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 05. There is no duty we so much underrate as the duty of being happy

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Lexie A. Preston
Lexie A. Preston
Ginger Spice ; You bet you're gonna lose it to that hellbound crimson glory
Age : 25 yo
Occupation : Galeriste, chef auto-proclamée de la Pension Preston, life coach du dimanche et membre des Second Chance
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MessageSujet: 05. There is no duty we so much underrate as the duty of being happy   05. There is no duty we so much underrate as the duty of being happy EmptyMer 18 Juin - 0:20

Si Wyatt la voyait. Si Charlie savait. Si Anna avait vent de ses manigances. Anna, qui avait d'ailleurs très mal pris son petit jeu du jour à la galerie. Pour une raison obscure, les trois compères étaient présents à la galerie et c'était un jour particulièrement lent. Ils avaient bien eu un client peu après l'ouverture, qui avait été bichonné comme une âme vagabonde l'avait rarement été à The Gallery. Petit café, blagues, jeté de cheveux et sourire blancheur. Tout ça pour que le quinquagénaire en question promette d'y réfléchir et de repasser. C'était bien la peine. Et le reste de la journée avait été plat et sans intérêt, puisque l'efficacité d'Harper avait eu un effet bénéfique sur JJ et que la paperasse était en ordre pour la première fois depuis... Et bien sans doute depuis la création de la galerie d'art. Alors il avait bien fallu s'occuper. Et quand réunis dans l'ennui, Joachim et Lexie J redevenaient les grands enfants qu'ils étaient toujours, au fond. Aussi, après un petit bac échauffé - comprenant un débat vigoureux sur la bonne orthographe du mot ornithorynque et si un mot mal écrit pouvait tout de même rapporter des points - les deux amis avaient décidé de se lancer dans un jeu qu'ils n'avaient pas pratiqué depuis le lycée. Il faut dire qu'à l'époque, ils faisaient partie d'une bande d'amis un peu rustres et peu recommandables. Et en sa qualité de rares filles du groupe, la petite Lexie avait fait de beaux efforts d'intégration. Dont elle avait gardé quelques séquelles donc. C'est ainsi qu'elle et JJ passèrent l'après-midi à s'entraîner, à échapper au regard courroucé d'Anna, pour finalement se planter devant elle et, dans un choeur parfait, laisser échapper un rot sonore, tout en récitant l'alphabet. C'était un talent qu'elle ne pensait pas avoir à cultiver à nouveau, mais avec un grand verre de Coca et aucune occupation digne de ce nom, c'était rapidement revenu. Sa soeur n'avait bien sûr pas tellement apprécié, jugeant tout cela peu professionnel et ne voyant pas ce qu'il y avait d'hilarant dans cette grossière activité.

Aussi, la cadette des Preston avait bien pris soin de taire ses activités du soir à sa très chère grande soeur. Car même si Anna n'était pas du genre à faire dans la délation, ni à se mêler des affaires des autres - puisque Lexie s'en chargeait pour deux - mais nul doute qu'elle n'aurait guère approuvé. D'abord, elle n'aurait pas compris et ce n'était pas pour rien que la si expansive et bavarde rouquine avait tu à son entourage une de ses dernières fréquentations en date. Non pas qu'elle soit mauvaise - elle en avait objectivement de bien pire parmi ses meilleurs amis - mais nul doute que son lent tissage d'amitié avec une certaine Ruby Caldwell ne ferait pas l'unanimité chez ses proches. Anna l'accuserait - sans doute à raison - de fourrer son nez partout, Wyatt penserait sans doute qu'elle confrontait la choriste avec de mauvaises intention et Charlie l'accuserait de pactiser avec l'ennemi. Autant dire qu'elle nageait en eaux troubles avec cette histoire, mais ce n'était pas ce qui allait empêcher Ginger Spice d'aller au bout de son idée. Elle avait donc récemment recontacté la jolie brune, avec qui elle avait partagé un uniforme fort court il y a quelques années. D'abord pour voir comment la timide jeune femme avait tourné et, il fallait bien l'admettre, évaluer si elle pouvait effectivement être une menace pour le couple Watsbury récemment reformé. Néanmoins, la rouquine a bien vite oublié cette idée dans le peu de temps passé en compagnie de sa camarade retrouvée. Cette jeune femme n'était que douceur et bonté d'âme et personne ne pouvait la soupçonner de mauvaises intentions. Celles de Lexie avaient donc également évolué et elle s'était donnée pour mission de l'aider à sortir de sa coquille et de s'en aller explorer le monde, plein de belles créatures et de joyeuses aventures.

