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 06. Do you speak French ?

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MessageSujet: 06. Do you speak French ?   06. Do you speak French ? EmptyLun 23 Mai - 0:20

Santana referma son casier avec force. Elle regarda avec envie les autres lycéens quitter l’établissement. La journée était enfin terminée et tous rentraient chez eux avec une joie non dissimulée. Elle ne pouvait pas. Son professeur de français, Mademoiselle D’Anceny, lui avait demandé plus tôt dans la journée de venir la voir dans sa salle de classe après les cours. La jeune fille ne savait pas vraiment pourquoi elle était convoquée, et espérait, pour une fois, n’avoir rien fait de mal. Elle n’avait pas envie d’une énième heure de colle.

Santana mit son sac sur son épaule, grimaçant sous son poids. Elle avait tellement de devoirs à faire qu’elle se demandait comment elle allait bien pouvoir s’en sortir. Elle avait une soirée de prévue samedi soir, et elle ne la manquerait pour rien au monde. La fête avait lieu chez l’un des footballeurs, ce qui signifiait alcool à volonté et corps peu vêtus. Tout à fait le genre de soirée dont raffolait la jeune fille. Elle avait déjà prévu ce qu’elle allait porter, promesse faite à l’un des membres de l’équipe, et elle savait qu’elle allait passer un très bon moment.
Santana se dirigea vers l’aile droite du lycée. Il n’y avait pratiquement plus personne dans les couloirs, et Santana sentit sa colère monter d’un cran. Elle avait beau essayer de trouver une raison à cette convocation, mais elle n’avait aucune idée de ce qu’elle avait bien pu faire pour devoir rencontrer son professeur après les cours. Peut-être que son devoir n’était pas bon. Elle avait choisi de s’intéresser à la poésie de Baudelaire, un de ces auteurs préférés, mais elle savait qu’elle avait quelques lacunes en grammaire. Pourtant, et elle ne l’avouerait à personne, le Français était sa matière préférée. Depuis toute petite, elle dévorait les livres de Camus, Zola et Balzac. Elle se souvenait avec précision du premier livre en Français qu’elle avait lu. Son père lui avait offert Les Fleurs du Mal pour son douzième anniversaire, et elle avait passé les jours qui avaient suivi à tenter de déchiffrer, un petit dictionnaire à la main, les vers de Baudelaire. Depuis, elle avait lu ce recueil une bonne centaine de fois, et le livre était écorné et les feuilles froissées. Son père avait voulu lui racheter un nouvel exemplaire, mais elle avait refusé. Ce livre était presque comme une relique. Elle le gardait précieusement dans sa table de chevet, et le feuilletait de temps en temps, souvent lorsqu’elle ne se sentait pas en forme.

Elle voulait partir en France, après le lycée. Peut-être faire ses études à Paris. Elle s’était renseignée sur internet, mais cela n’était pas aussi facile qu’elle l’avait pensé. Elle aurait voulu en discuter avec Mademoiselle D’Anceny, mais elle n’avait jamais eu de bons rapports avec ses professeurs, en particulier les femmes. Ces dernières la regardaient toujours avec mépris, comme si elle avait fait quelque chose de mal. Certaines la haïssaient ouvertement, d’autres se contentaient de glisser quelques commentaires acerbes sur ses copies. Pourtant, Santana prenait garde à bien agir lorsque était en présence de ses professeurs féminins. Mais ce n’était visiblement pas suffisant. Mademoiselle D’Anceny lui avait toujours semblé gentille. Elle n’avait jamais montré une once de haine en sa présence, n’avait jamais écrit de commentaires presque insultants sur ses copies. Santana s’était dit que la jeune femme était l’une des seules à agir normalement avec elle. Pourtant, maintenant, tandis qu’elle se dirigeait vers la salle de classe, Santana doutait. Le Français était une matière qu’elle adorait, et elle espérait vraiment que le comportement de son professeur envers elle n’allait pas changer.

Santana s’arrêta devant la porte. Celle-ci était entrouverte, et elle apercevait Mademoiselle D’Anceny à son bureau, occupée à griffonner quelques mots sur un tas de copies. Santana prit une grande inspiration, repoussa le sentiment de panique qui venait de naître, et frappa à la porte.
Elle n’attendit pas de réponse de la part de la jeune femme et pénétra dans la pièce. Elle se dirigea d’un pas gracile vers le bureau, la tête haute et le regard fixe. Elle s’arrêta en face du professeur et croisa les bras.

