07. Let's do some warming up

La sentence était tombée. Pour vaincre l’ennui de son quotidien de pionne errant dans tout McKinley à la recherche de quelque chose à faire, Mad Wild s’était inscrite de bon cœur au championnat de football organisé par le lycée. Rien de tel qu’un peu de sport pour passer le temps sainement bien sûr, mais c’était surtout l’esprit de compétition qui commençait à régner partout dans les couloirs qui avait achevé de convaincre la jeune femme. Après tout, cela lui ferait le plus grand bien de s’impliquer un peu plus dans l’établissement. Elle ferait connaissance avec les plus que charmants footballeurs du lycée, ce qui en plus d’être agréable, rentrait totalement dans son plan d’action « se rapprocher des élèves » lancé quelques jours auparavant. Ce matin-là elle s’était donc rendue dans le hall d’entrée, toute guillerette, pour découvrir la liste des membres de son équipe. Et quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’elle découvrit en tête de ladite liste le nom d’Ashton Kinney. Oh. Mon. Dieu. Ces trois mots résonnèrent dans son esprit vide pendant quelques instants de blanc total où elle fut coupée de toute civilisation. Elle était plantée sur ses talons aiguilles rouges, au milieu du passage, à fixer bouche bée le panneau d’affichage comme si quelque chose allait se passer, que la terre allait s’ouvrir sous ses pieds, espérant que quelqu’un allait venir ôter cette blague pour la remplacer par une autre liste. Comment est-ce que cela avait bien pu arriver ? En y réfléchissant bien ce n’était pas très surprenant : elle s’était engagée auprès de Figgins sans s’informer de la nature du championnat ou du rôle qu’elle devrait jouer. Elle avait cru qu’elle ferait office de second pour le coach, la gourdasse blonde ou quelque chose du genre, mais là il était clair qu’avec un second professeur sur la liste elle allait faire partie des joueurs. Maddie ne connaissait même pas le début de l’ombre de l’once de la base des règles du football américain ! Elle avait été cheerio au lycée, me direz-vous, elle devait bien connaître le principe. Que nenni ! Lorsqu’elle était encore dans son uniforme rouge et blanc l’adolescente était bien trop concentrée à réaliser sa chorégraphie à la perfection et à impressionner les garçons de l’équipe adverse pour se soucier de ce qui se passait en réalité sur le terrain. Et voilà qu’elle allait devoir enfiler une de ces tenues ridicules aux épaules démesurément rembourrées et l’un de ces casques à grille ? Impossible. Preuve s’il en était qu’elle devait vraiment remédier au plus vite à sa tendance tête-en-l’air pour lire les contrats au-delà de la première et de la dernière ligne. Mais il était trop tard à présent, elle s’était engagée et elle ne pouvait en aucun cas faire faux-bond à cette liste de jeunes hommes qui seraient sûrement fort déçus de perdre un de leur seul membre féminin. À cette pensée, elle ne put s’empêcher de sourire, amusée par son imagination débordante qui la berçait de douces illusions. Après tout, qu’avait-elle à perdre ? Elle s’amuserait à coup sûr : courir sur un terrain boueux et se faufiler entre de gros musclés, la simple perspective de se voir au milieu du terrain avait quelque chose de jouissif, et pour ce genre de sensation elle était prête à mettre un de ces infâmes dentiers de protection dans sa bouche.

Mais toutes ces divagations sur son rôle futur au sein de son équipe flambant neuve l’avait fait dévier de sa surprise initiale. Ashton Kinney ! Le Ashton Kinney ! Mad n’en revenait de voir son nom en haut de la feuille ! Le destin lui réservait décidément bien des surprises, et il avait plus d’un tour dans son sac. Laissant derrière elle la feuille bleue accrochée au mur, elle repartit en marchant tout doucement vers la salle des professeurs en tâchant d’éclaircir ses idées. Elle savait que son ancien petit ami travaillait au lycée comme professeur de biologie, mais leurs chemins ne s’étaient pas encore croisés, et elle n’avait pas réfléchi à la manière de l’aborder. Les retrouvailles allaient être étranges, elle aurait parié un gros billet là-dessus. A fortiori après une séparation aussi pathétique : du jour au lendemain elle ne lui avait plus adressé la parole, lassée de devoir entretenir une relation suivie avec lui, elle avait opté pour l’indifférence que ce dernier lui avait bien rendue. Ils ne s’étaient donc jamais vraiment quittés, ni jamais vraiment fâchés. C’était plus comme une dérive qui les aurait séparés sans qu’ils ne s’en rendent véritablement compte. Si seulement ils avaient eu une altercation dramatique comme on n’en voit que dans les films : il aurait crié à s’en érailler la voix, elle aurait pleuré à en faire couler son mascara waterproof, ils se seraient réconcilié puis un nouvel éclat tragique aurait achevé de briser leur couple de manière théâtrale. Mais non. Elle avait sauté dans les bras du suivant et il s’était trouvé une nouvelle petite amie en moins de deux c’était certain. La banalité de cette rupture la taraudait seulement maintenant. Mad n’avait jamais vraiment eu de talent prononcé pour entretenir les relations et elle avait brisé des couples plus de fois qu’elle ne s’était engagée. Ne l’ayant jamais croisé dans les couloirs, elle ne savait même pas à quoi il ressemblait à présent. Elle avait entendu la rumeur selon laquelle il serait désormais en couple avec son amie Désirée Cravy, mais la jeune femme s’était bien gardée de faire une quelconque mention de son ex devant elle. Aaah… elle ne put s’empêcher de lâcher un long soupir alors qu’elle se traînait toujours vers le point de rencontre favori des professeurs, ne sachant plus quoi faire. Ils n’avaient même jamais été amis avant ! Qu’est-ce qu’elle allait bien pouvoir trouver à lui dire pour renouer le contact sans que ce soit le moment le plus embarrassant de sa vie ? Embarrassant n’était probablement pas le mot. Quelque chose entre ennuyeux à mourir et vraiment trop risible serait plus adéquat pour décrire le sentiment que ces retrouvailles inspiraient à Madeleine.

Ce n’est que lorsqu’elle fut heurtée par un de ces footballeurs à la carrure de taureau en rut et rattrapée de justesse par un autre qu’elle reprit ses esprits. Au final, son véritable objectif dans toute cette histoire, c’était de profiter de se mêler un peu à des adolescents poussés à bout par les hormones ! Ashton n’était qu’un dommage collatéral, et puis, dans ses souvenirs, il était loin d’être désagréable à regarder lui-même. Au diable la scène de retrouvailles, elle allait le provoquer directement et éviter la confrontation grâce au jeu ! Il fallait bien que quelqu’un lui explique les règles de ce maudit jeu de ballon et elle allait avoir besoin d’entraînement pour faire face à des molosses déchaînés ! Ashton jouerait donc le rôle du collègue attentionné qui l’aiderait à se sortir de ce mauvais pas et l’affaire est dans le sac. Pressant le pas, elle finit par atteindre la salle des professeurs et griffonna sur un bout de papier « Hey team mate ! Rendez-vous demain 10h sur le terrain de sport pour un petit échauffement. Maddie.» : avant de le glisser dans le casier de sa victime. Le mot n’était guère explicite, mais ce serait déjà un premier test pour s’assurer qu’il se souvenait bien d’elle. Après tout elle pouvait en douter : il avait dû avoir son lot d’aventures pour l’oublier et puis il ne s’était pas plus manifesté qu’elle quand elle avait fait son grand retour à Lima. Et voilà comment Madeleine Wild éliminait un problème : en rejetant la faute sur autrui.

C’est donc complètement décomplexée, vêtue d’un short blanc et d’un t-shirt informe qu’elle se présenta dans le stade de McKinley à 10h moins 10 pour attendre son nouveau partenaire. Elle n’avait pas vraiment pensé à ce qu’elle lui dirait, bien trop occupée à regarder son fascinant documentaire sur la sexualité des pandas la veille au soir. Il finirait bien par arriver et elle aviserait en fonction de ce que lui dirait. Pas très téméraire mais elle n’avait pas mieux en réserve. Elle alla poser le sac contenant ses affaires de rechange à côté de la sortie des vestiaires et s’assit dans l’herbe pour faire quelques échauffements. La surveillante était couchée sur l’une de ses jambes pour attraper son pied lorsqu’elle entendit tout près de sa tête le bruit des pas d’Ashton qui avait fini par arriver.

Cela faisait maintenant quelques mois qu'Ashton Kinney avait débarqué dans ce petit état qui s'appelait Ohio. En arrivant ici, il avait eu le malheur de penser qu'il serait heureux, et que de retrouver son ancien lycée lui ferait le plus grand bien. Et bien, c'était mal vu... Quand il fut arrivé, la première chose qu'il fit, c'était d'aller voir le proviseur, afin de se présenter en tant que professeur de biologie. Bien sur, Figgins n'avait pas hésiter une seconde : Ashton ne demandait pas énormément, même moins que la plupart des jeunes professeurs. De plus, et ce n'était pas un détail à oublier : Ashton était ce qu'on appelle un enfant surdoué... Il aurait pu travailler pour la NASA, ou même pour des recherches poussées scientifiques...

