l'accompagnaient dans ce numéro. Revêtu d'un tee-shirt large et d'un jean troué, son numéro de transformiste me laissa sans voix et quand il s'approcha d'une démarche assurée vers les musiciens qui s'en donnaient à cœur joie sur cet instrumental légendaire, il attrapa une guitare électrique avec poigne et changea de trajectoire pour aller se planter sur le devant de la scène les jambes écartées, le buste décalé.

Là, il entama un solo de guitare. Les yeux fermés, la tête se secouant dans tous les sens, il fit exploser toute la virtuosité de son doigté. La lumière se faisant plus orangée, moins agressive, je parvenais aisément à imaginer le garçon dans une colonne de fumée, des groupies lui saisissant les chevilles, prêtes à faire de lui leur quatre heures mais, je devais aussi prendre en compte le reste du groupe et à contrecœur, je tournais la tête vers les demoiselles qui elles aussi changèrent de tenue : moins proprettes, plus aguicheuses peut-être aussi, leur attitude changea du tout au tout et elles vinrent se placer avec des mouvements fluides aux côtés du jeune homme qui continua sa prestation avec passion. Toutes de rouge vêtues, les adolescentes se mirent à faire du air-guitar. Les cheveux dans le vent, mimant l'action de jouer de l'instrument, elles secouèrent la tête avec vivacité. Leurs longues chevelures se noyèrent dans la lumière des spots. Se déplaçant de part et d'autre de la grande scène je parvins à distinguer l'une d'entre elle sautillant sur une jambe, faisant mine de maintenir la guitare d'une main et secouant la tête comme électrisée par le moment.

Le son de la guitare électrique me donna des frissons et ne sachant pas où donner de la tête, je fixais mon regard sur les volutes de lumières qui balayèrent la scène puis l'assemblée d'un seul coup. Quand alors le solo de guitare se termina, ils se rassemblèrent dans leur position initiale. Le jeune homme maintenant sa guitare fermement, les deux jeunes filles cessant de remuer la tête et toute ébouriffées en plus d'être essoufflées, ils reprirent pour la dernière fois :

“ Just beat it, beat it, beat it, beat it
No one wants to be defeated
Showin' how funky, strong is your fight
It doesn't matter who's wrong or right
Just beat it, beat it, beat it, beat it ”

Fendant l'air avec des coups de poings violents, visant le public avec des regards dédaigneux, les trois acolytes mirent plus d'agressivité dans la fin de leur prestation et cela eut le don d'exalter la foule. Certains se levèrent levant les bras en l'air en huant de façon encourageante. Je remarquais un groupe de supporters au loin qui faisait plaisir à voir et quand je retournais la tête vers la scène, la musique cessa. De nouveau dans la position dans laquelle ils avaient fait leur entrée, leur look grunge changeait radicalement avec l'élégance des premières notes : les mains des jeunes filles posées sur les épaules de leur camarade, le jeune homme semblait concentré, fier de sa prestation. Le manche de la guitare relevée, une expression de fausse rage sur le visage, quelques gouttes de sueur faisaient briller sa peau sous la lumière des spots.

Un tonnerre d’applaudissement émana de la salle telle une vague particulièrement violente. Essoufflé, transpirant, l’adolescent pointa du doigt le public avec un regard agressif et relâcha la manche de la guitare qui vint s’échouer sur le sol. Ses camarades se retournèrent subitement en balançant avec arrogance leurs cheveux décoiffés : les lumières s’éteignirent à nouveau.