‘Vous avez demandé à me voir, Mademoiselle D’Anceny ?’
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MessageSujet: Re: 06. Do you speak French ?   06. Do you speak French ? EmptyDim 29 Mai - 14:15

"Tu verras, les cheerleaders et les sportifs... Ils sont tellement préoccupés par leur popularité que tu ne risques pas de voir un uniforme rouge ou un bout de pompon dépasser de ton cours, à moins d'une révolution majeure."

Elle avait regardé, les sourcils haussés de surprise, sa collègue qui la mettait ainsi en garde. Allons bon ! Ce n'est pas possible, on ne voyait cela que dans les séries américaines. Les élèves étaient bien obligés de venir, sans quoi leur année n'était pas validée... Et puis, les premiers jours, l'absentéisme de certains inscrits la désenchanta immédiatement : oui, elle avait eu tort, très peu d'élèves osaient se pointer dans sa classe. Optimiste - et il le fallait - elle mit ceci sur le compte de son tout nouveau poste. Après tout, elle était le grand élément inconnu de la saison.

Alexiane est quelqu'un de calme et de patiente. Sa politique s'éloigne bien évidemment de tout esprit de coercition, mais il a bien fallu qu'elle passe à la vitesse supérieure, et en a touché deux mots à certains membres de l'équipe des professeurs. Après tout, une note en dessous de la moyenne à l'examen semestriel, et on pouvait dire adieu à son année. Le chantage semble plutôt bien marcher : elle eut l'occasion d'accueillir pour la première fois un petit groupe de Cheerios, quelques sportifs, qui suivaient avec un air maussade le cours. Parce qu'ils étaient obligés, bien évidemment.

Pendant un instant, le regard clair de la jeune femme se posa sur eux. Intérieurement, le goût amer de la déception la mordit sauvagement. Il ne fallait surtout pas se laisser aller au découragement, mais dès le départ, ce genre de tension était difficile à tenir. Surtout pour une jeune prof pleine d'idéaux.

"Et fais attention aussi à ne pas trop les froisser, sinon..."

Sinon quoi, son regard avait demandé. Sinon ils n'auraient pas leur année et se ramasseraient les notes qui leur étaient dévolues en toute honnêteté? Sinon elle aurait une gommette pour bons services? Non. Elle aurait droit à se confronter à Sue Sylvester. Coach Sylvester. Et d'après ce que son oreille baladeuse avait réussi à recueillir, il ne valait mieux pas se trouver entre ses pattes, ou en tout cas il fallait oeuvrer à conserver une sorte de distance polie avec elle. Et comme Alexiane était loin de vouloir marcher sur les plates-bandes de quiconque...

La lumière divine s’abattit sur notre protagoniste : après tout, c’est ridicule, pourquoi avoir peur d’une femme qui entraîne des cheerios ? Leur monde est totalement différent. Et puis elle n’était pas non plus venue braver les Etats-Unis pour simplement prendre peur dès la première menace venue. Elle avait affronté le jury de l’agrégation, sacrebleu ! C’est donc ainsi, galvanisée par ce genre de réflexions stériles, qu’elle décida de partir en guerre. Et il fallait frapper fort. Par une évaluation. Oh non, ce ne serait pas non plus la croix et la bannière, elle n’allait pas les piéger. Ce serait une évaluation évolutive, comme elle se plaisait à penser. Il s’agissait de cerner les lacunes, en augmentant progressivement la difficulté. Ensuite, passé un certain point, ce ne serait que des questions bonus, qui ne serviraient qu’à débusquer les éléments forts et possédant déjà une culture littéraire francophone. Evidemment, d’après ce qu’elle avait entendu, elle ne s’était pas trop fait d’illusion quant aux résultats de certains élèves : les cheerios n’allaient sans doute pas passer le deuxième palier.

La jeune femme avait passé une nuit relativement courte pour leur rendre le plus rapidement possible les évaluations. Puis, à 2h du matin, le regard perdu dans sa tasse de café, elle avait lu la copie de Santana Lopez. Son regard fermé et son expression butée avaient poussé Alexiane à la mettre dans le même panier que les autres cheerios : elle se fichait comme d’une guigne du cours de français. Elle avait ouvert des yeux ronds, légèrement injectés de sang, à la lecture de la copie. D’accord, il y avait deux ou trois bricoles en grammaire. Mais comme tout le monde, enfin ! Cela restait parfaitement compréhensible et dans l’ensemble d’une bonne qualité. Mais quand Alexiane passa à l’une des dernières questions bonus, elle ressentit un vif étonnement. Il s’agissait pour les étudiants d’évoquer soit leur genre, soit l’un de leurs auteurs favoris. Jusqu’ici, elle n’avait eu que quelques rares réponses. Et les tartes à la crème évidentes. Mais Santana avait choisir de s’intéresser à Baudelaire et à cette poésie d’une violence inouïe, cette modernité haletante, où le poète finissait par tout à fait rompre avec les codes préétablis. Elle en était restée bouche bée. D’une telle manière qu’elle s’effondra sur son bureau, mettant en périls la correction de ses copies.