Mais non, ce qu'il demandait, c'était une place de professeur. Le jeune homme ne voulait en rien ressembler à ses chercheurs n'ayant pas de vie personnelles, et passant leur temps dans un laboratoire, à faire des blagues que seuls les hommes ayant fait de grandes études peuvent comprendre, et surtout, apprécier... C'était donc avec une joie de vivre incroyable que le beau brun avait prit le poste de professeur. Et comme la cerise sublime le gâteau, Ashton était sublimé par Désirée, une jeune professeur de littérature au lycée... Il avait vraiment eu le coup de cœur pour cette jeune femme, et le lui avait bien fait comprendre. Il réussit même à sortir avec la jeune femme, ce qui vraiment le rendit heureux... Jusqu'à la semaine dernière...

Lors du mariage de son oncle, lui et sa petite amie ont parlés de leur avenir, et depuis... rien ne va plus... Entre le mariage en grande pompe et ultra romantique d'Ashton, et le mariage à Las Vegas en t-shirt et jean de Désirée... Il n'y avait pas photo ! La discussion à finit par éloigner les deux amoureux, jusqu'à ce que leur couple ne cède. Fini les projets et les plans qu'Ashton avait en tête, et bonjour le célibat. C'est donc un Ashton totalement déprimé qui s'était pointé au lycée un lundi matin, pas en état de faire cours... La journée avait passé à la vitesse de la lumière, ayant été dans ses pensées tous le temps... oubliant presque qu'il était professeur et que c'était aux élèves de s'endormir pendant les cours. Tant pis, il leur avait collés une interrogation surprise à chacune des classes, et le tour était joué.

Et c'est ce jour la où, en se dirigeant vers la sortie, Ashton vit une fiche sur le tableau d'affichage... Apparemment, 4 équipes de football étaient organisés par le lycée, et elles allaient donc disputer des match... Après avoir regardé la feuille longuement, Ashton prit un stylo, puis signa de son nom. Franchement, certes il avait perdu la femme qu'il aimait, mais il ne voulait pas faire comme tous les faibles, et rester dans son coin. Alors si pour se sentir mieux il devait se rouler dans la boue, et plaquer certains de ses élèves, il fallait qu'il le fasse. Euh... Plaquer certains élèves ? Alors la, plus aucune hésitation... Nombreuses sont les fois où le jeune professeurs qui rêvent de prendre un élève, et de lui donner un coup afin de le remettre à sa place...

C'est donc en essayant de garder la tête haute que le jeune Ashton se rendit vers la feuille avec les équipes afin de voir avec qui il allait devoir jouer... Il vit certains noms qui réussirent à le réjouir, comme par exemple Alex Donovan. Il s'entendait très bien avec le jeune homme, et le considérait vraiment comme un fils... Jensen était le demi frère de sa meilleure amie, et Madeleine... Euh... Madeleine ?? Il relit la ligne plusieurs fois, et dut se rendre à l'évidence... Madeleine Wild, autrement dit, son ex petite amie... D'ailleurs, il n'avait jamais vraiment rompu avec elle... Enfin, il fut vraiment sous le choc de savoir qu'il allait devoir faire équipe avec elle, mais n'en était pas déçu. Malgré leur petite aventure, Madeleine était une femme qu'il appréciait, et il savait qu'en jouant à ses cotés, il ne risquait pas de s'ennuyer.

Il sourit en s'éloignant, puis se rendit dans la salle des professeurs pour y déposer des copies corrigées qu'il rendrait dans un avenir proche. En ouvrant le casier, il vit un petit morceau de papier tomber à terre... Il se pencha pour le ramasser, puis l'ouvrit pour y découvrir une écriture familière. - Hey team mate ! Rendez-vous demain 10h sur le terrain de sport pour un petit échauffement. Maddie - Bon, et bien, c'est officiel, il avait rendez vous le lendemain matin avec son ex pour s'entrainer... En y réfléchissant, ce n'était pas une mauvaise idée... Il prit alors sa voiture, et une fois chez lui, se jeta dans son lit... Quand il se leva le lendemain matin, il n'eut pas envie de se lever, mais après un bon coup de pied mental aux fesses, il vit l'heure sur son réveil... 9h30 ! La, c'était critique...

Il prit juste quelques fringues dans un sac, et décida de prendre une douche dans les vestiaires du terrain. Après tout, il n'allait quand même pas arriver en retard ! Il monta dans sa voiture, et fonça jusqu'au stade. En 10 minutes, il finit par arriver, et courut jusqu'à la douche commune, qui bien sur, était vide. Il fit alors couler l'eau tout en se déshabillant, et en essayant de faire émerger son cerveau. Une fois sous l'eau, il se laissa totalement aller... Il se plaqua contre le carrelage glacé, et attendit quelque chose, un signe qui allait le faire réagir... Depuis sa rupture, il n'était plus vraiment lui même, un garçon qui ne se prenait pas la tête, et qui aimait la folie... Et c'est en voyant une des banderoles qui encourageait les équipes qu'il eu un déclic... Il s'éloigna du jet d'eau, puis détacha l'affiche qui soutenait son équipe, à savoir Team Will.

Il prit une grande inspiration, puis se dirigea vers le stade... Il faisait assez bon dehors, et se retrouver nu dans un stade vide était étonnamment libérateur... Alors sans réfléchir, il prit la pancarte, la brandit au dessus de sa tête, et se mit à courir autour du stade. Il ne prit même pas le temps de regarder ce qu'il se passait autour de lui, se vidant la tête au maximum pour apprécier ce moment de pur liberté. Peu importait qu'il y ai des personnes dans les gradins, ou autre... Tout ce qu'il pensait, c'était à courir... Il finit quand même rapidement son tour, et jeta un dernier coup d'œil au stade. C'est à ce moment la qu'il vit une silhouette familière dans le stade... était-ce Madeleine qui arrivait au milieu du terrain ? Soudainement, il fut prit d'un frisson, et courut dans les vestiaires, la bannière autour de sa taille...

Il se dépêcha de retourner à son jean, et prit son portable : 9h52... Il mit alors ledit jean, et prit son t-shirt dans la main, en allant au centre du stade. De toute façon, ce n'était pas comme si Madeleine ne l'avait jamais vu nu... mais ce n'était pas la question ! Il avança vers elle, légèrement rouge vu l'action qu'il venait d'effectuer, mais essaya de rester calme... Il s'avança juste vers elle, et finit par se mettre dans son angle de vue, et tenta de faire comme si de rien était...

" - Salut toi ! J'ai eu ton mot... Mais j'aurais du comprendre qu'échauffement voulait dire séance de bronzage... "

Il lui sourit, puis se pencha sur elle afin de l'aider à se relever.

" - Comment tu vas ? ça fait... un bail ! "

En arrivant sur le terrain Mad n’avait rien remarqué d’anormal, comme à son habitude elle était perdue dans ses pensées, à s’imaginer avec tel ou tel grand sportif plutôt qu’avec son ex sur le terrain de sport du lycée. Partie optimiste le matin, la jeune femme avait un peu regretté le choix du short pour un début mars encore frais. Le contact de l’herbe légèrement humide sur sa peau la fit frissonner et elle se maudit intérieurement d’avoir choisi un horaire si matinal. Qui donc pouvait vouloir s’entraîner à l’aube par un temps pareil ?! Mais malgré tout elle resta assise par terre, tâchant de capter les quelques rayons de soleil qui perçaient au travers des nuages. Elle ne remarqua rien lorsque du bruit se fit entendre du côté des vestiaires, au contraire la jeune femme semblait désormais à des années lumières de ce terrain et de ses préoccupations du moment. Madeleine rêvassait. Déconnectée en un instant du monde réel, la jolie blonde ne perdait jamais une occasion de déambuler dans un monde imaginaire fait de bric et de broc. Connu d’elle seule cet univers presque magique était le refuge de tous ses fantasmes et de tous ses souvenirs chers. Peut-être y cherchait-elle Ashton, mais tout lui semblait si brouillé ce matin-là. Elle ne mettait de visage sur aucun des amis qu’elle avait fréquentés à l’époque où ils sortaient ensemble, tout cela semblait si lointain. Cette impuissance la rebuta : elle n’était pas si vieille, comment pouvait-elle oublier si vite ce qui avait été le centre de sa vie quelques années auparavant ? La jeune femme saisit soudainement son pied pour le ramener derrière ses fesses et tirer tous les muscles de sa jambe jusqu’à s’en faire souffrir. En tant qu’ancienne cheerio elle avait su entretenir la souplesse de son corps qui s’avérait fort utile à bien des moments, mais le sentiment de douleur que celui-ci provoquait parfois était un moyen infaillible de la ramener à la réalité. La morsure du froid qui lui donnait la chair de poule alliée à la douleur de ses ligaments trop violemment étirés la plongeait dans un état second pour quelques secondes où elle perdait tout contrôle et pouvait se laisser aller à oublier qui elle était et ce qu’elle voulait.

