Dimanche le 1er octobre 2017, 10h25 AM

Ryder se leva en sursaut avec un léger mal de tête. Il regarda son réveille-matin qui affichait 10h21. Il avait un peu plus d’une heure et demie avant de se rendre au boulot. Le dimanche était la seule journée où le gérant du Gramophone Record se permettait d’arriver un peu plus tard. Le magasin ouvrait seulement à dix heures et c’était rarement le grand achalandage et de toute façon, s’il y avait quoi que ce soit à la boutique, il aurait immédiatement un appel. Il n’avait donc pas à s’inquiéter d’arriver un peu plus tard. Cette journée-là aussi, il était rarement au comptoir devant la clientèle, mais plutôt enfermé dans son bureau pour effectuer la paperasse de la semaine, soit les paies, un petit inventaire des stocks, les horaires des employés et les tâches à accomplir au courant de la semaine. Cela ne dérangeait donc pas qu’il ait une sale gueule parce qu’il avait un peu fêté la veille, comme c’était probablement le cas ce matin-là.

Aussitôt réveillé, Ryd s’empara de son téléphone, légèrement énervé. En effet, il avait échangé quelques SMS avec une personne totalement inconnue. En revenant de sa soirée, il avait lu le journal et était tombé sur une petite annonce pour le moins intrigante. Poussé par une quelconque force surnaturelle (et un peu d’alcool), il avait envoyé un message à ce numéro. À sa grande surprise, il avait eu une réponse avec un ton très sec et énervé d’abord, puis plus calme par la suite. La personne à l’autre bout avait été plus ouverte au fil des messages échangés. Elle avait même accepté de lui donner son adresse courriel afin de facilité la conversation. Ce qui l'avait surpris. Il avait dû la convaincre par ses belles paroles et son humour de garçon un peu saoul. En temps normal, il n'aurait pas su quoi dire.

Le musicien se dirigea à son bureau et ouvrit son portable. Il ouvrit la page de sa vieille adresse électronique Kid_A_12 en référence à un album de son groupe favori, Radiohead et à sa date d’anniversaire. Il entra ensuite l’adresse que sa mystérieuse correspondante lui avait donné, rsspams@****.com. Il ne tenta pas de déchiffrer les deux premières lettres se doutant qu’il s’agissait de ses initiales. Il y avait tellement de possibilité de toute façon. Il ne savait pas si elle allait lui répondre. Elle avait quand même spécifié qu’il s’agissait de sa boîte de pourriels, mais il écrivit tout de même.

« Salut! C’est le mec qui t’a harcelé hier avec des messages textes. Je suis d’ailleurs désolé pour tout cela, ce n’est vraiment pas mon genre, mais disons que je n’étais pas totalement dans un état normal. J’espère quand même que tu voudras continuer d’échanger. Je ne sais pas pourquoi, mais ça m’a fait du bien de discuter comme ça avec une totale inconnue. Comme je l’ai dit dans un message, c’est probablement parce que pendant quelques minutes, je suis sortie de ma routine et c’était assez excitant. Pour dire vraie, je ne m’attendais pas à recevoir une réponse, alors j’étais plutôt content. Je comprendrai que tu ne répondes pas. C’est quand même assez « freakant »  que quelqu’un d’inconnu t’écrive comme ça.  Mais j’ai un truc à te proposer, si tu veux continuer, bien sûr. Que dirais-tu qu’on ne donne aucun nom soit de personne ou de lieu ou autre qui pourrait donner des indices de qui est l’autre? On sait qu’on est tous les deux de Lima, du moins, je le suppose car ton annonce est parue dans la Gazette de Lima…La ville est grande, mais le monde peut parfois être petit ;)On pourra continuer de discuter sans jugement et en toute liberté. Ça peut faire du bien de parler avec quelqu’un sans avoir peur de son avis. C’est ce qu’on m’a souvent dit, mais je n’ai jamais essayé! Bref, en espérant recevoir à nouveau une réponse. Je sais que je t’intrigue

Bonne journée.

