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 02. Wait a minute girl, can you show me to the party ?

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MessageSujet: 02. Wait a minute girl, can you show me to the party ?   02. Wait a minute girl, can you show me to the party ? EmptyVen 24 Fév - 19:34

NINA&JAYDEN
« Encore un verre, c'est si bon pour le coeur,
Un Verre…»

Le bruit le réveilla. Le bruit crispant, si étonnamment éloigné de l’image veule de ses créateurs, viscéral de deux chats se battant à grand renfort de crachats et de cris. Créatures stupides. Se battre pour aimer. Pour s’aimer. Créatures humaines. Jayden, lui, ne se préoccupait bien moins des raisons que du combat, dans quelques situations, il frappait pour blesser et non pour ressentir. A moins que les deux notions ne soient liées ? Il était trop tôt pour y réfléchir. Une réponse lui serait peut-être trouvée, plus tard, après un matin pourvu d’un bon petit déjeuner… ou une nuit sans beuverie. Autant reporter ça pour trois ans, au moins.

Le Dashwood, constatant avec un étonnement d’ivrogne qu’une vague gêne oppressait sa poitrine, s’extirpa avec difficulté du lit inconnu dans lequel il avait échoué. Dans le lit, c’était de biens grands mots, seules ses jambes se confondaient encore entre les plis nombreux du matelas, la tête coincée entre comme qu’il considérait comme une table de nuit, bloc massif de chêne poussiéreux, et un des pieds du meuble, il contemplait le ciel masqué du bois du plafond de la chambre comme au fond d’un puits aux parois de tissus grisâtres. Appuyant douloureusement ses coudes sur le parquet froid et humide, il repoussa d’une main la petite table et, une fois la place dégagée, se releva sans doute un peu trop vite au vu de la force étrange qui le poussa, sous peine de petite crise de tétanos instantanée, à s’asseoir précipitamment sur le bord d’un oreiller fleurant la lessive bon marché. Ou la sardine en décomposition depuis dix bonnes heures au soleil. Voire peut-être onze.

Plissant le nez à cette délicate fragrance digne d’un mucus de porcelet hyperactif bodybuildé aux maïs transgénique qui aurait fait une réaction allergène à l’ingurgitation prolongée d’oignons de taille non-réglementaire au Texas, excusez du peu, qu’apportait à ses sinus brusqués un courant d’air étonnamment fort, il battit des paupières alors que le haut de son crâne frappait le plafond un peu plus bas qu’il ne l’imaginait quand il le contemplait encore quelques secondes auparavant, étonné. Il n’était pas dans une chambre. Ce n’était pas un lit mais des sacs de poubelles entassé, dont l’un, qu’il avait pris pour un drap de soie, avait été éventré par des ratons laveurs, à moins que ça ne soit un nouveau coup du lutin enragé nain siamois avec sa jumelle parasite à moitié crevette qu’il accusait, les larmes ruisselants sur ses joues gonflées de chagrin, de mettre le bazar dans sa chambre quand l’employée mexicaine de ses parents, qui avait bizarrement disparu une fois le trafic de sexe de son paternel démasqué, cherchait à la lui faire ranger, quant à son oreiller, il se révélait être une masse velue, sale et un peu trop grouillante pour être parfaitement inanimée. Un rat. Haussement de sourcils. La bestiole ne l’effrayait pas plus que ça, à près tout, il fréquentait bien le lycée McKinley, dans le genre nuisible à l’odeur fétide, il était paré.

Tournant son regard abruti par l’alcool vers le haut, il perçu de la lumière à travers une fente lumineuse lézarder sur toute la longueur du plafond. Réflexion faite, il se décida à considérer ce-dernier comme le couvercle métallique, recouvert d’un choix si impressionnant de chewing-gum qu’il aurait fait frissonner n’importe quelle potelée, de la benne à ordure dans laquelle il avait échoué. Donnant un coup de poing poussé par la petite montée d’adrénaline que le manque d’oxygène respirable sans risquer l’intoxication pulmonaire pour l’ouvrir, il aspira une longue goulée d’air, certes, chargé en vapeurs urbaines diverses, mais lui paraissant bien plus vivifiant et pur que n’importe quel verre d’aquavit. Ou presque. S’extirpant avec difficulté des détritus qui l’enserraient jusqu’à la taille, ignorant volontairement la vague nausée qui le prit quand son pied nu effleura une… chose qui couina et explosa mollement sous la pression, Jayden leva une main qu’il passa sur sa nuque endolorie, un goût des plus désagréables anesthésiant sa langue pâteuse.

Seul, dans une ruelle sombre et inconnue, attrapant son téléphone portable qui trônait jusque-là au milieu d’un tas de bières vides à moitié calcinées et une paire de lunettes de soleil bas pris qui lui mangeaient la moitié du visage, décrétées comme sienne et impatientes d’être arrachées à leur présentoir-nez-rongé de boutons d’un SDF inconnu qui ne paressait pas prêt de se réveiller avant la prochaine guerre nucléaire qu’on petit panneaux de carton détrempé à ses côté annonçait pour le mois prochain, au moins on serait prévenu, le Dashwood fit ce que n’importe quel adolescent bien équilibré ferait une situation pareille : il checka ses sms. Grimace. Checker. Encore un terme à ajouter à sa liste de verbes onomatopéiques à consonance phonétique vomitive. Il le placerait juste entre rétrograder et gorgonzola.

La mine écœurée, il jeta un coup d’œil dans les éclats d’une vitre de voiture, sans doute ramenée sous le lampadaire à l’ampoule nue par des gamins du quartier. Quel quartier, d’ailleurs ? Qu’importe. Observant son multiple reflet, improbable silhouette d’alien, d’aliéné ? Oui, l’adjectif convenait mieux, sinon, pourquoi porterait-il des lunettes en pleine nuit ? Une conjonctivite était une autre explication probable, voire probante (il ignorait l’exact sens du mot, mais quelque chose en lui, sa paresse ? Le chili de la veille ? Sa conscience ?, pariez pour le plat en sauce étymologue, vous avez plus de chance de gagner, lui signifiait qu’il existait un lien subtile entre les deux expressions), Rien que ça, mais insuffisante compte-tenu du fait que son globe oculaire et lui-même seraient déjà sur le billot d’un chirurgien dans une clinique spécialisée, accueilli dans une chambre équipée du wifi et d’un écran plat 100 pouces gracieusement payée par l’hystérie hormonale d’une mère inquiète., bleuie par la lumière du téléphone hausser les épaules à cette question des plus superficielles dans les petits bouts de verres mal éclairés, il comprit qu’il faisait de même et se pencha sur la liste de messages apparaissant à l’écran éraflé tapoté vivement.

Il les parcourra rapidement. Quant on pense aux louboutins, on en voit le tweet. Enfin, quelque choses dans ce goût-là. Toujours était-il que sa chère "monsther" s’était assurée à travers quelques vingt-quatre messages affolés que son "What, Son ?!" (À prononcer « Wotson », ce qui est assez déconcertant quand on sait que Deborah n’a pas d’accent, mais qu’elle s’imagine que parler comme une fermière Écossaise devenue femme du monde grâce à une histoire d’amour incroyable relatée dans un téléfilm pouvait la rendre plus maternel) s’était trouvé un entrepôt pas trop susceptible de lui donner des MST où passer la nuit sans se faire égorger par un clandestin moscovite. D’un coulissement du pouce assuré, il effaça les sms angoissés et tweeta une photo de plaque de la rue principale de Lima où il n’était absolument pas, gardée en réserve pour ce genre d’urgence-retrouvaille. Satisfait, le gamin tria entre les annonces du « repas » de Noël que le compte de Julliard lui envoyait à sa demande, enfin, à la demande de la grosse bourse que sa mère offrait à l’école tous les ans pour assurer la place de son fils totalement dénué du moindre talent, les sms enthousiastes de plusieurs soirées à venir, notamment un mariage dont il n’avait aucune idée de l’existence, de la part d’un jeune homme qu’il devait avoir sacré « son ami » pour la semaine, celle-ci comprenant un devoir de biologie à remettre le vendredi qu’il n’avait décidément aucune envie de faire, à qui il renvoya une demande de renseignement en fronçant les sourcils, et une longue série de photos commentées par les plus hautes instances en matière de smileys par deux inconnues.

Alors qu’il lançait la diapo’ sur la série, il revoyait sa soirée se dérouler sous ses yeux, les flashs de souvenir embués par l’alcool se mêlant aux clichés évocateurs. Heure par heure. Il sortait du lycée, T-shirt grisâtre, short taché et baskets aux pieds, Comment en avait-il perdu une, d’ailleurs ?, son cours de gym l’avait sans doute motivé à partir chercher des enseignements plus… tangibles que ce que pouvait lui apporter une corde lisse un peu plus tôt que le règlement national ne le prévoyait, accompagné de deux inconnues déjà hilares auxquelles il attribua l’envoi des preuves pixellisées. Se succédaient diverses situations dont il ne prenait pas réellement conscience, à mesure que les images, d’une netteté redoutable, défilaient et se fixaient dans sa rétine la mémoire, elle, se faisait plus confuse, des rires à des blagues vaseuses lui revenaient, des langues effleurées, des bouteilles… beaucoup de bouteilles. Plissant les yeux, il distingua l’entrée tout en néon d’un club qu’il avait l’habitude de fréquentait en fond d’une scène le montrant embrassant la cuisse dénudée d’une jeune femme qui avait du s’ajouter au groupe, escarpins roses vifs aux pieds, s’exécutait à la périlleuse pratique d’un poirier contre un lampadaire avec pour seules attaches les mains baladeuses du Dashwood, sous le sourire un peu dément de celui-ci et ceux de quatre autres personnes dont Jayden n’en repérait avec mépris qu’un comme un vague joueur de hockey de McKinley. La « haute » de Lima. Et, de toute sa hauteur, cette société s’étouffait de rire sur trois autres photographies hautes définitions, l’appareil avait sans doute changé, face à la flaque de vomi déversé par la jeune femme tout aussi éclatante de joie gaillarde. A partir de là, on voyait Jayden avec une chaussure en moins sur chaque image. Ils étaient rentrés. Ils avaient dansés, ils avaient bu, encore, fumé et s’étaient rejoins dans les « salons », comme on appelait les petits culs-de-sacs sombres et sales derrière le bâtiment.