Mais elle n’eut pas le temps de se torturer plus avant, son partenaire était enfin arrivé. Elle releva les yeux et relâcha immédiatement la pression qu’elle exerçait sur sa jambe. Mais qu’il était beau ce garçon ! Elle n’avait pas souvenir qu’il fût aussi beau dans sa jeunesse, mais cette barbe de trois jour avait immédiatement allumé de petites étincelles dans les yeux de Mad. Comme toujours elle ne pouvait s’empêcher de fondre devant un physique avantageux. Ses lèvres pincées à cause de la douleur s’étendirent en un sourire chaleureux pour accueillir son collègue. Son visage était assez rouge, de même que tout son corps, comme s’il avait subi un violent choc de températures, ce qui intrigua la jeune femme qui voyait mal comment une telle chose avait bien pu se produire. Il faisait certes frais mais certainement pas à ce point. La surveillante n’eut pas le temps de s’attarder sur la question qu’il enchaînait sur une de ces remarques dont lui seul avait le secret et qui arracha un petit gloussement à la jeune femme. Décidément il n’avait pas changé, et de toute évidence il se souvenait d’elle. À l’entendre parler la situation n’avait pas l’air si compliquée en fin de compte, il pouvait très bien renouer des liens amicaux en se servant de leur passé comme d’une base. Certes, ils n’avaient jamais vraiment été amis, mais on ne va pas chipoter sur de si menus détails. Elle rit à sa remarque et mis sa main au-dessus de ses yeux pour se cacher de la lumière trop blanche que lui renvoyait le ciel couvert de nuages pour mieux toiser son interlocuteur.

Non mais tu m’as bien vue, bronzer à cette heure de la matinée, si ce n’était pour tes beaux yeux je ne me serais même pas tirée du lit ! Je suis très sérieuse moi monsieur.

Son ton feignait le sérieux et l’indignation, mais il ne faisait aucun doute qu’il verrait clair dans son jeu. Ils ne s’étaient pas fréquentés pour rien ! Elle attrapa sa main pour se relever avec autant de grâce que possible, ce qui n’était pas évident étant donné la douleur qui persistait encore dans sa jambe droite. Mais sans tomber le masque de sourire qu’elle arborait elle s’appuya légèrement sur l’épaule du jeune professeur pour se réceptionner et réhabituer sa jambe à un afflux de sang normal et au poids de son corps. Essuyant les brins d’herbes qui restaient sur son short et ses jambes, elle souriait bêtement à le voir planté là. Est-ce que cette scène était même réelle ? Si on lui avait dit qu’elle reverrait un de ses ex, et pire, qu’elle devrait avoir de bonnes relations avec lui, elle aurait sûrement ri au nez de cette personne. Mais impossible n’est pas Wild, et elle avait la ferme intention d’entretenir une relation d’amitié purement désintéressée avec Ashton Kinney, parole de Mad.

De fait, ça ne nous rajeunit pas ! Mais je vais très bien. Je n’en dirais pas autant pour toi par contre, tu as l’air… d’une tomate !

Elle ne put s’empêcher de rire en le considérant une fois de plus de haut en bas, il était sérieusement rouge, et il n’avait pas l’air tranquille. Et puis qu’est-ce que c’était que ce jean décontracté pour faire du football américain ? Madeleine avait beau ne pas connaître les règles, elle savait tout de même que le but était de plaquer son adversaire à un moment ou à autre pour l’empêcher d’avancer, et c’était même ce qui la réjouissait dans cet entraînement. Se rouler dans l’herbe mouillée et la boue avec un ancien petit ami, en voilà une activité qu’elle devait être agréable.

Je te préviens tout de suite, je vais avoir besoin d’une sérieuse mise à niveau question foot, plaquage dans la boue mis à part, je n’y connais rien !

Tout en marchant vers le milieu de terrain, Ashton se débattait avec son haut. Dans la précipitation, le pauvre homme avait confondu la manche avec le trou destiné par la tête, ce qui lui vallu quelques secondes de panique, et d'agitation en vue de réparer cette erreur. Bien sur, après quelques minutes, son t-shirt était revenu sur son torse, et le plus normalement du monde. la nervosité était une chose qu'il ne connaissait pas beaucoup dans la vie, mais le fait d'avoir une espèce de cours particulier avec son ex petite amie le rendait nerveux... et il n'aimait pas du tout ça ! Pourquoi la jeune femme lui donnait elle cette envie de partir en courant ?

Peut être était-ce à cause de leur passé... C'est vrai que parmi ses ex petites amies, Madeleine était la seule avec qui c'était... Bizarre... Ils avaient formé ce que jeune on appelle un couple, mais qui n'en était pas vraiment un... Franchement, mis a part le sexe, et quelques petites sorties, Ashton n'avait pas l'impression d'être en couple... Du moins, c'était une situation assez délicate... Il avait aimé la jeune femme bien sur, mais de la à former un couple... Ils étaient encore jeune, et c'était surement trop tôt... Peut être était-ce pour ça que les deux jeunes n'avaient pas trop eu de mal à enchainer une autre relation lors de leur (presque) rupture...

Bref, une fois correctement habillé, il se lança, et brisa le silence entre eux. Bon d'accord, le silence n'était pas vraiment présent vu que la jeune femme ne l'avait pas encore vu. C'est donc par un simple "Salut" qu'il fit savoir qu'il était la. Bien sur, il ne put pas s'empêcher d'ajouter une petite taquinerie sur les activités de la jeune femme, ce qui eu son petit effet. Quand il entendit son petit rire, Ashton craqua, et sourit à son tour. Il est vrai que ça lui rappelait des souvenirs étant loin d'être désagréable, et même excellents. Il continuait à regarder son ex, afin de voir comment elle allait réagir à ses habituelles boutades, ce qui ne manqua pas.

Il vit d'ailleurs que Madeleine était anormalement rouge, ce qui le fit sourire intérieurement... Peut être que le fait qu'il soit extrêmement gêné par ses actes se verra moins... Il croisa les doigts mentalement, avant de tendre la main à la jeune femme pour qu'elle puisse se relever sans trop de pénibilité. Il l'écouta parler, et ria à son tour devant son expression et l'intonation de sa voix. Pour l'avoir fréquentée pendant pas mal de temps, il savait reconnaitre quand elle était sérieuse ou pas, et dans ce cas précis, il n'avait qu'une envie : entrer dans son jeu.

" - Oh pour mes beaux yeux hein ? Je suis flatté d'avoir le droit à tant d'effort de ta part... Et puis tu sais, certains préfère bronzer à ces heures, tout simplement parce que les rayons du soleil sont beaucoup moins nocifs, et que malgré le fait qu'il ne fasse pas très chaud, il nous envoie quand même des ultraviolets ce qui permet... "

Hey, ce n'était plus une réponse la, c'est un cours de biologie qu'Ashton était en train de donner à son ex petite amie ! Heureusement, il s'était arrêté avant de devenir trop barbant, et se mit à bredouiller des excuses, et assez maladroitement... Passant une main dans ses cheveux, il essaya de s'excuser avec le sourire, pour avoir plus de chance d'obtenir son pardon, donc il n'avait pas besoin d'ailleurs...

" - Désolé... tu me connais, quand je domine un sujet, je ne peux pas m'empecher ! Mon intelligence qui ressort... "

En disant ça, il afficha un petit sourire timide... Il est vrai que sa connaissance lui avait causé pas mal de problème depuis sa jeunesse, et il ne s'était pas débarrassé de cette habitude qui constituait à étaler son savoir quand il en avait l'occasion. Une fois Madeleine relevée, et à coté de lui, elle dit quelque chose qui le déstabilisa encore plus... ça se voyait tant que ça qu'il était rouge ? En entendant cette phrase, Ashton préféra regarder ailleurs et baisser la tête, trouvant soudainement la pelouse des plus intéressante... Il finit par avoir les pieds de Madeleine dans son champ de vision, et remonta doucement la tête tout en la regardant de bas en haut, pour finir par la regarder dans les yeux. Elle s'était habillée pour l'occasion, et lui avait tout simplement oublié...

" - Je vois que tu es en tenue pour jouer... moi aussi... Et non ! pas de remarque... Le football, c'est assez compliqué... Je ne suis même pas sur d'avoir totalement compris les règles... Mais de toute façon, je ne pense pas que notre équipe va jouer comme des professionnels... "

Bah c'est vrai quoi ! La seule équipe qui aurait une véritable chance de correctement se placer sur le terrain, et d'avoir une strategie de folie serait l'équipe de Beiste... Avec qui était il déjà ? un professeur d'espagnol, une professeur remplaçante, des élèves qui n'avaient surement jamais touché un ballon de leur vie... Seul Sam Evans étant footballeur pourrait peut être leur laisser une chance... Et lui et Mady. Franchement, si jamais leur équipe gagnait, il ferait le tour du stade nu ! ah non... déjà fait... Bon et bien il verrait ! de toute façon, il en doutait fortement... Son pessimisme l'emportait sur le reste de toute façon.

" - Et bien... pour commencer, il faut que tu saches que les autres équipes n'auront qu'un seul objectif : te mettre à terre ! Alors je pense qu'il faudrait en premier que tu apprennes à les éviter... A esquiver, et à créer des effets de surprise... "

Comme pour illustrer ses dires, Ashton venait de se baisser, et avait foncé sur Madeleine, la mettant en quelques secondes à terre. Il s'écarta quand même, afin qu'elle puisse reprendre ses esprits, et lui sourit avant de se remettre assit sur l'herbe, a coté du corps étendu de Madeleine.

" - ... et il y a encore du boulot ! "

Il fut envahit par un fou rire, auquel il lui fallu quelques secondes pour qu'il reprenne ses esprits.