Elle avait donc fixé rendez-vous avec Santana. Diantre, un tel intérêt ne pouvait pas se laisser étouffer par quelques pathétiques défis de popularité. Il fallait qu’elles en parlent. Et qu’elles le préservent. Elle était donc là, dans la classe de l’aile droite où elle donnait ses cours, à terminer de corriger ses copies, nerveusement. La classe était vide, la sonnerie avait retentit. Et tous les élèves étaient partis en weekend. Elle imaginait bien que la jeune femme allait lui en vouloir. Elle entendit frapper, releva les yeux. Santana était là. Elle lui offrit un sourire un peu timide.

- Entrez, je vous en prie.

Sauf qu’elle n’a pas vraiment attendu la réponse. Tant pis, ce n’était pas extrêmement grave : la jeune femme n’était pas là pour se formaliser. Intérieurement, elle s’amusa de la démarche de la jeune femme, de sa façon de se planter devant le bureau, les bras croisés, comme un roc farouche. Cette fierté… Visiblement, la jeune étudiante s’attendait à des représailles. Tranquillement, Alexiane rangea ses affaires et laissa une copie en évidence.

- En effet, je souhaitais vous voir, à propos de votre devoir. Je comprendrais que votre départ en weekend soit ce qui vous préoccupe en priorité, en ce moment même. Mais cela me semblait suffisamment important pour que je demande à vous voir.

Elle laissa planer un suspens insoutenable. Elle adorait ça. Quelques secondes de silence où rien ne laissait transparaître sur le visage de la jeune française. Elle descendit de l’estrade, referma la porte derrière elle et se tourna vers Santana.

- Ce sont des résultats qui me paraissent extrêmement enthousiasmants. Votre choix de mettre en avant Baudelaire est assez inhabituel. Jusqu’ici, j’ai surtout vu des étudiants américains qui s’arrêtaient péniblement sur le sens premier des poèmes, sans pour autant aller plus profondément dans les interprétations. Ma première question est : d’où vous vient cette culture pour Baudelaire ?

Elle lui sourit, tentant d’instaurer en elle une atmosphère amicale et détendue. Après tout, elle était loin de vouloir déclarer la guerre à la jeune femme.
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MessageSujet: Re: 06. Do you speak French ?   06. Do you speak French ? EmptyDim 19 Juin - 5:20


Santana ne sourcilla pas lorsque la jeune professeur plongea ses yeux dans les siens. Elle soutint son regard, gardant le visage le plus impassible possible tandis que Mademoiselle D’Anceny l’informait, d’une voix douce mais ferme, qu’elle souhait la voir au sujet de son devoir. Santana sentit la panique la gagner, et bien qu’elle n’en montra rien, elle n’avait qu’une envie : prendre ses jambes à son cou et fuir le plus rapidement possible. La jeune femme se leva pour fermer la porte que Santana avait laissé entrouverte, et pendant ce temps l’esprit de la cheerleader fonctionnait à toute allure. Qu’avait-elle bien pu faire ? Elle savait que sa grammaire laissait à désirer, bien qu’elle y passait un bon nombre d’heures chaque semaine. Peut-être était-ce son choix de poèmes ? Elle avait décidé de s’intéresser à Harmonie du Soir et Le Serpent qui Dance, mais peut-être que si elle avait sélectionné des pièces plus connues, comme L’Invitation au Voyage ou L’Albatros, elle ne se serait pas tant trompée. Elle connaissait ses lacunes, elle avait conscience d’interpréter de façon beaucoup trop personnelle les écrits des auteurs qu’elle appréciait, tout particulièrement Baudelaire qui avait bercé son enfance.