Kid_A »

Ryder relut son message plusieurs fois. Il ne voulait pas se montrer trop insistant et il trouvait la situation vraiment bizarre. Il ne savait pas ce qui lui prenait. Si la situation était inversée, il n’aurait même jamais répondu et il aurait effacé le message illico. Peut-être avait-il besoin de mystère et de challenge dans sa vie. Depuis qu’il était devenu gérant du Gramophone, une certaine routine s’était installée. Chaque matin, du lundi au samedi, à huit heures précises, il entrait dans la boutique. Il s’assurait que tout était en ordre, il passait un petit coup de balai, il vérifiait qui étaient les employés cédulés et il attendait leur arrivée tout en prenant un bon café. À neuf heures, il retournait la pancarte qui indiquait « Ouvert » et la journée commençait. Une journée était rarement toujours pareille, les conflits n’étaient pas les mêmes, tout comme les clients et les ventes, mais les tâches revenaient au même. Le soir après le travail, il revenait chez lui, il mangeait, il s’ouvrait une bière et il s’écrasait devant la télévision ou il passait du temps avec Robbie et la fillette de ce dernier. Cela ne paraissait pas, mais les journées au magasin étaient épuisantes. Ryd ne sortait presque jamais le soir. Quelques fois le vendredi ou le samedi soir. Il ne se plaignait pas de ce mode de vie. Il avait toujours été de type casanier, mais parfois la vie de tournée où tout était improvisé lui manquait. Il fallait qu’il sorte de sa zone de confort.

Ryder relut une dernière fois son message et appuya sur « Envoyé ». Il haussa les épaules. Pourquoi être aussi nerveux? Il n’avait rien à prouver à cette personne. Si elle répondait, tant mieux. Sinon, tant pis! Il aura eu une petite montée d’adrénaline pendant une soirée! Le brun referma son ordinateur. Il devait aller se préparer pour le travail, mais quelque chose lui disait qu’il allait penser à son inconnue toute la journée et qu’il aurait très hâte de revenir à la maison.

Samedi 30 septembre 2017, 18:50

Ruby scruta les environs, paniquée. Une, deux, trois... une dizaine de personnes tenait entre ses mains la gazette du mois, la lisant assis tranquillement à une table du bar, tandis que le souffle de la jeune femme s'accélérait de plus en plus. Elle tendit le bras jusqu'au petit kiosque où étaient distribués les exemplaires du journal de Lima et en attrapa un troisième pour vérifier si les deux premiers dont elle s'était emparés étaient bien les seuls contenant le petit encadré de l'avant-dernière page. Instinctivement, elle fit voler les grandes feuilles de papier en espérant ne pas retomber sur le numéro de téléphone qui lui était beaucoup trop familier. Son numéro de téléphone, accompagné d'un message aguicheur dont la description lui correspondait exactement. Là, en bas. Encore une fois. Prise d'un élan de bon sens (ou de folie), elle ramassa toutes les copies se trouvant dans le Piano-Bar, se chargeant de toute cette paperasse qu'elle tenait à bout de bras, et avant que le gérant ne le remarque, elle se dirigea en courant vers sa voiture. Après avoir balancé le tout sur la banquette arrière, elle s'installa place conducteur mais ne démarra pas. Elle se retourna, pris un autre journal et arracha ladite page sans même avoir besoin de la rechercher. Répétant cette opération sur chacun d'eux, elle rassembla le paquet devant elle et le feuilleta pour constater que l'annonce était partout. « Oh non, non, non. » La crise de nerf la menaçait dangereusement et avant de s'abandonner à celle-ci, elle enclencha le moteur et se mit en route vers son appartement à la quatrième vitesse.