Sans s’en rendre compte, ses jambes s’étaient mises en marche pendant que son visage se figeait dans un sourire sarcastique à la revue de ces, ses, souvenances enflammées. Comme un papillon de nuit à qui on aurait froissé une aile en essayant de le caresser, il se pressa jusqu’à la porte vitrée assurée pare-balle d’une épicerie arménienne. Pénétrant dans l’intérieur crasseux et seulement éclairé par un poste de télé disposé dans un coin, près des boites de céréales périmées de six mois, il ne détacha pas son regard de l’écran qu’il tournait lentement, comme pour mieux comprendre ce qu’il y voyait, tandis qu’il ouvrait la porte d’un frigo défraichi menaçant de s’écraser sur le sol à tout instant sous les poids des nombreuses caisses posées à son sommet. Attrapant une bouteille de tequila qu’il coinça sous son bras, un baklava à deux dollars logé dans son poing gauche, Jayden porta l’appareil à son oreille droite, se glissant entre les rayons bas du magasin jusqu’au comptoir où le petit homme chauve accoudé lui jeta un regard mauvais. Une ridule dessinée sur le front, il écouta le message dont la réception s’était présentée comme le dernier sms en date. « Vous avez… UN… nouveau message. Reçu à… VINGT-DEUX… heures… QUARANTE-TROIS…minutes… » Jetant un coup d’œil à un cadran vert lumineux rappelant étrangement une autoradio posé aux côtés de la petite télévision beuglant un programme en portugais auquel il ne comprenait rien, il nota que le message datait déjà de deux bonnes heures. Calculant inutilement le décalage horaire avec l’Europe, il considéra que, si le matin luisait là-bas, c’est qu’il devait être assez tard en Ohio tandis qu’une voix caquetante identifiée via son numéro comme propriété d’une des deux jeunes femmes qui l’avaient si gentiment rappelé aux bons souvenirs de sa soirée perçait ses tympans. « …Je pense que tu devrais prendre un petit xanax avant de vérifier tes relevés bancaires prochainement, Darling. Tu risques d’être surpris. J’espère que les poubelles étaient confortables, on pouvait vraiment pas te laisser dans la voiture dans cet état. Allez, à plus tard Jayd’ !»

- Et merde…, grogna-t-il, encore mortifié de l’outrage d’avoir été appelé Jayd’, balançant un billet sur l’épicier qui s’impatientait et sortant dans la nuit fraiche de Lima après avoir empoché dans un nouveau juron le mobile qui pouvait comptabiliser une bosse de plus, tant il s’était acharné à le frapper de la paume, attendant qu’il confirme transmission du mms à sa belle-mère. Il n’y avait plus rien à faire. Il n’avait plus rien à faire. Cela suffirait. Il l’espérait. Non. Il s’en foutait. Mais on croirait qu’il espérerait, alors c’était tout comme.

Zigzaguant entre les voitures garées devant le parc Lincoln, inaccessible obscurité fleurant l’herbe coupée, il s’écorcha l’index en tentant de décapsuler son amie la plus fidèle, celle qui rendrait le grand bordel fumant de son existence un peu plus anormal. Peinant à l’ouverture, il se résigna à faire exploser le col de verre sur les sièges de plastique orange où il se laissa tomber allongé, assoiffé. Il régla cela rapidement, le bruit sourd de la bouteille éclatée raisonnant encore comme étouffé par du coton à ses oreilles, une légère douleur se signala dans sa bouche.

Son esprit sulfureux, non, fourmillant, oui, fourmillant : rongé par des idées moins immatérielles que fourmis rouges, qui s’activent, colonisent, creusent, détruisent et transforment à mesure qu’elles grandissent et se renforcent, embrasé par les vapeurs s’échappant du goulot ébréché de sa boisson, il n’en savoura pas plus les notes qu’il incendiait sa gorge. Il entama un tango consumant avec le liquide qui se répandait sous sa peau, ses lèvres se sucrant délicieusement après le goût de sel laissé par le sang de sa langue coupée, sa tête s’agitant doucement, cognant contre les tags de la petite cage d’attente du bus, les prunelles ternies contemplant le vide, à peine illuminée par le soupir qui s’éparpilla en un petit nuage translucide dans le froid qu’il ressentait soudain.
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MessageSujet: Re: 02. Wait a minute girl, can you show me to the party ?   02. Wait a minute girl, can you show me to the party ? EmptyLun 27 Fév - 22:52

"Première position, dégagé devant, à la seconde et retiré... Trois, quatre, Nina le plié, dégagé arrière.. on s'élance, un deux trois, le jeté réception en arabesque.. OUI ! Vous voyez là, parfait ! PAR-FAIT ! Vous pouvez aller vous changer, Nina on reste encore avec toi."

En grand écart, le front contre sa jambe gauche, Nina s'étirai pour souffler un peu alors que ses camarades retournaient aux vestiaires. Ce cours de danse avait été exaltant, comme à chaque fois d'ailleurs, mais ce soir là Nina sentait cette capacité de réussite déconcertante de facilité qu'on peut sentir parfois, et alors on se sent à sa place, plus brillant que jamais. C'est ce que la jeune fille ressentait à cet instant et pour cause, elle avait le premier rôle du nouveau récital de l'école pour les fêtes. Elle interpreterai Clara, jeune fillette de Noël qui quitterait l'enfance à jamais, assistant à la magie d'une autre métamorphose, celle du casse noisette en prince charmant. Ce nouveau défi la passionnait, elle adorait ce ballet de Tchaïkovski dans le reflet qu'elle y trouvait d'elle même d'une certaine manière. Elle aussi avait peut être besoin d'une métamorphose, évoluer et avancer pour de bon. Mais ne nous leurrons pas, elle était galvanisée par cette nouvelle expérience essentiellement dans la nouvelle opportunité qu'elle y trouver de briller encore un peu plus aux yeux de son père, une réussite qui serait certaine aux vues du travail qu'elle fournissait et qu'elle était prête encore à fournir.

Travailler encore, c'est la raison pour laquelle sa prof lui avait demandé de rester exceptionnellement plus tard ce soir là. Irena McPoints ne doutait pas réellement de Nina, mais n'avait pas encore assez confiance en elle, comme en n'importe quelle autre élève qui serait à sa place, pour laisser sa Clara lézarder quelques semaines avant ce spectacle dans lequel son implication n'avait d'égal que les espoirs qu'elle y plaçait. Un ancien (très ancien) musicien du Bolchoï faisait en effet le déplacement jusqu'à Lima, et pour le faire venir, Irena n'avait fait appel qu'à des moyens peu orthodoxes. Nina se retrouvait donc seule dans cette gigantesques salle plus lumineuse qu'une ampoule immaculée, dans la banlieue de Lima avec sa prof afin de poursuivre ses tribulations avec son casse noisette jusqu'à tard dans la soirée, à la lumière de ce qui devait être le sapin de Noël. Au signal de Mme McPoints, quelques minutes seulement après le départ de ses camarades, Nina empoigna la barre et se mit en position. Elle était en sueur après les deux heures de cours en communs et déjà bien affaiblie. Son justaucorps noir corbeau lui collait à la peau et lui procurait une sensation très désagréable à chaque mouvement. Pourtant, à la première note du premier tableau, toutes ces pensées furent renvoyées loin quelquepart pour ne laisser que son corps prendre le contrôle.

Son corps allait bientôt souffrir bien plus qu'elle ne le pensait. Irena était complètement hors de raison, car quoiqu'elle eusse fait pour amener ce musicien en fin de vie à Lima, elle semblait bien avoir l'intention d'en récupérer la juste contrepartie. Cela faisait des heures que Nina répétait en boucle le premier acte, et chaque fois qu'elle commençait à nouveau "La décoration de l'arbre de Noël", c'est les phares des bus de la ville qu'elle s'imaginait s'éteindre peu à peu jusqu'au dernier, tout comme les dernières barres de batterie de son téléphone. Alors qu'il était minuit passé, que les derniers bus récupéraient les derniers passagers en ville, Nina se révolta quand l'énième "Valse des flocons de neige" prit fin. "ASSEZ ! J'arrête ! C'est pire qu'aller récolter la coca dans les Andes. Mon jupon en tulle me colle aux cuisses, et je ne pensais même pas que c'était possible. Il est hors de question que ma peau ressemble à un grillage demain matin. Je vais prendre mon bus ! Bye Irena !". Sans plus de cérémonie, elle retira ses pointes en marchant vers la sortie, excédée de fatigue et d'agacement. Elle enfila son sweat de jersey gris, des basket et passa la porte en courant, son sac à la main, histoire d'avoir le dernier bus pour ne pas rester coincée dans la banlieue de Lima à cette heure là. 00h33, le temps lui était compté, et le compte était dépassé. Nina arriva à l'arrêt de bus après le dernier départ, essoufflée et découragée, avec dans la main son portable déchargé. Il lui faudrait une bonne heure de marche pour parvenir jusqu'à chez elle, et hors de question de faire du stop à cette heure là en jupon de danse rose bonbon. Ce n'était pas le coin dangereux de Lima, mais Nina se sentait comme un aimant à pervers. Un peu étourdie par sa course, alors qu'elle entamait son pèlerinage urbain, elle se vit un instant costumée en un imposant chamallow rose pâle, perdue au fond d'un saladier, ultime représentante de sa race avec juste la tête qui dépasse d'une épaisse couche de guimauve. Les adversaires sont tenaces et ne sont autre que les mains de tout ces pervers de Lima, velus et ridés, qui tentent de l'attrapper. C'est finalement dans la bouche de Will Schuster que l'épilogue se déroula...

Honteuse de toutes ces images délirantes, Nina s'assit un moment sur le rebord du trottoir pour se rafraîchir un peu. Elle en profita pour se passer de la crème hydratante sur le visage, se donnant ainsi l'impression d'être protégée du froid et de la sueur. Elle se sentait respirer à nouveau, fraîche comme une fleur au matin, les pores purifiés et nettoyés en profondeur, un délice de propreté et d'hygiène. Une fois sa toilette de chat effectuée, Nina reprit le pas avant de s'arrêter seulement quelques mètres plus loin. Ce qu'elle redoutait se pointait juste devant son nez : un clochard déambulait sur le trottoir d'en face, visiblement sobre encore, mais la bouteille qu'il tenait en main y remédierait sûrement quelques heures plus tard. Il longeait les grilles du parc Lincoln avant de s'effondrer lamentablement sur les sièges de l'arrêt de bus. Nina observa un long moment ce manège, car en réalité, elle restait tétanisée par l'anxiété. Elle ne voulait pas que cet homme la voit, lui parle, l'accoste, voir pire. Elle n'avait pas très bien vu de quoi il avait l'air mais le contexte suffisait à lui supposer une sage prudence . Il était assit là devant le parc, devant la végétation nocturne qui surplombait les grilles et qui semblait le protéger de quelques manières que ce soit. Il était en terrein conquis, dans la rue, sous cette nuit noire et complice des plaisirs du vagabond.

Elle se mit dans l'ombre d'un des arbres qui bordaient les trottoirs pour observer encore comme d'une façon anthropologique la scène qui se déroulait sur l'autre rive de ce fleuve noir de macadam. La curiosité malsaine dont elle faisait preuve lui joua un tour lorsqu'en se penchant un peu trop, un bruit interpella le spécimen observé. Nina croisa son regard avec celui de Jayden Dashwood, un garçon du lycée, et pas n'importe lequel. Ce type était une bête de foire en son genre, très à part des autres, en marge de ce qui pouvait animer les lycéens de son âge et aux activités totalement à côté de la loi. Malgré tout, et sans savoir vraiment pourquoi, le garçon l'intriguait intensément comme jamais quelqu'un d'autre auparavant, il la fascinait même. Ce n'était pas seulement ce faciès d'éphèbe écorché, brun au teint pâle qui laissait flotter à la surface des lèvres rouge et charnues, à la moue enfantine et au regard insolent, qui la déroutait totalement. Elle lui prêtait une aura ravagée de passion, d'une impulsivité et d'une acuité plus à vifs que jamais. C'est un univers qu'elle savait tout à fait opposé au sien mais pourtant, elle oserait l'approcher quand elle en aurait jeter mille autre de son espèce. Elle sortit de sa cachette ombrée pour sortir à la lumière des lampadaires bleuâtres, penaude et ravie. Après l'avoir fixé quelque seconde elle lui demanda de l'autre côté de la route : "Est ce qu'il y a encore des bus sur cette ligne ?"