" - Bah quoi ? C'est de l'apprentissage accéléré ! "

Décidément il n’avait pas beaucoup changé depuis toutes ces années… Quand ils s’étaient rencontrés Ashton était déjà un Monsieur je sais tout en herbe. Ce n’était un secret pour personne il en avait plus dans la tête que la plupart des gens, et c’était un fanatique de science et de formules compliquées. Dans ses souvenirs il y avait même un tableau blanc dédié à des équations insolubles dans un coin de son appartement, ce qui avait beaucoup fait rire Madeleine la première fois qu’elle l’avait vu. Ils étaient très différents, lui posé et sérieux, elle tête en l’air et insouciante, mais pour une fois elle ployait devant la science, il y avait quelque chose de chimique entre eux qui la dépassait complètement. Sérieusement, elle arrivait à le trouver mignon à parler de ses rayons ultraviolets, c’était un comble. En revanche il avait très certainement fait des progrès pour ce qui est de se limiter dans les logorrhées sur la physique et ses merveilles. Bon point pour lui parce qu’elle n’était pas disposée à écouter 30mn de débat sur les effets des ultraviolets dans la nature. Pour une fois qu’elle était à peu près concentrée sur un objectif elle n’allait pas lâcher le morceau si facilement, mais voilà que ses beaux espoirs s’envolaient. Son partenaire d’entraînement se révélait aussi nul qu’elle sur les mystères tactiques du football, et en plus il était défaitiste. Et il avait l’air d’un touriste planté là à côté d’elle en jean de ville, avec ses petites tennis et son teint écarlate. À quoi donc pouvait-il penser en venant ici, le message était plutôt clair à son sens. Ce n’était pas dans ses habitudes, enfin, dans ses habitudes d’avant, de manquer d’organisation à ce point. Il devait être tracassé par quelque chose, mais Mad n’avait pas vraiment la place de choix pour jouer les confidentes pour le moment, et puis il ne fallait pas s’éparpiller.

Oui je vois que tu as sorti ton plus beau pantalon, si tu crois que tu vas échapper à mes plaquages, tu te goures mon ami ! Je suis sûre que je peux te rétamer en moins de deux ! Et puis comme ça doit être la seule chose qu’on sache faire en football… ça s’annonce mal pour une victoire éclatante tout ça.

Il n’y connaissait de toute évidence rien, mais il jouait quand même les fins stratèges, du Kinney tout craché. Ses remarques la faisaient sourire, les retrouvailles étaient beaucoup plus agréables que prévu en fin de compte. La jeune femme se surprit même à songer qu’elle n’aurait peut-être pas dû le laisser si facilement, mais ce qui est fait n’est plus à faire, et puis elle savait de source sûre qu’il avait trouvé mieux ailleurs ! Enfin… elle avait quelques doutes depuis qu’elle n’avait plus croisé Désiré dans les couloirs et qu’il était devenu impossible de la joindre. Elle s’était perdue dans ses pensées lorsqu’un violent choc l’en tira. Elle venait de se faire plaquer violemment sur le sol à peine relevée. Le temps de réaliser ce qui venait de se passer il était étalé sur le sol mort de rire à côté d’elle. Effectivement il y avait encore pas mal de boulot niveau esquive, parce qu’elle n’était certes pas en sucre mais si elle devait endurer ça cinquante fois par match elle pouvait dire adieu à la vie. Mais en attendant Mad éclata de rire à son tour en jetant un regard faussement furieux à Ashton toujours plié en deux.

Nan mais apprentissage accéléré ! C’était pas un effet de surprise ça, c’était une attaque de traître ! En fin de compte si tu fais subir ça à nos adversaires, je ne vois pas bien comment la victoire peut nous échapper…

Qu’est-ce qui avait bien pu lui passer par la tête en voulant s’entraîner avec le professeur de biologie, elle n’apprendrait rien sur les règles et elle s’en sortirait avec de magnifiques bleus qui lui vaudrait des collants opaques pour un moment. Elle se releva tant bien que mal en se frottant la fesse droite encore endolorie et posa son pied sur le torse d’Ashton en relevant un sourcil. Elle s’étonnait elle-même d’avoir résisté à la tentation de lui grimper dessus pour lui faire payer le plaquage intempestif, mais elle avait peut-être grandi au fond, elle savait limiter le contact physique maintenant.

Alors Monsieur je m’en prends à plus faible que moi, et le ballon, on en fait quoi dans cette histoire hein ? C’est bien beau de jouer les gorilles mais ça va pas m’aider moi ! Comme si je pouvais plaquer un lycéen dans la force de l’âge.

C’était bien fin de lancer ce genre de remarque alors qu’elle n’avait pas pensé un instant à en amener un… Mais comme à son habitude elle tâcha de ne rien laisser paraître de cette réflexion sur sa propre inutilité, il n’avait qu’à y penser lui, au moins elle était en tenue de sport. Elle commençait à ne plus vraiment savoir ce qu’elle faisait là, sur ce terrain humide et boueux, avec le professeur qu’elle avait évité jusqu’à présent, à parler football américain. Le temps la sauva des doutes qui commençaient à l’envahir, elle sentit tout à coup de grosses gouttes de pluie tomber sur sa peau, et en un instant c’était une véritable mousson qui s’abattait sur Lima. Ni une ni deux Mad courut se réfugier dans les vestiaires, mais de toute évidence pas assez vite. L’ondée fourbe venait de la tremper jusqu’aux os en un clin d’œil, autant dire que son short blanc avait viré au transparent et qu’elle remportait le concours de t-shirt mouillé pour aujourd’hui. Ce n’était pas exactement le genre de tenue que l’on portait devant un ami désintéressé, tant et si bien qu’elle se mit à chercher partout le sac contenant ses affaires de rechange… Resté à l’entrée des vestiaires, sous la pluie. La jeune femme se retourna alors vers Ashton d’un air désespéré dans l’espoir qu’il l’aiderait d’une manière ou d’une autre à trouver une solution avant qu’elle n’attrape une pneumonie. Et puis il était hors de question de repasser par le lycée dans cet état ! Si Figgins la croisait ses jours de surveillante était comptés, si elle tombait sur un élève elle pouvait dire adieu à sa non-réputation, bref elle était acculée et elle espérait bien que le beau brun la sorte de là.

Euh… on fait quoi maintenant ? Des idées ? Je suis preneuse.

Ashton avait souvent du mal à s'arrêter quand il commençait à parler d'un sujet qui le passionnait, ou même qu'il connaissait un tant soit peu, et Madeleine venait d'en avoir un exemple concret. Mais avec le temps, il avait apprit à prendre sur lui, et à se contrôler pour ne pas redevenir le "Ashton du passé", celui que les dernières années aimaient bien mettre la tête dans la cuvette des toilettes, ou d'autres sorte de "bizutages". Ashton était la victime n°1 des footballeurs à l'époque où il était à McKinley, il lui fallait plus d'un an pour qu'il soit accepter parmi les gens de son niveau. Contrairement à ce que l'on peut penser, il est difficile de s'intégrer dans une classe quand tous les élèves sont plus âgés et moins brillants...

Mais il avait survécu, et plutôt bien même. Il avait réussi à devenir un des plus populaires auprès des filles, et gagna donc le respect des garçons, et finit son année scolaire normalement. C'est à partir de cette période qu'il essaya de réduire au minimum c'est intervention, ce qui n'était pas de tout repos. C'est comme ici, il avait du beaucoup prendre sur lui pour trouver la force de s'arrêter. Il avait donc contourner son savoir, et avait affiché un petit sourire tout en s'excusant. Après tout, ils étaient la pour jouer au football, et non pour entendre Ashton donner un cours improvisé sur les effets des rayons ultraviolets sur la peau.

Heureusement pour lui, Madeleine trouva vite un sujet de conversation en rapport avec leur objectifs du jour : son pantalon. Et oui, ça peux paraitre étrange, mais sachant qu'ils allaient s'entrainer, Ashton avait mit... un jean ! Pourtant, il était sur d'avoir mit un survêtement dans son sac... Sac qui était dans les vestiaires... Ah voila pourquoi ! Bon... tant pis... de toute façon, ce n'est qu'un jean ! une ou deux petites taches d'herbes et de boue, ce n'était pas la fin du monde ! Il laissa alors Mady faire preuve de sarcasme par rapport à son pantalon, et écouta les espoirs de la belle. Non mais sérieusement... Elle pensait vraiment pouvoir le "rétamer en moins de deux" ? J'en connais une qui va être déçue...

" - Je te l'accord, mon pantalon est très beau... Mais tu sais, même si je ne suis pas en tenue de sport, ça ne m'empêchera pas de te faire mordre la poussière ! "

Elle ajouta que leur victoire serait fortement compromise vu leur aptitude... elle n'avait pas tord, et Ashton se préfera se taire plutôt que de ressortir son pessimisme qui envahissait sa vie depuis quelques semaines. Et bien qu'il n'y connaissait rien, il fallait qu'il essaye d'initier sa partenaire aux dures lois du football... Il aurait peut être du aller sur internet histoire d'en savoir un peu plus, mais non... il avait préféré dormir... ça lui apprendra tient ! Mais pour avoir déjà vu un match, il connait une seule chose : le plaquage... Alors il n'avait pas chercher à comprendre, il se jeta sur Madeleine pour la mettre à terre, en prétextant un "apprentissage accéléré". Ashton s'était mit à rire, chose qui ne lui était pas arrivé depuis longtemps, et qui lui fit le plus grand bien. Il s'assit à coté du corps de Madeleine, et attendit que celle ci se relève à nouveau.