Il ne lui fallut pas longtemps avant de le rejoindre, armée de l'ensemble des revues. Une fois entrée, elle se dirigea vers sa cuisine, jeta la cargaison à la poubelle et, rejoignant son salon, elle se laissa tomber dans le canapé en s'allongeant de tout son long, la tête dans un coussin. Et elle se mit à pleurer de rage. Qu'est-ce que cela signifiait? Jamais au grand jamais elle n'aurait écrit ce genre d'article à son sujet! Sa situation sentimentale était peut-être désespérée, mais pas encore à ce point. Une annonce pour célibataire. Est-ce qu'il s'agissait d'un nouvelle épreuve que Thomas voulait lui imposer pour l'endurcir? Si tel était le cas, il avait dépassé les limites. Depuis environ trois ans, le jeune homme l'avait aidée à surmonter la plupart de ses craintes et à gagner en personnalité et en répondant. Ainsi, il était allé plusieurs fois raconter des choses irrationnelles à son sujet à de parfaits inconnus qui venaient ensuite lui demander des explications qu'elle donnait sans trop de difficultés. Cela devenait plus ardu lorsqu'il l'incluait dans des conflits que lui seul aurait dû régler, mais bien sûr, la mission de Ruby était de s'en charger. Un peu comme si elle veillait sur lui alors que le contraire se produisait. Car il assurait toujours ses arrières au cas où elle ne s'en sortirais pas sans son aide. Parfois, il se chargeait lui-même de la provoquer, ce qui avait permis à la jeune femme de se forger une force de caractère bien plus importante qu'autrefois. Cependant, il ne s'était jamais aventuré dans les relations personnelles de la brunette, et se mêlait encore moins de ses sentiments amoureux. Ce domaine relevait du privé et il n'avait jamais vraiment désiré l'aborder, ce qui n'était pas pour lui déplaire. Elle se voyait mal lui parler de ses problèmes de cœur. Aurait-il donc finalement osé franchir cette frontière interdite? Est-ce qu'il pensait ainsi lui porter secours? Impossible, ce n'était pas son genre. Entre deux sanglots, Ruby se releva et attrapa son téléphone resté sur la table alors qu'elle s'était absentée quelques heures. Du revers de la main, elle sécha sa joue, puis composa le numéro de téléphone de l'intéressé afin d'obtenir les réponses à ses questions. « Répond abruti. » Rien, juste la tonalité puis la messagerie. Bonjour, vous êtes bien sur le répondeur de Thomas, vous connaissez le rituel. Silence. Bip. « Écoute moi bien sale traître, parce que je te le dirai pas deux fois. T'as le don pour trouver des astuces et m'attirer des ennuis, et d'habitude je dis rien parce que toi et moi, on sait que c'est pour la bonne cause. Mais là, je te jure que je vais te faire bouffer tes yeux parce que t'es allé trop loin. Mêle-toi de ce qui te regarde, je suis parfaitement satisfaite de ma situation et j'en ai rien à faire qu'elle dure depuis toujours, j'ai pas besoin de toi pour trouver quelqu'un et encore moins de cette manière! Une annonce dans la gazette de Lima! Mais à quoi tu pensais? T'as vraiment intérêt à avoir une bonne excuse parce que tu vas avoir de TRÈS sérieux problèmes. Tu culpabilises maintenant parce que je suis rarement aussi énervée, hein? Oui, je suis même folle de rage, et si tu fais l'étonné la prochaine fois qu'on se voit je te tuerai de mes propres - » Bip. Son temps de parole était écoulé. En furie, elle poussa un grognement hystérique puis proféra des injures à l'intention de son pseudo ami. Son portable vibra presque aussitôt. S'empressant d'ouvrir le message qu'elle venait de recevoir, elle s'arrêta cependant presque immédiatement en réalisant qu'il ne provenait pas de la personne qu'elle se figurait.

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SMS

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INCONNU

21.26 - Le 01/31 - à LIMA

Salut. On ne se connaît pas et crois-moi ce n'est pas mon genre de faire ça, mais j'ai vu ton annonce dans la gazette et je sais pas...ça m'a intrigué. Je ne suis pas un fou pervers, même si ça y ressemble. Enfin bref... J'espère que tu répondras.