Dernière édition par Nina Stewart le Ven 9 Mar - 22:31, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: 02. Wait a minute girl, can you show me to the party ?   02. Wait a minute girl, can you show me to the party ? EmptyJeu 1 Mar - 21:33

Deux perles dans la nuit. Luisantes, ocre mais écaillées d’un éclat noir, comme éclatées en leur centre par la nuit rampant à leur bord. Comme le fond inaccessible d’un puits creusé à même la roche brunâtre, vibrante, d’un volcan. A moins que cela n’en soit la sortie, l’éclat de la liberté presque totalement noyé d’obscurité légère et poisseuse alors qu’on la contemple d’en bas. Le puits était un tunnel, un tube à essai où les produits se mélanges et réagissent, où les molécules s’entrechoquent dans un chaos acide. Le tube avait tourné et tournait encore, lui tournait la tête sans que cela ne tienne droit. Droit. Couché. Droite. Gauche. En bas. En haut. Eau. Orange. Rose. Non, violet, comme les arbres qui bruissaient un chuchotement apeuré par la température refroidie derrière lui. Bruisser. Un nouveau verbe à ajouter, la soirée n’était peut-être pas tout à fait perdue. Il ne savait pas. Il ne voulait pas savoir. L’apesanteur des sens l’avait déjà agrippé de ses longs doigts diaphanes mais intangibles, plus alourdie qu’exacerbée par la boisson. Battement de cil.

Il l’observa sans comprendre. Il ne la reconnaissait pas vraiment. Il ne devait pas les connaître, ces pierres inconnues épinglées sur des yeux tout aussi étrangers. Quoiqu’il n’ait jamais été très fort pour des visages ne présentant pas les perfections attendues. Pour les visages qui n’étaient pas siens, et ceux-ci se faisaient malheureusement bien trop nombreux. Un peu plus chaque jour menant à un beaucoup trop par semaine. Avait-elle vingt ans ? Cent ? Seize ? Quatre ? Il misa sur ce dernier chiffre. Oui, quatre ans. Cela lui allait si bien au teint. Plongée dans la ruelle, affublée de ses vêtements invraisemblables et apparemment trop grands, la gamine avait flambé les pensées inondée d’alcool du garçon au croisement de leurs iris sans qu’il n’y voit de réelle conviction, sans qu’il n’y distingue cette éloquence vindicative qui corrodait de mauvais auspices à son propos les humeurs des adultes.

Auspices. Dans l’antiquité, présage traitant de l’avenir au travers de l’interprétation du vol des oiseaux. Un oiseau. C’était la métaphore qui lui convenait le mieux. L’élégance d’un vol à la trainée parsemée de plumes arrachées par la tempête. Entre les bourrasques se glisse l’idée, l’envergure floue de l’effort pour voler. La cage était laissée ouverte, l’oiseau est parti. C’est mieux comme ça. Alors la bestiole lâche tout et se laisse porter par la folie des caprices de l’air chargé d’orage, battant les champs et prairies éloignées comme une mer ondoyante dont tout les déchaînements épargnaient l’animal de son altitude par pudeur de se montrer encore attirés par le sol. L’oiseau monte, monte, monte, s’éloigne de l’oxygène, effleure les cieux, cherche à atteindre les nuages et s’écrase sur les flancs d’un immeuble imprévu. L’histoire de sa vie. Ou, tout du moins, celle qu’il venait d’inventer, alors que la boite de plastique transparent du baklava, ornée d’un logo en forme de goéland, collait entre ses doigts recouverts d’une substance sirupeuse granulée de miettes qu’une longue et consciencieuse succion n’avait pas réussi à lui faire savourer tant ses papilles, grisées par la tequila trônant à présent sur le sol, étaient aux prises avec un morceau pourtant petit de la pâtisserie copieusement imbibée de miel. L’histoire d’une marelle où le caillou a dérapé, de la Terre au Ciel il n’y avait pourtant que huit cases, mais si une lui manquait, ça suffisait. Ou ne suffisait pas, plutôt.

Passant une langue rappeuse sur ses lèvres sucrées, le Dashwood reporta son attention sur un panneau publicitaire à sa gauche où, sous une vitre décorée de rayure et de dessins, ou ce qui devait l’être, aux feutres noirs, une jeune fille blonde multiplement tatouée en un mètre sur deux lui lançait un regard aguicheur imprimé laser derrière un flacon dont le cristal stylisé avec goût et marketing ventait de lui-même la fragrance sensuel de son contenu contrasté en brillant avec tout les soins possibles applicables par photoshop. La chose lui semblait plus facile que de poursuivre cet étrange dialogue muet avec l’âme déposée de l’autre côté de la route. Chose imprévue : la créature sans âge se pressa à rompre un échange contraignant pour en générer un nouveau, réthorique cette fois, bien plus indésirable.

- Est ce qu'il y a encore des bus sur cette ligne ?
[Qui t’as permis de me tutoyer ?]

Posant une expression morne sur la silhouette bleutée et blafarde dont l’aspect fantomatique, artificiellement irréel, le força à plisser ses paupières comme s’il la découvrait difficilement derrière une fenêtre recouverte de givre, Jayden esquissa un sourire mécanique. Automatisme inévitable au contact du beau sexe. Ses prunelles incendiées par un intérêt prédateur dont il ignorait lui-même s’il était simulé, il pencha la tête sur le côté, bordant langoureusement de ses cils convoiteurs une mâchoire arborant des lèvres plus familières qu’attendues. Coulant un regard jusqu’aux courbes de la taille, les tâtant presque de celui-ci, il hésita une seconde alors que la vague étiquette uniformisée d’une Cheerios naissait dans ses idées. Nul ne peut s’imaginer les ignorer, bien qu’elles ne soient à ses souvenirs qu’en une paire d’yeux à la fois réprobateurs et admiratifs qui s’accrochent à son passage, comme tout élève à McKinley, à la seule différences qu’elles paraissaient des êtres un temps soit peu plus intéressantes que les autres. Le syndrome des jambes dénudées et de la mini-jupe sportive. Arrêtant le cheminement sinueux mais tentateur de ses pensées sur le physique de la jeune femme, il s’engagea sur une voie plus tortueuse, une voie de miel brun durcit marbré d’éther, distillant une lourde brume aux senteurs de souffre. Un parfum de destruction. Le quai d’un train qui embarquait en goinfre, sans espoir de retour, sans idée d’arrivée, laissant le juste choix du temps qu’il faudra pour ne plus rester assis, passer sa tête par la fenêtre et se gorger des sensations offertes à l’instant où deux mains se rejoignent au creux de votre dos et vous pousses. Parfois la chute, vertigineuse mais clémente, se terminait sur le bas-côté, parfois les rails traîtres réceptionnaient sans permettre qu’on ne se relève. C’était un jeu. Une chance à saisir, un hasard sur lequel on ne pouvait compter. Une démence douce-amère qui émulsionne l’esprit et y laisse ses traces blanchâtres d’huile bouillante. Le jeu est un art qui se consume à l’instant où le vainqueur est désigné. A ce titre, Dashwood ne pouvait être un maître car, lorsqu’il parait l’embarras extrait de la posture de l’inconnue par une moue ardente du coin de ses lèvres tachetées de morceaux d’amendes grillées molles, il n’envisageait pas de perdre plus qu’elle.

-Qui t’as permis de me tutoyer ?, balbutia-t-il avec plus de douceur qu’il ne s’en envisageait capable à la vue du tôt d’éthanol tournoyant dans son sang et d’un accent New-Yorkais deviné.

Ainsi son idée n’avait évolué. Cela n’avait rien d’étonnant en soit, mais cette résolution tenait plutôt de quelque chose qui s’apparentait au décevant. Le bruit métallique d’une canette de bière laissée déloyalement abandonnée une fois vide s’entrechoquant avec la bouteille éveilla en lui l’étrange impression du tintement d’une cloche aussi solennelle qu’assourdissante. L’heure était venue, clamait-elle. Quelle heure, il, donc personne, n’y attachait la moindre importance, le savoir de son arrivée étant simplement que trop intense pour en gâcher la saveur inespérée en analyse.

-Enfin, je doute que les transports en commun desservent encore à cette heure… A Lima.

Il n’avait pas jeté un seul coup d’œil au panneau énonçant les heures de passage disposé dans son dos avant d’émettre un avis. Cela n’avait aucune importance. Qu’est-ce qu’un morceau de plexiglas gribouillé d’heure face à ses conclusions logiques basées sur les statistiques inventées à l’instant d’une étude sociologique approfondie démontrant les probables divergences existant entre les conducteurs de bus aux volants recouverts d’imitation de cuir de vache chiangus ou lineback ? Rien, alors à quoi bon s’y attarder. Comme pour mieux s’assurer de l’existence d’un interlocuteur à qui il adressait sa réponse, il se leva dans un craquement du plastique usé du siège à présent assurément honoré de l’avoir soutenu. Reprenant la conversation avec une pointe de sarcasme dans la voix, il scruta

-Mais le doute n’est pas fiable…

Attrapant une nouvelle fois la bouteille par le goulot ébréché en un sourire tordu recouvert de quelques gouttelettes sombres de sang qui, Surprise, ne se logea non-pas contre sa trachée mais se retrouva longeant sa cuisse, il s’avança pour ne plus se trouver qu’à quelques pas de la frontière entre le trottoir et la rue, toujours fixant un point entre l’oreille et la tempe droite de celle qu’il prenait pour une lycéenne.

-Je te propose donc d’attendre…

Sur ces mots, la boite, suivie au loin par les yeux figés de la fille de la publicité, tomba dans une trainée de l’épais sirop édulcoré qu’elle contenait sur le goudron à l’aspect ductile infirmé par la douleur provoquée au fessier du jeune homme quand il s’installa au milieu de la route déserte atteint quelques secondes plus tôt, bouteille refroidissant la joue fiévreuse, improbable illustration d’un pique-nique nocturne en préparation.

-Avec moi.

L’intonation suave avait presque valeur de défi alors que son menton brillant de miel se carrait effrontément, accentuant de façon inattendue les traits enfantins gravés au scalpel d’une sucette quotidienne sur son visage. Semblant subitement se rappeler d’une ancienne coutume tribale en plein conseil d’une tribu perdue en pleine forêt amazonienne, il présenta presque à contrecœur sa boisson à la créature apparue qui n’avait toujours pas bougé, scrutant cette dernière en stroboscope, une lueur passée pour interrogative éclaira un instant ses pupilles virbantes.