La galeriste avait donc prétendu avoir un rendez-vous avec Gary, son ami fleuriste qui tenait la boutique un peu plus bas sur la rue. Personne ne questionnait jamais ses escapades nocturnes avec le flamboyant commerçant et il lui semblait parfois que ses co-directeurs n'étaient pas aussi fan du personnage qu'elle. On ne cherchait donc pas à l'accompagner et on ne viendrait pas vérifier où elle était, ce qui était tout à son avantage. Une fois JJ et Anna repartis, non sans une longue et infructueuse discussion sur quelle voiture serait laissée à Baby Preston, cette dernière prit les clés de son meilleur ami, pour aller garer son tas de ferraille un peu plus près du centre. Une fois une place - plus ou moins réglementaire et plus ou moins gratuite - trouvée, la grande rousse se repassa un peu de rouge sur les lèvres, retoucha le trait de crayon doré sur ses paupières et quitta l'habitacle. Elle frissonna légèrement, sentant un petit vent frais se lever dans le crépuscule, mais décida tout de même de ne pas retourner à la galerie, prendre une veste plus épaisse. Son blazer ocre, sa droite et courte robe beige et surtout, ses collants chair, seraient amplement suffisant pour la couvrir, le temps de faire le trajet de la voiture au Rock'n'Diner. La londonienne n'avait que peu été dans ce restaurant typiquement américain et fleurant bon les frites et les 50s, ce qu'elle regrettait d'ailleurs. Les burgers étaient délicieux et l'ambiance des plus conviviales. Et ils servaient également des bières pas trop mauvaises, ce qui était ridiculement difficile à trouver dans ce pays. Et Lexie espérait bien que tous ses facteurs délient la langue et dénouent les muscles tendus de miss Caldwell. La petite étoile des Awesome Voices était bien entendu déjà là, toujours ponctuelle et parfaitement courtoise, là où la rouquine était chroniquement en retard et toujours trop brusque. Elle s'avança donc d'un pas vif, ses escarpins de la teinte de sa robe claquant sur le sol carrelé, alors que son visage poupin affichait un sourire chaleureux. Sans plus de cérémonie, elle se laissa tomber sur la banquette face à Ruby, non sans lui avoir fait deux bises, puis se glissa devant son assiette encore vide et attrapa le menu. La jeune femme ne le regarda pas vraiment, préférant pépier joyeusement. « Bonsoir Ruby, je suis désolée du retard, Anna et JJ avaient beaucoup de mal à me céder une de leurs voitures. J'ai eu une panne en... février je crois et ils ne veulent pas lâcher l'affaire, on croirait que j'ai planté la voiture dans un arbre, à les entendre ! » Elle secoua la tête de droite à gauche, non sans rouler des yeux, puis scanna rapidement la carte. Elle ne s'interrompit pas toutefois, partie sur sa lancée qu'elle était. « Enfin bref, ça me fait plaisir de te voir, j'ai eu une journée mooooortellement ennuyeuse alors, je compte sur cette soirée pour terminer sur une bonne note ! Tout roule pour toi? La vie? Les amours? » Elle lui fit un sourire taquin, ponctué d'un clin d'oeil exagéré, infiniment amusée par la réserve de Ruby et désespérée de sa fixette sur ce cher Dr. Pillsbury. Mais elle croyait fermement en la possibilité de convertir la douce demoiselle à un mode de vie plus rock'n'roll et ce temple du burger et de la bonne musique était un bon endroit pour commencer.