Options

Répondre

L'apothéose. « C'est un cauchemar, dites-moi que je rêve. »

* * *

Dimanche 1er octobre 2017, 11:27

Vissée à sa chaise de bureau, Ruby ne décollait pas son regard de son écran d'ordinateur, animée d'un soupçon d'excitation et d'angoisse. En effet, elle attendait un mail. Drôle d'attitude pour un événement aussi banal, et pourtant. Il ne s'agissait pas d'un message ordinaire, tout du moins pas exactement. L'émetteur n'était autre que le parfait inconnu qui l'avait abordé par SMS la veille suite à l'annonce mystérieuse postée dans la gazette. Le premier à y avoir donné une réponse. Elle devait admettre que la rage qu'elle avait ressenti à l'égard de cet homme mystérieux – si c'en était bien un, et elle préférait y croire – s'était finalement dissipé au fil des quelques textos échangés. Parce que oui, elle lui avait répondu également. Tout d'abord, elle s'était montrée plutôt sèche et n'avait laissé présager aucune suite à cette conversation. Puis finalement, son irascibilité s'était transformée en peur (car rien ne lui assurait qu'il n'était pas un tueur en série à la recherche de jeunes victimes pour agrandir son tableau de chasse) avant de se métamorphoser en curiosité. Il s'était montré plutôt drôle et flatteur, et ne la connaissant pas, elle y avait été d'autant plus réceptive. Intriguée, elle avait accepté de lui donner son adresse courriel lui servant de « poubelle » pour les spams qu'elle recevait. Comme si cela excusait son audace. Ses mains tremblaient sur sa souris. Elle était cinglée, ça ne lui ressemblait absolument pas. Elle qui d'ordinaire était contre l'idée même des relations virtuelles. Qu'est-ce qui l'avait donc poussé à oublier ses principes? La réponse était finalement simple. L'adrénaline, l'impression d'intéresser quelqu'un sans avoir besoin d'en faire des tonnes. Et puis qu'y avait-il de mal à cela en fin de compte? Elle n'était pas obligée de poursuivre le dialogue, et il était même très peu probable qu'elle le fasse. Sa fierté risquait sinon d'en pâtir. Un son tinta soudain, celui de sa boîte de réception. Arrêt cardiaque. Frémissante, elle glissa lentement le pointeur vers le message en question, qui évidemment avait été envoyé à l'adresse qu'elle avait donnée. Aucun doute possible, c'était bien lui. Le pseudo lui valut un rictus complice. À priori, il aimait Radiohead. Il marquait déjà un point. Impatiente sans vraiment comprendre pourquoi, elle lut attentivement le message pour ne pas en perdre une miette. D'après celui-ci, accoster une inconnue en furetant les petites annonces n'était pas vraiment dans ses pratiques habituelles non plus. Et à en croire certains mots, il aurait semblé qu'il n'avait pas tout à fait la tête sur les épaules au moment où il s'y était pris. D'accord, Ruby commençait à craindre la suite. Néanmoins, celle-ci retint davantage son attention. Elle se reconnaissait dans ses phrases. Les mêmes sentiments s'étaient emparés d'elle lorsqu'elle s'était hasardée à répondre anonymement. Considérant la proposition qu'il lui faisait avec attention, elle réfléchit à ce qui paraissait le plus juste. Continuer ou tout arrêter là?

« Salut, Homme de l'ombre. » commença-t-elle à taper. C'était mal, très mal.
« Je crois que je suis dingue. Je ne plaisante pas, vraiment! Moi, me mettre à écrire à un parfait inconnu (ou une, j'en sais strictement rien)...
Histoire de mettre les choses au clair, ce n'est absolument pas mon genre. Comme tu prétends aussi cela, je me dis qu'on est quitte, et puis les mêmes raisons que toi m'ont poussées à répondre. Il y a aussi une question d'estime de soi, mais je ne m'attarderai pas là-dessus. J'aime le terme « freakant » parce que c'est exactement ce que je ressens à propos de tout ça. C'est effrayant de se dire qu'on peut bousculer une vie de cette manière sans rien pouvoir faire pour rétablir la balance. Hier matin, j'étais encore tranquillement assise dans mon canapé devant la télévision, en train de me demander ce que je ferais de ma journée. On peut dire que je ne m'attendais pas du tout à ça. Enfin...
J'ai bien réfléchi, et je trouve que ta suggestion est assez injuste. Ne le prend pas mal, c'est juste que l'annonce donnait pas mal de détails à mon sujet. Tu connais mon âge, ma couleur de cheveux, une partie de mes origines, mais moi, je ne sais absolument rien de toi. Le concept de la discussion anonyme et de la confiance aveugle peut être assez... sympa? mais seulement si elle est équitable. Et ce n'est pas mon impression pour l'instant malheureusement, j'espère que tu comprends. Donc juste pour être certaine que je ne m'adresse pas à un vieillard ou à un ordinateur, est-ce que tu serais d'accord pour me donner au moins ton âge également? Confiance aveugle oblige, j'ose espérer que tu seras honnête. Je ne peux faire que ça de toute manière, espérer. Ah et évidemment, je suis de Lima. Le comble serait quand même qu'on se connaisse, mais j'en doute fort, je suis pas assez sociable pour ça.
Donc si toi tu es « Kid A », il faudrait que je me trouve quelque chose aussi... hum... du genre... Laa Laa, ça c'est la classe. Non? Bon, je vais chercher...
À très vite je crois,