" - Une attaque de traitre ? Toujours les grands mots... Mais comment réagira tu quand se sera les autres équipes qui t'étaleront au sol ? Mais oui, je sais... Je suis le seul espoir qu'a notre équipe pour gagner... "

Il se laissa alors tomber sur la pelouse, et regarda le ciel qui commençait à s'assombrir. Hum... C'était mauvais signe... Il sentit alors que la pluie n'allait pas tarder à tomber sur l'herbe du terrain. Mais il fut tiré de ses pensées en voyant Mady lui mettre un pied sur le torse, le mettant alors dans une position de faiblesse. Et pour l'histoire du ballon, c'était une bonne question....

" - Et bien... tu fais la "Ashtechnique", c'est à dire que dès que tu as le ballon dans les main, tu cours ! Et si tu vois un membre de ton équipe, tu lui lance sans chercher à comprendre. Comme ça, c'est lui qui se débrouillera ! "

Il lui fit un sourire, avant que celui la ne soit effacé par une goutte de pluie tombée sur sa joue. Alors qu'il commençait à se redresser, ce fut la fin du monde. Des trombes d'eaux s'abattaient sur Lima, et le jeune homme se mit à courir derrière la jolie blonde jusqu'aux vestiaires. Une fois à l'abri, il se mit à rire en voyant son ex petite amie trempée, et surtout, qui avait eu la bonne idée de se mettre en blanc... Il ne se priva pas de la regarder, avant de sourire, et de se rendre vers son sac après qu'elle lui ai demandé si il avait une idée. Et bien, c'était vraiment un coup de chance qu'il l'ai oublié dans les vestiaires ! Il en sorti son fameux jogging tout en faisant un clin d'œil à Madeleine du genre "Hey ! tu vois que j'avais prévu une tenue...", et alla dans un des coins de la pièce.

" - Tu peux regarder ailleurs s'il te plait ? "

Bon, je vous l'accorde, c'était un peu bête étant donné que Madeleine l'avait vu des dizaines de fois nu à l'époque où ils étaient ensembles... mais quand même ! Il se mit dans le coin, dos à elle, et retira son jean et son caleçon trempé, et se dépêcha d'enfiler son pantalon de sport. Il le mit s'y vite qu'il s'embrouilla un peu, et eu beaucoup de mal à le remonter. Bref, une fois fait, il retira son t-shirt mouillé qu'il mit dans un coin des vestiaires. Il retourna à son sac, et en sorti un t-shirt qu'il avait ramené au cas où il se salirait. Il le tendit ensuite à son ex petite amie, en souriant.

" - Je n'ai pas vraiment d'idée, mais... Commence par enlever tes fringues, et enfile moi ce t-shirt... J'ai vraiment pas envie que tu tombes malade. Et puis, si tu ne le met pas, je jure de t'expliquer le nombre de maladie que tu pourrais attraper, en te décrivant les symptômes, et même combien de personnes sont atteintes dans l'Ohio en un an ! "

ça, c'était de la menace... Mettre un t-shirt, ou écouter Ashton pendant des heures à parler d'un sujet plus que barbant. Il lui laissa son haut, puis alla s'asseoir sur le banc en attendant que le temps passe.

" - J'ai une question pour toi... Pourquoi c'est avec moi que tu as voulu t'entrainer ? J'ai regardé la liste de notre équipe, et... Enfin, je sais pas... Je pensais pas qu'on se reparlerait un jour... Ca me fait plaisir de te revoir hein, mais... Je sais pas, je me suis posé cette question en voyant ton mot. "

L’entraînement s’annonçait déjà compliqué venait d’être annihilé par une météo peu clémente, et les espoirs de victoire de Mad s’envolaient doucement alors qu’elle tâchait tant bien que mal d’essorer le bas de son t-shirt trempé. La « Ashtechnique », vous m’en direz tant… Il ne faisait pas la moindre illusion que le jeune professeur n’était pas plus avancé qu’elle sur la question du championnat et qu’il faudrait compter sur beaucoup de chance pour espérer gagner un seul match. Mais, étrangement, en sentant le regard de son « collègue » sur elle dans cette tenue, les questions de tactique et de victoire venaient subitement de sortir de son esprit… Elle ne se sentait pas particulièrement mal à l’aise qu’il la voie, ils n’en étaient pas à leur premier coup d’essai et Mad n’avait jamais eu de pudeur particulièrement prononcée, pourtant la scène lui laissait un arrière-goût désagréable. Après avoir été récupérer son sac, lui aussi mouillé, pour en sortir ses vêtements qui devraient passer le reste de la journée à sécher sur le radiateur du bureau des surveillants, la jeune femme restait fixée sur Ashton qui se déshabillait déjà pour enfiler les vêtements de rechange dont il semblait se vanter avec une petite moue victorieuse à la « je te l’avais bien dit ». Voilà qu’il lui demandait de se retourner maintenant, ça c’était vraiment le bouquet. Levant les mains au ciel avant de les poser sur ses yeux, Madeleine fit donc demi-tour pour le laisser se changer à l’abri de ses coups d’œil curieux. Il semblait plutôt en bonne forme même s’il s’approchait déjà de la trentaine, celle qui avait mis la main sur ces muscles avait de la chance… Et il se trouvait qu’elle connaissait l’heureuse gagnante. Tout du moins c’est ce qu’elle croyait. La tension qui semblait monter sans raison de son côté tenait sûrement au fait qu’elle n’avait pas envie de la jouer ambiguë avec le petit ami de l’une de ses meilleures amies. Il fallait qu’elle en parle à Kyle, son ami des situations cornéliennes. Kyle avait fait sa première apparition quand elle avait 12 ans et qu’elle était partagée entre Andy et Dorian, deux garçons de sa classe d’arts plastiques qui lui avaient offert un dessin pour la saint Valentin. Andy était convoité par Phylis, une petite peste rousse avec qui elle passait le plus clair de son temps, et nul ne l’ignorait. Elle ne pouvait donc parler de ça à personne, et Kyle était venu à la rescousse pour lui apporter la solution sur un plateau : Phylis était une peste dont elle aurait préféré se passer, accepter le dessin d’Andy ferait d’une pierre deux coups, Dorian était donc à disqualifier. Mais son ami imaginaire semblait avoir pris ses congés pour la journée et malgré ses efforts inhabituels pour se le figurer rien ne venait, elle était désespérément seule avec Ashton Kinney dans les vestiaires.

La jeune femme se retourna enfin en entendant le son grave de sa voix, il était sec et changé mais toujours torse nu, lui tendant son haut de rechange. Bon… ce n’était pas l’idée du siècle mais au moins elle aurait un peu moins froid.

Oui, oui, oui… Mais je ne vais pas mourir d’un rhume non plus tu sais. Enfin, merci pour le t-shirt. Je ne voudrais pas me retrouver en arrêt maladie et priver Figgins et mes chers élèves de ma douce présence dans les couloirs. En plus si je ne suis pas d’attaque pour les matchs du championnat vous êtes perdus, on ne gagnera jamais.

Sans attendre une seconde de plus elle retira l’éponge qui servait à couvrir son buste en lançant un regard de défi à Ashton qui n’allait pas rester longtemps planté là. Cette distance savamment entretenue entre eux, qu’elle soit physique ou mentale, la faisait doucement rire. On aurait dit une danse nuptiale entre deux oiseaux où chacun avançait puis retirait immédiatement ses pions en espérant que l’autre finirait par se lancer enfin et se poserait sur la même branche. C’était presque triste de se rendre compte qu’après avoir été si proches, ils en étaient arrivés à un point où le silence était une meilleure solution. Le seul bruit qui se faisait entendre en dehors de leur respiration était celui de la pluie qui martelait la porte et les vitres qui ne laissaient passer que la lumière faible et grise. À quoi pouvait-il penser ? Est-ce qu’il s’était intéressé à elle pendant son absence ? Est-ce qu’il avait été peiné de leur séparation ? Toutes ces questions qui ne l’avaient jamais effleurée lui arrivaient toutes à la fois pour l’embrouiller complètement. Elle ne se posait jamais de questions sur le passé parce que c’était du temps perdu. Elle ne se posait jamais de questions tout court parce qu’elle avait autre chose à faire, du genre maudire l’administration, rêvasser, ou espionner des élèves. Mais il semblait que lui, il s’en posait des questions, et des questions problématiques. « Pourquoi ? » ou de l’art de compliquer une situation déjà tendue avec un seul mot. Il devait bien se douter qu’elle n’avait pas réfléchi outre mesure, qu’elle s’était jetée sur le premier nom connu de la liste, et qu’elle avait juste envie de faire mumuse avec un ballon en jouant les grosses dures. Mais avec ce ton dramatique et cette pose de héros de comédie romantique, si elle lui sortait ce genre de réponse cash, il le prendrait mal, c’était certain. Donc, tact, tact, tact. Pour compléter la scène de cinéma la jolie blonde vint s’asseoir face à lui, à califourchon sur le banc, plongeant son regard bleu dans le sien. Là, tout était parfait pour que l’inspiration du mensonge lui vienne :

Oh mais je suis flattée que ma présence ne te soit pas désagréable, manquerait plus que ça quand même ! Mais… tu sais à McKinley on parle beaucoup, et quand on passe sa vie dans les couloirs, eh bien on entend pas mal de choses… Je sais que tu es avec Désirée, enfin je crois, donc je me suis dit que ça ne te poserait pas de problème particulier de t’entraîner avec moi.