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Ruby Caldwell
Ruby Caldwell
« You just see the surface »
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Statut : En couple avec Ryder Crawford
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MessageSujet: Re: 05. There is no duty we so much underrate as the duty of being happy   05. There is no duty we so much underrate as the duty of being happy EmptyVen 8 Aoû - 23:01

Ce qu’elle faisait ici : elle ne le savait pas très bien. Les ongles enfoncés dans son siège en skaï rouge et blanc, mordant ses lèvres en une moue exprimant on ne peut mieux sa préoccupation, Ruby laissait son esprit divaguer dangereusement vers des pensées peu agréables tandis qu’elle se perdait dans la contemplation d’une guitare en néons fluo. Dans le principe, elle n’avait pas vraiment de raisons de s’inquiéter ainsi. Après tout, que pouvait-elle craindre d’une nouvelle sortie avec Lexie Preston?
… Beaucoup de choses à vrai dire.
La frivole rouquine était davantage une connaissance qu’une véritable amie. Pour cause, les deux jeunes femmes ne possédaient que très peu – et c’était encore les méconnaître – de points communs, parmi lesquelles demeurait leur ancienne appartenance à l’équipe des cheerleaders lorsqu’elles étaient encore lycéennes. À l’époque, leurs rares conversations se résumaient à leurs impressions sur le groupe, leur parcours scolaire, telles deux camarades qui au détour d’un couloir s’arrêtent pour se saluer poliment avant de reprendre leur chemin sans que cette interaction ait le moindre impact sur le reste de leur journée. Ainsi, elles ne s’étaient jamais vraiment fréquentées avant que Preston Junior ne décide du jour au lendemain de reprendre contact avec la blondinette. Alors qu’elles ne se croisaient qu’occasionnellement dans Lima et ne s’adressaient que de simples signes de tête respectueux, Lexie était récemment venue la retrouver de l’autre côté de la rue, un sourire XXL agrafé au visage, à la grande surprise de Ruby qui, en raison des évènements qui rythmaient actuellement sa vie, resta sur ses gardes. Car un autre point commun réunissait les deux jeunes femmes  - ou avait au contraire de quoi les éloigner l’une de l’autre. Wyatt.

Non sans savoir que le docteur fréquentait la rouquine pour les avoir aperçu ensembles à quelques reprises, une intuition orientait la blondinette vers la certitude que sa part de responsabilité dans la rupture du gynécologue et de cette peste de Charlie ne lui était pas inconnue. Loin d’être assez dupe pour fermer les yeux sur leur amitié, Ruby avait, par précaution, élevé autour d’elle un mur qu’elle avait cru assez solide pour résister à la folie prestionienne et à son potentiel contagion. C’était sous-estimer l’aura persuasive que la jeune femme diffusait et qui au bout d’une seule conversation parvint à anéantir l’armure protectrice établie avec tant de bonne volonté, laissant une Ruby désespérément vulnérable qui se garda d’exposer au grand jour son apitoiement.