Dernière édition par Jayden R. Dashwood le Sam 3 Mar - 21:39, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: 02. Wait a minute girl, can you show me to the party ?   02. Wait a minute girl, can you show me to the party ? EmptySam 3 Mar - 6:39

Elle se tenait droite et raide enveloppée de cette lumière bleue nocturne et froide, une lumière qui l'habillait d'une aura fantomatique comme une apparition de l'au delà venue chercher son du depuis le royaume des morts. Sa silhouette surlignée de ce halo lumineux n'était pas des plus gracieuse, alourdie de son sweat soutenue par des jambes frêles et fines qu'on pouvait distinguée par transparence à travers son jupon de danse. Le tulle flottait au vent la faisant toujours plus spectrale et mystique. Seulement la réalité était bien étrangère à ces images morbides et magnifiques. Nina ne venait pas en conquérante, en négociatrice d'âmes non plus. Elle se trouvait au contraire dans une situation bien inconfortable, prise sur le fait en train d'observer d'une curiosité presque perverse et malsaine l'objet de toute son attention. Elle ne sentait plus le froid à cette heure de la nuit déjà bien entamée, elle ne songeait plus à ses parents, bien loin du théâtre que formait cet environnement urbain, bien loin de la scène palpitante qui se jouait ici. Le tout s'organisait en un tableau digne des symbolistes les plus émérites. Tout paraissait faire sens, tout était signe d'une réalité bien supérieure qui semblait échapper à celle qui quelques minutes avant était encore Clara, jeune fille perdue dans un conte de fées au bras de son casse noisette. Cette mise en scène ci avait placé les deux protagonistes des deux côtés opposés de la rivières noires en laquelle se déguisait la chaussée pour un instant. Chacun restait de son côté, condamné a résider sur l'une des rives qui bordait ce cours d'eau particulier et infranchissable. Si les éléments physiques leurs enlevaient toute proximité, Jayden leur retirait aussi par la parole.

"Qui t’as permis de me tutoyer ?"
"Oh, je...euh.."

Peu importait vraiment les mots, Nina n'entendait qu'un son, celui d'une voix qui l'envoutait presque plus que le visage. Dans la confusion des sens, elle n'avait pas prit compte de sa remarque, n'avait pas chercher à répondre et ne réalisait pas plus qu'on venait de lui reprocher un manque de politesse, ce à quoi elle se pliait drastiquement en temps normal. Elle avait uniquement produit un son en retour, juste un son pour se manifester. Sa voix s'était perdue dans le vide sans jamais s'éteindre, mais sans jamais sonner vraiment. Elle avait fait en sorte que sa voix rencontre la sienne, juste pour une autre note de plus, rien qu'une, comme elle aurait effleurer une cloche avec nonchalance et douceur pour entendre encore son tintement. De son écho elle était tomber amoureuse. Elle ne remarquait même pas le peu d'intérêt que le garçon portait à sa demande, s'en rappelait-elle elle même. Tout ce qu'elle distinguait dans le silence qui se fit quand enfin s'éteignit son gémissement, c'était ces yeux qui la fixaient, ce regard qui l'évaluait et qui faisait peur. Elle était toujours immobile cependant qu'elle sentait son esprit fléchir et divaguer, embrumé par quelques sortilèges dont seul le sulfureux personnage avait le secret. Sa condition physique la prédisposait à quelques délires : Nina n'avait rien avaler depuis bientôt plus de six heures et avait fourni un effort physique considérable, le manque de glucose se manifestant avec insistance dans son corps, lui drainant ses force et sa raison. Peu importait car Jayden semblait bien être une sorte de molécule parente du glucose. Alors que son corps ne criant qu'au défaut d'une substance, Jayden l'emplissait d'une autre par les yeux et les oreilles.

"Enfin, je doute que les transports en commun desservent encore à cette heure… A Lima."
"Ah oui..."

Le bruit du silence qui se brisa sous la voix de son interlocuteur la ramena presque à terre. Ses yeux cessèrent leurs égarements et le voile de cécité qui se levait lui redonna la vue. Jayden se leva et sortit un peu de l'ombre de l'abri devenant à son tour personnage irréel flottant dans l'espace et la lumière des lampadaires. Instinctivement, Nina fit un pas en arrière quand ce dernier en fit un vers elle. Son équilibre lui faisant défaut un instant elle identifia objectivement l'hypoglycémie légère qui liquéfiait ses membres.

"Mais le doute n’est pas fiable… "
"Vraiment...?"

Jayden avançait encore faisant une nouvelle fois reculer Nina qui n'osait prendre la parole que pour signifier qu'elle n'était pas son reflet, qu'elle était bien présente et existante malgré l'attention parfaitement aveugle qu'elle lui portait. Il n'avait sûrement pas conscience de l'état de faiblesse dans lequel elle se trouver, autant face à son propre corps que face à lui, trop lointain encore malgré tout pour la percevoir tout à fait, mais elle avait bien conscience des fils minces et solides qui l'étreignaient plus fort à mesure que sa voix le leur ordonnait. Elle se vit en une fraction de seconde chuter de toute sa hauteur sur le trottoir la conscience éveillée, les yeux bien ouverts, mais son corps entier totalement inanimé. Jetant un coup d'oeil à ses jambes qui ne répondaient plus de rien, elle les perçu faites de bois, liées à des cordes que Jayden tenaient en main, et avant qu'elle puisse réaliser qu'il en était de même pour ses mains et sa tête, le marionnettiste prit en main son pantin pour une danse macabre sur le macadam. Quand Nina revint de son imagination créatrice de maintes visions métaphoriques délirantes elle constata que Jayden n'avait absolument pas entendu sa maigre manifestation, ou l'avait totalement ignorée car il s'avançait maintenant davantage pour finalement prendre place au plein milieu de la rivière noire autrefois infranchissable, maintenant terre de rencontre.

"Avec moi."

À l'appel de ces mots Nina ne put que ressentir un grand frisson presque convulsif dans son ventre, mêlant excitation et crainte alors qu'elle n'avait toujours pas clairement réalisé ce qu'impliquait la proposition de Jayden. Aussitôt, il tendit sa bouteille, contenant de quelques liquides inconnus à la jeune fille ignorante des breuvages qu'affectionnait son partenaire de jeux, avec un flegme douçâtre et tendancieux. Sa voix s'inscrivait dans un registre de défi, de jeux, dont Nina ne pouvait saisir le sens, et cette invitation à partager son met ne l'encourageait pas à comprendre ses agissements. Cette perspective de gouter ne serait ce qu'un filet mince de ce que Jayden paraissait considérer comme un élixir mystique s'était heurter de plein fouet à la muraille solide de ses convictions, l'extirpant totalement de sa léthargie contemplative pour la remettre aux commandes de la citadelle des bonnes moeurs. La voilà la métamorphoses, la marionnette était devenue humaine, déchirant les liens qui l'handicapait, grandie par la morale et la conduite d'une fermeté sans faille ! Le regard de Nina s'était fait plus ferme à nouveau, les faiblesses de son corps avait fait place à la douleur. Malgré tout cela, elle était désireuse de se confronter à ce comportement pour le combattre, voire même le changer.

"Pour qui tu me prends, je n'ai jamais cédé à ces trucs là et ce n'est pas maintenant que je tournerai le dos à tout ce que je m'efforce de préserver pour tout détruire avec ces délires d'adolescents attardés et désaxés !"

Nina s'était réellement énervée. Elle rejetait avec mépris le genre de comportement que Jayden pouvait avoir et s'en voulait farouchement de s'être laissée intimidée aussi longtemps. Cette montée en puissance n'avait en fait pour but que de défendre ses murs de conviction qu'elle sentait affaiblis par l'aura du jeune homme et l'écho qu'elle trouvait dans les sens de Nina. Sortie de sa torpeur, le froid se fit sentir à nouveau la faisant frissonner et lui rappelant par la même occasion la faiblesse de son corps. Cette montée d'émotion avait gonflé ses veines et son sang palpitait avec force sur ses tempes, alors, comme un flux d'énergie trop intense aurait briser sa bonne condition, le manque énergétique dans lequel elle se trouvait l'affaiblit pour de bon, frappant dans tout ses membres, brisant ses os et ses muscles à coups minces et lents mais assez lancinants pour l'obliger à s'asseoir. Désorientée, elle prit place sur le rebord du trottoir prise d'étourdissements qui lui troublaient un instant la vue.

"T'as pas quelque chose à manger, je me sens faible... Ah non c'est vrai que t'as que ta boisson... Boire c'est important n'est ce pas !"

L'ironie de ses propos ne masquait que faiblement son agacement, l'agacement de se trouver là en position de faiblesse face à celui qui la mettait dans un trouble absolu, et l'agacement plus prosaïque de n'avoir rien à manger mais juste cette bouteille que Nina exécrait au plus haut point dans tout ce qu'elle représentait, incapable en plus de lui redonner des forces. Au bord de la crise de nerfs mais incapable de s'énerver tout à fait, sa frustration l'amenait à se décharger sur Jayden et sa bouteille, mais dans une accusations presque plaintive et pleine d'empathie.

"Non mais sincèrement, tu n'es pas fatigué de faire n'importe quoi, tout ce que tu veux sans mesurer ce qu'il y a autour, les attentes qui pèsent sur toi ? Qu'est ce que tu vas faire de ta vie ? Regarde moi ce soir, j'ai fait n'importe quoi, je me suis attardée avec toi et voilà le résultat. Habituellement je ne fais jamais d'erreur, jamais, et tout se déroule comme prévu sans encombres ni peur, ni faiblesse ni rien du tout. Juste ce qu'il faut, là où il faut"

Les propos de Nina était à la limite de la cohérence, emportée dans son ressentiment et son impatience, accablée par la situation et l'état volatile de ses pensées en manque de sucre. Elle n'attendait pas vraiment de réponse de Jayden, mais au bout du compte, elle était rassurée par sa présence et sentait presque une sorte de connivence dans ce qu'elle considérait comme "leur" galère, comme si lui aussi subissait totalement la situation.Malgré le réconfort de sa présence, le froid et la faim la tenaillaient toujours, les bras croisés autour de ses jambes, la tête posée sur ses genoux, elle attendait que son état s'améliore dans l'unique but de rentrer le plus vite possible.


Dernière édition par Nina Stewart le Ven 9 Mar - 22:32, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: 02. Wait a minute girl, can you show me to the party ?   02. Wait a minute girl, can you show me to the party ? EmptyMar 6 Mar - 21:14

La cheerleader marmonnait quelques fragments de mots que le jeune homme ne se donna pas la peine de réunir. Et, chose improbable, l’aurait-il seulement voulu qu’il n’aurait rien su en faire, déjà bien trop déstabilisé par les termes qu’il essayait péniblement d’aligner sur une langue asséchée, comme le brouillon raturé d’une conversation qu’ils n’auraient pas. Un sourire fiché sur le coin des lèvres, flèche de silex perçant une masse d’argile fraiche pour y rester emprisonné, les prunelles se durcirent.