Teletobbies par défaut »

Avant de se relire en étant sûre de se dégonfler, elle appuya au plus vite sur la touche Envoyer, une main devant les yeux, preuve de son courage. Mais dans quoi s'était-elle embarquée?

Lundi 2 octobre 2017, 18h48

Cela faisait déjà deux jours que l’inconnue de la petite annonce lui avait répondu. Il était en route pour le travail lorsque son téléphone lui avait annoncé la réception d’un nouveau message dans sa boite de courriel! Ça avait été rapide et il en avait été agréablement surpris. Il s’était dit qu’il lirait le message une fois au calme dans son bureau de gérant. Mais voilà qu’il venait à peine d’entrer dans le magasin qu’il avait reçu un appel de l’un de ses employés qui ne pourrait entré travailler ce matin-là car il était malade. Ryder avait bien du mal à le croire, mais il ne pouvait rien faire. Il s’était retenu de tout briser. Ce n’était pas le fait qu’il lui manquait quelqu’un pour la journée, en fait si mais pas seulement. C’était plutôt le fait qu’on le prévenait à la dernière minute. Le gérant n’avait pas beaucoup d’option pour remplacer le commis manquant. Avec le retour des classes, ses effectifs s’étaient retrouvés réduits et il n’avait toujours pas déniché de nouveaux employés pour combler les trous. Il avait téléphoné aux autres employés en congé, mais avait essuyé des refus. Il n’avait pas eu le choix de travailler à la caisse toute la journée. Il allait devoir effectuer les tâches qu’il se réservait normalement le dimanche, le lendemain puisqu’il n’avait aucune envie de quitter la boutique très tard. Comme il avait interdit l’utilisation du téléphone portable aux caisses et devant la clientèle, il se voyait très mal déroger à sa propre règle. Il devait donc attendre pour lire l’e-mail qu’il avait reçu.

Ryder en avait profité lors d’une petite pause-pipi pour parcourir le message. Il avait sourit à l’épellation d’homme de l’ombre. Au moins, il n’était pas seul à trouver cette histoire effrayante et spéciale. Elle semblait timide et mal à l’aise. Ce n’était pas difficile à s’en apercevoir si on lisait bien entre les lignes. Tous les deux avaient été poussé par la même adrénaline et avait besoin d’un peu de piquant dans leur quotidien. C’était bon signe. Il éclata de rire lorsqu’elle lui signala que leur petit échange était injuste étant donné qu’il connaissait quelques détails sur elle mentionnées dans l’annonce de la Gazette. Elle n’avait pas tord. S’il voulait qu’elle ait confiance en lui, valait mieux que ce soit égal de chaque côté. Il fronça les sourcils en lisant qu’elle n’était pas sociable. Était-il tombé sur une ermite qui vivait dans le grenier de ses parents avec ses douze chats? Il ne devait pas faire de préjuger, c’était le but de la chose. Il sourit une dernière fois au surnom qu’elle se donnait. Satisfait, il avait refermé son téléphone et était retourné travailler. Toute la journée, il n’avait que pensé à elle et à ce qu’il lui répondrait. Il aurait voulu lui répondre dans la soirée, mais il avait eu un empêchement. Le lendemain, il avait dû effectuer ses tâches et il avait été occupé toute la journée.