C’est ainsi qu’elle se retrouva quelques jours plus tard un café à la main dans le bar du coin en compagnie de son ancienne camarade Cheerio, avant d’enchaîner sur d’autres sorties papotages, jusqu’à ce qu’un réel plaisir remplace sa méfiance alors volatilisée comme un nuage de fumée. Malheureusement, les premiers soupçons de Ruby se confirmèrent peu à peu. Quoique certains noms n’aient jamais été prononcés de vive voix, les allusions à ce cher Wyatt s’étaient amplifiées, les encouragements peu subtils à rencontrer d’autres hommes attirants intensifiés, et par-dessus tout la blondinette savait désormais qu’elle sympathisait avec une complice de son ennemie numéro un. De plus en plus, chaque fois qu’une conversation tournait vers l’un de ces sujets indésirables, Ruby tentait au mieux de garder son calme. Si cela n’avait tenu qu’à elle, elle aurait déjà pris ses jambes à son cou en plein milieu d’un des discours préférés de Lexie concernant les relations amoureuses. Saisissant que la rouquine attendait le moment où elle accepterait de se livrer pour endosser le rôle de sauveuse de couple et rejeter sur elle tous les vices ayant conduits à la séparation du Watsbury, Ruby s’efforçait de se comporter en jeune femme exemplaire, pure et innocente, un sourire bienveillant lui déchirant les lèvres pendant que le fantôme de la culpabilité prenait possession de son esprit et s’amusait à l’abattre en lui injectant son intolérable venin.

C’était à peu près ce qu’elle ressentait actuellement, la peau marbrée de frissons et le corps pris de tremblements compulsifs. Même la voix envoutante d’Elvis Presley assourdie par l’acoustique de la pièce ne parvenait pas à l’apaiser. Il fallait dire que dans l’état actuel, elle n’entendait plus grand-chose. Pour la troisième fois en cinq minutes, la jeune femme jeta un coup d’œil anxieux à sa montre. Pourquoi fallait-il que son angoisse l’ait fait se hâter et qu’elle arrive au final en avance sur le lieu de rendez-vous? Soupirant bruyamment non pas par agacement mais parce qu’elle croyait que son stress était prisonnier de ses poumons et qu’expirer l’aiderait à l’évacuer, elle détendit ses muscles raidis et s’affala au fond de son fauteuil. Elle devait canaliser ses émois. Objectivement, Lexie ne s’était jamais comportée de façon déplacée, ne s’était pas non plus montrée désagréable. Peut-être que ses intentions n’étaient pas mauvaises et qu’elle imaginait lutter pacifiquement pour une cause noble. Une Gandhi entremetteuse en somme. Elle n’avait sans doute pas la moindre idée que le moment était mal choisi pour aborder les sujets préférés de la gente féminine étant donné que Ruby ne gérait plus ses sentiments depuis que Ryder s’était immiscé dans sa vie. Encore fallait-il qu’elle les ait déjà gérés un jour. Elle ignorait les avances du beau brun mais n’avait pas réfléchi à deux fois avant d’écraser ses lèvres sur les sienne dans un élan de jalousie au boot-camp MM une semaine plus tôt, et refusait de tirer un trait sur un homme hors d’accès alors qu’elle se sentait de plus en plus capable de détachement quant à ce qu’elle ressentait pour lui. Pas de doute, le problème venait clairement d’elle. Au fond, Lexie avait toutes les raisons du monde de lui affliger une correction bien méritée.

Un son de fines clochettes carillonna dans l’enceinte du restaurant et mit tous les sens de la blondinette en éveil. Son cœur battait au rythme des escarpins claquant sur le sol. En découvrant de longues jambes à peine dissimulées sous une robe couleur chair, le visage de Ruby se métamorphosa automatiquement pour céder son expression déconfite contre son plus beau sourire. Se dirigeant droit sur elle pour lui offrir une bise éclair, Lexie se laissa ensuite tomber sans retenue sur la place libre en face d’elle, attrapa d’un geste vif le menu et le scruta tout en expliquant distraitement la raison de son retard. Casual mode activated. Tout allait bien se passer. Ce soir, aucune allusion ne serait faite. Pas de raisons de s’inquiéter. Prête à répondre que son retard importait peu, elle fut brusquement interrompue par la suite de la tirade d’introduction que Lexie prenait grand soin de réitérer à chaque sortie. Sous la table, Ruby s’acharnait à tordre ses doigts dans tous les sens si bien que ses articulations meurtries finirent par lui tirer une grimace de douleur.