Il n’estimait absolument pas la créature tremblante face à lui, ou si peu. Il aurait pu la voir bien trop faible pour être amusante, bien trop fade pour l’intéresser, mais non. Les qualificatifs compréhensibles paraissaient comme confier bien plus d’importance qu’elle ne pouvait en rêver. Pour ses perceptions troublées, elle paraissait en beignet fourré à la crème anglaise face à un éclair au chocolat, de la même famille mais pas de la même espèce. C’était ainsi et autrement à la fois, mélange détonnant d’idées reçues et de concepts trop abstractifs, indépendants sauf eux-mêmes mais à lui sans réelle définition. De l’appartenant à l’appartenu, l’antinomie tenait à quatre lettres que les rondeurs de l’alcool rendaient pareilles. L’oiseau blessé émet son dernier cri, espère éloigner l’agression par le frisson, là où le sage scorpion s’inflige son propre venin pour échapper aux dangers qui l’entourent. Les scorpions sont des cafards arachnides et empoisonnés, voilà peut-être pourquoi ces derniers survivrons à tous et pas les ailés. Car, si entre les plumes filtre la vie, c’est dans la carapace de cuivre que tournoie l’écoeurante odeur de l’intelligence.

"Pour qui tu me prends, je n'ai jamais cédé à ces trucs là et ce n'est pas maintenant que je tournerai le dos à tout ce que je m'efforce de préserver pour tout détruire avec ces délires d'adolescents attardés et désaxés !"


Enivrance totale. Le fou crie échec à la reine. Celle-ci s’essaye à un carré de dames et le plateau est renversé. La réaction n’était plus attendue, seule la prière soutenait encore l’espérance, et la Miséricorde avait dû certainement agir pour que se produise cette fermeté de langage et de caractère. Comme quoi, qu’importe les actions, l’angélisme des corps suffit à tromper le Divin quant à la nature des âmes. La lycéenne prétendait ne pas céder. Elle avait raison. C’était déjà fait. A l’instant où elle avait ouvert la bouche pour répliquer, sursaut imprévisible de conscience, cette dernière était condamnée à l’exil. La traquée se lançait à l’assaut de ses pièges. Elle échouerait. Mais la défaite des autres concédée à sa propre réussite paraissait tellement plus, tellement mieux, tellement plus mieux que la grammaire n’y tenait plus les rigueurs infligées aux paroles exprimées, infiniment préférable que si elle s’était rendue sur le champ à son échafaud discuté. Une vision parvenait au cristallin de Jayden. Point de larmes pour la jeune fille, juste l’envie. Le besoin. Succincts, les deux se pressaient et agitaient son cerveau, prodigieux chaos qui enfiévrait ses pensées, les fondaient pour les mêler dans une étroite aberration de la morale. Tout détruire. C’était elle qui l’avait dit. C’était cela qui lui rendait un intérêt provisoire.

- Désaxé… désaxé… le suis-je peut-être autant qu’ivre… Probablement. Mais sans doute moins que toi… Car, moi, j’ai encore pour moi la conscience de ma déviance… Alors que la tienne ne fait que s’enraciner plus profondément à mesure que tu la nies…

Et, quand s’approche dans la nuit l’essence même des mots empourprés de savoirs, se glisse entre les ombres et trépasse en fumée sur les étoiles glorifiées dans leur traîtrise, c’est la phrase qui accuse, dévoreuse de sens et de symboles, qui engrange les syllabes sans en comprendre les lettres et que l’esprit dissèque à la pointe d’un accent acerbe. Moquerie qui tinte comme un carillon et s’en va en l’air, devenu colibri battant de ses ailes appelées cils dans un éclat d’ocre qui l’éblouit et le tue. Boum, boum, bam, le cœur, tambour de scarlatine, d’humeur, avance, survit, se bat pour se crever plus longuement sur les parfums de la sève qui monte, qui pulse dans l’écorce craquelée comme le sang ponctionné dans les veines boursoufflées par la pudeur, sur la lumière d’une lune d’automne aussi nouvelle que transparente à la nuit semblable à tant d’autres.

- Nous sommes tous accrochés à quelques choses… Nous avons tous une dépendance… les cigarettes, l’Amour, le sexe, les antidépresseurs… Moi, j’ai la…

Sa phrase se coupa-là une demi-seconde. Une respiration. Il avait presque vagît « la vie ». Idiot. L’optimisme, l’idéal fatalisme que la vie était le seul refuge digne d’intérêt dans lequel se lovaient les ignorants, les personnes pas encore tout à fait détraquées, plus déjà parfaitement saines, était une valeur qu’il exécrait, car elle ne menait pas au progrès, simplement à la joie, et cette dernière humeur ne présentait que l’avantage d’être comparable au malheur, de nous en innerver plus intensément, jusqu’à ce qu’un moindre frôlement nous en incombe la douleur. Mais, pourtant, il était persuadé que son comportement, si on devait absolument y trouver un sens, onirique ou non, trouvait son origine dans la vie-même. Il était le bidon de kérosène, la boisson était l’allumette, et dans un craquement de souffre d’une gorgée, s’élevait déjà les langues orangées de l’existence, ricanant une salive âcre, fumeuse fulminante, au goût de ce qu’elles consomment dans la combustion.

- l’alcool. Et pour toi ? Ce sera quoi, l’addiction qui te fera sentir adolescente ? Qui te fera vivre autrement que par tes notes de cours ? Que par les vidéos de spectacle que tu passeras en boucle à tes enfants en pleurant sur tes pompoms délavés et ton album de terminal jauni ? Ce qui t’offrira des souvenirs ?

Le futur employé. L’inachevé anticipé. Le bout rouge de la dernière allumette, désormais cassée en son centre, qui pourtant se consume encore, brisée, mais bien vivante, dans un craquement d’os qui aurait ébranlé jusqu’à la cave si celle-ci avait daigné exister sous leur pieds autrement que dans son imagination rongée par les acides dématérialisés en idées, avait noircit avec délectation sous les baisers embrasés. Restait la boite à flamber pour que subsiste la flamme.

- La chose qui fera que tu ne regretteras pas totalement cette période ?

Petit pavé de méchanceté lancé dans une marre de vitriol, qui se ride d’iridescence à son contact et éclabousse les berges brûlées, cendres maintenues encore vertes et coagulées par la vie mais pourtant roussie de l’incandescence à venir. Juste aux limites auxquelles il sait qu’il appartient, il plonge et se noie, prospère dans un abysse ricanant de parfum de camélia, le craquement du corps compressé par les éléments comme un dessin arraché à son calepin, consomption des émotions, voulue et acquise, perçue sans un doute comme un brouillard indéchiffrable. Une brume toxique que, rempli des délices d’un combat perdu d’avance, l’on respire à plein poumons et qui dissous ceux-ci à la première inspiration. Plus de canards dans la marre. Morts ? On ne le sait. Ils ne sont pas là, ils n’existent pas, ils ne le retiennent pas dans sa course à la destruction. Ils sont donc méchants, ignobles, ignominieux. C’est bien qu’ils ne soient pas là, alors. Des bords lapés par les vaguelettes troubles, il tombe. Amoureux ? Non. L’amour, si ce n’est pas dur, ce n’est pas drôle. Si on ne souffre pas, c’est qu’on n’aime pas, c’est qu’on se contente d’observer et de sourire, c’est qu’on ne sombre pas.

"T'as pas quelque chose à manger, je me sens faible... Ah non c'est vrai que t'as que ta boisson... Boire c'est important n'est ce pas !"

Les yeux fermés par l’eau imaginée, les paupières pourtant bien relevées, il se laisse enliser sans un mot dans la fange qui happe âme et corps dans un soupir d’effort, sa moue de petit garçon flottant sur ses traits, les troublant un peu plus. Comme une conclusion logique aux préceptes énoncés, il se contenta d’hocher une fois la tête, cherchant toujours le regard aiguisé par l’orgueil. A ses pieds, luisants sous la lueur des lampadaires, les quelques fils de miel détachés de la pâtisserie coloraient de lumière le sol terne.

‘‘Non mais sincèrement, tu n'es pas fatigué de faire n'importe quoi, tout ce que tu veux sans mesurer ce qu'il y a autour, les attentes qui pèsent sur toi ? Qu'est ce que tu vas faire de ta vie ? Regarde moi ce soir, j'ai fait n'importe quoi, je me suis attardée avec toi et voilà le résultat. Habituellement je ne fais jamais d'erreur, jamais, et tout se déroule comme prévu sans encombres ni peur, ni faiblesse ni rien du tout. Juste ce qu'il faut, là où il faut…’’

- Quand il le faut, conclut-il, dans un cynisme cassant.

Etonnamment, si la jeune femme lui reprochait le chaotisme de son existence, dans sa brusquerie, elle paraissait bien plus bancale que l’enfant raidi de brocards muets mais pourtant bien perceptibles. Et comme l’animal galopant entre les saillies des rochers coupantes parcourant sa route, c’était par leurs écorchures brouillées que les railleries blessaient le plus. Eloignée de l’enveloppe gazeuse de fuel brûlé, comme pensant se protéger d’une emprise néfaste des idéaux plus nocifs encore du Dashwood, qui flottait, flottaient, toujours derrière son corps recroquevillé, attendant l’occasion sournoise de la reprendre à leur circonvolution quand l’œil de lumière, inutilement braqué sur le trottoir nu, la retrouverait, la jeune fille chiffonnée de la sorte éclaira une commissure du jeune homme.

- Tu me parles de fatigue. C’est là où est tout le problème. Les attentes ? Ma vie ? C’est moi qui les définisse. La lassitude ne m’atteint pas car je renouvelle les expériences, modifie mes souvenirs de celles-ci à mes besoins, à mon plaisir, je ne me contrains qu’à ce qui m’est bon…

Qu’à ce qui le détruit. Et entraine les autres dans sa déchéance. Abîmer. Trainer dans la poudre et recommencer la pyromanie. Tout cela était mental, bien moins extinguible que la tacite réalité.

- A l’inverse de toi. Je te regarde, je vois. Vois où l’ordre te mène. Une situation diverge : là où j’y vois une opportunité, tu y pressens un malheur. Tu ne vis que pour les autres. Que pour la structure et le contrôle.

Sa bouteille dans la main. La boite hâtivement ramassée dans l’autre. Une fossette au visage. Trois pas. Deux autres. Les genoux plient, le souffle exige un léger nuage blanc et il s’installa sur ses chevilles, face à l’inconnue, tentation incarnée en traitrise.

- Je te propose un marché. Une gorgée, un morceau.

En équilibre précaire, il tendit ses bras devant lui, approchant les deux substances un peu plus près de la figure féminine, gardant seulement la boite de plastique, apparu diamant, bordée d’ambre coulant, un peu plus proche de lui.

- Bois.

Et par ce geste, scie ta folie restrictive.

- Essaye.

Il est toujours temps de revenir en arrière.