Lorsque la professeur se plaça devant elle, Santana se sentit perdue. Elle ne savait pas où elle avait bien pu échouer. Et elle devait bien l’avouer, Mademoiselle D’Anceny l’impressionnait quelque peu. Elle arborait en toute circonstance un sourire amical et bienveillant, et sa voix ne s’élevait jamais et gardait ce timbre doux, presque impassible. Elle possédait cette délicatesse qui manquait aux autres enseignants, et cette gentillesse mettait Santana mal à l’aise. Elle avait l’habitude que les professeurs l’ignorent ou la snobent. Mis à part Mr Schue, aucun professeur ne lui avait adressé un sourire. Personne, excepté Mademoiselle D’Anceny. Et Santana était persuadée que cela cachait quelque chose. Tout était sûrement là : sous des airs avenants, la jeune Française cachait un côté sadique qu’elle exploitait en corrigeant les copies de ses élèves. Et elle s’apprêtait à briser le rêve de Santana ; car sans l’accord de son professeur, la cheerleader n’avait aucune chance de partir faire ses études en France. Alors c’était avec appréhension et crainte que Santana attendait que l’enseignante continue, pendue à ses lèvres comme jamais.

Lorsque Mademoiselle D’Anceny reprit la parole, Santana ne put empêcher un froncement de sourcils. Elle s’attendait à tout sauf à des compliments, et elle resta sans voix, la bouche légèrement ouverte. Jamais personne ne lui avait fait d’éloges quant à son Français. Sa mère, qui était la seule et unique personne que Santana connaissait qui possédait quelques notions de la langue, lui avait toujours dit, avec cette gentillesse qui la caractérisait, que son Français n’était qu’un tissus de fautes monstrueuses. Santana avait alors tout fait pour s’améliorer, voyant en cette langue un moyen de rendre sa mère fière. Pourtant Gloria n’avait jamais complimenté sa fille sur ses progrès dans la langue de Molière, et Santana avait tout bonnement fini par ne plus aborder le sujet avec sa mère. La jeune fille avait très vite compris que rien de ce qu’elle pouvait faire - et peu importait son degré d’implication ou un talent quelconque - ne trouverait jamais grâce aux yeux de sa mère. Gloria garderait toujours à l’esprit que sa fille n’était qu’une erreur de parcours, une fausse note dans sa vie de femme accomplie, et Santana pouvait bien être une cheerleader populaire, une étudiante exemplaire, ou un mannequin célèbre, elle resterait toujours cette tâche sur le tableau immaculée de Gloria Lopez. Et c’était l’une des raisons pour lesquelles Santana voulait quitter le pays et continuer ses études sur le continent Européen. Ainsi ne serait-elle plus obligée de lire le regret et l’amertume dans les yeux de sa mère, lui rappelant à chaque fois combien elle n’avait jamais été désirée.

Le crissement d’une chaise sur le sol la ramena au moment présent. Honteuse de s’être laissée aller à ses pensées devant un de ses professeur qui, de plus, attendait une réponse de sa part, Santana baissa le regard et posa les yeux sur le bout de ses chaussures immaculées. Elle se gratta légèrement la gorge, et le bruit se répercuta dans la salle silencieuse et pratiquement vide, la mettant davantage mal à l’aise.

"Je…"

Sa voix tremblait et elle se gifla mentalement. Santana n’était pas quelqu’un qui perdait de sa superbe facilement, et la gêne ne faisait pas partie des sentiments qu’elle éprouvaient souvent. Pourtant, en ce moment précis, elle se sentait mal, et savait qu’elle était sur le point de bredouiller. Elle prit donc une grande inspiration avant de répondre à son professeur, le regard toujours fixé sur le sol.

"Mon père m’a offert le livre des Fleurs du Mal lorsque j’ai eu douze ans, et c’est ce recueil qui m’a donné le goût du Français. C’est mon livre de chevet, et je le feuillette régulièrement. Je connais peut-être la moitié des poèmes par cœur. Je trouve la poésie Baudelairienne profonde et intense, et sa description des sentiments humains me touche. Je…"

Santana se mordilla la lèvres, tentant désespérément de trouver les mots adéquats pour décrire ce qu’elle pensait des textes de ce poète qu’elle idolâtrait tant, sans succès. Elle se contenta de hausser les épaules et ajouta :

"J’adore Baudelaire, mais il n’y a rien d’exceptionnel là-dedans. Je veux dire… C’est juste de la poésie, quoi."