Ce n’est qu’en rentrant du boulot le lundi soir qu’il s’installa devant son ordinateur pour enfin répondre à son interlocutrice. Il avait faim. Il n’avait pas diné, mais il avait l’impression que s’il ne répondait pas immédiatement, on viendrait le déranger. Le musicien ne voulait pas non plus que l’ enchantement soit brisé car il avait pris trop de temps pour répondre.

« Bonsoir Laa-Laa : P J’aime bien ce surnom, même si je n’ai jamais aimé les télétubbies. J’ai toujours trouvé que cette émission prenait les enfants pour des cons avec leur gaga, gougou et leur bébé-soleil. C’était loin d’être éducatif! Mais faut croire que les bébés aimaient cela. Bref…!

Je suis certain que tu te languissais de ma réponse. »Ryder arrêta d’écrire. Comme cette phrase paraissait narcissique! Comme si la fille ne faisait plus rien de ses journées et attendait devant son écran pour sa réponse. Dit de vive voix, cela serait mieux passé. On aurait bien vu qu’il rigolait et ne se prenait pas au sérieux, mais parfois l’interprétation par écrit n’était pas la même et comme il ne connaissait pas la jeune fille, il ne savait pas comment elle pourrait réagir. Il effaça sa dernière phrase.  Je suis certain que tu te languissais de ma réponse. « Désolé si j’ai été long à répondre. J’ai été pas mal occupé ces deux derniers jours. On était en manque d’effectif dans le magasin dans lequel je travaille et j’ai du prendre la relève. J’ai un poste de gérant et cela faisait longtemps que je n’avais pas travaillé comme commis. Je ne me rappelais pas à quel point c’était éreintant! Mais ça a fait du bien. Puis, le soir, l’ami de mon coloc est arrivé avec une bouteille de rhum, alors tu peux imaginer la suite. » En effet, Ryd s’apprêtait à répondre à son courriel lorsque Glenn était débarqué avec son fort dans leur appartement. Les trois garçons en avaient donc profité pour passer du temps ensemble et parler de tout et de rien. Ça avait été une super soirée.   « C’est bizarre parce qu’avec ce mec, on a pratiquement aucun point en commun, à part mon coloc en fait, et pourtant, on s’entend super bien!  Je te jure, on est des contraires dans tous les domaines, mais chaque fois que je le vois, on rit et on fait les fous. C’est toujours génial de le voir. Puis, aujourd’hui, j’avais pas mal de boulot à reprendre, mais je suis content j’ai réussi à tout faire! Et toi? Tu as passé une belle journée? » Il espérait qu’en lui racontant sa vie comme si de rien était , cela allait mettre la jeune fille plus à l’aise. Comme s’ils étaient deux bons amis qui se racontaient leur journée tout bonnement. Cela lui faisait un bien fou. Il venait tout juste d’avouer un truc qu’il n’avait jamais dit à personne concernant Glenn. Malgré leurs différences apparentes, Ryd appréciait énormément le blondinet. « Sinon, concernant l’équitabilité  dont tu fais mention dans ton message, tu as raison. Je te propose de donner le moins de détails possible, mais j’en connais un peu sur toi, ça ne va pas . Alors voilà. J’ai les cheveux bruns plutôt clairs et je déteste les peigner. J’ai 24 ans et même bientôt 25. Ce qui me fait affreusement peur. Le quart de siècle, les responsabilités et tout ça..:/ et je viens aussi de Lima. J’y ai toujours vécu d’ailleurs. Ça te va?

J’espère que je ne t’ai pas trop emmerdé avec ma vie!
À bientôt,
Kid_A, l’homme de l’ombre. »

Il se relut à nouveau pour être certain  de ne pas avoir fait trop de fautes d’orthographes. Cela pouvait en dire long sur l’autre. Il vérifia si certains passages pouvaient être mal pris. Il envoya finalement son message, satisfait. La gêne des premiers échanges était maintenant terminée. Ils pouvaient à présent communiquer pour mieux se connaître.