Oui, évoquer sa copine actuelle c’était une bonne idée, ça ferait distancier, comme si elle y avait réfléchi longtemps, qu’elle avait pris le temps de considérer leur relation à lumière du passé. Se laissant prendre au jeu du mensonge, elle reprit sur un ton plus grave en regardant ses cuisses qui n’étaient plus couvertes par le t-shirt maintenant qu’elle s’était assise :

On ne s’est jamais vraiment fâché pas vrai, donc je ne vois pas de raison particulière de t’ignorer. Je t’ai toujours adoré tu le sais ! Bon… on n’a jamais vraiment été amis non plus, mais ça ne coûte rien d’essayer hein.

Comment avait-elle pu passer d’un entraînement au plaquage à une justification imposée du « mot glissé dans casier » ? Toujours était-il que ses mensonges à demi-mot étaient rouillés et qu’elle ne savait même plus où elle en était en réalité. Après tout il y avait peut-être un fond de vérité là-dedans. Elle ne croulait pas sous les amis et ça ne serait pas déplaisant d’avoir un ami de plus à Lima. Saurait-elle ne pas dépasser les bornes, ça c’était autre chose…

La pluie... Franchement, même en ayant regardé la météo la veille, Ashton ne se rappelait pas avoir vu qu'il devait pleuvoir... Bon, certes il n'avait pas vraiment porté une grande attention à la télévision à ce moment la, mais quand même. Serait-ce la météo qui aurait décidé qu'il n'était pas assez déprimé ? Qu'il avait besoin de se pointer sur un terrain de football pour ensuite recevoir la saucée du siècle ? Surement... Mais de toute façon, un peu plus ou un peu moins, ça n'allait pas entacher plus son moral. Et puis, il fallait bien l'avouer, la journée ne commençait pas si mal que ça. Il ne pouvait pas le savoir avant, mais le fait de se retrouver de nouveau face à face avec Madeleine n'était pas si horrible qu'il l'avait imaginé. Bon d'accord, c'était même assez plaisant.

En quelques minutes passé avec elle, il avait rit, et s'était quand même un peu amusé avec elle. En effet, c'était quelque chose qui lui avait vivement réchauffé le cœur. Et puis d'un coté, il était beaucoup mieux ici que dans son lit. Étant dans les vestiaires, et n'étant vraiment pas près d'en sortir, il se mit à réfléchir. Premier objectif : essayer de se sécher. Mais n'ayant pas de serviette pour s'essayer, il fallait bien faire avec les moyens du bord. Il allait aussi faire une chose assez jubilatoire pour lui, à savoir apporter son aide. Ainsi, il offrit gracieusement son t-shirt, alors que lui même revêtait son pantalon en essayant de garder un tout petit peu d'intimité. Certes Madeleine l'avait déjà vu dans son plus simple appareil, mais sérieusement, ça ne faisait pas bizarre de voir quelqu'un nu quand on est plus avec ? La réaction de Mady fut simple : elle s'exécuta.

Ashton sourit en la voyant de dos, et les mains sur les yeux, pendant que lui s'habillait plus convenablement. Une fois le t-shirt dans les mains, la jeune femme avait poser ses mains sur son haut trempé, et avait commencer à l'enlever. Étrangement, Ashton n'avait pas décollé les yeux de sa collègue, qui avait retiré la totalité de son haut. Mais quand il vit le regard de Madeleine, il s'empressa d'aller voir plus loin si il y était, et attendit qu'elle soit elle aussi habillée un minimum. Alors qu'il regardait le mur, en espérant que le temps passe plus vite, il se remit en tête l'image de Madeleine sans son t-shirt.. Il n'y avait pas à dire, c'était vraiment une jeune femme ravissante, et surement une des plus belles filles du corps enseignant.

Il est vrai qu'il avait souvent regretté leur relation, se demandant ce que ça aurait pu être si ils avaient été différent tous les deux... Pleins de questions avaient fusées dans sa tête, mais avec le temps, elles étaient parties. Il finit par se retourner après quelques minutes, lui ayant laissé pas mal de temps pour être présentable. Il se mit alors face à Madeleine, et attendit... Malheureusement pour lui, il n'avait jamais vraiment aimé le silence... ça le stressait plus qu'autre chose, alors au lieu de faire des "toc" avec sa langue contre son palet, il se mit à poser des questions. Pourquoi avait elle voulu s'entrainer avec lui ? Pourquoi lui avoir mit se mot dans son casier ?

Pourquoi, pourquoi, pourquoi... Pour n'importe quel scientifique, il n'y avait rien de plus frustrant que de ne pas avoir de réponses aux questions qu'on se pose. Mais heureusement pour lui, les réponses ne tardèrent pas à venir. Mais quelques secondes plus tard, il se gifla intérieurement. Pourquoi avait t-il posé une question hein ? La raison pour laquelle elle n'avait pas vu de problème pour s'entrainer avec lui, c'était parce qu'elle pensait qu'Ashton était en couple... avec Désirée... Il ne réussit même pas à répondre, et la laissa continuer, tout en essayant de ne montrer aucune émotions sur son visage.

" - Je vois... Bon, je ne suis plus avec Désirée, mais je comprend "

Elle marqua un point quand elle ajouta qu'ils n'avaient jamais été vraiment en froid, ni même vraiment ami. Mais elle avait raison, ils pouvaient peut être essayer de le devenir... Après tout, même quand ils étaient ensemble, Ashton trouvait sa petite amie très cool, et était presque sur que, si ils s'étaient connu dans d'autres conditions, ils auraient été de grands amis.

" - Tu as raison... On devrait pouvoir être amis... Alors d'accord ! on essaye comme ça ! "

La façon dont il l'avait dit faisait un peu ridicule, mais il est vrai que dans cette situation la, son cerveau s'était un peu perdu. Apparemment, l'eau de pluie tombée sur sa tête avait fait plus que de le mouiller. Il finit par lui sourire, et commença a jouer avec la boucle de sa ceinture après quelques secondes de silence.

Le sourire aux lèvres Madeleine se tenait droite sur son banc, redressant un peu plus son dos, faisant ressortir la poitrine qui, quelques secondes auparavant, avait été le centre d’attention du grand brun. Totalement à l’aise avec cette tenue des plus légères elle ne pouvait que se sentir flattée par le regard insistant d’Ashton posé sur son corps dénudé. Elle se savait jolie, et elle en avait joué un nombre incalculable de fois, tant pis si ça lui valait la haine des autres filles. Pourquoi se priver de tels avantages quand il était si facile de mener le sexe opposé par le bout du nez avec un décolleté pigeonnant et un joli sourire ? Son ego était assez solide pour encaisser les critiques des jalouses, au contraire, elle avait toujours préféré avoir des amis mâles presque rien que pour les narguer. Déjà au lycée elle chassait davantage après les sportifs que les Cheerios de son équipe, dans le club d’échec elle était la seule fille, dans le Glee Club il ne lui était arrivé qu’une seule fois de proposer un duo avec une autre fille… Au grand dam de sa mère, elle avait le contact très (trop ?) facile avec les garçons et n’avait jamais vraiment considéré l’amour avec un grand A, et ça personne ne l’ignorait dans son entourage. Sans être une fille facile, elle n’était pas bien difficile, il fallait l’admettre. Sans se douter du début de ce que faisait sa fille, Mme Wild jugeait que cela pêcherait dans son jeu d’actrice si elle ne vivait pas une rupture déchirante ; à l’écouter Mad avait parfois l’impression qu’elle voulait qu’elle tombe amoureuse pour mieux se faire larguer et pleurer toutes les larmes de son corps, rien que parce qu’elle chanterait mieux les chansons d’amour déprimantes ou qu’elle pourrait auditionner pour des rôles de cœurs brisés. Malheureusement pour sa tragédienne de mère, elle préférait les amourettes légères où l’on profite de la compagnie de l’autre sans lui demander de décrocher la lune. En général les relations s’enchaînaient sans qu’elle y pense, sans jamais dire non elle suivait le mouvement, et lorsque la passion des premiers temps s’estompait, elle passait à autre chose, se laissant simplement dériver, et ça n’avait pas été différent avec son nouveau collègue. À 22 ans, elle n’avait toujours pas vécu son premier grand amour suivi du premier drame du déchirement et de la rupture qui fait mal. Pour elle c’était comme au cinéma, elle regardait les autres de loin, leur laissant les affres de la torture pour le papillonnage. Mais elle était loin de se douter qu’à moins d’un mètre d’elle se trouvait quelqu’un qui vivait justement ce genre de situation.