Combattant cette timidité qu’elle ne se connaissait pas, Santana releva les yeux et posa un regard anxieux sur son professeur.
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MessageSujet: Re: 06. Do you speak French ?   06. Do you speak French ? EmptyMar 5 Juil - 17:48

C'était étrange. Alexiane n'avait guère l'habitude d'inspirer cette tension. D'accord, elle savait que la jeune adolescente se donnait un mal de chien pour ne rien laisser paraître. Mais Alexiane n'était pas folle : elle-même était passée par là dans sa jeunesse, et elle abhorrait être convoquée dans le bureau des profs. C'était plus fort qu'elle : qu'elle ait ou non des bons résultats dans la matière concernée, rien ne pouvait l'empêcher de paniquer quand il s'agissait de parler à un prof. La jeune femme était loin d'être un prof qui aimait inspirer la terreur. Pourtant, la situation lui arracha un sourire intérieur. Elle s'en amusait pour la simple et bonne raison qu'elle n'avait absolument rien à reprocher à la jeune fille. Et la voir ainsi paniquer était plutôt cocasse. M'enfin, il ne fallait pas que cela tombe dans la moquerie.

Et puis, il fallait impérativement rompre le charme, sans quoi la jeune française aurait bientôt l'imagine ternie d'une prof aux allures sympa, qui poignardait sans vergogne les étudiants dans le dos, ce qu'elle ne voulait absolument pas. Alexiane était pure, et sans doute un peu naïve de ce fait : elle ne cachait pratiquement pas ses émotions, et tout ce qu'elle arborait, le sourire comme l'expression de la colère, tout ceci donc, était vrai.

Outch. Jour historique. Elle avait presque hâte de raconter ça à tous ses collègues, si elle les connaissait tous, ce qui était loin d'être le cas, mais bon. Il y avait comme un parfum de triomphe personnel lorsque la jeune femme se rendit compte que Santana était littéralement sans voix. Puis, elle se sentit affreusement gênée. Zut, cette petite avait travaillé, de quel droit pouvait-elle se jouer de ce travail? Elle se reprit immédiatement.

Ce fut rapidement au tour de l'enseignante d'être surprise. Baudelaire, les Fleurs du Mal, en livre de chevet? Non, était-ce réellement possible? Même en France, bien peu de gens pouvaient se targuer de lire et comprendre du Baudelaire, en tout cas de moins en moins. La culture littéraire se faisait rare, et progressivement, se faisait phagocyter par l'absolutisme des matières scientifiques, qui trônent majestueusement au sommet de la hiérarchie scolaire. C'est d'une tristesse. Après tout, qu'est-ce qu'un scientifique? Quelqu'un qui analyse, certes, mais qui se noie dans les chiffres, dans un monde tellement dense et déconnecté de la réalité, qu'il est incapable de prendre du recul. Or, dans cette société, qui serait capable de faire opposition, si tous les penseurs littéraires disparaissaient? Enfin, elle aurait tellement de choses à dire là-dessus...

Soudain, ce fut l'émerveillement pour la jeune femme. Que ce soit en français ou en anglais, Santana semblait produire des efforts désespérés pour parvenir à mettre en place ses idées. Et souvent, cela signifiait simplement qu'il n'y avait pas les mots. Il s'agit d'une tentative de mettre des mots sur une émotion tellement forte qu'elle les transcende. Elle n'avait encore jamais eu l'occasion de croiser quelqu'un qui tenterait de lui témoigner une telle chose. L'excitation montait dans les nerfs de la jeune française : elle se sentait comme Champollion découvrant la pierre de Rosette. Il y avait quelque chose. Quelque chose de fort, qu'il fallait exploiter. Sinon, cela allait mourir. Et la jeune femme ne laisserait pas cela mourir.

L'esprit d'Alexiane fonctionnait à toute allure. Elle aussi entrouvrit les lèvres, laissa un long moment s'écouler, le temps pour elle de faire le clair dans sa tête et de laisser retomber un moment l'excitation.

- Non, bien au contraire, ce n'est pas juste de la poésie. C'est la rupture poétique par excellence. La plupart des jeunes gens que je connais lit Baudelaire pour la simple et bonne raison que c'est un classique français, sans se poser de questions. Mais vous, vous allez plus loin. Et je crois qu'il y a quelque chose à creuser, avec votre permission, bien sûr.

Elle lui sourit amicalement. Cheerios, footballeurs, loosers, Alexiane ne faisait pas attention à la partition des élèves. Elle était prête à aider tout le monde, s'ils le voulaient bien. Rien ne pouvait partir d'un manque de volonté de la part de l'élève.

- Si vous le voulez bien, nous pourrons explorer ensemble la littérature française, la civilisation et les subtilités de la langue. Je suis certaine que nous pourrons aller très loin. Il suffit que vous le vouliez.