Les paroles de Lexie enchantèrent sincèrement la blondinette en premier lieu. Elle aussi, malgré la peur injustifiée qu’engendrait l’innocente rouquine, était ravie de ne pas passer la soirée seule. Quand il n’enterrait pas profondément Ruby sous une montagne de remords, le caractère si singulier de sa camarade avait le don d’égayer une journée morose. Mais puisque Lexie ne serait pas Lexie sans commettre une maladresse à un moment ou à un autre – dommage, elle semblait aujourd’hui avoir décidé de la réaliser dès les premières minutes -, les questions pourtant si communes qu’elle lui posa eurent l’effet d’une bombe. Le répit aura été de courte durée. Incapable de contenir son émotion, Ruby bredouilla. « C’est-à-dire que… » Vite, inventer un mensonge, prétendre que tout allait bien, sourire, sourire, sourire. Son facies tout entier s’empourpra, ses yeux s’embuèrent, et les coins de ses lèvres jusqu’alors largement étirées retombèrent en tremblotant. Tant pis, elle était finie. « Lexie… » Sa voix se fit si brisée et aigue qu’elle crut ne pas avoir réellement prononcé son prénom. Elle déglutit péniblement pour retrouver une contenance mais déclara toujours quasi imperceptiblement. « Ça roule pas du tout. » Puis plus fort, fixant un point invisible. « Non, pas du tout du tout. Et tu le sais. Pourquoi est-ce que tu me le demandes alors que tu es évidemment au courant de toute la situation? Je t’en supplie Lexie, stop les clins d’œil lourds de sens et les non-dits. » Ses iris s’étaient soudainement redressés en direction de son interlocutrice et reflétaient une névrose inquiétante. Ruby agrippa entre ses poings fermés sa chevelure ondulée et secoua la tête comme pour se débarrasser de toutes les ondes négatives qui l’assaillaient, fermant alors ses paupières avec une force qui lui fit froncer les sourcils. « Je sais que tu attends depuis le départ de me régler mon compte alors vas-y. Balance tout ce que tu as à dire avant que je regrette de te l’avoir demandé. » Un soubresaut secoua son corps amolli par la faiblesse. Trop tard. Elle le regrettait déjà.
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Lexie A. Preston
Lexie A. Preston
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MessageSujet: Re: 05. There is no duty we so much underrate as the duty of being happy   05. There is no duty we so much underrate as the duty of being happy EmptyDim 24 Aoû - 1:22

Ce serait mentir que de dire que Lexie ne s'attendait pas à ce que le sujet de Wyatt soit explicitement mis sur le tapis. Elle avait beau éviter de le mentionner directement et faire tout son possible pour égayer son ancienne camarade Cheerio et éloigner ses pensées du beau gynécologue, il serait stupide de prétendre que son ombre ne planait pas sur leurs interactions à la moindre mention de sujets romantico-sexuels. En vérité, la rouquine avait été étonnée que Ruby n'en parle pas plus tôt, ne serait-ce que pour lui dire d'arrêter de jouer les entremetteuses et l'envoyer sur les roses. Mais elle avait fini par comprendre que la pulpeuse Awesome Voice était beaucoup trop polie pour cela. Aussi, quand les larmes emplirent les yeux de la blondinette et qu'elle céda sous une pression qu'elle accumulait visiblement depuis longtemps, la jeune galeriste fut prise au dépourvu. Elle fixa son interlocutrice avec de grands yeux ébahis et son expression enjouée se décomposa en un rien de temps, à mesure que les paroles de Ruby atteignait sa caboche creuse. Elle avait été stupide. Ce n'était pas la première fois - et sans doute pas la dernière - que Lexie Preston se faisait cette réflexion, mais cette fois-ci, elle s'en voulait sincèrement d'avoir été aussi irréfléchie. Car si elle n'avait rien à faire de ne jamais mettre un cent dans un parcmètre ou ne pas regarder attentivement avant de traverser la route, causer un tel émoi chez miss Caldwell lui causait un trouble certain. Elle