- Vis.
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MessageSujet: Re: 02. Wait a minute girl, can you show me to the party ?   02. Wait a minute girl, can you show me to the party ? EmptySam 10 Mar - 2:41

Le chêne et le roseau. Le chêne est à terre, le roseau contemple sa défaite. Le chêne avait été trop fier pour supporter encore un peu plus les déferlantes du vent, il n'avait pu rester debout plus longtemps devant le souffle implacable des événements. Le roseau avait su courber l'échine et présenter son dos sans craindre la souffrance pour ployer délicatement avec souplesse sous le mépris des éléments. Mais le chêne n'avait-il pas été beau et grand tout ce temps que le roseau n'avait jamais su que glisser de tempête en tempête dans l'anonymat le plus meurtrier. Certes le roseau s'était fait assez souple pour survivre jusqu'ici mais qui peut estimer les fuyards, aussi persistants soient ils, quand la comparaison avec leurs voisins vainqueur de maintes batailles, vaincus dans l'honneur d'un dernier effort leurs fait défaut. L'arbre millénaire s'était montré aux yeux de tous, majestueux et magnifiques, trônant sur la colline de la gloire, et tous l'avaient admiré au moins une fois. Le roseau quant à lui restera médiocre et méprisé, caché dans la berge parmi les herbes hautes, et personne ne le verrait jamais puisse-t-il vivre une éternité. C'était l'interprétation que Nina avait opposé sans la dire à sa professeur de français qui leur révéla cette fable d'un certain La Fontaine quand elle fit l'apologie du roseau, appuyées par la morale qui concluait ce récit qui ne contait pas la vie du végétal vainqueur, vainqueur pour la première et unique fois. C'était la morale que Nina en avait tiré, tandis que Jayden lui contait la vie de ce roseau, libre et indépendant. Car si personne ne le remarquait qui savait de quoi son existence était faite, caché dans la brousse il vivait peut-être encore de multiples péripéties passionnées et passionnante, des centaines de dérives exaltées et exaltantes.

Nina écoutait patiemment et avec attention celui qui en effet semblait bien plus heureux qu'elle à cet instant précis. Elle entendait tous ces mots, "vivre", "adolescente", "plaisir", "expériences". Aucun d'eux ne semblait résonner avec ses idéaux. Qu'en était il de "réussite", "reconnaissance", "respect" ou "admiration" ? Tout ce sur quoi Nina planifiait son quotidien, ce sur quoi la cohérence de ses deux vies reposait. Ces deux monstres affamés de mensonges et vérités tout à la fois, sans aucune préférence tant qu'il n'en restait plus, plus qu'une folie vacillante avec laquelle Nina se débattait, plus que ces cerbères à nourrir juste dans l'espoir qu'ils les lui donnent les trois "R". Elle n'avait jamais recherché autre chose que ce que seul les autres pouvaient lui offrir, et Jayden avait bien montré en ce sens qu'elle ne vivait pas pour elle, ou plutôt qu'elle ne vivait pas par elle. Elle se vendait sans limite corps et âme à ses pairs pour leur arracher le "Respect", s'enfonçait comme dans la boue dans un proxénétisme obscur, sa sincérité, son unité contre la "Reconnaissance, se sacrifiait, elle et sa liberté, ses plaisirs, sur l'autel de la "Réussite". À la lumière des propos de Jayden, elle semblait grande de médiocrité, grelottant de froid et de faim. Quant à ses convictions, sous la lumière bleutée des lampadaires, elles avaient perdu leur sens dans une hémorragie meurtrière, dépecées, décharnées, désossées, il n'en restait plus rien, juste le délice que le garçon manifestait en se léchant les doigts après ce met atypique.

Il semblait peut être assouplir comme un roseau les hautes murailles qu'elle avait bâties pour l'attaquer à l'intérieur, mais on ne renonce pas à ses croyances, ses convictions, à sa ligne de conduite si facilement. Ce n'est pas si rapidement que Nina rendrait les armes. Il n'y avait plus qu'un brouhaha d'idées qu'elle se répétait et qui lui encombrait l'esprit et les oreilles, ne restant plus que la dissonance avec les propos de Jayden. Mais ce dernier parlait avec conviction et clarté, avec une force de conviction étonnante. Ce n'était peut être pas tant ses mots que sa voix qui la faisait battre en retraite chaque fois un peu plus. La réalité empirique et sensible a parfois beaucoup plus de force que la réalité des mots, venue en force du monde abstrait des concepts et des images, même dans un conflit intérieur que Nina livrait férocement encore.

- Tu me parles de fatigue. C’est là où est tout le problème. Les attentes ? Ma vie ? C’est moi qui les définisse. La lassitude ne m’atteint pas car je renouvelle les expériences, modifie mes souvenirs de celles-ci à mes besoins, à mon plaisir, je ne me contrains qu’à ce qui m’est bon… A l’inverse de toi. Je te regarde, je vois. Vois où l’ordre te mène. Une situation diverge : là où j’y vois une opportunité, tu y pressens un malheur. Tu ne vis que pour les autres. Que pour la structure et le contrôle.

Elle ne pouvait en supporter plus. Entre la faiblesse de son corps qui se faisait toujours plus fortes et la voix enivrante de Jayden qui lui insufflait un venin tout aussi séduisant mais térrible, c'en était trop ! C'est la folie qui l'habiterai si elle ne le faisais pas taire.

- Tais toi, s'il te plaît tais toi. Je n'ai plus envie de t'écouter finalement, j'ai juste faim et froid...

Elle n'était plus capable d'aucune agressivité, seules des supplications avaient été entendues dans la nuit. Chaque mot prononcé lui coûtait beaucoup trop pour continuer à ce rythme. Comment ces choses-là se déroulaient ? Son esprit s'engourdissait-il à mesure que son corps s'étourdissait toujours un peu plus ou bien somatisait elle au contraire, cette lutte intérieure et le visage illuminé de son interlocuteur lui drainant toute énergie mentale. Même si ce n'était assurément pas par charité, le garçon avait entendu son appel affamé. Il se levait une fois sa boîte ramassée, sa bouteille toujours à la main et fit quelques pas vers elle, qui le regardait s'approcher dangereusement en levant la tête. Il s'accroupit finalement juste en face d'elle, les soufflets de brume dont ils se séparaient se retrouvant dans la nuit.

- Je te propose un marché. Une gorgée, un morceau. Il tendit la bouteille et une boîte, contenant d'étrange pâtisseries mielleuses, mais cette dernière d'un peu plus loin.
- Va au diable C'est avec un air pourtant intrigué qu'elle l'envoya ballader, ce qui aurait été très simple en vérité puisque ses mollets tremblaient sous la pression de l'équilibre instable à garder. Elle ne fixait pas la boîte étrangement, elle le regardait lui, droit dans les yeux, l'air soupçonneux.
[color=blue]- Bois. Essaye. Vis.

Nina restait coi finalement. Peut être étouffée déjà par ces substances épaisses et sucrées qu'elle sentait déjà dans sa bouche. Ce n'était que des produits à ingérer après tout. Mais le poison aussi s'ingérait par les lèvres, et une fois dans le sang, l'essai était irrémédiable. C'est ainsi qu'elle se représentait cet alcool qui dansait toujours dans sa fiole, une invitation des sens à se perdre en quelques endroits dont Nina ignorait l'existence, comme un liquide qui s'ancre dans la peau pour y laisser une marque de Chine indélébile. Le liquide transparent se voyait déjà voguant en coulée délicate sur sa gorge en accompagnant de l'extérieur les plus gros débits qui se déverseraient allègrement à l'intérieur.

- D'accord. Une seule gorgée hein !

Ce serait déjà bien trop. Nina s'empara de la bouteille et vivait cette impression qu'on a en se regardant de l'extérieur, comme une autre personne. Nina détourna le regard un instant comme pour présenter ses excuses à son autre, qui repartait chez ses parents. C'était cette route qu'elle contemplait en vérité, priant pour être sûr de l'emprunter dans les instants qui suivraient. Où alors formulait elle déjà ses excuses à ses parents pour ne pas rentrer ce soir ? Elle ne savait pas encore qu'elle le faisait mais c'est bien sans la permission en tout cas qu'elle porta le goulot de la bouteille à ses lèvres, jetant un regard laconique mais bavard à son maître chanteur, puis leva le bras pour avaler la première gorgée. En vérité, depuis le début elle avait eu les moyens de continuer sa route seule et si elle était assise au milieu de cette dernière à présent, c'est que la part d'elle-même qui voulait relever le défi était resté là. À peine le liquide effleura sa langue que Nina recracha aussitôt, le menton déjà couvert d'alcool. Plus jamais avant le matin il ne lèverait l'ancre.

- Mais qu'est ce que c'est que ça !

Comme si cela l'avancerait un peu plus. Elle toussa péniblement, la gorge brulée d'avoir dit oui. Maintenant si ce n'était pas la faim qui la motiverait pour ces pâtisseries, le goût infect qui imprégnait sa langue le ferait. Elle reprit la bouteille en main, la porta à ses lèvres, leva le bras et laissa enfin le liquide pénétrer son corps. Elle avala en vérité une grosse gorgée puis fit signe à Jayden de lui donner une de ces étrange pâtisseries avec insistance. La matière qui lui enveloppaient la bouche était miraculeuse et quand Nina voulu enchaîner goulument sur une deuxième bouchée, Jayden lui tendit la bouteille à nouveau avec un air réprobateur. Elle lui prit cette dernière des mains avec la sienne encore libre, la seconde prête à porter la nourriture à sa bouche l'instant qui suivrait ce goût affreux qui lui assaillirait le corps. Elle répéta le même rituel une nouvelle fois, ignorant que les rituel se répètent inlassablement.

La spirale s'emballait et les gorgée s'enchaînait de plus en plus vite, l'alcool ayant finalement trouvé lentement le chemin de sa gorge. Elle ressentait chaque gorgée dans tout son corps, une vague de chaleur piquante lui montait à la tête et lui serrait le coeur, une explosion sourde lui gonflait l'abdomen et lui brisait les muscles. Elle ne ressentirai bientôt plus le froid mais seulement des étincelles au bout de chacun de ses doit, la vue se troublerait et ferait basculer le monde, elle abolirait l'orthogonalité tandis que son cerveau se comprimerait doucement. L'ivresse prenait ses repères doucement dans ce corps inconnu jusqu'alors.

- Eh - je ne connais même pas ton prénom - qu'est-ce que c'est censé faire, parce que là... ? Oh mon dieu, je n'ai aucune idée de l'heure qu'il est, est-ce que t'as l'heure. Mes parents m'attendent, je ne devrais pas être là ! Tu m'aides à me relever ? Oh mon dieu il faut que je mange quelque chose de plus... de plus... Oh je me sens mal, aides moi !" Les gestes de Nina ne répondaient plus qu'à une logique douteuse, totalement désorientée elle tentait de se relever en s'essuyant le front. Elle tendit sa main vers Jayden et se mit d'abord difficilement à genoux, pris appui sur un pied puis sur l'épaule de Jayden avant de s'effondrer sur le sol lamentablement.