Elle rendit la copie à la jeune femme. Un joli A.

- Vous aurez un plus si vous vous penchez un peu plus sur la grammaire, pour faire des choses plus authentiques. Mais c'est aussi pour cela que je suis là, sinon, le jeu n'aurait aucun intérêt !

Elle jeta un oeil à la porte, en réfléchissant.

- Je sais que la littérature est loin d'avoir le vent en poupe. Je n'aime pas vraiment votre système de popularité, mais je ne peux rien contre cela. Cela ne veut pas dire que je ne le connais pas. Je le respecte. C'est en le respectant que je vais mieux apprendre de lui. Et mieux m'intégrer au système. Je sais donc qu'en acceptant de travailler avec moi, vous pouvez risquer gros sur votre popularité.

Elle planta son regard clair dans les yeux sombres de la jolie latino.

- Êtes-vous prête à rejoindre mes rangs?
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MessageSujet: Re: 06. Do you speak French ?   06. Do you speak French ? EmptyJeu 28 Juil - 13:00


Santana attendait avec une certaine impatience mêlée de crainte la réponse de son professeur de Français. La jeune fille détestait ce sentiment d’infériorité qu’elle ressentait en cet instant précis, sous le regard lourd de la jeune femme qui l’obligeait à baisser les yeux et déglutir péniblement.

Santana n’aimait pas vraiment l’école, et si elle n’écoutait qu’elle-même, elle quitterait le lycée pour débuter une carrière dans le mannequinat, à New York ou Los Angeles. Pourtant elle restait là, au milieu de ces élèves insupportables et ces professeurs incompétents, et ce pour deux raisons. La première était ses parents, ou plus précisément son père, qui la poursuivrait jusqu’au bout du monde s’il le fallait pour qu’elle finisse ses études. Mais il n’aurait pas besoin de faire une opération commando, car Santana, bien qu’elle n’aimait pas les trois quarts des matières qu’on l’obligeait à suivre au lycée, savait qu’elle avait besoins d’un diplôme si elle souhaitait fuir Lima, cette ville de loseurs où elle n’avait rien à faire. Elle méritait bien mieux que de finir femme au foyer ou serveuse dans le café du coin, perdue dans cette petite ville où tout le monde se connaissait assez pour critiquer chacun de vos faits et gestes. Santana avait suffisamment d’estime pour sa personne pour savoir que son avenir se trouvait loin d’ici, loin de cette ville, de cet état, et peut-être même de ce pays.

La France, elle en rêvait depuis toute petite, et surtout depuis son court voyage dans la capitale durant l’été de ses douze ans. Elle se souvenait de la beauté poétique de Paris, avec ses petites rues escarpées, ses monuments magnifiques. Elle revoyait la classe naturelle des Parisiennes, leur beaux vêtements et leurs airs conquérant et intouchable. Elle se remémorait la langue chantante, si belle et si éloignée de la sienne, sèche et brutale. Oui, c’était ce qu’elle retenait de Paris : la poésie, la beauté, cette impression d’entrer dans une autre époque, dans un autre monde. Elle avait supplié ses parents de l’envoyer au lycée international, mais la réponse de sa mère avait été sans appel : "Qu’irais-tu faire là-bas, Santana ? Tu ne parles pas un mot de Français, et tu es bien trop mauvaise élève pour que je me ridiculise auprès de mes amis dont leurs enfants y suivent une scolarité exemplaire. Cesse de rêver et va plutôt faire tes devoirs de mathématiques."

Depuis ce jour, Santana avait redoublé d’effort, se promettant qu’elle finirait par réaliser son rêve, même si pour cela elle devait se forcer à aimer l’école tout en jouant sur deux tableaux : celui de la fille populaire qui se foutait de tout et principalement des études, et celui, secret, de la fille studieuse, donc le but ultime était de faire des études supérieures à l’autre bout du monde. L’histoire, les mathématiques, la littérature Anglophone, tout cela, elle s’en moquait comme de son premier sac Vuitton. Mais le Français, c’était comme sa bouée de sauvetage dans ce lycée, dans cette ville à laquelle elle n’appartenait pas.