aurait dû être moins insistante. Percevoir sa fragilité. Ne pas prétendre qu'elle était comme Charlie, une âme délirante et coriace sous une carapace d'handicap social et de timidité. Qu'elle n'avait peut-être pas simplement besoin d'amis plus drôles et de quelques partenaires visuellement attrayants. Mais de douceur et de patience, d'attention sans insistance, de présence sans envahissement. Bref, d'une subtilité dont Ginger Spice n'aurait pas été capable même pour sauver sa peau. Et voir Ruby s'effondrer de la sorte serra douloureusement le coeur de celle qui prétendait vouloir être son amie, mais ne l'avait clairement pas traitée comme telle. Lexie fut alors frappée que, alors même qu'elle était clairement la victime d'un harcèlement amical dont seule Baby Preston était capable, la blondinette croyait mériter le blâme. Et croyait que c'était là l'intention de la londonienne, de lui donner du fil à retordre pour avoir été la pomme de discorde dans l'union qu'elle avait contribué à former. Enfin, c'était ce que le Cupidon en elle s'efforçait de croire. Mais la jeune femme était clairement mal placée pour conseiller quiconque dans le domaine des amours, comme elle venait encore une fois de le prouver. Mais c'était un problème à étudier plus tard.

Ses instincts de soeur reprenant le dessus, Lexie abandonna sa carte et son siège pour se rendre de l'autre côté de la table. Elle s'assit à côté de la demoiselle et l'enlaça avec tendresse, tapotant son dos et murmurant un « Oh Ruby... » qui se perdit dans ses boucles blondes. Elles restèrent ainsi un moment, sans doute un peu trop longtemps, mais l'expansive rousse voulait dissiper tout malaise pour que ce câlin puisse avoir un effet bénéfique maximal. Elle se détacha finalement de la Awesome Voice, gardant néanmoins sa main entre les siennes et ne lâchant pas son regard. « Je suis vraiment désolée, je ne voulais pas te mettre aussi mal à l'aise, crois-moi. Je... Je sais que ce n'est pas mes affaires et tout ça, mais je suis tellement émotionnellement investie dans les affaires de Wyatt et Charlie que je me suis autorisée à me mêler des tiennes. » Exprimer ce sentiment à voix haute lui faisait prendre conscience du ridicule de son raisonnement, mais cela n'empêcha pas Lexie J de poursuivre son explication avec un naturel désarmant. « Je veux dire, ce n'est pas très juste que je me préoccupe du bien-être de ces deux idiots et que j'essaie de faire en sorte qu'ils se remettent ensemble et aient un magnifique happy ending alors que je te laisse sur le carreau. Je... Je suppose que je me suis laissée emporter dans mon élan d'entremetteuse du dimanche et que j'ai voulu m'assurer que tous les protagonistes s'en sortaient bien. Mais tu es une vraie personne, pas une expérience ou un personnage dans mon petit monde enchanté. » Lexie se sentait perdre pied, son discours devenant de plus en plus incohérent et ses métaphores bancales. Mais elle comptait sur l'intelligence de la blonde pour saisir son propos. « Je n'ai pas été respectueuse de toi et de tes sentiments, je suis désolée Ruby. On ne parlera plus de quoique ce soit qui t'embarrasse, promis ! Mais il faudra sûrement que tu me signale quand je manque de tact, je suis une cause désespérée dans ce domaine. » Anna et JJ ne perdaient jamais une occasion de le lui rappeler, secouant désespérément la tête dans son dos quand elle faisait un commentaire mal venu de sa voix toujours un peu trop forte. Mais s'il était inconvenant de se moquer de la tenue mal foutue de la vendeuse qui se trouve juste à côté de vous, c'était toujours moins grave que de mettre une personne aussi fondamentalement gentille et douce que Ruby Caldwell dans un tel état. Mais maintenant qu'elle s'était engagée dans cette discussion, il fallait bien la mener à son terme, aussi gênant et douloureux cela puisse être.
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