- Oh seigneur non, Est-ce que je suis saoule dis moi ? Allez dis moi ! Elle s'accouda sur le goudron en souriant, elle riait presque même, mais toujours un peu nerveusement. Elle avait bu quelques deux cents cl de liquide, et assurément, ils avaient emménagé bien confortablement dans ses veines pauvres d'énergie et d'expérience en la matière.
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MessageSujet: Re: 02. Wait a minute girl, can you show me to the party ?   02. Wait a minute girl, can you show me to the party ? EmptyMar 20 Mar - 20:52

- Va au diable, balbutia-t-elle au milieu de ses volants, ailes détrempées de papillon noyé, épinglées sur le panneau-présentoir d’un collectionneur, le prenant sans doute pour une pomme de terre.

Ce qu’il n’était manifestement pas. Quoique ses visions passassent à trois-cent soixante degrés à mesure que l’alcool s’infiltrait entre les moindres fibres de son être, il était, à peu près, encore persuadé de ne pas être un tubercule.

-Tu n’es qu’un merle !, marmonna-t-il en guise de réponse, sans trop comprendre le pour du quoi d’un Alfred qu’il n’avait jamais mangé en lisant du pain.

Diable au corps. Il a bien choisi, le Rouge Barbu. Celui qui ricane avec les flammes, bacchantes infernales, concubines hargneuses aux banquets dansés. Le corps. C’est par-là que passe l’esprit, son reflet, comme un flux, comme le venin entre les globules écarlates et gonflés de vie, se contorsionnent les sens, se plisse pour cela la peau qui s’envole, escouade desquamée car trop vieille pour protéger les circonvolutions d’un cortex égratigné d’une folie encore jeune mais qui, sans qu’on la voit, est. Qui meurt et naît. Qui meurt est né. Réjouissance ! Rire et joie sur les visages ! Mortification ! Griffures et barbes sur les joues ! L’organe infini, rosé, étendu en cuir sur les squelettes recouverts de chaire, se presse dans la tombe avec les craquelures et s’accouche sans plus de sagesse que de femmes avec des crèmes, de jour comme de nuit. L’enterrement appelle aux souvenirs. La naissance s’ingénie au futur. Seule la transe et la gueule de bois se prétendent à nous faire vivre le présent. Violence faite sans un souffle. Diantre roule dans la bouche et l’interjection se corne des enfers. Comme un corbeau blanc. Pur, immaculé, innocent mais corbeau, donc condamnable. Donc condamné. C’est pour cette déraison que ses ongles sont recourbés. Quelle esthéticienne, mésange mais chinoise, immigrée accepterait d’arranger les cuticules d’un corbeau ? Aucunes, elles ne le peuvent car elles ne savent pas réfléchir. Ou plutôt, ceux qui se disent seuls à être en mesure de réfléchir les désigne comme trop éloignée d’eux pour provoquer les pensées nécessaires à l’élévation de l’esprit. Qui a jamais vu oiseau à confesse ? Nulle réponse sauf la honte à une question qui accuse. Or, même la volaille doit souffrir quelque péché. Sinon, pourquoi serait-elle représentée sur cette bouteille qui tremble entre ses mains, elles-mêmes pourtant fixes ? C’est la Terre. Elle se retourne, embarque l’estomac avec elle et fait rhotacisme de vile à vibre. Sur le sol, bien trop mobile pour être inanimé, le venin aux relents de soirées s’égoutte du menton, salit de lumière gluante le parterre lisse après un éclat de voix.

- D'accord. Une seule gorgée hein !

Enfin. Angélisme d’un ricanement désabusé. De l’illusion déchirée aux écorchoirs de la situation dans un petit pot mental stérilisé à l’hésitation féminine, prude d’enfreindre un code complexe aussi absurde que protecteur. Anguilles frétillantes entre les mains constellées de plaies d’une servante effarouchée des bestioles que le contact chaleureux de ses paumes avaient ranimées. Robes d’écailles graisseuses, parure nappée de sel, assises entre deux phalanges tremblantes comme chétives, les poissons se font, avant même que la chanson ne démarre, femmes toupies. Pour trouver un équilibre. De danseuses au bal du diable, bien préférable à celui de dieu, ce-dernier exigeant silence et prescrivant Orangina bénie plutôt que Bloody Mary, les deux finissent en une dans un cri. En une inconnue, recrachant le breuvage si révéré par celui qui l’avait contrainte sans une caresse ou un cri à boire, elle aussi en perdition dans les tours qu’elle fait sur elle-même, dans un mirage de couleur. Une brume qui n’est que netteté, c’est un flou sans artiste, de arthrite dans un fou, car il n’apparaît que dans le brouillard des mouvements, dans le tournis qu’elle s’évertue à faire sans bouger, comme pour se réguler à la course du soleil sans comprendre qu’il s’est couché.

- Mais qu'est ce que c'est que ça !

L’alcool. Un tubercule. Un organe externe. Un organe de réserve. Une échappatoire. Comme Jayden. Finalement, il était peut-être une pomme de terre. Lié aux gens sans les toucher autrement que pour en pomper la vie, nés pour se multiplier, infester, s’accrocher à la terre avec ses racines, pour ne plus la relâcher, et se salir de celle-ci. De ces pommes de terre qu’on vend très tôt pour pas très cher sur un marché. En guise de récompense de la transaction réalisée : de l’argent froissé à l’odeur de poisson au fond du portefeuille et des engelures irréversibles aux creux des doigts. D’une chaire tendre mais farineuse, ferme pour un gratin mais friable sous l’eau. L’eau ne lui avait jamais réussi de toute façon. « Elle », elle ne semblait pas de cette constitution. Elle, elle était plutôt une aubergine. Une tomate à la rigueur. Faite pour murir sous les cuisants sourires emprunt d’un sadisme de fournaise du jour d’Hélios. Faite pour être colorée et brillante. Faite pour être mangée. Avec les pépins. Sourire carnassier. Des pommes de terre, des tomates, des aubergines, une vague image de moussaka flottait en bordure de son esprit, prête à jaillir à travers son front à la moindre fêlure et faire suinter des litres de salives entre ses lèvres hermétiquement tordues. Car la moussaka, c’est bon. On en reprend, encore et encore. Comme l’alcool. Comme le rimmel qui tourne dans un losange qui est en fait, perfide, un carré sur pointe. Pointe, battement, pointe, attitude derrière, arabesque. Sur les notes d’une comptine russe. Ritournelle à l’odeur fétide de gel hydro-alcoolique qui vient avec la crise, avec l’excès, de et jusqu’à l’hôpital.

Le bruit mouillé de la gorgée énoncé, prononcé de telle sorte que ledit bruit le soit aussi mais dans un sens différent, parvint à ses oreilles encore toutes engourdies de ses méditations culinaires anéanties en une seconde par les crissements de pépites de couleurs dénuées de nom, ou, s’il fallut en trouver, ce n’était pas Jayden qui s’en chargerait, dans le linceul moelleux des iris fondants qui le vrillaient dans un monologue silencieux. Particule de ciel qui s’écrase sur son cerveau en chute libre. Le voilà sous le sternum, croisant le fer rougi jusqu'au blanc avec le cœur. Embrun éclaté sur des rochers par ces-derniers qui siffle et danse jusqu’aux joues pour s’y sécher dans une marque de peau et de sel. Alors que les bouillonnements du liquide s’écumaient aux coins des lèvres frémissantes de l’inconnue, libation originelle pour le Divin Amusement, il contemple avec émerveillement la raison ruisseler sur sa gorge, avec la tequila. C’est mieux que du lait caillé. C’est du chocolat chaud glacé qui fait rire en brûlant.

Si la vision de formules chimiques provoquaient chez lui une réaction épidermique proche de sumac vénéneux, pour le Dashwood le doute ne subsistait, irrésistible emmerdeur semblable au premier énoncé, que par pur principe. Le gyroscope mental de la jeune fille penchait, penchait, penchait. Il effleurait, en griffant, la table sur laquelle il était posé. La main lourde du liquide attendait patiemment de pouvoir s’abattre sur lui et d’arrêter sa course. Jayden attendait frénétiquement le moment où la toupie s’heurterait à l’inertie pour l’envoyer, d’un revers de main, bien au-delà des bords de bois brillant de vernis de la surface de sa conscience. Menuiserie et psychanalyse réunie. Amour pour la démolition, souligné aux antidépresseurs, et le carnaval des déments reprend. Des gorgées se succèdent aux déglutitions si bien que ses sourcils se froncent, si l’impertinente buveuse poursuivait ses idées d’envie en faits aussi bien qu’à cet instant, il ne lui resterait bientôt plus que l’air comme substance véreuse car vitale.

- Eh - je ne connais même pas ton prénom - qu'est-ce que c'est censé faire, parce que là... ? Oh mon dieu, je n'ai aucune idée de l'heure qu'il est, est-ce que t'as l'heure. Mes parents m'attendent, je ne devrais pas être là ! Tu m'aides à me relever ? Oh mon dieu il faut que je mange quelque chose de plus... de plus... Oh je me sens mal, aides moi !"

-Shut !

L’injonction resta au bout de sa langue comme un vague goût aigre-doux. De l’arsenic sur des lèvres à embrasser. A embraser. Une main agrippait son épaule, ses doigts-jambes aux ballerines acérées entamant un ballet plus que prohibé sur son épaule, souplesse de l’angle improbable d’un membre à deux genoux qu’il s’envola bientôt dans un mystérieux saut de chat qui finit sur l’asphalte. Première leçon : Sans folie, pas de raison. Réminiscence de l’enfance télévisuelle qui se prolongeait dans son quotidien d’adulte en fermentation. Qui aurait cru que Walt l’aiderait ainsi. Devenu précepteur, noctambule immobile, d’une parole exercée par delà les deux dimensions liant écran et réalité. Grognon, vieillard acariâtre, il apposa sur sa bouche un regard orageux. Narines dilatées, il inspira à fond, profitant des odeurs de la nuit déformée aux épices de son ébriété à présent partagée. Que les jeux commencent.

- Oh seigneur non, Est-ce que je suis saoule dis moi ? Allez dis moi !

Jayden réprima un ricanement enfantin qui se fraya néanmoins un chemin jusqu’à l’extérieur, brisant l’atmosphère stagnante de la rue déserte, dans un bourdonnement sourd, fugace impression du silence, d’abeille furieuse. Il contempla avec un soupçon de satisfaction le corps renversé, brisé, sur le sol, cherchant ses repaires en aveugle dont seuls les neurones sont crevés. Hormones qui régressent. Comme une œuvre d’art, mais à l’envers. Détruire le beau étant aussi important que de le créer.

-Les gens appellent généralement ça un sale état. Je préfère « en état de me comprendre ».

Et c’était tout dire de l’état de délabrement que présentait la situation de l’inconnue. Installée ainsi sur le sol, elle apparaissait au jeune homme que bien plus sensée lorsqu’elle se postait sur son piédestal de fierté et de principes à débiter ses bons sentiments et réprimandes de bon ton à gorge dévoilée. Plus sauvage dans sa fragilité, son caractère gommé par la boisson s’offrait comme parfaitement appréciable.