C’était pour cette raison qu’elle craignait la réponse de Mademoiselle D’Anceny. La jeune femme pouvait, en un instant, briser tous ces rêves et ces espoirs.
Pourtant, lorsque la professeur reprit la parole, Santana sentit le soulagement la traverser. Son corps se détendit instinctivement, et elle laissa échapper un petit soupir. Elle l’écouta patiemment et avec attention, son esprit fonctionnant à toute allure. Était-elle capable d’égratigner quelque peu sa réputation, celle qu’elle avait mis des années à créer et à façonner pour arriver où elle en était - en haut de l’échelle sociale de McKinley -, juste pour pouvoir poursuivre un rêve fou ?

Santana tira sur sa queue de cheval avant d’affronter le regard de son professeur.
"J’aimerai vous répondre oui, sans hésitation, Mademoiselle D’Anceny, mais malheureusement je ne peux pas. J’aime le Français, et ce bien plus que ma réputation, mais malheureusement celle-ci est la seule qui me fera avoir mon diplôme sans encombre. Le lycée est une jungle, Mademoiselle, et je pense que vous n’avez pas conscience de l’importance de la popularité dans un endroit comme celui-ci. Si vous ne faites pas partie du top, on vous écrase, et vous venez ici tout les matins avec la boule au ventre. Donc non, je ne suis pas prête à dire adieu à ma réputation, et ce même si je sais que les études sont plus importantes qu’une place dans l’échelle sociale de McKinley. Je suis désolée."

Ses yeux se posèrent de nouveau sur ses chaussures, et elle prit une grande inspiration avant de continuer.
"Mais j’aimerai tout de même approfondir mes connaissances sur le Français, pour des raisons personnelles et peut-être que…"

Elle releva la tête. Elle essuya ses mains moites sur sa jupe froissée et, le menton bien haut accompagné de son air le plus farouche, elle plongea les yeux dans ceux de son professeur.
"Si vous êtes d’accord, et dispo, on pourrait se voir en dehors du lycée. Ça serait comme des cours particuliers, et je vous payerai, bien entendu."

Son cœur battait trop fort dans sa poitrine, si fort qu’elle était persuadée que Mademoiselle D’Anceny pouvait l’entendre. Santana savait qu’elle risquait gros en demandant cela, et elle avait peur d’avoir fait la plus grosse bêtise de sa vie.
Devant le silence qui suivit sa proposition, la jeune cheerio soupira doucement avant de se diriger vers la porte. Tant pis, elle continuerait à apprendre le Français de son côté. Elle n’avait besoin de personne, après tout.
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MessageSujet: Re: 06. Do you speak French ?   06. Do you speak French ? EmptyMer 14 Sep - 15:03

La réponse de la jeune femme tarda un petit peu. Pendant l'instant d'incertitude, Alexiane ne pipait mot, se contentant de la regarder. Mais, depuis le début de leur entretien, le regard de la jeune enseignante s'était adouci. Pas la peine non plus de rendre la jeune fille mal à l'aise. Enfin, apparemment, c'était déjà le cas, rien qu'en la regardant baisser les yeux. Cela ne devait pas être commun, en réalité, d'après ce qui se disait dans les couloirs. Alexiane sentit une faille se creuser dans son coeur : elle aurait voulu tendre la main, la poser sur l'épaule de la jeune femme afin de la réconforter, et lui promettre que cela resterait entre elles deux. Elle n'irait pas fanfaronner auprès des autres profs, en se vantant de son succès inattendu sur la cheerleader. Ce n'était pas trop son genre.

Enfin, Santana parla. Alexiane l'écouta, sans rien dire de nouveau, le visage légèrement incliné, pensive et attentive. Inconsciemment, elle avait prévu cette réponse, mais malgré elle, elle serra ses poings, une légère flamme pointant timidement son nez dans sa poitrine. Elle savait qu'elle ne tarderait pas à s'enflammer, détruisant dans le même temps toutes les défenses de la jeune femme, qui permettaient de la contenir dans son calme. Pour dissimuler son trouble, la jeune femme passa ses poings derrière son dos, comme un militaire au repos.

Pour elle, c'était tout bonnement inconcevable. Sans le vouloir, la jeune femme avait touché une corde sensible dans l'âme de la jeune française. Pour elle, le système était tellement différent. Cela ne pouvait pas être réel. Comment ces jeunes pouvaient-ils réellement mettre en avant le système de réputation, alors que leur propre avenir était en jeu? Oh, elle n'en voulait pas à Santana, bien sûr, elle n'était qu'une sorte de malheureuse victime de ce système. Et quand bien même Alexiane aurait voulu prendre les armes pour mettre à bas ce système, pour crier à la bêtise et l'ineptie, elle aurait tout simplement été radiée de sa place d'enseignante, elle en était quasi certaine. Elle savait que c'était la loi, ici. Qu'elle n'y pouvait rien, ou si peu. Elle tenait elle-même à sa réputation, quand bien même ce n'était pas réellement le même type, et n'avait aucune envie de se faire mépriser par les autres membres du corps enseignant.