Finalement ses explications étaient plutôt satisfaisantes. Ça ne lui avait pas coûté grand chose à elle la menteuse née, mais tout de même, l’improvisation d’une réplique dramatique quand on est trempée et qu’on a qu’une seule envie c’est de rentrer chez soi, ce n’est pas donné à tout le monde. La jolie blonde était plutôt fière du résultat. On aurait vraiment dit qu’elle y avait réfléchi longuement et que cette rencontre n’était pas du tout le fruit du hasard ou de l’empressement à jouer en profitant de la présence d’un nom connu sur une liste. En plus elle semblait ne pas le laisser de marbre à en juger par le regard lourd qui s’était posé sur sa poitrine quelques instants auparavant, décidément, il était bien ce garçon, un peu trop torturé néanmoins. Dans l’ensemble, la situation aurait pu être bien pire. Enfin… Ça c’était ce qu’elle pensait jusqu’à ce que son château de cartes s’effondre en un instant. Il ne lui avait fallu qu’une petite phrase, marmonnée à la va-vite pour que son beau plan d’amitié renouée tombe à l’eau. Comment ça il n’était plus avec Désirée ? Elle aurait aimé avoir la touche Pause ou Rewind pour revenir en arrière et prendre le temps de penser une petite seconde à cette bombe atomique qu’il venait de lui lancer en pleine figure. Et ce petit air triste qu’il tâchait de réprimer… Est-ce que même c’était légal de faire ce genre de coup à son ex ? Dans un dessin animé, sa mâchoire serait tombée jusqu’au sol et ses yeux seraient sortis de ses orbites pour sauter à la tête d’Ashton. Dans une comédie romantique elle se serait agenouillée dans l'espace de ses jambes pour l’enlacer tendrement et lui remonter le moral. Mais la seconde option prendrait certainement une toute autre tournure dans la réalité, et elle ne se sentait pas d’attaque pour ce genre de dérive dans les vestiaires du lycée alors que Beiste devait rôder dans les parages. Bien qu’elle sût garder un air à peu près digne — aussi digne qu’on peut l’être à moitié nue, assise à califourchon sur un banc, trempée jusqu’aux os — la surprise n’avait pas été des meilleures. Tout d'abord, Désirée qui ne semblait pas refaire surface ne lui en avait pas touché un mot. La blonde déjantée n’avait plus donné de nouvelle après sa mystérieuse disparition et Madeleine se sentait de plus en plus irritée par cette situation. Pourquoi est-ce qu’elle l’avait écartée de cette manière ? Elle n’avait rien fait pour la fâcher, elle ne savait rien de ce qui se passait dans sa vie, en bref cette amitié lui semblait bien maigre maintenant qu’elle la considérait de plus près. Le nom de Désirée dans la bouche d’Ashton avait eu l’effet d’une détonation. Sans savoir pourquoi elle se sentait touchée en pleine poitrine, son cœur se serrait contre sa volonté. Pourquoi est-ce que ça la dérangeait qu’il parle d’elle ? Elle n’avait pas l’intention de le draguer, elle ne l’avait pas invité sur le terrain de sport pour raviver la vieille flamme. Elle ne l’avait revu que pour s’entraîner pas vrai ? Il n’y avait aucun plan de récupération de l’ex boyfriend de ses jeunes années, aucune manigance, aucune ambiguïté. Alors pourquoi est-ce que le fait qu’il lui annonce qu’ils avaient rompu devait changer quelque chose à son comportement ? Le regard un peu vague elle sentait comme un nœud dans sa gorge. Sans pour autant avoir de mal à respirer elle sentait le malaise s’emparer de son corps, ses mains qui un instant auparavant pianotaient sur le rebord du banc avaient cessé leur mouvement pour s’agripper aux lames de bois. Est-ce qu’il avait voulu la piquer ? Est-ce que c’était une phrase longuement pesée ou bien simplement le cri du cœur brisé ? Toujours était-il que Mad était contrariée de cette réponse, elle n’avait aucune raison d’être en colère mais tout en elle lui indiquait qu’il fallait qu’elle s’insurge, de manière irrationnelle, qu’elle se rebelle contre ce petit air de chien battu qu’il affichait. Le petit sourire en coin qu’il lui avait adressé avant de se mettre à jouer avec sa ceinture, le ton enjoué de collégien avec lequel il lui avait parlé, tout cela la faisait bouillir.

Comment ça… tu n’es plus avec Désirée mais tu comprends ? Est-ce que c’est une invitation ? Je… euh attends attends temps mort.

Tout se passait bien trop vite, elle avait laissé les mots sortir tels quels révélant le fond de sa pensée alors qu’elle-même essayait de se convaincre que c’était fini entre eux et qu’elle allait bien trouver un autre mec intéressant dans les parages pour passer un peu de bon temps. Les deux mains levées en signe de stop devant le visage d’Ashton, elle regardait le sol en essayant de rassembler ses esprits pour parler de manière cohérente.

On est amis hein ? Enfin… On tente le coup. Mais si on est amis, il va falloir me dire pourquoi est-ce que tu me regardes comme ça. Parce qu’une seconde tu me mattes en sous-vêtements et la suivante tu prends un air malheureux pour m’annoncer ta rupture entre deux tranches de brioche enrobée de confiture. Tu serais pas un peu en train de te moquer de moi Kinney ?

Voilà que la tension qui pesait contre sa cage thoracique sortait et qu'elle s’emportait en haussant le ton. Sentant le besoin de prendre ses distances avec cette situation d’une autre dimension elle recula de quelques centimètres sur le banc et replia ses jambes en tailleur en essayant de lire sur le visage de son interlocuteur.

T’as sans doute pas envie d’en parler, mais moi j’en ai besoin tu vois. Il s’est passé quoi avec Daisy ? Parce qu’un jour, on est super copines et le lendemain, elle disparaît sans laisser de trace, pas un numéro, pas un texto, rien. C’est quoi votre délire à tous les deux ? Vous avez décidé de me rendre folle ? Parce que si c’est le cas là je crois que je ne suis pas loin de tomber dans le panneau.

Le couple Ashton / Désirée était surement la chose dont laquelle Ashton était le plus fier cette année. Il était arrivé dans cet établissement seul, et il se rappelait encore la première fois qu'il l'avait vu. Elle était magnifique. Il l'avait vu de loin, avec la lumière d'une fenêtre qui se reflétait sur ses magnifiques cheveux blond. Plus il s'était rapproché, et plus il s'était rendu compte que la jeune femme était parfaite. Elle était belle, très intelligente (surtout dans les matières littéraires) et avait un franc parlé et une répartie très rare pour une jeune femme... Ashton avait arrêté de compter les femmes qui, au moindre pic lancé, s'écrasaient pour éviter le conflit. Non, Désirée était une femme forte, et ça lui plaisait beaucoup.

D'ailleurs, ça lui plaisait autant que ça lui manquait. Il avait eu du mal à dévoiler ses sentiments, et elle avait eu beaucoup de mal à lui avouer qu'elle aussi n'était pas indifférente. Mais après beaucoup de semaines d'attente, ils s'étaient mis en couple... Et tout semblait bien aller pour lui, et jamais il n'aurait pensé que son couple se noie en si peu de temps. Mais en y réfléchissant bien, il n'arrivait pas à vraiment regretter son départ. Bien sur, elle lui manquait, et il savait qu'il n'allait pas l'oublier tout de suite, mais après la discussion qu'ils avaient eu au mariage, c'était peut être mieux comme ça.

Ils se rappelaient encore que, entre deux baisers lors du mariage Quincy-Sheffield, ils avaient parlé de leurs avenirs... Et il en avait retenu que ses rêves de mariages étaient tombés à l'eau. Alors c'était surement mieux qu'ils se soient séparés maintenant... Au moins, ça l'éviterait d'être déçu dans le futur. Et puis zut, c'était un mec ! Et les mec arrivent à oublier rapidement les filles non ? Comment ça se ne sont que des à priori ? En ce moment, Ashton aurait tant aimé que ça soit une réalité. Mais il devait arrêter d'y penser, il se faisait du mal pour rien.

Il n'y avait rien de pire qu'un Ashton stressé. Il se retrouvait enfermé dans une pièce, sans pouvoir sortir, et torse nu. Il fallait qu'il s'occupe, qu'il trouve un moyen de faire vagabonder son esprit hors de ce contexte plutôt étrange dans lequel il était fourré. Alors il avait décidé de jouer avec sa ceinture, seul élément qu'il avait sous la main. Il prit alors la boucle, et la défit, pour ensuite la remettre en place, et ainsi plusieurs fois d'affilé. Mais il n'avait pas pensé un seul instant que ce geste aurait pu être traduit bien autrement. C'est vrai qu'il se trouvait dans une pièce à moitié nu, avec une femme à moitié nue elle aussi...

" - Une... invitation ? "

Tout à coup, il se rendit compte, et lâcha sa ceinture en plaçant ses mains sur ses genoux. Il fit de grands yeux, essayant de capter le flots de paroles que la bouche de Madeleine déversait. Il sursauta légèrement en voyant les mains de Madeleine se diriger vers son visage, pour marcher un stop. Bon d'accord, il allait se taire et la laissé parler. Et bien... Oui, ils allaient essayer d'être amis... Par contre, il ne put s'empêcher de lacher un rire nerveux, bien que la situation n'avait rien de drôle.