-Oui. Tu es saoule.

Du moins, il s’en prétendait intimement persuadé. Mythomanie étourdie qui assourdit le jugement. A travers ces yeux troublés, c’était le panorama d’un univers en décomposition qui s’étendait devant le garçon. Une citée antique, forte de son architecture, de ses concepts et de sa politique, réduite à néant, inondée d’un océan inconnu, apparu dans un déferlement des dieux, à un néant sublime, miroitant, mouvant, lumineux et chaotique dans le chant d’une jeune Vestale emmurée laissée échappée de sa prison au milieu des enfers liquides.

-Félicitation !

Ses doigts tremblants vaguement pianotèrent le long de son cou, s’enroulèrent autour des branches des lunettes perchées dans la poche de sa veste, salie mais portée comme de la haute couture, pour les poser maladroitement sur le nez de la jeune fille, l’étiquette pendant misérablement le long de sa joue. C’était beaucoup mieux. Le visage mangé par les lunettes paraissait bien plus surréaliste dans l’obscurité, percée d’une tache bleue, éloignée comme un iceberg immense mais glaçon au fond d’un verre d’un paquebot dérivant en plein Pacifique, par le réverbère, bouée de sauvetage qui coule, s’enfonce dans le miel violet de la nuit, bien plus qualifiable, donc. Une mèche de cheveux sursauta. Surprise, sans doute, par la gravité traitre qui, aguichée par les cent nonante centimètres soudain approchés à cinquante par une flexion des genoux, eux-mêmes agités, électrifié, pour retrouver un équilibre tâtonnant à cette altitude. Spectacle burlesque. Vertige d’un équilibriste.

-Première épreuve. Premier trophée.

Sens aiguisant de la compétition. Serment solennel de bac à sable. Une gorgée pour lui. Un ongle qui récupère du sucre sur le bout de l’index de l’inconnue. D’une poigne affermie par l’adrénaline de voir trainée dans les vices une âme braquée, il tira l’avant-bras attrapé et força la jeune femme à se mettre accroupie. Une pomme de terre funambule. Sur le fil d’un rasoir, trainant les autres jusqu’à cette guillotine. Petite nécrose dans la découpe grossière. Une question lui revint des masses de son bredouillé auparavant, agglutinée dans ses tympans, bien trop étroits pour les laisser filtrer jusqu’à son cerveau, plus onaniste qu’incendier. Incendié dans les plaisirs capiteux trouvés à se jouer des autres. Déformation du bon sens, excroissance pustulante des mœurs. La réponse arriva, alors que ses doigts droits terriblement gauches, libres de l’emprise que maintenaient les adroits gauches, geôliers emprisonné par la cellule qu’il forme, continuaient leur concerto, ayant bien vite quitté le plastique rouge de l’accessoire pour tâter l’air, sur un rythme échappant en confusion à ce que pouvait percevoir un esprit sain, vers les grillages dont la brillance grisée attirait son œil abruti.

-Appelle-moi « Lui ». Quant à moi, je t’appellerai…

Jaugeant d’un regard critique le front à nommer, il se détermina rapidement, fulgurance d’un instinct paternel malsain, étouffé bien avant l’ovaire fécondé.

-Emma.

Qui pouvait bien se foutre des prénoms ? Certainement pas lui. Alors, qu’elle importance ? Que cela plaise, ou non, c’était ainsi. Et si cela ne l’était pas, c’est que Dieu était mort. Et Dieu ne peut pas mourir. Comme les cafards. Ou un pneu hiver. Il est increvable.
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MessageSujet: Re: 02. Wait a minute girl, can you show me to the party ?   02. Wait a minute girl, can you show me to the party ? EmptyDim 1 Avr - 17:50

Le goudron se mouvait en vague frissonnante sous ses mains peu assurées. Au plus Nina tentait de trouver un repère spatial, au plus elle se perdait un dans une atmosphère étouffante et incertaine. Toujours étalée sur le macadam, s'appuyant uniquement sur ses bras qui peinaient à la soutenir, la lycéenne tourna lentement la tête lorsque son camarade laissa échapper un ricanement, un rictus moqueur qui pouvait assurément s'observer sur son visage insolent. Était ce une question idiote de vouloir être informée de son état ? Pour sûr aux yeux de Jayden c'était insensé de ne pas connaître cet état d'ivresse et le goût de la boisson. En état de le comprendre ? Nina n'était plus sûre de pouvoir comprendre quoique ce soit dans l'état actuel des choses.
Essayant de ramener ses pieds à elle pour pouvoir au moins se mettre à genoux, Nina écoutait distraitement Jayden qu'elle entendait en mono stéréo avec une voix lointaine et bourdonnante. Alors que le garçon lui annonçait le verdict – à savoir que oui apparemment elle était saoule - et lui adressait de diverses félicitations Nina tentait toujours de se relever avec une peine digne des rescapés du radeau de la méduse qui tentent de rester sur la planche de bois maigre pour tant de survivants. À l'état normal, son esprit se laissait aller à ces images métaphoriques délirantes à l'image des diverses situations déjà très fréquemment, il était alors inutile de préciser à quel point celui ci s'emballait à une vitesse décuplée sous les effets de l'alcool. Pourquoi une action si simple lui demandait elle tant d'efforts ? Elle avait tout bonnement l'impression d'être noyée sous un flot de miel ininterrompu qui biaisait ses mouvements et la clouait au sol. Alors qu'elle avait maintenant un pied sur deux sur le goudron, elle regarda Jayden d'un air excédée par cette mine victorieuse qu'il affichait. Il s'approchât d'elle et lui glissa en guise de récompense une paire de lunettes sur le nez. La saouler avait il était son seul objectif depuis le départ alors même qu'elle lui avait préciser ne pas toucher à l'alcool ? Tout ça n'était il qu'un jeu pour lui, alors qu'ils étaient là comme deux épaves dans le froid ? « La ferme ! Moi, je t'ai demandé ton nom ! » Sans répondre encore le garçon s'empara de son bras pour l'aider à se mettre accroupie dans un premier temps et elle se leva enfin totalement avec son aide.

Sur ses deux pieds, le sol lui paraissait encore moins stable, friable et mou, prêt à se dérober sans prévenir. Elle se tint un peu au bras de son voisin en clignant des yeux dans l'espoir de faire cesser ces fourmillements qui lui brouillaient la vue et lui flanchaient son équilibre. Quoiqu'elle pouvait faire, les effets de l'alcool se faisaient de plus en plus violent dans son sang et son esprit, sûrement le contre coup des multiples gorgées avalées quelques minutes plus tôt. Les dernières s'étaient elles déjà manifestées ? Ce fut préférable car l'étourdissement se faisaient déjà insoutenable. Nina regarda Jayden à travers les lunettes et s'empara de la bouteille qu'il tenait encore dans la main. « Et bien Emma a soif ! » La bouteille devenue sienne, elle la porta à ses lèvres et ravala une gorgée qui dégoulinait une fois encore dans son cou. « Et Lui a besoin d'une bonne punition ! » Sans attendre elle porta le goulot au dessus des cheveux de Jayden et lui déversa une bonne partie du contenu de la bouteille sur la tête. « Voilà pour toi taré ! » Nina s'esclaffa comme une enfant après une mauvaise blague et lui lécha sans un mot la joue. « C'est meilleur dans la bouteille, ta peau doit avoir un goût de rance avec toutes les conneries que t'avales ! »
Habituellement Nina n'était pas vulgaire, elle n'était pas tactile et restait pudique, imposant toujours une distance avec les autres, mais l'ivresse avait sûrement brisé quelques barrières et dans sa tête elle s'observait avec affliction devenir la pire des gamines écervelée et stupide alors qu'elle émit un rire brut une fois encore. Quelle étrange sensation de pouvoir garder encore toute clairvoyance dans son esprit, de pouvoir se parler et tenter de se résonner en toute sagesse sans que cela ai une quelconque emprise sur son corps et ses actes. L'alcool rendait peut être la raison plus lente, toujours avec un train de retard sur ses paroles. Cela vous rendait il pour autant plus sincère, plus vrai avec les autres ? Nina n'y avait jamais cru et n'y croyait pas encore. Aussi libérée qu'elle pouvait l'être, ce n'était pas plus elle pour autant. Mais c'était un débat impossible à tenir aux vues de la situation.

Elle s'éloigna enfin et, toujours la bouteille à la main, retira péniblement son sweat qu'elle lança sur la route sans préoccupations pour ébaucher quelques pas de danse désastreux. Ses pieds répondaient mal à ses intentions et sa perception de l'espace et de sa force étaient plus que faussée. La faim était toujours tenace mais elle ne la sentait plus, elle ne sentait plus les tremblements violents qui s'emparaient de chacun de ses membres. Tout en continuant son numéro en se dirigeant vers les grilles du parc Lincoln, elle se mit à chanter en plus de cela, d'une voix aussi fragile et mal assurée que ses mouvements.

You've been acting awful tough lately
Smoking a lot of cigarettes lately
But inside, you're just a little baby
It's okay to say you've got a weak spot
You don't always have to be on top
Better to be hated than love, love, loved for what you're not

You're vulnerable, you're vulnerable
You are not a robot
You're loveable, so loveable
But you're just troubled

Guess what? I'm not a robot, a robot
Guess what? I'm not a robot, a robot

You've been hanging with the unloved kids
Who you never really liked and you never trusted
But you are so magnetic, you pick up all the pins
Never committing to anything
You don't pick up the phone when it ring, ring, rings
Don't be so pathetic, just open up and sing

I'm vulnerable, I'm vulnerable
I am not a robot
You're loveable, so loveable
But you're just troubled

Guess what? I'm not a robot, a robot
Guess what? I'm not a robot, a robot

Arrivée devant les grilles au terme de son spectacle affligeant, elle s'arrêta net et gratifia Jayden d'un regard souriant. Elle grimpa sur la première barre de la grille en se tenant d'une main pour boire une nouvelle gorgée. Elle reboucha enfin la bouteille, manquant de tomber en passant et contempla le parc noyé dans l'obscurité. Cette vision baignée de silence l'apaisa quelque peu et la rendait plus sereine l'histoire d'un instant. Elle glissa sa tête quelques secondes entre deux barreaux en fermant les yeux. Revenant à elle, Nina Leva le bras et sans discours lança la bouteille dans l'herbe du parc, celle ci atterrissant sans bruit quelques mètres plus loin ! Toujours en s'agrippant aux barreau, Nina se tourna vers Jayden en déplaçant sa main et son pied de l'autre côté sur un autre barreau. Les bras tendu, se laissant tombée et tenir par la forces de ses pieds et la tension de ses bras, elle regarda Jayden avec un sourire et un regard de défi. « j'ai cru comprendre que t'étais joueur, alors cours ! Va chercher ! » Il l'avait bien mérité, et Nina, bien qu'elle fut fascinée par le garçon, avait bien mérité de lui lancer à son tour ce challenge. En se balançant de barreau en barreau, Nina de son côté continuait à chantonner la même phrase inlassablement une bonne dizaine de fois.

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