- Je vois.

Ces simples mots furent sa réponse. Il y avait là la sincérité de la constatation, mêlée à une sorte d'amertume, celle de la résignation. Elle perdait ici la possibilité d'avoir une réelle bonne élève en cours, qui serait dynamique et participante : elle supposait qu'à cause de la fameuse loi de la réputation, la jeune cheerios ne pourrait faire autrement que taire son intérêt pour la littérature. C'était terriblement dommage. Enormément de mots se bousculaient aux lèvres de la jeune française, mais aucun ne parvenait à franchir la barrière de ses dents : ses éléments auraient sans aucun doute été confus et l'argumentaire de ce fait absolument pas recevable. La jeune française baissa légèrement la tête, pensive.

Des cours particuliers. L'idée avait cheminé lentement dans la tête d'Alexiane, avant même que la jeune femme lui en fasse la proposition. Mais en avait-elle le droit? Est-ce que cela lui serait réellement profitable? Le professeur D'Anceny considérait l'enseignement comme un sacerdoce, ce n'était pas réellement la rémunération qui l'intéressait, en tout cas pas la rémunération matérielle et concrète qui prenait la forme d'un billet de dollar. Elle ne désirait qu'une chose, une chose que seuls les gens qui sont déjà relativement aisés peuvent se permettre de désirer et d'obtenir. En France, les cours particuliers au sein de l'établissement scolaire étaient interdits, à moins d'obtenir une dérogation. Oui, on ne savait jamais, si la jeune prof était saisie d'une envie irrésistible de violer son élève en lui déclamant du Racine. Enfin, il y avait des malades partout. Même à la tête des grandes organisations mondiales. Elle ne savait pas comment cela se passait aux Etats-Unis. Elle devrait peut-être se renseigner. C'était un petit peu chaotique dans sa tête.

Santana crut sans aucun doute que son silence n'avait d'égal que son mépris à son égard. Ce qui n'était pas du tout le cas. Alexiane était toujours à son bureau, ses deux mains posées sur le rebord, bien à plat, s'appuyant légèrement sur ces dernières, le visage incliné vers le plateau, regardant sans réellement les voir son sac en cuir, couché sur le flanc. Santana avait disparu de son champ de vision périphérique. Alexiane revint brutalement à la réalité et releva la tête.

- Attends.

Brutalement, elle était passée du vouvoiement français au tutoiement. C'était spontané, comme un élan irrépressible et désespéré pour la retenir encore un peu dans sa salle de classe. Elle descendit de l'estrade.

- Je sais que tu as de l'orgueil. Je sais que la loi du lycée est celle de la réputation. Faire ami-ami avec un prof ce ne serait pas bienvenu. Je comprends. Je comprends ce que tu ressens. Mais ne penses-tu pas qu'il est possible que les choses changent? Si tu penses que le cours de littérature peut être envisagé d'une façon différente, alors aides-moi. Je vais avoir besoin de toi, et des autres.


Elle marqua une pause. Sa main s'était posée sur l'épaule de Santana, sans pour autant qu'elle ne s'en rende compte. Son coeur battait de plus en plus fort. Elle savait qu'elle mettait Santana au pied du mur. Mais elle avait vraiment besoin d'elle pour que les choses évoluent... Au fond, c'était un sacré défi. Mais si elle était la cheerleader qu'on décrivait, elle devait aimer les challenges.

- Si tu te sens le coeur de m'apporter ton aide, j'aimerais que tu chantes pour moi. Soit devant les autres, soit devant moi seule. Que tu me trouves une chanson en français pour me montrer ton implication. N'importe laquelle.

Elle rangea sa grande main dans la poche de son pantalon de costume.

- Sinon, au prochain cours, je te donne un rendez-vous pour le cours particulier.

Elle hocha doucement la tête.

- Si tu n'as rien à objecter... Bon week-end, Santana. A mardi.

Le temps de la réflexion était peut-être un peu court, la jeune femme se le représentait parfaitement. Elle replongea son regard vert dans le sien.

- Tu as mon e-mail, si jamais, je vous l'ai donné la dernière fois.


Elle lui adressa un léger clin d'oeil, amical et chaleureux, puis fit deux pas en arrière.
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