" - Mais non je ne me fous pas de toi Madeleine ! Oui, c'est sûr que ma relation avec Désirée me rend triste, mais c'est normal ! Et pour le fait de te voir toi en sous vêtements c'est... J'en sais rien, c'est pas de ma faute, je suis un mec ! Oh et m*rde... "

Plus Ashton parlait, et plus ça devenait du grand n'importe quoi. Il se posa trente secondes, puis reprit calmement, cherchant bien ses mots.

" - Mon ex petite amie se trouve en sous vêtements devant moi. Alors même sans arrières pensée, oui, j'avoue avoir regardé... Mais ça ne veux rien dire ! Cites moi un homme qui n'aurait pas fait pareil. "

Ashton vit Mady se déplacer sur le banc, essayant de mettre de la distance entre eux. Il sourit, mais le perdit bien rapidement en entendant les paroles de Madeleine. Bon, apparemment, il n'allait pas échapper aux explications...

" - Non, ce n'est pas contre toi... Elle m'a juste quittée, c'est tout. Tu sais, moi non plus elle ne m'a pas laissé de nouvelles, la dernière conversation que j'ai eu avec elle, c'était au mariage de mon oncle ! On s'est disputé, elle est rentrée chez elle, et puis c'est tout. Après une semaine sans nouvelles, j'ai appris qu'elle avait donné sa démission à Figgins... "

Après avoir parlé, il regarda Madeleine, en essayant au maximum de ne pas retranscrire d'émotions sur son visage. Il finit par se lever, et marcha aléatoirement, juste pour s'occuper.

Déjà passablement énervée, Madeleine manqua de lui retourner une gifle en le voyant lâcher sa ceinture tout à coup, se méprenant totalement sur le sens de son invitation. Elle était excédée par le grand brun à l’air bêta assis en face d’elle. Alors comme ça il s’attendait à ce genre de remarque de sa part ? Leur amitié naissante en prenait un sacré coup dans l’aile. Mais elle s’était calmé tant bien que mal pour essayer de rationaliser les choses. Ce n’était pas dans sa nature de suivre l’ordre logique des choses mais il y avait quelque chose d’étrange dans cette rencontre qui la dérangeait. Elle ne se sentait pas elle-même, elle devait faire des efforts pour ne pas lui paraître désagréable, elle ne voulait pas non plus s’emporter contre le pauvre garçon qui avait été jeté d’une manière assez sèche. Si une simple amie pouvait mal supporter une séparation aussi tranchante, qu’en était-il du petit ami… Pour toutes ces raisons elle savait qu’elle devait la jouer profil bas, ne pas s’insurger comme elle en avait envie et écouter un peu ce qu’il avait à dire. Elle était Mad Wild. Folle, légère, inconsciente. Et voilà que pour une raison qui lui échappait elle se mettait à vouloir contrôler les choses, manipuler les sentiments d’Ashton et chercher à comprendre le pourquoi du comment.

Évidemment, il avait raison, c’était normal d’être triste après une rupture et elle n’avait rien à voir là-dedans. Et il n’y avait rien de particulièrement significatif à la regarder en sous-vêtement, elle était jolie, elle était là. Tout était d’une banalité affligeante. Et pourtant ça la dérangeait. Il y avait comme une amertume dans sa bouche qui l’empêchait de rire sincèrement de la situation en sortant un franc « C’était une blague roh, c’que tu peux être sérieux ». Même si elle avait refusé de l’admettre de prime abord, elle savait que cette grande innovation de son cœur c’était de la jalousie. Elle était envieuse de ce qu’avait eu Désirée, il lui était un peu pénible de voir qu’il y avait un après elle plus brillant. Le cœur a ses raisons que la raison ignore ? Merci le cours de philosophie de dernière année, décidément ces Français, elle ne les comprendrait jamais. C’était bien le genre de sa mère de lui sortir ce genre de citation tout à fait hors de contexte en lui disant qu’elle devrait se concentrer sur les études et laisser de côté les frasques de la jeunesse. Malheureusement pour elle, il était un peu trop tard à présent. Elle n’avait pas la moindre envie de faire marche arrière avec Ashton Kinney, elle voulait sincèrement être amie avec lui, partager des moments amusants et de franches parties de rigolade. Pas de drames cornéliens. Alors pourquoi avait-il fallu qu’elle se monte la tête avec les vapeurs du passé et de sa jeunesse embaumée ? Elle regrettait amèrement d’avoir laissé la colère du moment parler à sa place. Baissant les bras pour remettre les mains sur son visage, prenant une profonde inspiration, elle passa les doigts dans ses cheveux humides pour les remettre derrière ses oreilles et y voir plus clair, au sens propre. Remuant les épaules d’avant en arrière pour détendre les muscles contractés de son dos la surveillante sentait que petit à petit le calme revenait. Fini la crise d’hystérie féminine il fallait qu’elle mette fin à cet entretien avant que les choses ne dérapent.

D’accord, je m’excuse ok, je l’ai mal pris je ne sais pas pourquoi, je comprends. Je pense que le sujet « Désirée » serait plutôt à bannir…

Mais il s’était déjà lancé dans une brève explication de l’épineux problème du départ précipité de la blonde. Leur situation n’était vraiment pas si différente à tel point que Madeleine était un peu sous le choc. Jamais elle n’aurait cru que son amie était du genre à claquer la porte au nez des gens en ne laissant pas d’adresse. Mais le mal était fait. Il essayait de sauver les apparences en esquissant un petit sourire, mais il ne fallait pas être diplômé en physique nucléaire pour comprendre que les meurtrissures de ce départ étaient toujours là. Ne sachant quoi répondre, la jeune femme garda le silence. Ça avait dû lui faire du bien de rire un peu avec elle sur le terrain pour se changer les idées. Tout ça c’était la faute de la pluie en réalité. Si elle n’avait pas été trempée de la tête au pied elle ne se serait jamais retrouvée coincée en tête à tête avec lui dans les vestiaires, elle n’aurait jamais posé ce genre de questions débiles qui ne font que retourner le couteau dans la plaie, elle n’aurait même pas pensé à Daisy Cravy. Alors que son collègue s’était mis à marcher dans la pièce sans but précis pour cacher son embarras et probablement sa tristesse, Mad considéra son sac de sport trempé par la pluie qu’elle avait traîné dans un coin de la pièce. Gardant le silence malgré l’effet pesant de la scène, elle se leva et s’accroupit pour ouvrir ledit sac et voir de plus près l’état de son contenu. Dans l’ensemble ses vêtements de rechange étaient humides, mais pas aussi mouillés que ce qu’elle s’était imaginé. Elle pouvait toujours les enfiler et retourner dans son bureau pour se sécher au coin du radiateur en attendant que l’autre surveillant vienne la relayer. Elle s’éclipserait plus tôt et toute cette histoire serait réglée. Vérifiant par-dessus son épaule qu’il était plongé dans ses pensées ailleurs, la surveillante ôta le t-shirt du professeur de biologie pour passer son chemisier noir avant d’enfiler en toute hâte le pantalon qui allait avec. Elle eut du mal à le passer, le tissu se collant sur sa peau mouillée, mais après quelques secondes d’effort elle finit par être vêtue de manière plus convenable. Relevant ses cheveux dans un petit chignon qu’elle fixa avec un élastique, elle donna un petit coup sur ses cuisses avant de se redresser enfin pour faire face à Ashton qui avait fini par remarquer son petit manège dans son dos. Forçant un large sourire sur ses lèvres, elle marcha d’un pas décidé vers lui et le prit dans ses bras. Ce câlin n’avait rien de tendre ou de féminin, elle le serra fort en lui mettant deux petites tapes dans le dos comme l’aurait fait un bon copain. Puis elle s’éloigna à nouveau de lui en gardant ses mains sur ses épaules, le regardant droit dans les yeux d’un air amical.

Ça n’a pas dû être facile. Mais on est grands, pas vrai ! Il faut pas te laisser abattre ! On va faire du sport pour évacuer les tensions, courir avec un ballon, plaquer des jeunots et puis quand on aura brillamment remporté le championnat grâce à la Ashtechnique on ira fêter ça avec une bonne bière.

Elle avait tout bonnement choisi d’ignorer les détails. Le plus facile c’était de s’en tenir au plan initial : collègues et amis. Après la crise qu’elle venait de faire elle se savait attirée plus que de raison par le beau brun, mais il ne s’agissait pas d’elle à cet instant précis. Elle pouvait bien faire une entorse à la sacro-sainte règle du « moi d’abord, les autres s’il en reste » en faisant ce qui était mieux pour lui, en ne l’embrouillant pas avec des sentiments qu’elle avait elle-même du mal à comprendre. Ramassant le sac à ses pieds, elle lui tendit à nouveau le t-shirt généreusement offert avant d’ajouter :

Bon je crois que l’entraînement est compromis donc… on se voit une prochaine fois dans les couloirs et puis on pourra toujours fêter la défaite entre amis.

Sa voix s’était voulue rassurante mais ferme, elle avait même un peu ri à sa dernière remarque. Elle tentait de tout contrôler une dernière fois avant de s’éclipser au plus vite. Tournant les talons, elle marcha vers la porte, se retournant une ultime fois dans l’encadrement pour lui lancer quelques mots avant de se mettre à courir sous la pluie qui avait diminué en intensité.

C’était bref mais intense cet entraînement, mais je suis sûre que le plaquage me servira pour notre premier match !